Il se sent un peu bête. Ouais. Une perruque. C’était une bonne idée. Il se remercie de ne pas être une personne qui a besoin de passer inaperçu… Et il n’aime pas avoir quelque chose sur la tête. Ni des casquettes, ni des lunettes… Bref. Lui, il n’aimait pas avoir à mettre quelque chose. Rien que l’idée d’avoir des cheveux qui ne lui appartient pas, ça le gratte. Ils vont donc devant la file pour rentrer dans la super boîte de nuit. Rien que d’y penser, il avait envie de courir de l’autre côté. Il n’aimait pas les gens. La proximité et la sueur le rendaient mal à l’aise. La discussion, sur le foot, ne l’intéresse pas plus que la couleur de la casquette de l’homme derrière lui. D’ailleurs pourquoi mettre une casquette pour aller dans une boîte de nuit, de nuit et à l’intérieur, il ne veut même pas savoir, c’est trop con pour lui. Il grommèle avant de pouvoir rentrer, lâche un regard au videur avant de dire en espagnol.

- Je n’ai pas un aspirateur dans le fondement, murmura-t-il avant de rentrer et de se figer.

Trop de gens, trop de son, trop de lumières inutiles … Il était là pour voir la jeune femme s’amuser mais il avait bien envie de partir en courant de l’autre côté… Rapidement. Il lance un regard d’au secours à la jeune femme, mais elle, elle semble dans son élément. C’était pour ça la perruque ? Pour faire comme un masque en se dissociant de la réalité pour qu’elle semble moins affreuse ?

- Je crois que j’ai besoin d’un verre, commença-t-il avant d’arriver vers le bar pour commander un verre d’eau.

Parce qu’il avait besoin d’un verre pour se désaltérer, pour rien d’autre. Il observe la jeune femme et parle assez fort pour qu’elle l’entende.

- Je paie votre consommation si vous promettez de pas m’abandonner ici.

Il aurait presque pu faire la blague comme quoi ça serait considérer comme un meurtre de le laisser au milieu de tout ce monde … Mais il doutait que cela soit une blague. Si elle part et le laisse là, il allait vraiment mourir à cause de la proximité avec des gens. Une femme, blonde et avec une poitrine qui pourrait envouter plus d’une personne, s’approche et se colle à lui pour lui proposer une danse avant qu’il ne se décolle pour s’approcher de Rafaela, lui attraper la main et trouver une petite table ronde un peu plus loin. Non. Pas question qu’il reste au milieu du monde.

- Si vous m’abandonnez, je me vengerais, dit-il bien plus sérieux encore que la première fois.

Il la regarde, ne sourit pas, reste sérieusement sur son visage et l’impression qu’elle dégage. Il ne sourit pas, mais s’approche et plante un regard vers elle. Il y avait quelque chose qu’il devait mettre au claire tout de suite avec elle. Avant même de « danser », ce qu’il ne compte pas faire ne donnant l’impression d’être un pilier au milieu de la pièce.

- Je vous menace de mettre trois sucre au lieu de deux dans votre café autant que je le désire. Vous ne me faites pas peur, et je n’aime pas du tout qu’on insinue plus qu’une taquinerie de ma part.

Comme s’il allait faire plus ? Sérieux ? On pouvait le voir à son visage que sa réaction venait de l’énervé. Ses sourcils étaient froncés, sa bouche tiré et clairement il avait envie d’éviter de rester avec elle en la plantant là… mais il était curieux. Et ça le fait chier. Voilà pourquoi il n’était pas taquin, ou drôle, ou plein d’esprit. Parce que les gens entendaient et ressentaient que ce qu’il voulait. La jeune femme venait de lui rappeler, à l’instant, exactement ce qu’elle pense de lui. Il est un ennemi, et elle ne lui ferait pas confiance. Soit. Il ne comptait pas lui faire confiance, lui non plus. Mais ça l’agace. Parce que déjà qu’il n’aime pas travailler en équipe, si en plus il se retrouve à devoir supporter la femme insupportable, il n’était pas sorti de l’auberge. Il regarde les gens danser, et il se recule pour ne pas être dans le chemin de jeunes insouciants qui ne semblent pas comprendre la réalité du monde. Il replante ses yeux vers la jeune femme.

- C’est exactement pour ça, que je suis célibataire et que j’évite de sortir. On ne comprend pas, même quand je fais une « blague ».

C’était de la taquinerie, bordel de merde. Et ça l’agace encore plus qu’il avait pensé que la jeune femme était assez proche de lui pour le comprendre. S’il avait dû réellement la menacer, il ne l’aurait pas prévenu avant. Il l’aurait fait. Prévenir qu’on allait se venger, c’était une réaction d’enfant qui veut taquiner. Il fait un autre pas alors que la chanson change au milieu d’une note pour rester dans la fluidité du tempo. Alors qu’il allait clairement partir, il reçu un coup de coude dans le dos et tomba presque sur la jeune femme, comme une vieille scène cliché dans une série romantique. Il attrape la jeune femme pour qu’elle ne tombe pas avec lui et retrouve son bras autour de ses hanches sans aucune bonne raison. Il se tend.

- Pardon.

Et chose, Ô combien étrange pour les personnes qui connaissent le masque de fer qu’était Hunter, il rougit. Parce qu’il venait de se dire, en se faisant pousser, qu’il aimait bien la manière dont ses lèvres se mouvaient pour lui parler. Surtout en Espagnol. Il repoussa cette idée et la lâcha d’un coup en réalisant la tenir toujours.

- Pardon, répéta-t-il, je crois que je ne sais pas danser.

Raison de plus, pour retourner s’assoir, non ?

Dès qu’elle a repris ses esprits, Rafaela se fait suave et sensuelle :
- Tout le monde sait danser, inspecteur. Il faut juste avoir un bon partenaire… ou un bon professeur. Pour l’instant, vous pouvez juste me regarder faire, et attendre la prochaine bonne chanson pour vous lancer.

La Brésilienne reconnaît la blonde qui s’est collée à Hunter un peu plus tôt, et lui fait signe. La blonde les rejoint tout sourire, et n’a pas besoin d’échanger un mot avec Rafaela pour commencer à danser avec elle. Transportée par le rythme de La Dona, la sicaire oublie tous ses tracas, cette enquête casse-tête, les mauvais souvenirs qui remontent. Toutes ces pensées sont dissipées par la voix d’Aracely Arambula, et les mots que les deux femmes connaissent déjà par cœur, et qui parlent particulièrement à l’ancienne prostituée.

Spoiler:

Les épaules ondulent, les mains deviennent des éventails, les jambes se rencontrent puis s’éloignent, et surtout, de flamboyants sourires se dessinent sur les visages.

Fière et lumineuse, Rafaela retourne vers Hunter dès que la musique est terminée, tandis que la blonde va commander au bar.

- Désolée de m’être emportée. L’alcool pousse parfois à mal comprendre les choses.
J’ai entendu des types parler d’une chanson qu’ils passeront bientôt, vous seriez intéressé ? Honnêtement, vous n’auriez pas grand-chose à faire, juste à poser vos mains sur mes hanches ; je ne vous force à rien, je n'ai pas envie de faire ça avec le premier venu, et… je vous fais plus confiance qu'à la majorité des mecs ici.

Il la regarde, c’est perturbant de la regarder. Mais il la regarde. Il suit les mouvements de ses hanches, celui de ses mains. Il se demande comment elle peut faire pour que son ventre semble se déplacer. Elle était comme une vague, son corps était capable de bouger de chaque parcelle de celui-ci… alors qu’Hunter était un tronc d’arbre. L’image était parfaite. Il trouve la jeune femme bien plus intrigante. Il avait envie de la palper pour vérifier que ses os soient bien en place. Il aimerait pouvoir passer ses mains sur le corps de la jeune femme pendant qu’elle bouge. Pour qu’il comprenne comment elle fait. Pour sentir comment elle fait. Il ne lui dit pas qu’elle n’avait rien bu avant de l’agresser. Mais il le garda pour lui. Il la regarde ensuite pour sa proposition. Il avait dit justement qu’il avait envie de la toucher. Il fait un geste de la tête pour dire qu’il acceptait. Il s’approche d’elle et fait exactement ce qu’elle avait dit. Il mit ses deux mains contre ses hanches avant de la regarder droit dans les yeux, inconscient que la musique n’avait pas encore commencé.

- Et maintenant ?

Ses doigts touchaient sa hanche, mais loin d'être un pervers, il était curieux, délicat. Il ne posait pas la paume sur elle, juste les doigts. De manière délicat. Ce corps était curieux. Il plonge son regard dans celui de la jeune femme et attends les instructions.  

La musique, mais oui c’est clair… Il fallait attendre la musique et danser en rythme avec elle… il aurait peut-être du préciser qu’en plus de ne pas savoir danser, son corps était aussi souple qu’un moulin à vent et qu’il ne comprenait rien au rythme ? Tant pis. Il essaie de le faire, y arrive relativement pas. Il essaie. Juste pour faire plaisir à Rafaela, même s’il ne sait pas pourquoi il doit lui faire plaisir. Il en a envie, tout simplement. Il l’avait se laisser coller à elle. Il écoutait son cœur à travers la musique. C’était un meilleur rythme que la musique pour lui. Quand ils ont fini, il perçoit son trouble mais ne comprends d’où cela peut venir. Il hoche la tête.

- Je te l’ai dis. Je ne te quitterais pas. Sinon, je risque de mourir ici. Vraiment, je suis aussi à l’aise qu’un poisson dans le désert …

Autant dire qu’il était tout rabougri et pas totalement à sa place. Il s’approche du bar, demande à Rafaela ce qu’elle souhaite boire et demande un autre verre d’eau pour lui. Ouais. Le reste ne l’intéresse pas. Sauf quand il apprend que la boite faisait aussi des cafés ! Il prit un café, le barman bougonna un peu à faire une cafetière pour une personne et Hunter promet de la boire en entière. Ce qu’il commença par faire en buvant deux gros verres d’affilé. C’était pour lui donner du courage dans cet univers qu’il ne connait pas.

Lui. Lui, il commande du café en boîte de nuit. Parce que le café, ça réveille sans alourdir les sens. Cela permet d’être plus apte à faire les choses. Et puis, il aime le café, lui. Il aime vraiment ça. Il trouve que le goût est parfait. Il la regarde quand elle lui propose de l’alcool.

- Je ne bois pas d’alcool, répondit-il sans plus s’intéresser à elle.

Parce qu’il n’avait jamais bu pour les beaux yeux de quelqu’un, et ça n’allait pas commencer maintenant. Il n’était pas le genre de personne manipulable. Surtout qu’il ne voit pas l’intérêt de boire de l’alcool maintenant. Pourquoi est-ce que boire de l’alcool devrait faire plaisir à une autre personne que la personne qui boit, en effet ? Il hausse un sourcil.

- Je ne bois pas d’alcool, répéta-t-il simplement, parce que je n’en vois pas l’intérêt et que je n’aime pas ça. Même seul. Ce n’est pas par manque de confiance en vous.

Elle lui aurait tendu un café, de l’eau, de la limonade à l’extrême limite … oui… là. Oui, il aurait bu … mais de l’alcool ? Elle est sérieuse ? Il grimace. Prends le verre et regarde à l’intérieur d’un mauvaise œil. Il ne boit pas pour les beaux yeux des gens … mais il lui semble important d’au moins tremper les lèvres pour qu’elle soit heureuse… Et il se fou de savoir pourquoi … Il sent le fond de son verre et grimace.

- En plus, ça pue, s’exclama-t-il avec toute l’honnêteté donc il peut faire preuve.

Il tend son verre à la jeune femme pour un santé, prend une gorgé et grimace encore plus. Voilà. Il a bu. Il demande son café tout de suite pour faire passer le goût immonde de sa gorge.

- Vraiment, je n’aime pas l’alcool. J’ai l’impression de me prendre du white spirit javelisé dans le gosier, s’expliqua-t-il. La première fois où j’ai bu, j’étais à une fête avec des copains du lycée… et je me souviens simplement que je suis parti dépité parce que ça m’a saoulé.

Il posa son verre de café vide à côté de celui de Gin plein avant de lui tendre.

- Si tu veux la fin, fait toi plaisir. Je te l’offre.

Et demain, elle aura une gueule de bois… il n’était pas sa nounou non plus. Au loin, il vit une fille qui ne marchait pas droit et le regard d'un homme posé sur elle. Il s'excuse auprès de Rafaela et s'approche de la femme pour la prendre par l'épaule et la relever. Il regarde avec vigueur l'homme et ramène la fille sur une chaise. Il arrive à retrouver le Sam de sa bande et lui laisse sans charger. Non sans avoir rappeler qu'il fallait faire attention, et fait promettre au Sam de lui faire la morale. Il revient vers la brésilienne en soupirant.

- Si vous avez besoin de boire, je vous protégerais alors n'hésitez pas, dit-il plus pour lui que pour elle.

Elle a réussi.

Rafaela jubile, sans vraiment comprendre pourquoi elle a donné tant d’importance au fait que le brun avale du liquide. De toute façon, l’alcool qu’elle s’est permis d’ingérer ne lui permet pas de philosopher très longtemps. Elle le tient moins bien qu’elle s’y attendait. En même temps, ce n’est pas très étonnant.

Depuis bien longtemps, la jeune sicaire est très méfiante vis-à-vis de l’éthanol.

Cette défiance s’explique par l’addiction de sa génitrice, les conseils de Mikhaïl, et surtout, par ce qui est paradoxalement l’évènement le plus jouissif de sa vie.

Comme souvent, une partie des brutes épaisses qui servaient de chiens de garde aux maques de son réseau s’étaient enivrés et drogués toute la journée, en compagnie de leurs filles préférées, celles qui jouaient les espionnes pour leur compte. Rafaela avait toujours détesté ces dernières, qu’elle considérait comme des traîtresses. C’est pour cela qu’elle n'a pas cherché à les épargner, contrairement à ses autres “sœurs de galère”.

Pendant que les autres filles étaient sur le trottoir, la Brésilienne a froidement accompli tout ce qu’elle avait planifié pendant plus d’un an. D’abord, s’infiltrer parmi les “filles préférées”, en se liant avec une des brutes, Nacho. Ensuite, boire un peu pour ne pas paraître suspecte, mais le moins possible pour profiter de l’état d’ébriété des autres afin de d’attraper les clés dans la poche de Nacho, passer à la cuisine récupérer plusieurs briquets, rejoindre la cave, et accomplir sa funeste machination.

Elle a pu faire exploser le lieu de son calvaire et plusieurs de ses tortionnaires avec, et ce, en grande partie, parce qu’ils s’étaient alcoolisés, et elle non ; l’alcool est le meilleur moyen de piéger une cible, ou d’en devenir une.

Faisant fi des remarques de Hunter, elle lui adresse un large sourire, puis lui répond :
- Merci, inspecteur.

La Brésilienne ingurgite le reste du cocktail en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, et quelques instants plus tard, elle bondit de sa chaise en entendant la Samba do Brasil.
- J’y vais, suivez-moi.

Spoiler:

Quelques instants plus tard, elle se déhanche sur les paroles du groupe Bellini, galvanisée par ses réminiscences des carnavals de Rio où elle s’est rendue, et qui comptent parmi ses rares bons souvenirs dans son pays, et même sa vie natale.

Cependant, quelques morceaux plus tard, l’adrénaline retombe, et la jeune femme commence à chanceler.
- Je… Je ne me sens pas bien. Je crois que… Je voudrais y aller.