Sherwood observa la sorcière partir. Il fit même un petit soupir de mal être alors que son chat continuait de le frotter entre ses trois pattes. Le chat n’avait jamais fait cas de sa jambe… tout comme le loup n’avait jamais fait cas de ses yeux. Ensemble, il donnait l’impression d’être deux êtres blessés. Sherwood s’assit et laissa le temps des présentations. Il passa un regard vers Mathias, puis vers la sorcière, puis vers Mathias. Il se mit aux pieds de son alpha. Adam, par le lien de la meute, essaya de le rassurer sur quelque chose qu’il ne comprenait même pas. Il lâcha un regard vers l’oméga. Ce n’était pas son statut qui semblait mettre Sherwood dans tous ses états… il y avait Nabi pour ça… Il resta aussi surpris des loups qu’on leur avait envoyés. Tout cela était étrange.

- Mathias Leblanc, connaissiez-vous quelqu’un du nom de Wilsonia ?

Sherwood ne plus réprimandait un grand grognement et s’approcha de Mathias. Cependant, on pouvait voir qu’il n’y avait aucune menace pour le loup, au contraire. Sherwood s’approcha et se mit entre Adam et lui. Comme s’il essayait de le protéger de ses paroles. Adam sourit doucement en observant son loup jusqu’à ce qu'il détourne les yeux. Ce que fit Sherwood, mais il ne bougea pas. Pirate vient aussi, par mimétisme, si Sherwood protège Mathias, il le protège aussi. Pirate finit par faire ses griffes sur les jambes du français pour avoir à nouveau son attention et miaula pour être prit dans ses bras.

- Sherwood, change.

Sherwood approcha d’Erin pour prendre ses affaires. Il la frotta à dessein pour provoquer l’autre loup, pendant que Pirate quémandait encore ses attentions. Le loup finit par se changer dans un nouveau temps record et revient simplement sans rien dire. Adam le regarda avant que Sherwood ne réponde à la question silencieuse.

- Je vous prie de m’excuser, Monsieur, fit-il vers son alpha, le dénommé Mathias me dit quelque chose sans que je puisse mettre une image dessus.
- De l’époque du couvent ?
- Je ne crois pas, il se tourna vers Mathias avant de lui faire un geste d’excuse pour parler dans un français presque parfait, je vous prie de m’excuser Monsieur. Croyez bien que mon intérêt n’est point provocateur ou dans le but de vous mettre mal à l’aise.

Et tout le monde savait que sous forme de loup, les instincts prenaient le pas. Quand on était sous forme de loup, l’animal était plus fort… et cet animal n’avait que des instincts et des certitudes. Adam observa un instant les loups, tous dans la pièce avant de soupirer.

- Erin, j’aimerais que tu sois la cheffe de ces investigations. Je sais que tu es la plus proche de la magie, et cela sera plus simple si tu as la main sur les loups. Saches que tous mes loups, à travers Sherwood, seront aptes à te venir en aide.

En donnant la main à Erin, il rappelait à Sherwood sa place de protecteur. Celui-ci fit un signe affirmatif de la tête. Il rappela aussi poliment aux deux autres loups (trois si on compte le frère mais il ne comptait pas vraiment, puisqu’appartenant à l’équipe B)(tmtc) où était leur place. Ils étaient leur inviter pour protéger la jeune femme qui devait les aider, eux. Il faisait confiance à Sherwood pour ne pas être totalement obnubilé par la sorcière comme il semble l’être. Adam pensait même que celui-ci s’inclinerait pour un combat en faisant semblant d’être plus soumis que Félix. Pour le moment, il n’avait fait que montrer, comme le français, son intérêt pour la sorcière mais sans en venir à un combat de dominance. Ce qui était mieux.

- Je peux aussi vous laisser Ben.
- Non, merci, tonna l’homme revenant de la cuisine alors qu’il mangeait des cookies dans un Tupperware et n’en proposa à PERSONNE.
- Ben…

L’intéressé baragouina des jurons bien anglais avant de se tourner vers les loups et les regarder, puis baisser les yeux, clairement aucune envie de savoir qui était le plus dominant tout de suite, il prit un cookie.

- Je serais ravi d’être à votre disposition, mentit-il sans honte avant de croquer dans un cookie et de menacer Warren quand il essaya de mettre la main à l’intérieur pour en piquer un.
- Tu pourrais partager.
- Ce sont mes cookies. De MA compagne.
- Dieu nous garde…
- Loin de mes cookies, grogna-t-il vers Warren avant de reprendre, je ne resterais pas loin de mon ordinateur pour toutes recherches numériques. Sinon je vous envoie Echo.

Du point de vue de certaines personnes, envoyer Echo serait une punition. Dans la bouche de Ben, pourtant, cela ressemblait presque à une vraie proposition joyeuse. Il envoya un cookie à Erin et repartit. C’était pour lui souhaiter bon courage. Il devrait lui donner le numéro de Nabi pour savoir comment faire quand deux loups en avaient après sa vertu… bien que dans le cas de Nabi, Paul n’avait eu aucune chance… et l’autre non plus. Sinon, Ben les mange. Bref. Il repart dans sa cuisine avec son tupperware maintenant vide de toutes les miettes avant de grogner. Il pensait qu’il allait devoir faire une petite rasia chez lui pour pouvoir refaire son stock. Il avait faim… et sa compagne était trop loin de lui. Bref.

De son côté Sherwood eu un petit sourire au geste parfaitement gentleman que venait de faire Ben. Pour une fois, il était cavalier, mais il ne pouvait s’empêcher de se demander pourquoi… mais comme cette réponse commence à être trop longue, il préféra se reconnecter sur l’essentiel. Erin. Et Adam qui avait donné des conseils et des remarques pour pouvoir vivre en communauté dans les Tri-cities.

Wilsonia, un français. Il croit. Voilà ce que Sherwood avait dit quand on lui avait demandé d’exprimer tout ce qu’il se souvenait. Pas grand-chose. Des brides par son amnésie et beaucoup de déni pour repousser les souvenirs déplaisants. Quand il était venu dans la meute d’Adam, Sherwood avait simplement balancé les quelques noms qui lui trotter dans la tête. Le surnom qu’il donnait à Bran, « bràthair » qui voulait littéralement dire « frère » en gaélique. Wilsonia. Et quelques autres noms ou surnoms. Il n’en savait pas beaucoup plus. Il avait été oublié et utilisé pendant tellement d’année que tout était devenu noir dans son esprit, sauf les quelques mots jetaient dans son esprit. Il observa Mathias avec plus d’intérêt encore et sentit la douleur d’une migraine lorsqu’il essaya de transposer son visage sur un souvenir, en vain. Il savait qu’il disait, ou Erin, la vérité, mais il ne savait pas comment il le connaissait, pourquoi, ni même s’il était un ami… bien que son instinct lui criait de protéger Mathias avec plus de ferveur encore que son alpha, parce qu’il le doit. Il observe à nouveau le gamin. Il aimerait pouvoir faire ça, donner à quelqu’un l’entièreté de ses souvenirs pour qu’il puisse continuer à vivre dans l’insouciance… mais il sait malheureusement que son passé allait ressurgir un jour, surtout son frère puisque Mercy semblait l’avoir deviné (//Je sais pas si elle l’a dit à Adam ?) il lui fallait les cartes en main. Il fit une nouvelle révérence avant de regarder Erin et de faire un autre hochement de tête, signe qu’il aurait accepté son sort… mais rien n’arriverait à ce loup français. Ben grogna une réponse peu courtoise dont Adam et Sherwood n’appréciait pas la teneur alors qu’il éclata d’un rire sonore. Sherwood observa le frère d’Erin, se demandant pourquoi il était déçu alors que Ben arrivait si facilement à se laver les mains des responsabilités. Et il n’envoyait pas souvent des cookies aux autres. Si la jeune femme n’en veut pas, cependant, il ne s’en formalise pas. Une fois le cadeau offert, il n’avait rien à dire sur ce qu’elle en faisait.

- Du pop corn, murmura-t-il pour lui-même, je sens qu’il va me falloir du pop corn.

Pour observer tout ce qu’il se passe sans bouger le petit doigt… enfin, sauf si on lui demande d’aller fouiller un ordinateur ou de mettre un virus… mais pour le moment, il compte bien … hé bien ne rien faire. Il pourrait même proposer au Léon de faire pareil… mais pour ça, il faudrait qu’il aime les gens, ce qui n’est toujours pas le cas. Alors, il ne propose pas. Au contraire. Il n’allait pas remettre un beau gosse, parce que bon personne n’était vraiment moche ou beau dans la tête de Ben, dans le champ de vision de sa compagne. Il était fou, pas taré.

Sherwood, lui, continua d’observer Mathias et Erin. Les deux seuls éléments importants du tableau. S’il faisait confiance aux loups de la meute, surtout à Adam, et qu’il savait exactement la position de Félix, les deux étaient plus importants pour lui. Mathias avait quelque chose qui le poussait à sortir les crocs pour vérifier l’air qu’il respirait… Pas parce qu’il était un oméga, il connaissait la sensation de ses êtres, mais bien pour le passer. Il lui semblait qu’il voulait protéger son ancêtre avec toute son âme, et ne réalisa même pas que ça donnait une petite, et nouvelle, indication à Adam sur son âge. Pour le moment, tout le monde connaissait son âge théorie, pas vieux au vue de ce qu’il montre… Il observa Erin quand elle s’approcha, et il poussa un peu sa main contre sa joue dans un instinct purement … instinctive ?

- Cela serait mon plaisir, souffla-t-il avant de planter à nouveau son regard dans ses yeux.

Le loup n’était pas loin, elle pouvait le voir à travers ses prunelles. Ses yeux n’avaient pas changés de couleur… mais on pouvait voir la bête féroce et pourtant tenu par la main de la jeune femme dans une réaction purement protectrice. S’il pouvait la protéger de lui, il le ferait. Il savait que la jeune femme pouvait voir les souvenirs… mais elle n’avait pas vue le souvenir du baiser de Bran sur son front, si ? Donc, elle ne pouvait pas voir tout le temps ? Il ne sait pas. Il ne sait même pas si elle avait compris que c’était le baiser qu’elle lui avait offert qui avait amené à la penser de cet autre baiser, plus loin encore dans son esprit. Doucement, il monta sa main sur la sienne et la tien en essayant de faire lui-même le travail de souvenir, mais ça ne menait à rien. Il tourna à peine la tête pour que ses lèvres caressent la paume de la jeune femme, avant de se tourner vers Adam.

- Je vous emmène dans un restaurant français, cela vous convient-il ? demanda-t-il à Erin, puis à Mathias…et à Félix qui méritait aussi d’avoir son opinion… même si Pirate ne semblait pas l’aimer.

Pirate, lui, il miaule pour dire qu’il était assez heureux de l’idée… qu’importe l’idée, il avait compris qu’il allait manger, et ça, son ventre était toujours heureux d’être remplit !

Sherwood regarda l’échange entre Félix et elle. Il observe mais ne dit rien. Lui, il n’était pas en état de faire le jaloux ou le possessif. Pour le moment, il pensait que son attachement à la jeune femme n’était qu’une manière d’enfin être stable. Il ne pensait pas à une relation romantique, ni aucun cœur de brisé. Il sentit même un peu de pitié pour lui alors qu’il partit, suivit par Mathias. Il ne sait pas pourquoi, il se sent plus proche de Mathias que des autres. A cause de sa rencontre avec son ancêtre ? C’était possible… mais tant qu’il ne s’en souviendra pas, ça restera un petit secret mystérieux qui le perturbe. Il finit par faire un hochement de tête, laissant les deux loups partir, il observe la jeune femme, puis Léo.

- Il faut donc aller chercher nos repas, précisa-t-il alors qu’Adam était en train de calmer ses loups à travers le lien de la meute.

Il ramène Félix et Léo à l’hotel pour leur dire de les attendre et de prendre leur aise dans la suite. Il finit avec Erin et Mathias. Cela lui plaisait, même s’il ne le disait pas. Cela lui faisait plaisir d’avoir Erin, une jolie jeune femme qui lui donnait un avenir serein, et Mathias. Il ne sait toujours pas pourquoi, mais il sentait qu’il pourrait donner sa vie pour ce gamin… Pirate sur ses épaules, fouettant sa queue sur son visage, il s’amusait à passer de Mathias à lui, à Erin, comme s’il avait choisi de garder ses trois petits moutons ensemble. Une fois la commande prise, assez pour nourrir un régiment, ils reviennent dans la chambre d’hotel où se trouvent les deux autres loups. La tendance était inversée. Maintenant, il y avait plus de personnes de la meute d’Erin que de la meute de Sherwood, mais il ignora pas mal la tension. Pirate fit un miaulement étrange, qui aurait été traduit en humain par un « il faut toujours tout faire ». Et il s’approche des pieds d’Erin, l’enroule, puis enroule ceux de Mathias et ceux de Sherwood. S’approche de Léo et le fait aussi… Et saute directement sur les jambes de Félix avant de lui faire un long et plaintif miaulement et de se mettre à ronronner. C’était sa manière de dire « tout va bien ». Ouais, Félix était le troisième roue du carrosse et allait être ouster, Pirate le sait héhé, mais il n’aime pas la souffrance que peu ressentir les hommes. Ils sont trop tristes. Alors, il ronronne et commence à lui donner des coups de tête pour essayer de l’apaiser totalement. Sherwood le regarde et fait un petit sourire.

- S’il te dérange, n’hésite pas à le pousser. Il n’est pas rancunier.

Pirate se stoppa, lança un regard à Sherwood plein d’amour avant de reprendre ses coups de tête. Il avait aussi mis une patte sur Léo, quémandant d’être caresser par tout le monde, s’il vous plait. Quand Sherwood commence à défaire la nourriture, le chat se stoppa à nouveau… Donner du réconfort ou nourriture. Il plante ses griffes dans les jambes de Félix pour faire un miaulement à nouveau plaintif. Nourriture. Il fallait se mettre autour de la table aller.

- Pirate, réprimanda Sherwood avec un sourire jusqu’à ce que le chat descend, se place à côté d’une chaise et attend que Félix se met dessus.

Si Pirate avait choisi sa future maîtresse, il n’était pas méchant. Alors, il continue de miauler jusqu’à ce qu’on fasse ce qu’il demande. Sherwood avait même prévu une petite assiette à côté des autres pour lui. Logique. Il était un chat bien nourri !

Sherwood avait écouté la conversation, comme Pirate. Et il avait senti un élan de compassion pour le petit casse couille. Quoi ? Mathias avait peut-être de quoi lui rappeler un homme, il n’était pas casse-couille comparé à l’autre… Et puis, comme il ne faisait que le penser, sans le vocaliser ni même le montrer sur son visage, ça passait. Pirate, qui était sensible aux changements d’humeur des autres, se sentait capable de faire des ronrons pour tout le monde, mais compris qu’il n’avait pas à protéger sa nouvelle maîtresse… oui, pour lui c’était acté, et alors ? Il n’avait pas à repousser le loup solitaire et pouvait donc lui prodiguer du réconfort. Après tout, lui aussi allait être la troisième roue du carrosse un jour.

- Tu devrais retourner chez Adam. Pour rencontre Médée. C’est le chat de Mercy. Il est pareil, mais il n’aime pas Pirate, expliqua Sherwood avec douceur, plus attendrit par sa boule de poil que par Félix.

Il adorait son chat. Il l’aimait et savait qu’il allait devoir le perdre un jour, comme il perdrait chaque personne non magique et immortel. C’était triste mais inévitable. Pirate lui lança un regard. Il se sentait comme ça pour un chat… Comment devait se sentir alors tous les loups aux compagnons humains ? Cela devrait être une torture de tous les jours. Surtout que l’alternative étant le changement qui pouvait parfois être pire encore. Il mangea en silence, ignorant proprement les conversations bien qu’il les entendu. Il faisait la place pour la nourriture à Pirate qui le prenait toujours avec plaisir. Quand Erin se releva, le chat à trois pattes ouvrit un œil. Quand Sherwood la suivit, le chat se mit à miauler. Il n’aimait pas qu’un groupe se sépare, ça l’agace. Sherwood s’accroupit et caresse son chat qui vient se frotter contre lui et apprécier les papouilles.

- Je te fais confiance pour la protéger, énonça-t-il alors que le chat revient se placer sur les genoux de Félix.

Il avait l’être qu’il aimait le plus dans l’univers, pour le moment, sur ses genoux… alors il ne pouvait que lui demander d’y faire attention. Il avait lui aussi nettoyer sa place, et d’ailleurs, s’il n’y avait pas la poubelle et Pirate, personne n’aurait pu deviner qu’il était ici. Dès que la porte fut fermé derrière eux, Pirate se mit à miauler en regardant avec une attention particulière ce qu’était en train de manger Léo, lançant même la patte pour en avoir le droit à un bout, montant sur Mathias pour le fouetter avec sa queue et ronronner de plus belle.

Dans la chambre, Sherwood observait la zone. Il y avait une odeur d’elle. C’était doux et simple. Calmant. Il l’observe dans son environnement et ne bouge que quand elle s’avance. Il ne sait pas réellement ce qu’il doit faire. Cependant, il avait une question avant de commencer.

- Mad… Erin, est-ce que vous allez voir mes souvenirs ? Si oui, cela signifie que vous avez vue le souvenir, hier au restaurant ?

Celui de son frère qui embrasse son front. Savait-elle déjà qui il était pour le Marrok ? Ce qui donnerait le nombre de trois, les personnes au courant de sa filiation avec le grand seigneur des bêtes.

Il s’assit en face d’elle. Il était habitué à sa propre magie, mais peu coutumier de celles des autres, ainsi, il ne savait pas du tout à quelle sauce il allait être mangé. Il se positionne et s’attends à ce qu’elle lui demande tout et son opposé. Qu’il tende ses mains, fasse couler son sang, bref, il ne sait pas ce qu’elle désire mais il s’attendait à tout. Il fronce un peu les sourcils quand elle lui explique son histoire et sa filiation avec la magie. Il avait une filiation, lui aussi, avec cette part du monde, mais n’en comprenait que peu l’origine ou la mission. Il pouvait chanter et enlever le mal, où était-il alors dans cette explication ? Il ne posa pas la question et hocha simplement la tête pour lui dire de continuer. Quand elle lui prit la main pour lui rappeler le baiser, son esprit revient automatiquement au souvenir retrouvé. Celui de son frère baisa son front en lui disant que tout allait bien se passer. Bran n’était pas celui que l’on connait aujourd’hui. Dans son souvenir, il n’était qu’un homme transformé en loup sans en comprendre les conséquences et manipuler par une femme qui s’amusait de leur souffrance : leur mère. Alors, il hocha à nouveau la tête.

Le reste le mit un peu mal à l’aise. Savoir que l’on allait utiliser la magie était une chose, se retrouvait au centre de celle-ci était une autre. Il ne détourna pas le visage de sa position, tout son corps était immobile et seuls ses yeux observèrent autour de lui. C’était quelque chose d’impressionnant et d’intimidant, bien qu’aucun loup n’accepterait de l’avouer. Il planta son regard dans celui de la jeune femme. Cela impliquait donc qu’elle voit tout, et qu’en plus il lui fasse assez confiance pour rentrer dans « sa bibliothèque »… qui en l’état devrait ressembler à la bibliothèque d’Alexandrie sous les eaux, perdus et presque légendaire. Il reprit sa main doucement avant de regarder cette dernière. Cela impliquait beaucoup de confiance pour elle. Pour une fille qu’il venait à peine de rencontrer. Il se sentait mal à l’aise à cette idée. Il ne savait pas ce qu’il pouvait se trouver dans son passé… mais n’est-ce pas justement ce qui le rendait fou ? Pendant qu’elle se débarbouille, il réfléchit. Il ne pensait pas être une mauvaise personne. Si parfois, il se souvient de choses violentes, il pensait être dans son bon droit. Et… Il pensait à l’inné et l’acquis. Son caractère ne pouvait pas être totalement différent, si ?

- Commençons doucement, si vous voulez bien. J’aimerais savoir pourquoi Mathias m’attire à ce point.

Et quand il dit « attirer », il n’avait pas besoin de préciser que c’était dans une version presque instinctive de son être. Il avait envie de toucher Mathias, son visage et de le protéger alors même qu’il ne le connaissait pas du tout. Sa tête lui hurlait de le tenir contre lui alors même qu’il n’y avait aucun souvenir conscient pour expliquer un tel besoin. Donc. Il la laissa s’installer et lui tendit les mains avant de fermer les yeux.

Pendant qu’il fermait les yeux, sous ses paupières, il se souvient. Il ne sait pas réellement combien de temps elle avait mit dans sa bibliothèque de souvenir, puisqu’elle avait dit que le temps ne passerait pas pareil, mais Mathias apparu devant son esprit. Non. Pas Mathias. Wilsonia. Il se souvient.

Une cage. Un sol poisseux. Une grotte. Un cri de terreur. Un homme que l’on tire sur le sol. Une odeur d’excrément. Le sol qui tape à peine à travers un trou dans la roche. Le souffle court. La nudité. Dans un coin de sa prison, caché par les ombres, on balança un homme dans l’eau croupi. Son repas. C’était douloureux. Il savait ne pas devoir le manger. Il savait qu’il ne pourrait pas s’en empêcher. Comme l’homme d’il y a une semaine, ou l’enfant d’il y a deux mois. La nourriture était irrégulier, tant en terme de temps que de qualité. Approchant, son corps déformait par la semi-transformation que la sorcière avait faite de lui. Il s’approche. Il doit manger. Le corps est un loup. Il le sent. Il est encore vivant mais à peine. Et il sent la peur et la trahison. Alors, le prédateur s’approche. Il a besoin de se nourrir. Il veut mourir. Mais son loup était plus fort que la petite voix humaine dans sa tête qui lui dit de ne rien faire. La main, dont des touffes de poils éparses rendait sauvage, attrapa le cou de la victime. Puis, il posa le regard sur l’homme. Et l’humain cria. Le loup se calma. Le monde devient serein.

Sherwood, qui à l’époque déjà avait oublié son nom et n’était plus que « la chose » de la sorcière, prit une respiration douloureuse pendant que son loup se réfugia dans son esprit. Comme apeuré. Non pas de l’homme, mais de ce qu’il allait lui faire. L’homme. Wilsonia. Un homme aux regards doux et à la voix calme. Il fit s’approcher le monstre. Sherwood l’ignorait mais il venait de rencontrer un oméga qui, avec la force de son incroyable empathie, avait marqué son âme. La sorcière ne vient pas vérifier que son monstre avait eu sa nourriture et disparu pendant plusieurs jours, sans revenir ou voir s’il avait eu besoin de quoi que ce soit. Wilsonia, plus doué pour tenir contre la lune, moins traumatisé aussi, réussit à les nourrir de rats et de petites bêtes jusqu’à pouvoir trouver un moyen de s’échapper. Pendant presque un mois, il avait été le seul homme à lui tendre la main, à le soutenir, et Sherwood appris à survivre ainsi. Il était devenu une bête plus homme, il n’était plus sur quatre pattes mais deux. Alors quand la sorcière arriva pour le nourrir avec le corps d’une femme dont elle avait coupé la tête, elle ne put qu’être étonnée de sa mise à mort. Elle avait ouvert la porte, et Sherwood lui avait arraché le cœur.

Après cela, Wilsonia décida qu’il ne pouvait pas laisser son nouvel ami, et la raison de sa survie –même s’il avait bien compris que Sherwood n’avait aucunement décidé de le garder en vie consciemment-, seul, il le ramena chez lui. Il le présenta à son groupe. Ils vivaient dans un coin d’une forêt, pratiquement en autarcie. Il y avait quelques loups, une elfe, deux faes et beaucoup de sorcière. Et il y avait elle : Aveline. La fille de Wilsonia.

Sans parler d’amour, puisque Sherwood le ressentait ainsi dans ses souvenirs, il y avait eu un attachement évident et direct entre eux. Une amitié qui s’accompagnait de moment intime sur la plage, contre les arbres, jouant à ne pas se faire attraper ou simplement se fichant qu’on puisse deviner à l’odeur ou avec le son de ce qu’il faisait. Aveline avait trente et un ans. Elle était une vieille fille. Ainsi tout le monde le disait. On parlait de son visage peu gracieux. On disait d’elle qu’elle avait un visage plus masculin que son propre père. Mais Sherwood voyait surtout la simplicité dans ses moments tendres avec elle. Des moments agréables.

Et il y eut ce souvenir, un jour où il rentra de la chasse avec Wilsonia. Elle l’attendait devant la place qu’ils partageaient. Wilsonia, elle et lui. Elle lui dit de venir. Elle le fit s’asseoir et s’assit sur ses genoux. Et elle posa sa main sur son ventre, riant un instant de ce qu’elle savait que Sherwood sentirait. Le cœur vaillant d’un petit guerrier. La joie s’empara de lui. Depuis qu’il était avec eux, sa vie semblait plus paisible, son loup était calme et n’avait besoin que de cette petite troupe de personne. Cependant, elle perdit ce premier bébé, et trois autres. Sherwood l’apprit à ce moment-là, puisqu’il n’avait été que peu inquiété par ce genre de soucis dans sa captivité, que les loups avaient toujours du mal à avoir un fœtus viable. Chaque fois qu’elle perdait un bébé Aveline pleurait. Et à chaque fois, elle promettait que la prochaine fois serait la bonne. Sherwood savait qu’elle n’était pas en cause et lui demandait d’arrêter, mais elle voulait un enfant. C’était cela, l’amour que lui et elle recherchaient réellement dans les bras l’un de l’autre. Une famille.

Quand elle eut quarante-deux ans, son ventre s’arrondit à nouveau. Sherwood se maudissait de sa faiblesse et du plaisir qu’il ressentait de lui faire l’amour si c’était pour la faire souffrir. Elle promit que c’était la bonne. Et, de ce qu’il en sait, se fut le cas. Son ventre s’arrondissait de plus en plus jusqu’à la faire ressembler à une baleine –c’était ses mots à elle, pas les siens-. Il caressait le corps de cette femme et attendait avec hâte de prendre son bébé dans les bras.

Sauf que le monde en décida autrement. Un groupe de sorcière vient attaquer le village pour retrouver des loups. Lui ? Il ne sait pas comment elles ont pu le savoir, ni pourquoi toutes les sorcières pensaient qu’il était plus important que les autres. Il ne réalisait pas que sa position de « premier » loup lui donnait plus d’intensité en tant qu’essence pour les sorts. Le groupe s’enfuit. Alors qu’Aveline monta sur une barque avec son père, Sherwood secoua la tête.

- Je dois te laisser, c’est moi qu’elles veuillent.
- Je t’en supplie, tu ne peux pas faire ça. Je… Je sens que l’on ne se reverra jamais.
- Alors, vis en pensant à moi, fit-il en embrassa une dernière fois ses lèvres délicates. Et un jour je retrouverais notre enfant ou ses descendants. Je verrais en lui ton visage et je le protègerais encore. C’est le serment que je te fais, Aveline.

Il poussa la barque et s’enfuit dans la forêt, se faisant encercler trop rapidement. Il combattu les sorcières, mais le nombre eu raison de lui. Il sombra dans la douleur et la souffrance… mais il avait la certitude, au moins, que son fils allait bien. Son petit guerrier. Et il vit le visage de Mathias, quand il était arrivé, avec une clarté nouvelle. Mathias était son descendant. Il était son arrière-arrière grand-père. Quatre générations plus tard. Pourtant, le cœur de Sherwood s’arracha et il ne considéra pas Mathias aussi loin dans la généalogie. Mathias devenait son fils. Si ce n’est pas le sang, par l’âme. Il ouvrit les yeux et reprit ses mains alors que ses yeux écarquillés tombèrent sur la jeune femme.

- Il est…, souffla-t-il avant de tourner la tête vers la porte.

Il est sa famille. Et de la famille de Bran aussi, donc. Et de Samuel et Charles. Il a un lien avec eux. Et Sherwood se releva pour se mettre à faire les cent pas alors que son loup se réveilla tout bonnement. Il voulait clairement rejoindre le jeune et lui faire comprendre qu’il était son descendant et qu’il donnerait sa vie pour lui. Sherwood essaya de se calmer, son loup au bord de son esprit. Et la seule solution qu’il trouva pour apaiser cette nouvelle ? Il revient sur le lit, entoura ses bras autour de la jeune femme et se calma sur son ventre avant qu'elle ne puisse le repousser. Il n'y avait pas de possession ou de colère dans son geste, c'était plus de l'aide pour tenir les rennes de son esprit en place.

- Crois-tu que je dois lui dire ?

Si sa position n’était pas déjà assez éloquente sur le besoin de soutien qu’il demande, le tutoiement et la manière dont il avait eu de poser sa question l’avaient été. Il n’avait aucune idée de comment il devait faire maintenant. Son barrage mental, remplit de ses souvenirs, semblait tenu et lointain, comme s’il pouvait se permettre de réfléchir à une chose à la fois. Il avait vue plusieurs moments mais pouvaient toucher du bout de sa mémoire d’autres pendant qu’il habité avec Wilsonia et Aveline. Il savait qu’elle pouvait manger des tonnes de fraises chaque fois qu’elle était enceinte ou qu’elle avait le chic pour chanter quand elle s’ennuyait. C’était un souvenir doux. Il n’avait pas besoin de demander si elle était morte ou pas, il se doutait de la réponse mais ce savoir ne lui apportait pas de souffrance, vue le temps qui était passé, simplement la nostalgie de l’insouciance qu’il avait partagé pendant onze ans.