J'ai 24 ans et je vis où je peux, dans l'Anuire. Dans la vie, je suis fille aînée d'Aymeric Mosse Gawen de Lanasthël, Roi d'Anuire décédé d'une crise cardiaque et je m'en sors bannie du Royaume puisque j'ai convoité le trône.
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Alors même que la pression quittait péniblement la princesse, l'importunité de Bastes et l'inactivité de Malvo la piquèrent d'une amertume. Ces deux hommes qui avaient manqué de clarté avec elle s'attendaient à ce qu'elle se saisisse d'une décision qu'elle ne jugeait sienne : ce n'était pas elle qui irait affronter ces monstres là et elle se voyait mal envoyer le retraité paladin pour le faire à sa place, pas plus qu'elle n'avait l'intention de laisser le Seigneur penser qu'elle lui devait quoi que ce soit. Heurtée dans son égo et plongée dans l'incertitude de ses rapports politiques avec Malvo, Mélampe se saisit du problème à bras le corps et se posta, désormais plus froissée qu'impressionnée - mais surtout confortée par la surveillance du paladin -, aux pieds du vil (et vilain) Bastes.
"Seigneur je pense qu'il y a quelque chose que nous gagnerions tous deux à éclaircir. Je ne suis pas sous vos ordres, nous sommes associés, et vos questions rhétoriques tempèrent mal votre ton sommateur. Le marché a été conclus quoi qu'il arrive. Du reste, cet homme n'est pas à mes ordres non plus, aux dernières nouvelles."
Elle insista sur ces mots perforant du regard l'expression inchangée de Malvo.
"Mais si c'est une preuve de notre droiture en affaires qu'il vous faut, faisons de votre requête un nouveau marché. Nous irons chasser vos bêtes si vous remplumez nos deux amis souffrants, et que vous acceptez de nous équiper entièrement. Armes, armures, et quelques bagages."
L'autre homme s'inséra.
"Bastes on n'a pas à- - Réfléchissez, l'interrompit Mélampe sans lâcher du regard le dédain du chef des lieux. Vous avez tout sur place : minerai, forge, ça ne vous coûtera pas grand-chose. Nous, nous allons jusqu'à payer de nos vies. Il me semble que vous gagnez au change. - Faisons cela. Nous vous équipons et logeons et vous nous débarrassez de ces horreurs."
Bastes eut ce jour-ci une soudaine facilité à demander qu'on l'aide.
*
Au dehors, Malvo et Mélampe furent harponnés par les questions de leurs confrères à qui ils résumèrent la conversation.
"La princesse ne peut décemment pas prendre le risque de se faire tuer, nota Adeluvior. J'irai avec vous dans ces mines. - Pardon mais vous me paraissez vieillissant, jugea l'héritière sans trop faire cas de le vexer. - J'ai mon utilité ..."
Sur ces mots et alors qu'il aidait Tili et Lodeth à quitter la carriole, ses manches remontèrent sur ses bras - des tatouages tels que n'en avait jamais vu Mélampe y serpentaient, léchant son coude et grimpant sûrement encore plus haut. Tribaux, runiques et figuratifs, ils semblaient réciter un poème illustré sur les membres madrés du doyen. Il esquissa un sourire tranquille et la jeune femme remis pour plus tard ses questions. L'Ordre était un groupe fort mystérieux.
Ce qu'elle ne remis pas à plus tard en revanche, c'était la conversation qui s'imposait d'elle-même avec Malvo. Quelque peu isolés du reste du groupe, elle fit peu cas du trouble récent qu'elle l'avait vu traverser et s'engagea des deux pieds sur un tapis épineux.
"Que faites-vous au juste ? lui demanda-t-elle à demi-voix. Titus, Adeluvior et Krah sont venus me chercher pour porter le coup d'Etat, c'est cristallin. Lodeth et Tilli feront ce que vous voulez qu'ils fassent. J'imagine bien qu'en l'échange de soins à vos amis vous vous engagerez dans notre chasse aux monstres, soit. Mais où en êtes-vous avec ma position ?"
Elle tentait vainement de le sonder. Du même temps, le second de Bastes indiqua à Titus chez qui crècheraient les compagnons - Erüne n'avait pas d'auberge, pas plus qu'elle n'accueillait bras ouverts ses visiteurs. On racontait même qu'il était plus hospitalier de dormir dans leurs mines que dans leurs lits ... mais cette rumeur datait d'avant la prolifération du bestiaire, évidemment.
"La première fois que je vous ai parlé de mes ambitions vous m'avez sauté à la gorge, littéralement. Pourtant vous nous avez suivis jusqu'ici. Vous m'avez accompagnée pour les négociations et vous vous êtes tourné vers moi pour prendre une décision qui vous était offerte. Je vous porte grande confiance mais il me semble que j'ai le droit de savoir. Si vous avez l'intention de nous quitte une fois Lodeth et Tilli saufs, dites-le moi."
La nuit tombait durement et chacun était inconfortable de cette journée de calèche et de deuil. Mélampe sentait sur ses épaules jusqu'au poids physique de la pression qu'elle ressentait et l'électricité ambiante était palpable depuis leur départ. Tous avaient grand besoin de repos pour se rassembler, ce que Titus et Adeluvior, installant les plus fragiles en premier, avaient bien compris. La princesse néanmoins n'avait pas l'intention d'en démordre, elle qui avait bien assez peur de l'échec pour croire au hasard, et qui chassait l'incertitude avec rigidité.
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Mer 13 Oct - 16:26
Malvo
J'ai 39 ans et je vis en Anuire. Dans la vie, je suis mercenaire des Impavides et je m'en sors de moins en moins bien. Je suis un rescapé, quelqu'un qui avait de l'importance.
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Malvo prit le temps de rassurer ses hommes pour le moment. Lorsque Mélampe lui demanda de le suivre pour lui parler quelques instants, il accepta, bien entendu. Il ne s’attendait pas réellement à devoir se justifier sur ses intentions ou devoir lui prêter formellement allégeance à vrai dire. Il la regarda un long moment, silencieux. Ce n’était plus la même jeune femme que celle qu’il avait ramassé sous un tronc d’arbre, encore tremblante d’avoir manqué d’être dévorée par une salamandre géante. Elle avait de l’aplomb, de l’assurance… et ne manquait pas d’en jouer. Elle dissimulait certainement de grands doutes et un questionnement constant de ses choix mais elle s’en sortait admirablement pour le dissimuler, ainsi que le font tous les dirigeants.
- Je dois avouer n’en rien savoir, princesse, dit-il dans une pique amusée pour faire remarquer le changement qu’il percevait. Mes hommes sont libres de faire ce qu’ils veulent et quant à moi, je pensais pouvoir rester avec vous pour vous protéger le temps qui me semblait correct. Après tout, je vous dois ma vie dans la mesure où si vous n’aviez pas été dans ma cellule, je n’aurais jamais pu profiter de votre fuite pour sauver ma peau, expliqua-t-il plus sérieusement. Pour le moment, je n’ai rien de mieux à faire et j’ai le sentiment que nos destins sont désormais liés. De toutes manières, j’ai déjà fait mon temps chez les Impavides, éluda-t-il finalement pour qu’elle ne prenne pas trop attention à sa confidence.
Il la regarda un peu pour jauger sa réaction. Il avait ses propres raisons de choisir de la suivre. Peut-être que s’il se donnait suffisamment de mal à l’aider à monter sur le trône, elle lui permettrait d’exercer sa vengeance… Il n’y comptait pas trop. Les gens qui avaient comploté contre l’Ordre était trop insidieux pour se laisser être du mauvais côté de l’Histoire… Dans les premiers temps qui avaient suivis le drame, il avait voulu se venger lui-même, seul. Malheureusement, les pistes s’étiolaient les unes après les autres et il se sentait de plus en plus être observé. Il savait que l’élimination systématique d’éléments gênants de l’Ordre avait à voir avec les troubles politiques récents. Après tout, les dirigeants du Temple du Feu étaient à même de tutoyer le Roi et les plus grands marchands du Royaume.
- Ne réfléchissez pas trop : je suis avec vous tant que vous me traiterez avec respect. Je resterai le temps qui vous sera nécessaire et je m’en irai pour reprendre ma route si cela s’avère profitable pour nous deux un jour, acheva-t-il dans l’objectif futile de la rassurer avant de s’en retourner à s’occuper de ses affaires.
Il veilla à accompagner ses deux hommes jusqu’à la demeure qui leur était attitrée. Les deux gaillards se retrouvaient à tailler leur nid dans la demeure d’une famille de mineurs. Le père allait au charbon avec son plus grand fils tandis que la mère s’occupait des enfants et travaillait à tenir le logis et à filer du tissu avec d’autres femmes. Malgré leur air peu accueillant, ce semblait être des gens honnêtes et soigneux. La propreté des lieux dans lesquels un soldat blessé était soigné avait une importance capitale dans sa remise sur pieds. Il le savait d’expérience… Il prit le temps de les remercier et de leur offrir quelques pièces qu’il avait encore sur lui, en guise de remerciements. Il se rendit compte que ces pièces avaient dû être faites à partir de minerais récupéré sous leur logis, pour ainsi dire. Ils semblèrent apprécier l’attention.
A son tour, Malvo s’en alla rejoindre la demeure qui lui était attribuée à Adeluvior et lui. Les loger ensemble avait d’avantage à voir avec leur mission qu’une volonté particulière de séparer le groupe, il le savait, mais il n’empêchait qu’il était tout de même tendu à l’idée de vivre quelques temps avec le vieillard. Avoir vu ses tatouages, cela lui faisait de l’effet. Il était teinté d’une aura de mystère comme l’étaient les membres de ce groupuscule qui avait fait don de son corps complètement.
- Malvo, nous sommes tous amis dans ce groupe, lui dit-il de but en blanc alors qu’ils marchaient sur le chemin. Je sais que vous vous faites du souci à l’idée que je vous suive dans les souterrains et que je fasse usage de mes tatouages à mon grand âge mais j’ai confiance. Je dirais même que j’ai foi en les flammes qui coulent dans nos veines pour nous rendre plus forts que les abominations, justifia-t-il en attendant avant de pousser la porte.
Il avait dû longuement prendre le temps de réfléchir au moment qu’il choisirait pour mourir. On apprenait très tôt aux aspirants de l’Ordre que l’usage de la source pour en appeler aux forces du Feu éternel était la preuve formelle de la réalité de la divinité de leur foi. Malheureusement, comme une luciole qui brille plus intensément, les guerriers sacrifiés vivaient deux fois moins longtemps. Il ressentait le besoin de lui éviter de devoir venir mettre le pied sur le front mais il savait que cela aurait été lui voler une mort glorieuse véritablement digne d’un combattant de sa trempe. Il n’y pouvait rien et ne devait que se résigner à les plaindre, lui et Krah, s’ils venaient à ne pas ressortir ensemble des entrailles d’Erüne.
Après avoir frappé à la porte, un vieillard courbé et solitaire vint leur ouvrir. Il les scruta un moment en tremblotant, campé sur sa canne. Il semblait mâchouiller quelque chose répétitivement et clignait difficilement des yeux. Sa voix était faible et on sentait la raideur de son corps à sa posture. Marchant à petits pas, peut-être pour ne pas se trouver être déséquilibré, il avança à l’intérieur de l’unique pièce de sa modeste demeure. Plusieurs couchettes de pailles étaient déjà en place qu’il montra, son bras se mouvant d’une manière lente et mécanique. Sa main tremblait intensément alors qu’il pointait où nous installer et déposer nos affaires. Nous l’en remerciâmes chaleureusement en refermant la porte d’entrée derrière nous.
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Jo'
Ven 15 Oct - 10:39
Mélampe Hildegarde Gertrud de Lanasthël
J'ai 24 ans et je vis où je peux, dans l'Anuire. Dans la vie, je suis fille aînée d'Aymeric Mosse Gawen de Lanasthël, Roi d'Anuire décédé d'une crise cardiaque et je m'en sors bannie du Royaume puisque j'ai convoité le trône.
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La bougie éclairait une pièce toute en lambris dans laquelle reposait un lit et un couchage de paille drapée à même le sol. Naturellement, Titus ôta ses bottes devant la literie de fortune et laissa le sommier à la princesse.
"Vous feriez mieux de prendre le lit, protesta-t-elle sans grande conviction. Votre dos a davantage besoin de récupération que le mien. - J'ai l'habitude de pis, je vous laisse le matelas de bon coeur."
Elle concéda à s'y asseoir et observa distraitement la flamme malingre qui gambillait sous les assauts des courants d'air filtrant dans la maison. En ce premier temps d'introspection depuis ce qui lui paraissait être une éternité, Mélampe était pensive.
"Un problème princesse ? s'enquit Titus déjà installé aussi confortablement que possible. - Je me disais, prétexta-t-elle pour évincer la question, que j'étais assez soulagée que nous ayons été installés ensemble. Je n'étais pas gaillarde à l'idée de dormir seule dans une maison d'inconnus. - C'est moi qui ai demandé à être alité à vos côtés, pour ces mêmes raisons. - C'est aimable."
En vérité, la jeune femme remuait dans son esprit le poids du manteau qui s'accrochait sur ses épaules. Après l'immensité de son errement à quêter des alliés, des semaines d'emprisonnement et l'abandon de ses espoirs de survie, la liberté et le coup d'Etat étaient venus d'eux-mêmes aussi salvateurs et inspirés qu'accablants. Mélampe chaussait les bottes ambigües d'être décisionnaire tout en étant protégée, et réalisait qu'elle devait camper sa hiérarchie avec autant rigueur et d'amitié que possible.
"Qu'est-ce qui pousse un chevalier de l'Ordre à retrouver en catimini une vraie-fausse princesse exilée dans l'espoir de lui proposer un coup d'Etat ?"
Titus, n'étant pas au fait des élaborations intérieures de l'héritière, fut cueilli par la question à laquelle il donna l'air de songer un instant.
"... il y a des affaires que je n'ai pas pu régler avec votre père. Maintenant qu'il est trop tard, je fais de mes remords quelque chose de productif. - Des affaires ?"
Elle n'avait aucune connaissance de griefs ou arrangement entre son père et l'Ordre, ou du moins entre son père et un paladin de l'Ordre. Il lui aurait semblé qu'un dignitaire de leur foi aurait été plus à même de discuter - alors quoi ? Le chevalier ne lui donna pas plus de lumière.
"Avec ce que nous prévoyons de chasser, cette nuit pourrait être l'une de mes dernières - si vous me le permettez, j'aimerais en profiter dès maintenant, indiqua-t-il poliment pour lui réclamer le silence. Nous avons tous une bonne raison de vous voir en lieu et place du Marcéhal Faramond, princesse."
Etais-ce le fait d'apprendre que son père avait été empoisonné par un Maréchal des plus fidèles qui rendait la jeune femme méfiante ? Ou la Providence qui lui envoyait toutes ces bonnes âmes lui semblait-elle tout simplement louche ? Titus se retourna vers le mur et Mélampe s'allongea à son tour.
La flammèche dressée sur sa colonne de cire jaspait le regard ambré de l'héritière et qui s'égarait distraitement dans le dos du paladin, celui-ci lasuré d'un affrontement passé qui la peina ; avant toutefois qu'il ne remarque son insistance et ne la prenne pour de l'impudeur, l'héritière souffla d'un coup sec la bougie et les plongea dans le noir complet. Le bon coeur des réponses de Malvo et Titus la rassuraient quelque peu et elle trouva le sommeil bientôt.
*
Les jours passèrent et toute Erüne finit par reconnaître ces visiteurs incongrus comme des camarades. Lodeth et Tilli avaient repris des couleurs, la cheville de Krah se remettait à son rythme et il pouvait à nouveau marcher - quant à Malvo et Mélampe, il avaient plus ou moins récupéré la morphologie d'avant les privations de leur cellule. Ils avaient appris que la dureté de l'accueil de la région était surtout liée à une vie d'isolement roide et de deuil sévère : les pierres ne sont pas tendre, au sens propre et figuré ; pas plus que la forge où les flammes absorbaient parfois des vies. Bastes avait eu sept garçons et une petite fille, mais personne n'avait revu les aînés partis mineurs il y a des mois, et Mélampe fit le rapprochement entre son étonnant appel à l'aide et les disparitions de la progéniture. Le Seigneur admettait être vulnérable parce qu'on lui avait volé la chair de sa chair tandis qu'il gardait jalousement sa petite sous la coupelle d'une paternité de fer. Quant à son second, il proposa au groupe de partir chasser le monstre avec eux, avançant le judicieux argument qu'ils auraient besoin de quelqu'un sachant se repérer en sous sol.
De son côté Adeluvior instruisit l'héritière sur l'histoire que comptaient ses tatouages et qui reproduisaient un épisode des contes sacrés du Feu Eternel. Les formes tribales en arabesques liaient des motifs plus figuratifs et représentaient le Feu unissant les destins. De ses poignets à ses épaules pouvait-on déchiffrer - à condition d'avoir bon guide comme il l'était - ces instant où l'incendie tout destructeur qu'il était pouvait faire naître une vie nouvelle, ainsi que l'on défriche les bois pour y faire pousser dans leurs cendres de quoi se nourrir. "L'arbre qui se meurt ; devient terreau pour future fleur, récitait-il lissant des doigts l'encrage qui correspondait à ce verset." Et il parût évident que cet homme sur la pente déclinante de sa longévité souhaitait en effet disparaître en terreau et non en stérile statue.
Faire quelque chose de bon pour fermer les yeux sur ce que nous avons été de meilleur.
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Houmous
Mer 20 Oct - 16:32
Malvo
J'ai 39 ans et je vis en Anuire. Dans la vie, je suis mercenaire des Impavides et je m'en sors de moins en moins bien. Je suis un rescapé, quelqu'un qui avait de l'importance.
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Malvo passa plusieurs jours à prendre du repos et à se préparer pour pouvoir aller chasser le monstre dans les souterrains. Il prit le temps d’interroger quelques témoins plus ou moins directs de la présence de ses nouveaux amis. A ce qu’on disait, les créatures qui hantaient les mines craignaient la lumière et la fuyaient comme la peste. Du fait de cette particularité et de leur surprenante mobilité, les descriptions variaient et tantôt on les comparait à des chevreaux aux trop nombreuses pattes, parfois à de grosses araignées et enfin, à des hommes marchant à quatre fers, le dos tourné au sol. L’ancien paladin savait qu’on découvrait encore de nouveaux monstres.
Il passa le reste de ce temps de préparation à manier à nouveau l’épée et à l’affuter lentement et précautionneusement. Il ne s’agissait pas de se trouver bloqué quand il s’agirait d’abattre le jugement. On le trouvait parfois auprès de sa demeure d’accueil à frapper inlassablement un pantin qu’il avait confectionné pour l’occasion. Il répara également son armure et se débrouilla pour que sa tenue soit la moins encombrante possible.
Il constitua un petit groupe qui s’imposait de lui-même : Titus, le vieil Adeluvior et un guide, le second du Seigneur Bastes. Ce dernier s’appelait Amun, un nom bien exotique pour un habitant des terres isolées d’Erüne qui se justifiait du fait qu’autrefois, il était fils d’un courtisan de la Reine de la lointaine Tokel-num. Malvo était curieux d’en savoir plus mais il ne poussa par sa question plus loin, respectant les réserves de l’homme. Ils prirent le temps de recueillir toutes les informations possibles qui pourraient leur indiquer comment stopper l’invasion de nuisibles et permettre aux mineurs de se remettre au travail.
Le jour venu, Adéluvior était en train de parler avec la princesse du sens séculaire de ses tatouages. Il fut surpris de sentir la main de Malvo, amical et résigné, se poser sur son épaule. Le vieil homme tourna légèrement la tête et planta son regard dans celui de son camarade avant de se retourner et regarder vers le sol.
- Alors il est temps de partir ? demanda-t-il, rhétoriquement, avant de se relever. Ce fut un plaisir, jeune fille. J’espère que vous garderez la bonté et la curiosité qui animent votre cœur lorsque vous serez arrivée au trône, lança-t-il, en douce épitaphe.
Il tapota son cadet sur l’épaule avant de s’éloigner à pas lents. Il semblait l’encourager à prendre le temps de parler à la jeune princesse avant de partir pour ne peut-être pas. Pour ne pas gâcher l’opportunité, il vint s’asseoir sur la place encore chaude en retirant son épée de son côté et en la déposant non loin, soigneusement.
- Nous allons nous mettre en route. Si jamais tout ne se passe pas comme prévu… Bref, vous savez quoi faire, éluda-t-il, la mort dans l’âme. Combattre des créatures inconnues est toujours très risqué mais en compagnie d’Adeluvior, je suis certain qu’au moins l’un d’entre nous reviendra…
Sans prendre plus de temps, il s’en alla. Le fait de mourir sans pouvoir subir les rites funéraires était un grand tabou parmi les paladins. Il était d’usage qu’un autre des membres de l’Ordre puisse être prévenu pour s’occuper de récupérer la dépouille dans le cas où l’un d’entre eux venait à périr dans l’exercice de ses fonctions. Malvo n’y avait pas réellement réfléchi, peut-être saisissant chaque fois jusqu’ici avoir de réelles chances de l’emporter sur l’ennemi. Malheureusement, le doute était cette fois-ci de mise, les proies étant inconnues, en nombre indéterminé et la situation difficile à évaluer de l’extérieur. En d’autres termes, il percevait le danger évident à venir combattre sur son propre terrain une proie inconnue.
Alors que la petite escouade arrivait à hauteur de l’entrée de la mine, une petite foule s’était amassée pour les regarder débuter leur quête. Les regards avaient quelque chose d’inquiet et on sentait bien que peu dans la foule les croyait en mesure de l’emporter. Après tout, ils n’étaient pas les premiers à aller au-devant du danger. De ceux qui étaient revenus, ils étaient nombreux à noyer encore leur terreur dans l’alcool et à rester parfaitement inopérants pour la communauté. Un triomphe semblait trop improbable certainement…
La petite troupe s’avança à un pas prudent dans les premières galeries jusqu’à atteindre un premier semblant de barricade. Deux cadavres humains avaient pourri ici dans l’attente d’être tirés pour avoir le droit à une véritable sépulture. Ils se regardèrent un moment avant qu’Amun n’explique que personne n’avait accepté de descendre pour venir récupérer leurs dépouilles. Ils avaient été tués, comme nombre d’autres, pour mettre en place une barrière protégeant la ville quelques mètres plus hauts d’une invasion nocturne. Les paladins se mirent à desceller le chemin pour pouvoir descendre plus bas encore. De l’autre côté du passage, à la lumière des torches, ils purent sentir une puanteur encore inconnue de leurs nez. Un fumet miasmatique hantait les couloirs et de vagues bruits de mouvements insectoïdes se faisaient entendre, raisonnant au loin.
Une fois la barricade remise en ordre, ils continuèrent leur marche jusqu’à atteindre une première caverne largement creusée au sein de la montagne. Les minerais encore visibles dans les parois avouaient la présence du précieux cuivre et de petites pointes de fer. Les outils abandonnés en ces lieux laissaient un sentiment de malaise grandissant. Un silence glaçait le sang des courageux aventuriers au fil de leur découverte de la catastrophe. Titus, le premier, releva une trace de sang séchée sur le sol et resta un instant à réfléchir et à observer aux alentours.
- Hum… Du sang mais aucun cadavre… Ça va être moche cette affaire, souffla-t-il simplement.
- Pourquoi… ? demanda Amun, que la curiosité torturait.
- Il y a plusieurs possibilités… Réfléchis simplement à pourquoi des monstres emporteraient avec eux des cadavres, offrit-il comme seule réponse.
Une torche dans la main et sa lourde épée dans l’autre, Malvo continua à avancer, suivi de près par Adeluvior. Rapidement, les deux autres leur emboitèrent le pas. Les tunnels latéraux commencèrent à se multiplier à partir du premier palier qu’ils avaient rejoint plus tôt. Le capitaine du groupe ordonna de resserrer la formation et que chacun garde un œil sur une direction différente.
- Mais qu’était-ce donc que ça… murmura Adeluvior. J’ai vu une petite chose glabre et blanchâtre fuir dans une galerie.
- A quoi est-ce que ça ressemblait ? osa finalement demander Amun d’une voix tremblante.
Il n’eut en réponse qu’un vague haussement d’épaule du guerrier sacrifié. Ils arrivaient dans une autre caverne, plus vaste cette fois-ci. Sur les conseils d’Amun, ils se mirent à fouiller pour essayer de trouver un quelconque signe de la marche à suivre à partir de ce point de leur exploration. Ils n’avaient, pour ainsi dire, aucune idée de comment s’y prendre. Par où les monstres avaient envahi la mine ? Où s’étaient-ils installés une fois la fumée des premières batailles retombées ? Comment les abattre efficacement et rapidement ? Autant de questions auxquelles il leur faudrait répondre s’ils souhaitaient s’en sortir.
Alors qu’ils se trouvaient dans cette grande pièce, un petit pleur léger se fit entendre. Titus fit un signe du menton pour pointer la direction d’où venait le léger bruit et s’en approcha bravement. Une caisse semblait en être la source et il l’ouvrit brutalement en pointant son arme vers son occupant sans la moindre pitié.
- Ah !!! Ne me tuez pas, je vous en supplie ! beugla le misérable dans la caisse.
Malvo projeta sa main sur le visage du gaillard pour le réduire rapidement au silence avant de se tourner sur lui-même pour voir si le hurlement avait attiré l’attention sur eux. Il sembla que tout était calme alors il lui fit signe de rester calme avant de le relâcher.
- Je m’appelle Attano, je suis un des gamins de Bastes. Il faut que vous m’aidiez ! Ils vont finir par revenir ! chuchota-t-il. On n’est pas en sécurité ici… Il faut qu’on parte pour la surface.
- Qui ça, « ils » ? demanda Adeluvior pour en avoir le cœur net.
- Les créatures, par le Feu ! Elles vont revenir et elles vont nous tuer jusqu’au dernier si elles nous entendent parler ! Elles se repèrent au son et font de petits bruits avec leurs pattes sur les parois. Elles détestent la lumière et vous attaqueront dès que vos torches s’éteindront…
La petite troupe se regarda un instant à la lumière de ces révélations.
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Jo'
Jeu 21 Oct - 22:29
Mélampe Hildegarde Gertrud de Lanasthël
J'ai 24 ans et je vis où je peux, dans l'Anuire. Dans la vie, je suis fille aînée d'Aymeric Mosse Gawen de Lanasthël, Roi d'Anuire décédé d'une crise cardiaque et je m'en sors bannie du Royaume puisque j'ai convoité le trône.
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Le moins que l'on puisse dire, c'était que Mélampe n'était pas du genre à se laisser abattre. Lorsque son père était décédé, elle s'était élancée dans la course au trône. Une fois bannie de son foyer, elle avait sauté sur l'occasion pour se trouver des compères félons. Même emprisonnée s'était-elle encore échinée à secouer les barreaux de sa cellule, et ce jusqu'à tomber de fatigue. Au premier rayon d'espoir elle s'était jetée du haut d'une cascade, et elle n'avait pas hésité une seconde à serrer la main tendue d'inconnus qui lui promettaient sur la comète soutenir son coup d'Etat. Trop fière pour les jérémiades, la jeune femme recyclait ses états d'âme en efficacité.
Il parut ainsi évident qu'elle n'allait pas attendre les guerriers comme une Pénélope éplorée qui fait et défait sa tapisserie - elle n'esquissa pas même une prière. Au lieu de cela, elle avait étendu devant elle une carte du Royaume en peau de chèvre et l'étudiait pour chasser cette angoisse qu'elle ne voulait pas sentir ramper. Ce n'était pas tout à fait du goût de Krah, Tilli et Lodeth qui voyaient là une irrévérence à leurs amis et ne comprenaient pas qu'elle s'occupait l'esprit pour lui éviter d'aller sournoiser dans les mines.
"Que faites-vous ? investigua Krah qui blairait l'ouvrage de la princesse. - Une carte de route. - Déjà ?"
Elle finit par lever les yeux sur lui, épinglant de son doigt le tracé de la rivière qu'elle longeait du regard et dont elle ne voulait pas perdre le cours.
"Eh bien, nous ne resterons pas à Erüne éternellement. - Vous allez vite en besogne ..."
Il portait sur lui une arrogance qui piqua l'héritière mais qu'elle comprenait bien - la proximité du jeune homme avec Adeluvior, et l'inquiétude qui lui était proportionnelle, ne lui avaient pas échappé. Elle se fatigua donc à lui répondre, tentant de retrouver un peu de concentration dans le grain de peau tannée.
"Qu'ils remontent ou ne remontent pas, nous allons bien devoir poursuivre. Si nous les perdons, je serai fragilisée, mais pas moins encline au putsch. - Je vous imaginais tout de même plus idéaliste."
Cette fois elle fut détournée tout à fait de sa carte et s'en excéda. Elle n'avait pas tant l'urgence de réaliser leur itinéraire à l'instant bien sûr, mais elle s'irritait d'être traînée ainsi dans le tourment qu'elle cherchait justement, ce faisant, à fuir.
"Et moi je vous croyais voleur de jument lorsque l'on s'est rencontrés. Ca y est, on est quittes ? s'impatienta-t-elle."
Il hocha la tête et s'en retourna contrit ; mais se figurant que l'instant était tendu pour tout le monde, Mélampe se ravisa de le laisser si esseulé.
"Faites-leur confiance, ils reviendront, fut le meilleur mot qu'elle trouva pour lui exprimer sa compassion."
Il concéda d'un flottement à faire un pas vers elle et s'intéressa à son entreprise.
"Alors, où irons-nous ensuite ? - Nous rendrons visite à Vergile de Valanne. - Et qu'est-ce qui vous y mène ? - Je sais qu'elle a eu des griefs avec le Maréchal Faramond et je pense qu'elle sera ouverte à une discussion pour prendre sa revanche."
Mélampe laissait entendre qu'elle avait plus d'un tour dans son sac en lui décochant un sourire espiègle auquel il répondit d'un air malin.
"Et comment savez-vous cela ? - La différence entre un Roi et une Reine, mon cher Krah, ce sont les commérages."
Les deux jeunes gens s'efforcèrent d'oublier l'idée de ne jamais voir l'un de leurs frères revenir en pensant au lendemain.
*
Spoiler:
Il les vit dévorés par les ombres, ses frères et tous les autres Disparus en grand nombre, volés par les féroces apôtres. De la suie insondable émergèrent les bêtes carnassières, S'abattirent claudiquant sur la nasse ouvrière Et de ce son qui annonçait tout malheur Elles applaudirent sur la roche la fin des bonnes heures.
Rideau.
Le jeune Attano bénit par la discrétion trouva refuge au creux d'un baquet D'où l'en délivrèrent quatuor légion et le menacèrent fers prêts. Préservant sa vie, l'accablé s'empressa de confesser ses visions Et informa les guerriers de funestes superstitions. "Lumière éteinte les bêtes reviendront et dans les ténèbres sur vous s'abattront. Partez, partez avant qu'elles ne reviennent, qu'elles nous entendent et traînent leur obsidienne."
Le garçon partit retrouver les siens et les courageux prirent rendez-vous avec le destin. Soignant les flammes de leurs torches remuantes, Ces hommes de l'Ordre eurent bonne raison de chérir le Feu Qui les guettait d'une lumière ardente Dans l'épaisseur du labyrinthe poisseux.
Ils s'enfoncèrent comme on plante un couteau dans les entrailles de la roche Et sentirent à son odeur comme la mort y était proche. Leurs coeurs s'alourdirent avec l'humidité dans leurs cheveux et qui bientôt menaçait le feu.
Dans une veine qui les appelait par son manteau visqueux ils entendirent des clapotis un peu mieux. "Nous y sommes bientôt, confia le doyen resserrant sur son flambeau les rides de ses mains. Ne les éveillons pas tout de suite."
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Houmous
Sam 30 Oct - 9:25
Malvo
J'ai 39 ans et je vis en Anuire. Dans la vie, je suis mercenaire des Impavides et je m'en sors de moins en moins bien. Je suis un rescapé, quelqu'un qui avait de l'importance.
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Malvo observa l’ensemble de ses compagnons, du vieux Adeluvior à ce pauvre Amun, frappé d’une terreur absolue par sa traversée. Tous étaient prêts à en découdre, les mains serrées sur leurs armes et leurs torches. Une exploration comportant de tels risques ne pouvait se permettre de durer beaucoup plus longtemps car le stress les ferait craquer les uns après les autres et bientôt les chances de survie s’étioleraient comme l’eau quittant la fleur fraichement coupée. Il se décida à suivre cependant le conseil du vieillard car si le fait de trainer les mèneraient lentement à la tombe, se précipiter les y enverraient plus vite.
Les braves passèrent galerie sur galerie, gardant haut le cœur et plus haut encore la torche. Les flammes léchant le plafond les prémunissaient contre une attaque provenant de l’une des fissures qui serpentaient le long de la montagne comme autant de veines palpitantes. Bientôt, alors qu’ils passaient un énième couloir, tout au garde-à-vous, une main sortit de l’un des murs pour se saisir d’Amun par le bras. Alors que le malheureux sursautait de la vision étrange, dans un éclair de violence pure, Titus abattit le glaive vengeur sur l’ennemi. Le morceau de chair tomba mollement au sol, sans le moindre sursaut de conscience, au plus grand plaisir des membres de l’Ordre passés et présents. Le fait de s’assurer qu’il n’y avait nulle trace d’une quelconque nécromancie était pour eux une tâche de premier ordre.
- Hum… Je dois avouer n’avoir encore jamais rien vu de tel… s’interrogea Adeluvior en observant de plus près le bras sectionné. On dirait que c’est quelque chose d’humain… mais pas entièrement… Prenez garde, mes compagnons, car la menace s’accentue alors que nous plongeons dans le ventre de la bête.
- Que la flamme soit de nous, maigres descendances de son sein. Puissions-nous brûler longtemps encore alors que nos ennemis raidissent. Avec moi mes frères ! s’écria alors Titus en brandissant l’épée et en prenant la tête de l’expédition d’un pas plus décidé.
Malvo le suivit en premier et se rendit compte qu’ils étaient en train de s’enfoncer largement dans le réseau de tunnels. Cela allait sans dire mais en prenant le temps d’examiner la pente, il se fit à l’idée qu’effectivement, il serait épuisant de remonter jusqu’à la surface en courant s’il s’avérait nécessaire de fuir. Un soupir lui vint, toujours persuadé que son destin l’attendait à la fin de ce sentier. Soudainement, la terre se fit plus humide. Amun était bien incapable d’expliquer pourquoi ce phénomène avait lieu, n’en ayant lui-même jamais entendu parler. Il était étrange de découvrir que les profondeurs de la grotte étaient si froides et humides alors qu’on disait souvent que l’on mourrait de chaud dans les mines. Adeluvior grogna en reniflant et avança un peu avant le groupe pour pointer du doigt l’horrible raison de ce changement. Une grande pièce se trouvait face à eux et à l’intérieur, des cadavres par dizaines étaient entassés, embrochés sur des pics minéraux. Leur sang avait maculé la terre et elle s’en était imprégné, faisant de ce charnier un lieu tout particulier aux spécificités uniques. Malvo s’approcha d’un corps et tendit sa torche pour mieux y voir. Une pauvre femme était les jambes raidies en l’air et semblait être figée dans une position de fuite. Si un filet de sang mince gouttait inlassablement par sa joue, ce qui surprit Malvo était un autre filament tombant du plafond et venant se planter dans la nuque de la pauvre femme. Hésitant à la toucher ou à l’arracher de ce lien, il resta un moment à l’observer pour peser le pour et le contre.
Musique:
Malheureusement pour son étude poussée de la situation, elle changea du tout au tout alors que la femme se remit en mouvement dans un gémissement caverneux et sinistre. Elle s’extirpa tant bien que mal de son récif et s’en releva, plusieurs piques d’une pierre noir profond se développant de l’une de ses épaules et dans la plaie béante de son abdomen. Malvo fit quelques pas en arrière et posa son épée sur l’épaule pour pouvoir violemment la projeter si besoin était… Et effectivement, besoin il y eut lorsqu’elle tenta de lui sauter à la gorge. Il l’évita prestement et passa le fil de la lame sur sa gorge pour la faire mourir tout d’un coup. Surprenamment, cela ne fut pas. Loin de mourir, la femme tituba un peu alors qu’un fluide épais s’échappait de la plaie et que de nouvelles épines sortaient pour la renforcer et la combler, forçant son cou dans une position inconfortable.
- Prends ça, engeance innommable ! s’écria Adeluvior en projetant sur elle une sorte de flammèche de soufre bleuâtre. Maintenant, Malvo !!
Il n’en fallut pas plus pour que le guerrier en vienne à pourfendre l’immonde adversaire d’un puissant coup la passant de part en part. Entre ses mains, une si lourde arme semblait ne pas rencontrer de résistance ! Alors que le cadavre retombait en deux pièces, Titus eut le réflexe d’observer les alentours pour découvrir que seule cette créature impie, porteuse d’une flamme froide, n’était pas similaire à une peau.
Après quelques minutes d’une observation minutieuse, les paladins découvrirent que les marionnettes étaient vidées de toute leur substance avant d’être remplies d’un fluide sombre. Lorsque ces dernières recevaient de diverses blessures, elles pouvaient les colmater avec une solidification de ce fluide. Malheureusement pour ces créatures, la lumière vive des flammes de soufre empêchait la solidification du fluide, le dissolvant. De plus, lorsqu’elles étaient fragilisées par la lumière, abattre ces monstres était possible et le monstre intérieur révélé, il suffisait de détruire cet étrange fluide animé. Enfin, elles ne semblaient douées que d’une intelligence très basique et lointaine de ce que leur humanité perdue leur permettait.
- Amun, tous ceux que nous voyons étaient des mineurs d’Erüne ? demanda finalement Titus, pointant les diverses peaux entassées dans la pièce.
- Hum… Non, pas tous. La femme que vous avait combattue semblait plus être une fermière des environs. Pourquoi ? demanda-t-il en retour.
- Ça devient autrement plus épineux comme problème si la créature à laquelle les marionnettes sont reliées commence à s’attaquer à des fermiers des alentours… Ça veut dire qu’elle sait ce qu’elle fait et qu’elle essaye de se développer discrètement. Elle sait qu’en s’attaquant à des individus isolés, elle aura plus de temps avant d’être découverte complètement, expliqua-t-il. Il faut qu’on quitte la grotte et qu’on fasse appel à un plus vaste détachement d’experts pour faire face à ce problème sinon ça va devenir hors de contrôle…
- Non, on ne va pas faire ça, répondit Malvo sans fioritures, à la surprise de tous. Si elle est maligne, elle s’attend à ce qu’on essaye de fuir. Elle a du mettre en place des pantins qui nous couperont la route vers la surface… Elle ne s’attendra pas à ce qu’on s’enfonce encore plus et qu’on s’en aille la combattre.
- C’est de la folie ! On ne sait même pas si on serait capable de s’en débarrasser si on était effectivement face à elle.
- Si la flamme le veut, nous protégerons la région… trancha Adeluvior d’un ton sage.
Alors que les derniers restes de la créature à laquelle ils avaient fait face se réduisait à néant, un mouvement lent mais important se fit sentir. Un grondement réverbéra dans les galeries nombreuses de la mine, semblable au grognement d’une créature gigantesque. De la poussière tomba du plafond et Amun se recroquevilla dans son coin, effrayé. Heureusement, le phénomène s’en finit rapidement.
- Maintenant, elle sait qu’on est là… Tant mieux, je n’aime pas frapper mon adversaire dans le dos, fit Malvo, tendant une main à Amun pour l’aider à se relever.
- Je ne sais pas si je vais y arriver… chuchota-t-il, le visage couvert de larmes. Comment pouvez-vous rester aussi calme ?
- Vous avez creusé si profondément que vous avez trouvé un monstre enfermé par la Terre mère elle-même et vous venez maintenant me parler de courage, Amun ? Ne plaisantez pas, nous devons nous battre pour redresser ce tort ou il n’y aura bientôt plus d’Erüne, dit Titus en l’empoignant pour le relever. Maintenant, allons-y, nous avons un monstre à chasser.
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Jo'
Sam 30 Oct - 19:32
Mélampe Hildegarde Gertrud de Lanasthël
J'ai 24 ans et je vis où je peux, dans l'Anuire. Dans la vie, je suis fille aînée d'Aymeric Mosse Gawen de Lanasthël, Roi d'Anuire décédé d'une crise cardiaque et je m'en sors bannie du Royaume puisque j'ai convoité le trône.
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Spoiler:
Mélampe était précisément en train d'expliquer à Krah comment le Maréchal Faramond avait subtilisé la place de choix à laquelle le fils de Vergile était promis au moment où un cri venu de l'entrée de la mine leur parvint. Etant eux-mêmes postés à quelques mètres pour attendre l'arrivée de leurs camarades, ils n'eurent qu'à tourner la tête pour observer l'origine du chamboulement : certes voilà quelques heures que Malvo, Titus, Adeluvior et Amun étaient partis, mais il semblait nonobstant prématuré de penser qu'il s'agissait là de leur retour, le trajet simple vers les fonds étant lui-même assez long - ainsi que confirma le visage circonspect de Bastes tourné lui aussi vers la bouche des mines.
"Quelqu'un remonte ! Quelqu'un remonte ! s'exclamait pourtant le guet."
L'inconfort s'épaississait autour du peuple qui, comme de concert, s'agglutinait pour observer de quoi accoucheraient les boyaux rocheux. Le jeune homme alors posté à l'entrée sondait l'antre avec sa torche dans une attente impossible, puis d'un éclat qui lui vint du poitrail il clama plus fort encore "C'est Attano !!"
Bastes abandonna tout ouvrage et se rua pour accueillir son fils, mais celui-ci comme en proie à d'infinis démons se jeta sur son père d'une force qui ne convenait assurément pas à un garçon de quatorze ans. Le Seigneur se renversa sur le dos et l'enfant comme une bête acharnée semblait chercher à l'achever, cependant que nul n'osait bouger pour l'en délivrer : que faire ? C'était son propre fils ! Une bonne intention malencontreuse aurait sans doute garanti à son auteur un châtiment de Bastes, mais voyant quelle stupeur figeait la populace spectatrice de cette violence parricide, Mélampe se saisit de l'arc qui lui avait été fabriqué et décocha une flèche sévère dans l'épaule du possédé.
Malgré la sèche lumière solaire qui affectait manifestement le processus de guérison, tous purent être témoins du pétrole opaque qui s'échappait sous la pointe pour s'agglutiner tout autour. C'est à ce moment que le très vieil homme qui avait logé Malvo et Adeluvior se mit à hurler d'angoisse un nom que les étrangers ne comprirent pas. "Les prystes ! Les prystes ! La légende dit vrai, malheur !! chevrotait l'éperdu qui se hâtait de se murer chez lui." L'annonce fit un tollé général tandis que ménagères et mineurs au chômages observèrent une distance de sécurité entre Attano - qui s'excitait toujours avec violence sur son père épuisé de le contenir - et eux. Bastes changea d'expression du tout au tout et d'une froideur qui étonna grandement la troupe de Mélampe ordonna qu'on brûle l'adolescent. Ses appels étaient si véhéments que, malgré l'horreur, quelques uns de ses hommes parvinrent à dégager le furieux avant de l'immoler. Attano hurla son agonie une bonne fois pour toute dans une odeur nouvelle qui ne sentait pas comme les autres buchers, et Mélampe se trouva bien penaude de ne rien comprendre à cette situation.
Bastes s'ébroua avec désinvolture et quitta la dépouille calcinée de son fils qui disparaîtrait bientôt en fumée devant la sidération toujours plus intense de Tilli, Lodeth, Krah et la princesse. Les dépassant pour retourner à ses affaires, le Seigneur ne fit pas de sentiment pour énoncer la ruine qui devait avoir déjà engloutis les guerriers partis en sous-sol. "Vos amis sont déjà morts, vous pouvez repartir." Offusquée que personne ne s'attarde à lui expliquer quelle abomination se déroulait dans ces mines, elle suivit au pas de course Bastes et le talonna pour obtenir ce qu'elle jugeait qu'il lui devait.
"Qu'est-ce que vous racontez ? Qu'est-ce qu'il se passe, ici ? Que sont les prystes ? - Les prystes, grogna-t-il dans ses lèvres rognées par les flammes et faisant volte face vers la princesse, sont des cauchemars. Ils tuent puis font de vos morts des soldats aveugles qui ne peuvent plus jamais mourir. Je n'en n'ai jamais vu de mes yeux, mais avec la recrudescence des créatures, il fallait bien que ça arrive. Ils sont imbattables, tout le monde est probablement déjà mort là-dessous."
Il s'apprêtait à s'en retourner mais Mélampe, qui avait du mal à abandonner ses questions, le poursuivit une nouvelle fois.
"Attendez ! Comment peut-on en venir à bout ? - Ils sont immortels, je vous dis ! s'impatienta-t-il sans cesser d'avancer. Le feu ou la lumière, voilà ce qu'ils craignent, mais vous avez bien vu Attano au grand jour alors que sais-je !"
Krah, cette fois, se joignit lui aussi à la conversation. "Mais Amun, il est au courant n'est-ce pas ? s'enquit-il pour s'assurer que ses amis sauraient fuir en réalisant la menace. - Négatif, il n'est pas d'ici. Ces histoires, on se les raconte pour empêcher aux mômes d'aller seuls dans les mines ! Comment aurais-je pu ..."
Evoquer les "mômes" affecta ostensiblement le Seigneur qui, fortuitement, arrivait devant chez lui. Il claqua la porte d'un air de "Laissez-moi seul" et au vu de ce qu'il venait d'endurer, son unique fils survivant rendu démon et brûlé sous ses propres ordres, même Mélampe n'osa pas insister. Le vieillard qui semblait plus érudit sur la question vint tout de même à leur conseil depuis sa fenêtre. "On peut tous les neutraliser en tuant la mère, gémit-il presque. Mais elle est tout au fond ..."
Krah et Mélampe s'empressèrent au pied de la bâtisse. "Elle doit savoir que des chasseurs sont là pour elle, elle a envoyé Attano peut-être comme un avertissement ou un appât ... faire peur pour que les intrus repartent. Ce n'est qu'une bête après tout !" Les deux jeunes gens se regardèrent : sans causer, ils surent qu'aucun des hommes qui étaient maintenant dans la Terre ne feraient rebrousse-chemin, et contemplèrent à quoi leurs têtes dures les exposaient. "Si elle se sait attaquée, elle ripostera dans le village pour grossir ses rangs, réfléchit Mélampe. Elle en profitera cette nuit. Le temps est compté."
Il paraissait de plus en plus évident que la méthode la plus sûre aurait été de descendre à mi-chemin pour faire sauter les galeries et laisser les éboulements emprisonner tout sbire cauchemardesque, mais personne ne pouvait se décider à condamner ainsi les chevaliers. Le soleil était au zénith et il était encore temps de réfléchir à quelque chose. C'est curieusement Tilli qui la prit à part.
"Faut qu'on aille les aider. - Quoi, nous ? - Beh et qui d'autre ? - Je ne vois pas bien à quoi servirait mon arc ou une arbalète dans une mine où on ne voit rien à trois mètres ! Et vous, à part piller les cadavres, je me demande ce que vous savez faire en temps de combat ! Vous voulez nous tuer ?" Elle était blessante, mais il était vrai qu'il arborait davantage le profil d'un filou que d'un soldat émérite. "Même si nous étions soudains doués de pouvoirs, impossible pour nous de les rejoindre à temps. Si au coucher du soleil ils ne sont pas revenus, nous cloîtrons les issues et ça s'arrête là. Cette nuit, les créatures pourront s'échapper à leur guise et nous égorger jusque dans nos lits ! - Il doit y avoir d'autres solutions, raisonna Krah. On sait qu'elle est occupée avec la vraie menace, on pourrait en tirer parti."
Mélampe soupira dans son impuissance : prendre le risque de se faire tuer, c'était prendre le risque de devenir une arme de leur cible. C'est alors que la terre trembla sous leurs pieds.
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Houmous
Jeu 11 Nov - 14:18
Malvo
J'ai 39 ans et je vis en Anuire. Dans la vie, je suis mercenaire des Impavides et je m'en sors de moins en moins bien. Je suis un rescapé, quelqu'un qui avait de l'importance.
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La petite équipe continua à avancer. Au moindre bruissement de vent suspect, Amun sursautait vivement, voyant désormais sa mort arriver à grands pas. Encore une fois, ils avançaient lentement et le regard grave, scrutant tous les recoins afin de percer à jour toute tentative d’assaut ennemi. Malvo avait regagné la tête rapidement, tenant sa torche en avant pour pouvoir l’utiliser et se protéger avec son aide maintenant qu’il savait que c’était probablement l’une des rares manières qu’il avait de se protéger efficacement. Une odeur âcre montait alors qu’ils s’enfonçaient plus profondément dans la gueule de la bête. Bientôt, ce qui paraissait être des cocons ou des chrysalides emplissaient les plafonds, dépassant en nombre les stalactites et leurs cortèges de formations rocheuses et calcaires. L’humidité les rendait poisseux et bien sûr, les flammes vacillaient graduellement, accusant elles aussi le coup.
- Il faut tout de même reconnaitre une parfaite adaptation de cette créature à son environnement, déclara dans un souffle Titus. Elle a choisi d’enfouir à l’endroit où sa faiblesse peut être compensée son véritable corps. Les pantins qu’elle a macabrement formés lui permettent de ne pas se mettre en danger. Mais avec la flamme, aujourd’hui se solderont ses derniers moments, dit-il en regardant l’une des chrysalides qui tournait sur elle-même.
Rapidement, des cris bestiaux et effrayants se firent entendre de plus haut dans les cavernes. L’équipe se resserra pour couvrir chacun une partie de leur entourage. Les flammes des torches se développèrent lorsqu’Adeluvior découvrit ses bras et commença une prière. A mesure que les secondes se finirent, des formes se détachèrent de l’ombre abyssale, menaçantes et vindicatives. Peut-être la dernière déclaration avait été celle de trop pour mettre le feu aux poudres entre les guerriers et la grande Pryste.
Musique:
- Au commencement, il n’y avait que les ténèbres et ni le temps, ni la vie n’avaient place. Les créatures primordiales s’entredévoraient continuellement, sans vainqueur ni fin. Mais du chaos naquit la flamme originelle, et d’elle vinrent les premiers êtres. Les géants, faits de pierre, les âmes, faites de pensées, et les vents, faits de l’essence vitale. Lorsque la flamme refroidit par les complots des monstres du chaos, dit-il en regardant les créatures innommables arriver, l’univers tenta de se renfermer sur lui-même mais il concentra non seulement les cendres mais aussi les trois êtres créés par elle qui se mêlèrent et formèrent l’Homme ! Ses enfants marchèrent sur son corps et le colonisèrent depuis alors et n’oublièrent jamais de quelle magie ils furent conçus. Jamais ils n’oublièrent de louer l’animation originelle, chanta-t-il en se relevant, toujours en prière, alors que les flammes brûlaient plus fort que jamais.
- Louée soit la flamme ! s’écrièrent les paladins en sacrifiant de leur sang dans le brasier, lui offrant une teinte dorée et intense. Puisse-t-elle brûler à jamais dans nos filles et nos fils !
Ils se saisirent sans la moindre crainte de leur maigre torche et avancèrent dans l’ombre, repoussant les rampantes monstruosités que l’abomination voulait soumettre à leurs yeux pour voir faillir leur détermination. Les tatouages du vieillard brillaient de la même teinte et il avançait sans crainte, comme aveuglé par sa propre lumière mais tenant toujours ses mains grandes ouvertes pour recevoir en continu la bénédiction qu’il avait recherché. Malvo et Titus, empreints de la ferveur que leur inspirait leur aîné, trainaient avec eux le pauvre Amun qui se cachait les yeux pour ne pas voir son esprit brisé par les horreurs accouchées dans ces souterrains.
Les monstres tentèrent quelques assauts mais même la couverture de peaux humaines ne s’avérait plus suffisante pour les protéger de la morsure solaire convoquée en ces lieux. En désespoir de cause, ils tentèrent de se rassembler dans d’infâmes amas impies qui prenaient plus de temps à fondre comme la glace noire dont ils étaient faits. Comme une lance ou un javelot un membre de l’un d’entre eux s’allongea pour venir les attaquer tout en restant dans le couvert de l’ombre. L’attaque transperça la main d’Amun qui ne se tenait pas bien dans le couvert de la clarté.
- Ah !! Ma main, elle se tranforme ! Aidez-moi, je vous en supplie ! fit-il, paniqué en tenant au loin son membre qui n’était plus réellement le sien.
Titus, sans la moindre hésitation, abattit son épée sur son avant-bras, à distance de la blessure pour la libérer du reste du corps. Le malheureux hurla de douleur en tenant son bras meurtri. Malvo se saisit de lui pour comprimer la blessure et arracha un morceau de tissu de ses vêtements pour faire un bandage de fortune, bien serré. Il observa d’un œil la main se contorsionner et nourrir la matière noire, prenant graduellement une animation propre et fuyant la lumière tant bien que mal pour rejoindre ses congénères.
- Dépêchons d’avancer ! Le cœur ne doit plus être très loin d’ici ! beugla-t-il en se relevant et en remettant sur pied le blessé.
Il se saisit de sa torche tout juste à temps pour parer une attaque du même style. Son épée du temple, si usée qu’elle était, semblait largement abimée par les derniers combats qu’elle avait subi. La dureté du matériau de leur adversaire n’avait pas réellement grand-chose à envier à la pierre ou à l’acier.
Tant bien que mal, ils parvinrent dans une vaste caverne très profonde et visiblement glaciale. La glace se disputait un espace largement réclamé par la matière de la créature. Une énorme sphère d’un noir absolu était lardée de pics et de prolongements menant à ses nombreux pantins et excroissances bestiales. Les paladins se regardèrent dans un hochement de tête tout en approchant jusqu’à ce qu’une créature d’apparence humanoïde en sorte pour venir lentement à leur rencontre.
- Fils de la flamme, permettez-moi de parler avant que nous nous fassions face, demanda-t-elle d’un air majestueux. Vous comprenez mal la situation. J’essaie d’emprunter à votre espèce son évolution afin que ma race puisse vivre à la surface. Je ne suis que la première manifestation d’un grand tout. Regardez vos congénères : leurs peaux nous sont acquises pour être portée mais elles continuent d’exister en moi. Si vous me tuez, vous serez le seul responsable de la destruction de votre petite ville et de votre espèce lorsque nous donnerons l’assaut, un jour. Acceptez votre sort : la flamme se meurt et votre temps est compté. Continuez d’exister à travers moi et jamais vous ne retournerez à la terre.
Toute une marée humaine arrivait derrière elle. Les yeux écarquillés d’Amun signifièrent à Malvo qu’il reconnaissait parmi les silhouettes celles de certains des citoyens d’Erüne disparus dans la mine. A ses côtés vint un jeune garçon qui semblât avoir beaucoup en commun avec le malheureux Attano.
- Il est temps de mettre un terme à cette farce, monstre, fit Malvo d’un ton sec et sans concession. Nous sommes descendus si loin pour vous faire face et vous détruire, pas pour nous rendre. Choisissez vos dieux et priez de les rejoindre.
La foule commença à s’élancer pour venir les attaquer, leurs membres se fondant en armes diverses. De ci, une femme voyait son bras se transformer en une hâche à double tranchant, de là un homme avait une tête de flagelle cinglante. Plus inquiétant encore, derrière eux les monstres qu’ils avaient simplement repoussés sur leur chemin venaient à leur rencontre, comptant sur l’avantage du nombre pour les tuer.
La bataille qui s’ensuivit fut âpre. De nombreuses créatures fondirent sur place dans une vaste flaque de boue noirâtre et collante. Les guerriers faisaient de leur mieux pour survivre et même Amun s’en sortait remarquablement bien pour rester dans la lumière sans pour autant être une gêne. Probablement que sa main perdue restait dans son esprit comme une amère leçon sur la finitude de la vie et du danger du combat contre les prystes. Un duel éclata finalement entre Adeluvior et l’incarnation de la Grande Pryste. Vaillamment il projetait des flammes tantôt bleutées et chaudes, tantôt dorées et brillantes, pour se défendre de cette avatar du chaos originel. Cependant, il fut mortellement frappé à la gorge par un appendice pointu qui le transperça comme le fil dans le beurre. Loin de s’avérer vaincu, il se saisit de la flagelle et serra les dents en relâchant toute la puissance de son héritage antique. Son corps s’enflamma violemment avec une puissance absolue et la flamme se répandit comme sur la flagelle jusqu’à venir incinérer le cœur de la créature. Aussitôt, toutes les créatures dont elle avait la charge se tortillèrent, en proie à une torture infinie et explosèrent les unes après les autres en de vastes projections glauques et sombres.
La dernière vision qu’ils prirent le temps de recevoir avant de se mettre à boucher le trou qui avait libéré la pryste était celle du vieux paladin dans une position de prière, ses lèvres redressées d’une satisfaction absolue. Il était temps de rentrer après cette dure chasse…
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Sam 13 Nov - 8:43
Mélampe Hildegarde Gertrud de Lanasthël
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"J'vas les chercher moi si z'êtes trop lâches pour l'faire !"
Sur deux épais tréteaux siégeait une table en pierre sur laquelle Mélampe et Krah, formés par un artificier des mines d'Erüne, préparaient les explosifs destinés à reboucher tous les boyaux qui avaient été laissés ouverts. Le jeune homme avait finit par admettre avec raison qu'ils ne pouvaient rien pour leurs alliés rendus là-bas à l'aveugle vers leur mort et que, pour espérer protéger quelque chose au moins, empêcher les prystes de remonter aurait été la meilleure décision à prendre. La gravité avec laquelle les habitants considéraient ces bêtes, la hâte de Bastes à immoler son propre fils, le discours enfin du vieillard n'étaient que plusieurs couches de surlignage sur la catastrophe qui dormait sous leurs pieds. Quoique profondément attaché à son ami et doyen du groupe, Krah n'était pas abusé par la sympathie, et savait que quiconque choisissait la justice - a fortiori Adeluvior - acceptait aussi de périr pour elle. S'il le savait en réalité, c'est parce que cet homme lui-même le lui avait appris.
Néanmoins, ce n'était pas, mais alors du tout, l'avis de Tili qui explosait de reproches devant leur activité ininterrompue. Pas parce qu'il était plus idiot, mais surtout parce qu'il était plus loyal, il se rendait boiteux à l'orée du gouffre terrestre. Krah et Mélampe qui ne pouvaient prendre de retard voyant le soleil s'endormir ne s'attardèrent pas à le retenir mais Lodeth partit à ses trousses. Bientôt, leurs persiflages se perdirent dans les échos des roches - l'héritière n'était pas trop inquiète, sachant la barrière établie à bonne distance, elle était presque sûre que le pas saccadé du paysan ne lui permettrait pas d'atteindre un point de non-retour avant que Krah et elle ne l'aient rattrapés.
Quelle ne fut pas leur surprise lorsque, répétant une dernière fois le déroulé de leur expédition en binôme, un brâme émergea de la cuve souterraine pour retentir jusqu'à eux. "Arrêtez tout !! Y sont là ! Y sont là !!"
Krah éleva un espoir dans le regard qu'il tint à Mélampe et se précipita où Tili hurlait. Petit à petit, les têtes ressortaient des habitations, puis les corps entiers, pour assister à l'avènement inquiet du retour des héros. Etais-ce bien eux, ou leurs restes manipulés pour les assassiner ? Se figurant que le soleil brasillait encore et qu'une attaque aurait été prématurée, la princesse s'approcha à son tour faisant confiance au discernement de l'infirme.
Tous notèrent qu'ils ne revinrent que trois et le temps se suspendit. Bastes et quelques gardent intervinrent en faveur d'Amun qui avait perdu beaucoup de sang de son bras rompu et se cramponnait ardemment aux épaules de Malvo pour ne pas défaillir ; ils l'emmenèrent gémissant et demi-conscient pour le soigner cependant que Krah sondait derrière les paladins pour espérer voir remonter Adeluvior - mais cette idée à laquelle il s'était pourtant préparé gonfla soudain tout d'un relief qui lui vrilla le torse, et il finit par poser la question à Titus. Avoir l'espoir de le revoir avait défait tout le blindage du décès qu'il avait imaginé.
"Où est-il ?" Car il n'y avait pas nécessité à préciser de qui il s'agissait. "Il est parti fidèle à ce qu'il était, répondit le paladin posant une main solidaire sur l'épaule du jeune garçon, grand et pieux. Ne t'inquiète pas de son corps car il s'est consumé dans les flammes, et dans les flammes il repose, pur comme il s'est échiné à l'être toute son existence. Il a rejoint le Feu Eternel."
Mélampe compatissait évidemment pour ces gens qui le connaissaient bien mieux qu'elle, mais elle ne pouvait s'empêcher d'être interpelée par autre chose. Sur le visage des deux hommes s'apposaient le masque de la peine et de la fatigue, mais plus lourds encore étaient leurs traits d'angoisse, et l'héritière ne pouvait s'empêcher de présager qu'autre chose qu'ils ne disaient pas remuait dans leurs esprits. Elle n'imaginait pas quelle pensée inédite frappait les deux guerriers : il existait au monde des créatures satanée qui fomentaient en secret contre la race humaine. La pensée d'un bestiaire imbécile et désorganisé était révolue, et le Royaume abritait des choses qui représenteraient un jour un défi.
Mais maintenant n'était pas le moment. Malvo et Titus étaient collés d'un fluide noirâtre qui dégoulinait sur leur stature exténuée et dans le silence de Mélampe ils furent pris en charge pour être remis sur pieds. Personne ne songea à se réjouir de la fin - temporaire du moins - des prystes tant ils leur avaient fait déjà perdre et on ne prépara nul banquet quoiqu'on s'assura que les guerriers furent nourris en conséquence. Titus était allé se recueillir avec Krah laissant seul l'héritière avec ses pensées, et Malvo qui logeait avec Adeluvior avait été livré à lui-même chez le vieillard érudit.
*
Mélampe pensait à la dernière conversation qu'elle avait entretenu avec le défunt. Quel parfum de déjà-parti portaient ses propos et à quel point elle n'avait pas eu la clairvoyance de présager l'issue de leur expédition. Elle s'était imaginé qu'ils mourraient tous - déchiquetés ou ensevelis - ou reviendraient unis, mais quoique l'on se prépare à voir s'envoler une âme, ses premiers coups d'ailes sont toujours un étonnement. "L'arbre qui se meurt ; devient terreau pour future fleur." Elle se répéta le verset des encres qui lasuraient ses bras et sur lequel il avait insisté. Elle triturait cette prophétie avec tant d'application qu'il lui semblait que le sens lui en échappait de plus en plus. Toute fin promettait-elle une renaissance ? Y avait-il une équivalence entre la valeur de ce qui s'achevait et celle de ce qui en naîtrait ? L'arbre mort n'était-il pas essentiellement supérieur à la fleur ? Harcelée de pensées, elle décida de visiter Malvo qui portait l'épais linceul de dormir dans le lit à côté de feu celui d'Adeluvior.
Le vieillard la reconnut de leur conversation plus tôt dans l'après-midi et la laissa entrer. Dans la maisonnée piteuse elle trouva son comparse éveillé et considérant d'un air calme la couche vide du doyen. Elle demeura dans l'embrasure de la porte ne sachant pas réellement quoi lui dire - mais ils n'avaient pas échangé mot depuis le retour de l'équipée et Mélampe résistait mal aux non-dits. "Je suis soulagée de voir que ni vous ni Titus n'avez été blessés, entama-t-elle." Elle n'avait pas de mot plus aimable ou sensible et considéra à son tour quelques instants la morbidité de la couche nue. "J'en ai discuté avec Bastes et nous en sommes venus à la conclusion que notre présence ici n'était plus nécessaire. Nous avons évidemment conclut l'accord et il nous soutiendra face au Maréchal lorsque ce sera le moment. Une fois que tout le monde sera prêt et reposé demain, nous partirons pour Valanne, tout est déjà prévu." A défaut d'une parole de circonstances, la princesse qui était elle-même plus subjuguée que peinée par le départ d'Adeluvior s'était concentrée sur des données factuelles. "Bonsoir Malvo, et merci." Elle s'en retourna.
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Houmous
Sam 27 Nov - 9:11
Malvo
J'ai 39 ans et je vis en Anuire. Dans la vie, je suis mercenaire des Impavides et je m'en sors de moins en moins bien. Je suis un rescapé, quelqu'un qui avait de l'importance.
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La vision des nombreuses autres prystes qui dansaient sous terre, attendant patiemment leur heure pour abattre l’humanité resta un long moment dans les pensées de Malvo. Vu la difficulté qu’ils avaient eu à abattre une seule de ces créatures, une simple éclaireuse, il considéra avec gravité leur incapacité à décapiter le dragon et s’acquiter de leur tâche. Ils avaient sauvé Erüne mais à quel prix ? Quels savoirs intemporels et mystiques les quittaient avec leur doyen ? Pourraient-ils reproduire l’exploit à la seule force de leurs bras et sans l’assentiment de la flamme ?
Lorsque Mélampe vint lui rendre une visite de courtoisie, son discours brillait de ce qui en était absent. Il n’était pas stupide et se doutait bien qu’il était question de sceller les grottes alors qu’ils revenaient, face à cette hémorragie de soldats et d’hommes capables. Cependant, ce qui le marqua était le malaise de la disparition d’Adeluvior et son doute quant à sa capacité à survivre et vaincre. Il savait déjà depuis le début qu’il acceptait d’être pour elle un homme de main et il avait accepté cette condition pour le sens qu’elle offrait à son existence mais il se rendait peu à peu compte de ce que cela signifiait dans le fond. Il hocha simplement de la tête à ses remerciements et la laissa partir sans lui accorder un mot.
Le doute et probablement la peur intangible le malmenaient un long moment dans la soirée… Il passa un temps à la méditation sur les événements récents et en conclut que le monde serait certainement condamné si Mélampe n’accédait pas au trône pour préparer le royaume à l’invasion des prystes. Quand bien même elle y parvenait, il était possible de ne pas réussir à l’emporter. Il se sentit honteux lorsque la question de savoir s’ils avaient bien fait d’abattre la créature et de ne pas la rejoindre lui vint. Pour la première fois en très longtemps, il tenta de communier avec la flamme, fermant les yeux face à une bougie qu’il n’avait pas encore osé souffler.
Il n’arrivait plus à atteindre le calme du guerrier au repos comme on lui avait enseigné, fut un temps. Chaque fois qu’il essayait de se donner entièrement à la flamme, les images des prystes bafouant le puissant moine lui venaient et enfin le sourire qu’il arborait dans la mort. La colère le détournait alors violemment, lui rappelant les cris de sa femme et sa fille alors que leur demeure devenait leur prison ardente. Les pulsations dans ses tempes lui devinrent insupportables bien après que sa mâchoire serrée soit douloureuse. Ne pouvant recevoir la paix à laquelle il aspirait, il se saisit de son épée et se releva lentement. Marchant dans la nuit, il s’avança en direction de l’entrée de la mine, un sombre dessin en tête. Il n’avait pas pris la peine de la remettre au fourreau alors son pas déterminé avait quelque chose d’inquiétant vu de l’extérieur.
Une voix dans la nuit l’interrompit. Son ancien ami, Titus, lui demanda ce qu’il comptait faire, à une heure si tardive dans les mines, l’arme au clair. Malvo gromela, fatigué d’être en colère et le regarda dans les yeux. Dans le regard, ils se comprirent et sans un mot, l’autre dégaina également. Ils se toisèrent un peu jusqu’à ce qu’avec force, Malvo abatte son arme avec rage. Le bruit de l’acier rencontrant l’acier raisonna pendant quelques minutes. Titus était un adversaire redoutable : adroit, agile, robuste et endurant… Plus le combat durait et plus l’issue semblait défavorable pour Malvo qui s’épuisait en prenant d’assaut son ami agressivement. Le point d’orgue de leur duel fut finalement l’épée de Malvo qui se brisa suite à une puissante attaque portée avec les deux mains sur le pommeau. Titus pensa pouvoir le soumettre à ce moment précis et lui avoir simplement permis de relâcher ses nerfs mais alors qu’il se remit en garde, Malvo avait déjà lâché son épée et lui flanqua un coup de poing au foie. Eclairé seulement par la lune, sa silhouette se dessinait grande et menaçante mais il s’en tenu à ce dernier coup avant de tourner les talons et de s’en retourner vers la bâtisse dans laquelle il logeait. Plusieurs volets s’étaient ouverts, les bonnes gens d’Erüne s’interrogeant sur l’événement qui leur avait été donné de constater.
- Retournez dans vos couches ! Il n’y a rien à voir ici !! fit-il, se tenant le ventre après ce dernier coup à la force non maitrisée.
Il se redressa graduellement au fur à mesure que la douleur lui permettait de se mouvoir correctement et rassembla les morceaux de l’épée pour pouvoir les faire reforger avant leur départ. Ce duel devait avoir lieu depuis bien longtemps. Il était même nécessaire qu’il ait lieu pour enterrer le passé car si Malvo vivait dans le chagrin depuis ces quelques années, Titus, lui, vivait dans le regret. Il avait hésité à parler à son ami de ce complot qui visait à le faire disparaitre, tiraillé entre deux positions. A l’époque, on murmurait à mi-voix dans le monastère de la capitale que le maitre de l’Ordre voulait réduire au silence Malvo pour ses prises de position non traditionnelle. Un conflit les opposait alors et confrontait deux visions. Pour Malvo, l’Ordre devait prendre une place politique et participer à diriger le pays alors que le maitre voulait maintenir le code tel qu’il était et empêcher les paladins de se marier, de commettre des crimes et de prendre un rôle politique. Au fil du temps, la faction qui soutenait l’étoile montante de l’Ordre grandissait en nombre et la menace qu’elle représentait se faisait de plus en plus pesante. La décision fut alors prise de réduire l’opposant au silence et d’aménager la succession de l’Ordre. Titus avait une prise de position plus traditionnaliste et restait fort sensible aux propos du maitre. Il connaissait l’existence de ce complot mais aussi de la famille interdite de son meilleur ami. Lorsqu’il décida enfin de le prévenir, il s’avéra être trop tard. Bien sûr, Titus était présent lorsque Malvo vit la maisonnée isolée de sa femme être incendiée par des membres de l’Ordre.