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LE TEMPS D'UN RP

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras

Jo'
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Jo'
Mer 6 Juil - 14:39
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Maruo Takeda
J'ai 42 ans et je vis à Sado, Île de Sado, Japon. Dans la vie, je suis mercenaire yakuza et je m'en sors aisément. Sinon, grâce à mon charisme, je suis concubin et papa et je le vis plutôt tortueusement.


Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 Captur16

On le connaît parmi tous les criminels et les autoritiés sous ce surnom : la vipère à deux têtes. Deux lames, un coup, et il coche ses victimes en plein torse d'une croix qui signe sa morsure. Une survivante, qui deviendra son élève, qui deviendra sa rivale. Qui toujours dans le vent sifflant, siffle avec lui l'agitation. Et l'angoisse pour l'homme qu'un passé guerrier ne dégouline son sang sur son présent marin.

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 9b9d2189584f9d49c13664157e13a8b5

Verse à leurs pieds le flot de tes larmes sacrées,
Brûle tous tes parfums sur leur mystique autel.
Mais si l'amer venin est entré dans tes veines,
Pâle de volupté pleurée et de langueur,
Tu chercheras en vain un remède à tes peines :
L'angoisse du néant te remplira le coeur.
Ployé sous ton fardeau de honte et de misère,
D'un exécrable mal ne vis pas consumé :
Arrache de ton sein la mortelle vipère,
Ou tais-toi, lâche, et meurs, meurs d'avoir trop aimé !

- Leconte de Lisle


Sanada Hiroyuki :copyright: Jo'

"Maruo, Maruo ! Fais-moi un enfant."

Je ne parviens pas à ouvrir les yeux.

"Maruo, je ne plaisante pas. Fais-moi un enfant !"


Un plafond blanc, myriadé de reliefs témoins de l'isolation qui avait dû être refaite il y a peut-être deux ans, s'offrit en premier lieu à sa vue. Une hachure lumineuse contenue par les volets mi-clos éclairait les lieux avec parcimonie, et dans la pièce nageait une sérénité calme tranchant avec les derniers souvenirs qui lui revenaient à voix basse.  "Kobata mort. L'explosion. Le saule en feu." Il se dressa soudain "Ritsu-" mais fut coupé par la violente douleur qui tempêtait à son bras. Il y apposa les yeux - son membre était réduit aux deux tiers, pansé trois fois sur un moignon encore vif et douloureux, vertigineux de vide. Maruo hoqueta de surprise et serra son biceps avec violence, mais rien n'était à y faire, toute la douleur du monde n'appelait aucune sensation sous le bandage, et la disparition n'avait rien d'hallucinatoire. Il pressa à s'en faire saigner. Cette réalité lui était inconcevable mais elle s'imposait à lui irrévocablement despote. Son attention se détourna à la plaie autrefois purulente de sa plèvre : elle était désormais propre et sa fièvre disparue. Des compresses grasses s'agglutinaient sur son dos pour y abreuver des chairs assoiffées par la morsure des flammes. Il avait fondu sur Ritsuko et s'était laissé calciner pour l'épargner. S'en était-elle sortie ?

"Woh, t'as beaucoup dormi !"

Maruo s'effaroucha et porta par réflexe la main à sa ceinture mais il n'y trouva ni ceinture, ni sabres évidemment. Il s'apaisa lorsqu'il vit qu'au bout du lit dont il dépassait franchement, tournant sur une petite chaise de bureau au siège bleu marine, se trouvait un enfant qui picorait des bonbons acidulés distraitement. A la réflexion, et dans une éternité que la Vipère savait ne pas lui ressembler, il réalisa qu'il occupait la chambre d'un petit garçon. Le mobilier en bois clair et bords arrondis donnait sur pléthores de bandes dessinées et mangas, des comics, des histoires de héros. Sur le bureau devant lequel son veilleur grignotait s'amoncelaient pêlemêle matériel de dessin ou d'école. Seul un charriot encombré de gazes stériles et autres désinfectants jurait avec l'ambiance infantile des lieux.

"Tu veux que j'aille chercher maman ?
- S'il te plaît, oui."


La petite créature disparut comme elle s'était présentée à lui : toute en légèreté.

*

"J'ai lavé votre pantalon mais rien à faire pour votre t-shirt il était au moins aussi entamé que votre peau. Tenez, ça appartenait à mon mari."

Maruo nota silencieusement l'usage du passé et se confronta à son impotence : il était incapable de la plus simple chose et l'infirmière eut la patience de passer pour lui la chemise qu'elle lui tendait. La caresse du tissu sur sa peau vive sembla lui embraser l'échine mais il souffrit le supplice avec résilience.

"Elle va bien ? grogna-t-il enfin débarrassé du remugle de ses poumons malades.
- Qui donc ?
- Je sais qui m'a amené ici."


Un temps. Nanako comprenait que se jouait une tension dont elle préférait se tenir à distance et elle se contenta d'être informative en corrigeant le col sur les trapèzes de la Vipère.

"Elle était sur ses deux jambes en tous cas. Elle a apporté ça pour vous."

Elle délogea d'au-dessus d'une armoire, loin des doigts innocents de l'enfant grignoteur, le sac avec les deux sabres. Une décharge vrilla le coeur du mercenaire lorsqu'il réalisa qu'il ne pourrait plus en faire usage digne. Il fit lui-même le noeud de la manche droite qui criait la béance qui l'occupait.

*

Il n'avait jamais réalisé l'inventaire de ses cicatrices. Il y avait cet orteil en moins coupé par ses parents. Plus haut, les sutures du jour où une fracture du tibia avait percé sa peau. Les trois trous d'éclats de plomb dans le genou opposé. Un renfoncement froissé à l'intérieur de la cuisse qu'un poignard avait marqué pour toujours. Une énorme saignée de chair bourgeonnée sur le torse, en diagonale, issue d'un combat au sabre. L'impact de la balle qui lui perforait le diaphragme et laisserait probablement un trou enfoncé comme un nombril. La légère déformation de son épaule là aussi causée par des tirs. Ce bras manquant. Mais surtout la balafre qui scindait son sourcil, réunie en croix sur son front, qu'il avait héritée d'une des tentatives désespérées de Ritsuko d'en finir avec lui dans son sommeil. Il y en avait d'autres dans son dos, désormais recouvertes par cette gigantesque étendue de chair brûlée.

Et il y avait les plaies du dedans. Celles-ci avides, toujours saignantes. S'il allait mourir bientôt il lui fallait les refermer d'abord. Il remercia Nanako et repartit.

*

Il téléphona à Masahiro. Une brise légère flattait les rayons d'un soleil dardant.

"Maruo ! Je te pensais mort, on ne t'a plus retrouvé dans les décombres.
- Vous vous en êtes sortis, toi et Shun ?
- Oui, elle est retournée à ses affaires.
- Nous avions un marché."


Le mercenaire observa l'absence de son bras mais ne remit nullement en cause sa capacité à abattre ceux qu'il avait promis de mettre hors course à Masahiro en échange de son aide.

"Inutile, Maruo ..." Sa voix était changée. "... ma famille est déjà ..." La Vipère soupira, profondément affligée. Kobata avait dû la faire tuer ou enfermer au moment même où Masahiro avait signé son contrat. Au vu de ses activités, il avait dû renoncer à les contacter, et ainsi ne pouvait savoir qu'il était déjà trop tard. Gonzo annihilait sa monnaie d'échange au moment même de la transaction, et ça fonctionnait. "Ce salopard est mort maintenant, il faut passer à autre chose." Peut-être étais-ce d'avoir vécu si longtemps loin des siens qui rendait l'avocat si philosophe, mais l'écoeurement ne quittait pas Maruo. Il se saluèrent, puis la Vipère déposa devant sa porte une bonne bouteille comme d'un remontant camarade.

Il passa aussi visiter Hideo à l'hôpital qui se remettait de ses plaies et avait déposé une liasse de billets pour les prothèses qui l'attendaient probablement. Il attendit que la morphine l'endormisse pour glisser l'argent dans sa main.

Il prit le bateau et se rendit ensuite à Sado. Les corps avaient déjà été enlevés et il était recherché. Il arriva de nuit.

- Déchets, épaves et ravins -

Maruo a écrit:
Cette fois encore, il ne put fermer l'oeil harcelé par ses meurtres et s'en alla dévisager l'océan dans l'espoir de s'y voir. L'écume ronflante grondait son morinom - Maruo, Maruo - et sa femme depuis la chambre appelait le nouveau - Jinpachi, viens te coucher. L'insondable obscurité roborait les reproches de cette famille dont il ne comprenait pas les pleurs ou les rouscailles, et qui lui en voulaient de ne pas être tendre et sensible.

Il se vit. Ils se virent. Lui et lui. Il se haïrent immédiatement et se jetèrent l'un sur l'autre tels des animaux. Il s'étranglaient mais celui à qui il restait deux bras prenait le dessus. Ils vociféraient de cette voix commune qui était la leur.

"Pourquoi t'es parti ?! demanda l'infirme. Tu les as laissées mourir !
- Et toi, hein ?
le second serra plus fort. T'étais où quand ça s'est produit, enculé ?!"

Dans la réalité de Maruo qui était alors Jinpachi, Kumi sortit de la maison, agissant comme si tout était normal. Les deux hommes mirent un terme à leur pugilat et s'apaisèrent à sa vue. La petite se laissa aller dans les bras de son père, l'épis toujours en bataille. La vision disparut et la Vipère réalisa qu'elle était seule ici. La maison était dépeuplée, le ponton sur lequel refroidissait autrefois le thé et la cigarette était encore tâché du sang de sa femme et de sa fille.

- Incipit -

Maruo a écrit:
Souvent, il sentirait se poser depuis le ciel de nuit son regard noir qui lui jurait vengeance.
Il était rentré au Honshu - combien de temps se passait entre tout cela ? - et avait rendu visite à la maison dans laquelle il avait manqué de tuer Ritsuko, prétextant être de la famille des anciens locataires perdue de vue. Ils le firent entrer pour le thé. Ritsuko avait raison : ils avaient changé le parquet. Alors qu'il se rendait dans la salle de bain pour rafraîchir son visage bourdonnant, il se vit à nouveau, pas tout à fait trente ans.

"Qu'est-ce que tu me veux ? aboya le prodige des lames.
- Pourquoi tu l'as pas tuée ? Qu'est-ce qui t'en a empêché ?"

Silence agacé - lui non plus ne savait pas, c'était là le mystère de son existence. Pourquoi elle ?

"Le sang t'apaisera de moins en moins longtemps, et de moins en moins facilement. Ce ne sera pas aussi bon toute ta vie.
- Cause toujours."


Il tapa dans son épaule en sortant et passa à travers la porte, mais lorsqu'il l'ouvrit pour le suivre, le jeune Maruo n'était plus.

- Vieux rêves et bons rêves -

Maruo a écrit:
Il l'ignora, elle insista avec humour. "Viens t'asseoir ou je m'étouffe volontairement avec une amande." Il soupira de bonne guerre, il y avait une camaraderie tissée d'ennui entre eux, et s'assit à côté d'elle sur le lit. "J'avais à peu près ton âge quand j'ai rencontré Gonzo, tu sais. J'étais convaincue qu'il allait finir politique." Il affichait son désintérêt tandis qu'elle poursuivait pour elle-même comme on parle à son chien. "Au final, mafieux, politique, pas de grandes différences, ria-t-elle. ... j'ai peur de me faire tuer." Sa sincérité attira l'attention du jeune homme qui, pour la première fois, était confronté à une victime. Une victime comme celles qu'il faisait. Quelque chose qui ressemblait à de la compassion, et dont il n'avait jamais fais l'expérience puisqu'on ne la lui en n'avait jamais témoignée, le traversa désagréablement.

"Vu ce que vot' mari me ferait, j'ai intérêt à éviter ça."

Elle sourit de sa maladresse.

"Merci."

Elle posa sa main sur la sienne, qu'il retira.

Du temps, encore, ou peut-être pas. Il avait finit par se rendre sur la tombe de Kaori avec un bouquet de fleur et se moqua de sa propre attention puisqu'il ne l'avait jamais eue du vivant de son amante. Mais un jeune homme d'un vingtaine d'année se trouvait là assis par terre et contemplait distraitement la pierre tombale, le regard occupé par l'alcool, ce qu'il fumait, ou les deux. Le silence était enfin de rigueur si ce n'est pour les fleurs qui chutèrent nonchalamment sur le marbre. D'une voix éraillée, le jeune homme parla enfin.

"Je vais l'oublier." C'était une promesse. L'aîné s'assit avec lui. Le soir frôlait les cieux et les cigales s'élançaient de concert.
"Tu vas oublier une majeure partie d'elle. Mais tu ne toucheras plus jamais une amande de ta vie."

Le temps était tronqué. L'adolescent endeuillé n'existait déjà plus lorsque Kaori avait été tuée, mais tout était si vif dans l'âme de la Vipère qu'ils se superposaient avec affres.

"Qui a fait ça ?" Evidemment, le plus jeune ne connaissait pas encore Ritsuko.
"Aucune importance. Dis-moi plutôt, tu te rappelle le marché où elle t'a fait acheter six bouteilles de sirop d'orgeat ?" Un léger sourire entre les deux hommes.
"Elle pensait que c'était une eau-de-vie et j'ai rien dit, renchérit le cadet. La tête qu'elle a fait quand elle a bu le sirop nature !
- Elle supportait mieux des verres à 70 degrés que le sucre d'un peu de sirop."


Un temps suspendu dans leur rire franc.

"Merci pour les fleurs, j'suis venu les mains vides.
- Tu diras que c'était ton attention."


Ce trait d'humour était d'autant plus railleur qu'ils étaient la même personne. Le benjamin se leva avec une peine témoignant du temps qu'il était resté là assis en tailleurs et s'en alla. Derrière la grille du cimetière, il disparut.

Plus il remontait tôt dans sa vie, plus Maruo constatait à quel point il était encore temps de faire quelque chose pour lui, de le réparer. Il était partagé dans un sentiment doux-amer de s'offrir à la tendresse tout en souffrant que personne n'eut été là pour le faire.

Avec logique, il se rendit dans la maison de ses parents.

- Survive, if I let you -

Maruo a écrit:
"Ne t'attaches à rien."

"Ne fais confiance à personne."


Il se vit déçu que ses parents ne fussent pas capable d'appliquer ce qu'ils lui avaient pourtant inculqué.

Il entra dans sa maison d'enfance qui venait d'être mise en vente comme un acheteur potentiel. L'agent immobilier le laissa seul un moment pour prendre un appel et la Vipère entra dans la pièce où il avait abattu ses parents. Il y vit un garçon malingre, neuf ans tout au plus, terriblement émacié des mauvais traitements qu'il avait subit. Le petit rugit vers cet homme qu'il ne reconnut pas comme étant lui-même.

"T'es qui toi ?!" Il ne répondait pas, détaillant avec douleur la pauvre chose qu'il était. "Réponds ! Tu veux finir comme eux ?!" Maruo avança. Le petit s'énerva d'autant plus mais il commençait à trembler sur son couteau - peut-être finissait-il par entrevoir de qui il s'agissait ? "J'vais t'buter l'estropié ! J'en suis capable j'te jure !!" Maruo était désormais tout proche, il s'agenouilla calmement à hauteur du garçon. "Je sais." Le petit le planta - mais nul risque, puisque tout cela n'était qu'illusions. Maruo en souffrit, mais il s'avança, entrant l'entièreté de la lame dans sa poitrine pour prendre l'enfant dans ses bras - il se débattit puis s'épuisa, réalisa l'existence qui l'attendait avec un départ pareil ; et cette existence déjà si lourde qu'il avait supportée avec abnégation. Le tout petit Maruo se mit à sangloter puissamment.

L'agent immobilier reparut et fut étonné de voir un gaillard tel que son client à genoux sur le sol, pleurant tout son saoul.

- Toc toc -

Il restait un chantier, et de taille. Ritsuko. Il l'avait suivie et observée de loin sans s'y faire prendre : elle ne cachait plus sa cicatrice ni n'emportait son sabre. Voulait-elle toujours se venger ?

Si tel était le cas, il voulait la voir un peu avant. Il se rendit à son appartement et y entra, s'imaginant quelque chose comme un dernier soir avant la fin des fins. Savoir sa tête s'écrouler de fatigue sur son épaule encore une fois avant qu'elle le combatte. Partir en paix, quoiqu'il n'estimait pas le mériter.

Elle n'était pas chez elle, aussi, il détailla la modernité des lieux avant de s'endormir sur le canapé de cuir. Après une attente qui lui parut millénaire, il s'éveilla sur le bruit de la porte qui s'ouvre.


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Jo'
Ven 8 Juil - 6:31
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Shun Jito
J'ai 30 ans et je vis à Tokyo, Japon. Dans la vie, je suis Mante et je m'en sors bien. Sinon, grâce à mon métier, je suis célibataire et je le vis plutôt bien.



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Les rideaux sont tirés sur l’odorant silence.
Où l’heure au cours égal coule avec nonchalance.

Aucun souffle ne fait trembler le mimosa
Sur lequel, en chantant, un vol d’oiseaux pesa.
- Renée Vivien

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 EasyFearlessChimpanzee-max-1mb

Tao Tsuchiya :copyright: Jo'


Je venais de remporter une course universitaire à l'échelle du pays. Un record sur les vingt dernières années pour le 100m. Une sprinteuse comme ils en avaient rarement - pour certains, jamais - vue. J'étais à la remise du bouquet, suant, crispée de sourire, à l'apogée d'une euphorie hyperventilée lorsque j'ai vu pointer sur ma soeur, dans la foule, un point lumineux rouge.

Un sniper. Pan.

Le public qui se mouvait d'un corps se disloqua soudain, une aura vide s'étira autour de la victime. Autour de Kuyo, ma soeur.

*

Shun ne connaissait pas pour ainsi dire Ritsuko. Elles s'étaient par maintes fois entr'aperçues de par leurs territoires de travail qui se chevauchaient, mais en quittant les Mantes la plus jeune s'était jetée dans les bras de la mafia, et la distance avait achevé de les rendre plus étrangères encore. Avec leur différence d'âge, elles ne partageaient pas même l'expérience commune de la formation des Mantes, car au moment où Ritsuko avait intégré le cursus Shun était déjà presque en mission. Ce qu'elles savaient l'une de l'autre était ainsi principalement ce que les rumeurs disaient d'elles, et ce que la Mère avait daigné apprendre à Shun au sujet de Ritsuko à l'occasion de cette mission de rapatriement.

"Bonjour Anna, puis elle se corrigea sereinement, pardon, Ritsuko."

Elle était étonnée de la voir sans sabre, chemise ouverte sur le départ de cette cicatrice dont elle avait beaucoup entendu parler sans l'apercevoir. Mais ce sourire de façade ne la trompait guère.

"Des remontrances, moi ? Allons, j'ai l'air si sévère ?"

Shun portait sur elle une douceur distante et tranquille, sa façon à elle d'anesthésier des émotions. Certaines d'entre les Mantes s'enveloppaient de froideur rude et cinglante - c'était plutôt le cas de Ritsuko - et d'autres semblaient de béates fleurs sur qui tout glissait, à peine décoiffées par le vent. Dans les deux cas, l'affliction et l'affection leur étaient devenues étrangères, capacités émotives mutilées par leur formation sans précédent.

*

Ils sont venus le jour de son enterrement et pendant que mes parents prononçaient la lourdeur de leur deuil, un homme m'a tendu une carte. "Les mantes assassines. Warren Hofman"

Bien m'en a pris puisque lorsque j'ai été recrutée, Hofman était déjà mort, témoin de l'institution sempiternelle qu'étaient les Mantes Assassines. Désormais c'était une femme qui nous gérait toutes. Mais pour l'effet de marque j'imagine, son nom n'apparaissait pas sur l'encart en papier.

*

Un serveur vint prendre la commande de la nouvelle arrivante qui commanda la même chose pour ne hâter aucun soupçon à son encontre. Lorsqu'il fut éloigné, Shun reprit, menton posé dans sa main, scrutant les alentours d'une apparente distraction.

"Je viens parler travail malheureusement."

Cette mission lui tapait sur le système qu'elle avait d'autres choses plus palpitantes - à son sens - à faire que de jouer aux DRH pour les Mantes. Ritsuko était une légende vivante pour l'ensemble du groupe à la fois en raison de ses résultats et de son parcours, mais Shun était trop pragmatique et leste pour y accorder grande importance et préférait maintes fois traquer des pédocriminels qu'une ancienne collègue. Cette mission, et la lubie étrange de leur cheffe pour la protégée de Maruo lui était aussi absconse que puérile.

"Mère est en train de mourir, elle veut que ce soit toi qui lui succède."

La bombe était lâchée avec naturel : la jeune femme était plutôt reculée des considérations de pouvoir qui mouvaient les Mantes ces derniers temps. Une certaine amertume s'élevait parmi les éléments les plus prometteurs envers Ritsuko qui était l'irrémédiable et inexplicable favorite de la Mère, quoiqu'elle ai déserté ; certaines voyaient à la succession la consécration des sacrifices qu'elles avaient fait et répugnaient qu'une yakuza dont on racontait qu'elle avait tué femme et enfants puisse être à la tête d'un groupe qui se refusait précisément à ce type d'agissements. Les circonstances de la mort de Kaori et de ses petits laissait une voie béante aux racontars, et si la pègre masculine - plutôt frileuse à imaginer qu'une femme ai pu faire pression à un homme tel que Gonzo - aimait se dire que le baron avait lui-même tué ses proches, les Mantes elles savaient que Ritsuko travaillait pour lui à cette époque et la suspectaient volontiers. Shun avait été choisie pour quérir l'objet des convoitises justement parce que peu lui importait de qui elle prenait ses ordres de mission, pour peu qu'elle puisse travailler.

"Maintenant que la mafia n'est plus, elle se remit à touiller dans sa tasse la grande quantité de sucre qu'elle y avait dilué, tu n'as pas songé à une reconversion ?"

Au final, où était l'enjeu ? Que se passerait-il si elle maintenait son refus ? Shun aurait probablement une épée de Damoclès sur la tête pour avoir faillit à sa mission. Mais si la Mère mourait avant que les choses ne se dénouent, qu'en serait-il ? Plus de groupe ? Une assemblée dirigeante avec les plus anciennes membres ? Dissolution ? A la réflexion faite et au vu de toutes les vies qu'elle avait brisées pour mieux les forger, toutes ces tortures mentales et corporelles infligées pour faire de femmes - et parfois de très jeunes femmes - des armes vivantes, il était étonnant qu'elle n'ait pas déjà été tuée.

*

Quand j'y repense, j'ai dû être le démarchage le plus opportun de leur histoire. Une athlète aguerrie embrasée par le meurtre gratuit, incompris de sa soeur, désireuse d'une part qu'il n'arrive plus rien à ses proches, d'autre part d'évacuer sa colère. Ha ! Peut-être que ce sont carrément eux qui l'ont tuée !


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Lobscure
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Lobscure En ligne
Sam 30 Juil - 19:33
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Hideo Tanaka
J'ai 26 ans et je vis à Tokyo, Japon. Dans la vie, je suis membre d'un gang et je m'en sors mal. Sinon, grâce à ma dévotion, je suis désormais un estropié et je le vis terriblement mal.


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Il est dans tout adieu une haute sagesse :
Que l'on aime un siècle ou que l'on aime un jour,
L'amour n'est qu'une rêve, et tous les rêves cessent,
Il faut bien que survienne la fin de l'ivresse,
Et l'homme, tôt ou tard, se réveille toujours...
- F.T

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Aimer sans doute est le possible le plus lointain. - G.B.

Elle s'est présentée à l’hôpital au septième jour. Lieu de transit marqué chaque jour d'arrivées tardives ou bien précoces, accueillies de cris véhéments, tout autant que de départs redoutés ou bien salutaires d’âmes éreintées parfois morte-nées. Je l’attendais. Non pas de pied ferme sachant que ce terme ou tout autre lié de près à ce mot n'aura plus qu'une résonance risible à mon égard désormais. Je savais qu’elle viendrait. Il ne pouvait en être autrement. Et à onze heures tapantes, elle a chamboulé la chambre qui me faisait office de convalescence de la même manière qu’elle a chamboulé celle de mon adolescence.  

Elle s’est assise sur le rebord de mon lit d'hospice tandis qu’assis sur un fauteuil roulant et feignant d’observer le ciel, j’observai par le reflet de la fenêtre sa silhouette mièvre. Je l’ai aimée au premier jour. Celui où elle a assassiné mes parents. Je sais que c’était elle cette fois-là. La Vipère n’a fait qu’apposer sa signature, superposé sur ce qui était son oeuvre. Elle est apparue sur l’écran noir de mon ordinateur de la même manière que je la vois là, maintenant, sur la vitre de la fenêtre. Sa lame ruisselante du sang de mes parents, elle se tenait dans l’encadrement de ma porte, présence effacée, silencieuse et miséricordieuse. C’était alors une adolescente déjà consumée par la vie, et moi prépubère renfermé sur un monde virtuel qui faisait une crise d'angoisse non pas parce que je savais mes parents morts à l’étage et dont j’avais écouté l’agonie d’une oreille distraite, mais à cause d’une coupure d’électricité qui aura emporté avec elle un record monumental sur Dark Souls. C’est à ce moment-là que Ritsuko a remplacé tout le reste. Je n’avais jamais vu de visage aussi saillant que le sien. Elle est apparue avec l'aurore, est repartie avec elle. J’ai passé les quatre années suivantes à la chercher. Quatre ans d’errance et lorsque je l’ai trouvée…

À son arrivée, je n’ai pas voulu la regarder. Peut-être redoutant d’y lire de la pitié dans ses yeux, ou pire, de n’y trouver rien. Elle n’a rien dit. Pas de suite. Je m’étais promis de ne pas parler le premier, c’est elle qui me devait des comptes après tout. Mais son silence marqué de sa présence a réussi à me faire sortir de mes gonds. J’ai longuement pensé à ce que je lui dirais. Je m’étais imaginé une multitude de scénarios, dont l’un revenant le plus fréquemment était de la poignarder au cœur avec les cisailles que j’avais piqué à l'infirmier par crainte que la Vipère ne revienne terminer sa besogne. Je voulais qu’elle ressente ce que je ressentais. Je voulais qu’elle souffre à la mesure de ma souffrance. Je lui aurais tout donné. Ma vie, mes jambes, pour peu qu’elle me l'ait demandé. La Vipère l'a devancé sur ce coup-ci.
— Comment tu te sens ?
— Comme un type à qui on a coupé les jambes.

Silence. J'ai tourné les roues de mon fauteuil pour lui faire face, Ritsuko, immobile, ne bougeait pas d’un cil. Ses yeux ont glissés lentement vers l'absence de mes jambes avant de remonter à mes yeux. Son regard las, sans culpabilité aucune, m’a traversé en plein cœur. Ça fait plus mal qu'un courant d'air sur la fraîcheur de mes plaies, putain. Elle portait du blanc. Ritsuko ne porte jamais de blanc. J’entrevoyais pour la première fois la cicatrice que je m’étais parfois imaginée poser les doigts en rêve.
— T'as eu des nouvelles d’Eiji et d’Hajime pendant que j’étais assommé aux antalgiques ?
— Avec Hajime, on doit encore virer les fonds qui restent des familles aux associations. Quant à Eiji, je ne l’ai pas revue depuis quelques jours.

Sans blague. J’ai préféré ravaler ma colère. Autre chose harassait mon esprit depuis plusieurs nuits. Des cauchemars. De lui. Ce connard était désormais partout jusque dans mes songes.
— Et Maruo ? Je sais qu’il a survécu. Ce salopard est venu me déposer du fric. T’en fais quoi de lui ?
Je me suis risqué, même si je savais déjà connaître la réponse. Il est ce qui a dû se rapprocher le plus d’un parent. Son assassin manqué et celui de ses parents, un père de substitution, un amant sûrement. Bingo. Ses cils ont papillonné. Une fraction de seconde de trop. Elle n’a pourtant rien dit. Elle ne sait toujours pas encore lequel de ces Maruo l'emportera sur les autres, mais moi je sais. Pour ressentir ce qu’elle ressentait à cet instant, je sais. Et pour ça, je la hais.
— Tu te souviens de la première chose que tu m'as dit quand je t’ai retrouvé ?
Je n’ai pas attendu d’elle une réponse. Cette question était pour moi. Une réalisation tardive en quelque sorte. « “Imbécile”. Tu m’as traité d’imbécile.
Aucune lueur dans son regard tari d’émotions. Au moins quand elle avait la hargne, elle semblait encore animée de quelque chose. Je lui ai hurlé sourdement mainte fois que je l’aimais, mais la nature du sentiment lui glisse sur la peau comme d’une pluie. Les chiens aussi l’aimaient à leur façon. Yuri voyait en elle une sœur. On croyait tous être unis dans le sang, une famille d’orphelins en quête parricide.

— T’avais raison, tu sais.
Là non plus elle n’a pas répondu, mais m’a regardé interloquer. J’ai saisi son incompréhension pour lui renvoyer ses propres mots avec toute la rancœur qui m'habitait alors : « Ça n’en vaut pas la peine. »

Après ça elle est tout de même restée un peu me tenir compagnie, tous deux murer dans un silence contrit. J’ai longtemps cru que cette distance froide qu’elle tenait était ce qui faisait son charme, sa force de caractère. Il m’a fallu tout ce temps pour comprendre qu’elle était brisée tout autant que nous le somme. En réalité, elle n’avait ni les mots ni les émotions pour faire face à la banalité de ce genre de scène qui était des plus humaines. Elle aurait pu simplement assumer ses actes. Un simple pardon, même soufflé à demi-mot aurait suffit. Il n’aurait pas valu grand-chose certes, mais du moins, éprouver quelques remords l’aurait rendue plus humaine qu’elle ne le sera jamais.

Au bout d’un quart d’heure, elle s’est levée promptement. Je savais que c’était la dernière fois que je la voyais. J’ai toutefois détourné les yeux pour les reposer sur la fenêtre et son reflet avait disparu. Il n’y a pas eu d’Au revoir. J’ai compris aujourd’hui seulement, sous les néons aux lumières blafardes et l’odeur d’antiseptique qui possédait les lieux répulsif à tous ces états d’âmes vains, que Ritsuko et moi étions les mêmes. Tous deux étions tombés amoureux d’un monstre. Pour avoir marqué la fin de tout ce à quoi j'aspirai et le début de tout ce que je suis devenu, son visage me hantera toujours.



Le dernier acte est sanglant


quelque belle que soit la comédie en tout le reste: on jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais.
- B.P.

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Sam 13 Aoû - 13:54

Ritsuko Takeshi
J'ai 26 ans et je vis à Tokyo, Japon. Dans la vie, je suis Mante assassine et je m'en sors avec brio, constance et tourments. Sinon, grâce à ma hargne, je suis en quête de vengeance et je m'en sors tant bien que mal.

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 Buet

La flétrissure de cette terre
Ne touche pas les fleurs du ciel,
Et la rosée, dans la chaleur,
Ne sèche pas sur elles.

Ce qui fleurit ici ne fane pas toujours,
Et ce qui fut ici ne passe pas toujours.

Mais cette foi est chose rare,
Et la grâce n'en est donnée
Qu'à ceux qui, dans les heures noires,
Ont su, comme vous, souffrir d'aimer.

- F.T.


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Chanson thème 2 (Ritsuko)

Effigie : Mika Schneider

—Et les Mantes ? Qu’est-ce qu’elles te veulent ?
— Je crois avoir ma petite idée. Je dois rencontrer Shun tout à l’heure, on verra bien.
 
Hajime et Ritsuko s’étaient retrouvés sur une petite terrasse du district de Kiyosumi, replié de sa clientèle en raison de l’orage qui guettait le ciel. Il n’y avait qu’eux, hormis un habitué qui s’était assoupi au-dessus de sa tasse de café refroidi.
— Je suis allée voir Hideo à l’hôpital ce matin. » Déclara-t-elle.
— Ça n’a pas dû être très joyeux. Lui et Eiji continuent de croire que si tu n’avais pas impliqué la Vipère, les choses n'auraient pas si mal tourné… Pour Yuri et pour lui, j’veux dire.
Ritsuko se passa de sa médisance. Elle voyait d’un mauvais œil la désertion sans explication du cadet qui la préoccupait plus que ressasser le passé. Si elle avait formé ce gang, c’était avant tout parce qu’ils partageaient tous un but commun, pas pour fonder une famille de substitution. Si Ritsuko les avait épargnés du sort de leurs parents, ce n’était pas pour que ses jeunes rescapés suivent plus tard ses traces, mais pour leur donner une chance d’échapper à tout ce à quoi elle n’a pu elle-même s'émanciper. Et pourtant, ils lui étaient revenus d’eux-mêmes, comme elle pour Maruo.
— Tu sais où est Eiji ? T’as des nouvelles de lui ?
— Je voulais justement te parler à ce sujet. Si j’étais toi, je me méfierais. Il est instable depuis l’épisode de la boucherie à la demeure des Yamaguchi-gumi. Je l’ai croisé vaguement l’autre jour, il y avait un truc pas net avec lui. Tu ne devrais pas te promener sans armes…
— J’imagine qu’il voudra lui aussi venir chercher des comptes… »
Annonça-t-elle, le regard dans le vague et profitant des dernières caresses du soleil sur son visage, dont les rayons s’échappaient par quelques éclaircis.
— Tant que tu n’auras pas accompli ta part du marché, c’est une forte possibilité. » Maugréa-t-il.
La Mante se redressa lentement sur sa chaise et posa sur lui son regard froid et sévère.
— Et quelle est-elle, Hajime ? Je voudrais bien le savoir. » Rétorqua-t-elle.
Haijme lui décocha un sourire patient, mais préféra se taire réalisant le terrain glissant sur lequel il venait de s’aventurer. Aussi, il n’échappa pas à Ritsuko le rictus en coin qui trahissait l’agacement du jeune homme, et devinant l’allusion de ses propos, répondit à sa place.
— Nous nous étions entendus pour démanteler la mafia. Le sort de Maruo ne regarde que moi.
— Tu n’es pas la seule à lui avoir survécu, tu sais…

Un long silence suivit cette affirmation erronée. Ritsuko, réalisant l’ignorance qui le poussait depuis trois ans à la servir aussi docilement qu’un chien, se sentait néanmoins lui devoir la vérité même si elle n’était bonne à entendre, ni pour lui ni pour elle.
— Tu n'as jamais été victime de la Vipère, Hajime. J’ai tué tes parents. J’aimerai pouvoir te dire que c’était parce que je n’avais pas le choix… » Ritusko détourna les yeux pour mieux se remémorer cette ligne de non-retour qu’elle avait consciemment franchie dans le but d’un jour s’affranchir de son propre bourreau. Toutes ces années à troquer de nombreuses vies, parfois innocentes, contre la sienne. « ...mais ce serait te mentir. On a toujours le choix. Et tu n’as pas à me pardonner. » Elle plongea ses yeux dans les siens avec toute la sollicitude qu’elle se sentait pouvoir lui porter. Elle se sentit proche de lui, pour pouvoir ressentir ce qu’il ressentait à cet instant. Elle pesa ses mots. « Je ne te demanderai jamais de me pardonner, Hajime… »

Dans la rue, un passant sifflotait un air des années 2000 tombé dans l'oubli d’une certaine idole américaine aux yeux trop clairs.
Ensuite, il y eut la pluie.


*
L'avenir est un fantôme aux mains vides qui promet tout et qui n'a rien. G.D.N

Elle entra sur le silence de l’appartement plongé dans l’obscurité du soir, trempée de la tête aux pieds. Les lieux n'étaient traversés que par de rares endroits de la luminescence artificielle de la métropole. Dès lors qu’elle avait passé la porte, elle avait senti sa présence. Il en avait toujours été ainsi. Étrange sixième sens qui prenait peut-être ses origines du jour où il l’avait imprégné de sa marque. La Mante ne se pressa donc pas à démasquer l’intrus, d’autant plus qu’elle connaissait déjà son identité et la raison de sa venue.

La propreté des lieux témoignait de son inhabitation quotidienne. Aussi de par son absence de présence coutumière ou encore de l’inexistence du plus simple détail délaissé sur les surfaces du mobilier. Il n’y avait aucune odeur flottant dans l’air, aucune chaussure laissée au seuil de la porte ni de tasse de thé refroidi par oubli, ni le moindre courant d’air d’une fenêtre laissée entrouverte. Il n’y recelait aucune trace de vie. Un espace transitoire, sans âme et sans histoire, à l'instar de son occupante qui traversait l’allée sans se préoccuper des flaques rosâtres qu’elle laissait sur le plancher immaculé. Pas même la moindre craquelure sur le cuir d’un fauteuil ou du canapé sur lequel se trouvait alors un élément factice à l’ensemble du décor, tout comme elle le semblait alors. Elle demeura tout silence face à cette présence fantomatique dont elle s’attendait à la visite d’un jour à l’autre force d’étirer le moment de sa sentence. La chemise blanche qu’elle portait était altérée de sa couleur, remplacée d’un rouge vif qui lui collait à la peau. Elle avait le visage assombri par les giclures de sang qui le traversait de part en part et dont les sillons vermeils dissimulaient cette entaille sur sa joue dont elle garderait sûrement la cicatrice. Ses cheveux frisotaient indociles d’eau de pluie et lui retombaient lourdement sur le visage cachant aussi cette blessure à l’oreille dont il s’écoulait encore un peu de son sang le long de son cou. Las qu’elle était, ses cils tout empourprés et aussi rouges que les étamines d’un lycoris s’abaissèrent imperturbable sur lui. Elle était épuisée de corps, et d’esprit peut-être. Lui devait l’être tout autant. Depuis près d'un demi-siècle, au moins. L'éclaircie blanchâtre soudain émise par un panneau publicitaire par-delà la fenêtre vint chasser les ténèbres sur le visage de la Vipère. Ritsuko put y contempler fugacement les ravages de son existence sur la sienne ; par sa faute il était porteur de deux membres fantômes. L’un lui avait été arraché en même temps que sa légende, quant à l’autre, pire qu’un bras, il était amputé d’une fille. Cette clarté passagère fut chassée par sa concurrence, remplacée d’un autre écran de lumière qui revêtit cette fois de son bleu cyan la silhouette immobile de Ritsuko. Les couleurs qui défilaient ainsi dans une succession continuelle les peignaient tour à tour de leurs rayons arc-en-ciel, eux qui vivaient pourtant depuis toujours dans un monde où leur regard n’avait été voilé que du noir de leur existence ou du pourpre de celles qu’ils avaient mainte fois arrachées aux autres. Elle était enfin devenue le monstre qu’il lui avait dit devoir devenir pour lui survivre ainsi qu’à ce monde. Lui, réalisait seulement alors tout le poids de ce manteau dont il s’efforçait de renoncer sans y parvenir. Force de s’en revêtir, il lui était devenu une seconde peau.


« Sakura sakura
yayoi no sora wa
mi-watasu kagiri… »


— Ritsuko ! Ritsuko ! Viens ici.
La petite fille semblait ennuyée d’être ainsi interrompue au plein milieu de ses jeux. Elle se leva toutefois rejoindre sa mère dans la cuisine, laquelle lui tendait une main l’incitant à s’approcher plus près encore. Elle s’avança en traînant des pieds, la moue renfermée. La femme prit sa main dans la sienne et y déposa la petite paume sur son ventre rond.
— T’as grossi maman.
— Mais non, andouille ! Tu le sens ?

Ritsuko fît mine que non, mais c’était là un mensonge.
— Il est peut-être mort. » Répondit-elle en haussant les épaules. « Il est sans souffle et sans lumière depuis des mois alors…
L'innocence propre à l’enfance, pouvait parfois aussi pousser à une insouciante cruauté des enfants. Elle ne réalisait pas alors la lourdeur de ses propos et des pensées assassines qu’elle tenait à l’égard de cette chose grandissante non loin d’elle. Ritsuko n’avait que dix ans, et voyait en le petit être qui occupait les entrailles de sa mère, un parasite qui lui volerait bientôt tous ses jouets.
— Enfin Ritsuko ! Comment peux-tu dire de telles choses ? Tu ferais mieux de grandir. Il aura bientôt besoin d’une grande sœur… » Un doux sourire avait étiré ses lèvres, pleine d’indulgence et de patience pour sa fille qui vivait mal cette nouvelle arrivée.
Ritsuko ignorait alors que c’était le tout dernier sourire dont sa mère la couvrirait. La seule chose qui continuerait de vivre en elle. Un sourire. Car passé cette nuit, le temps aura effacé toute trace de son souvenir, ainsi que son visage de sa mémoire.



De longues minutes s’étaient écoulées dans ce salon, sans qu’ils ne s'échangent le moindre mot. Ils étaient au seuil de leur existence et ils en étaient encore à s’apprivoiser l’un et l’autre sans toutefois jamais y parvenir sachant tous deux que le pardon ne pourrait jamais compenser pour leurs torts ni l’affection apaiser leurs souffrances communes. Il y eut pourtant des jours, où Ritsuko s’était parfois laissée imaginer n’avoir jamais quitté l’appartement. Cela, en d'autres temps reculés et mal préservés des aléas du cœur. Elle avait compris quelque peu sur le tard qu'il fallait parfois faire le deuil des gens de leur vivant, mais aussi de soi. Le souvenir d’un sourire à demi effacé assaillit soudain son esprit troublé de lumière, elle porta une main à son front. Une douleur lancinante au crâne fit son apparition avec la sensation que ses chairs prenaient subitement feu. Elle pensa aussitôt que la pluie avait dû masquer les symptômes de cette fièvre soudaine. De nouveau lui apparurent ces lèvres qui ne se prêtaient à aucun visage et qui furent chassées par le cri d’effroi d’une femme hurlant à la mort. L’écho d’un tintement de lames qui se croisent fit taire l’étrangère. Le souvenir égaré et à jamais dissipé de sa mère n’avait jamais été aussi intrusif en seize ans qu’il ne l’était en cet instant. Elle comprit alors, de ce passé qui tentait de se superposer à son présent, la ruse qu’elle n’avait su prévenir. La grande Ritsuko défaite, frémit son désarroi de n’avoir su prévenir là une menace beaucoup plus mortelle travestie en une simple fièvre.


*

Elle se trouvait à quelques blocs de son appartement que la fine pluie qui l’avait accompagnée jusqu’alors s’était transformée en une pluie torrentielle. Elle se savait suivie, et par qui. La nuit était tombée et dissimulait les silhouettes qui se confondaient aisément aux ombres que lorsque Ritsuko s’était retournée sur elle-même, la sienne avait disparu. Lorsqu’elle se tourna, il se trouvait face à elle un gamin sur quelques mètres de distance à la corpulence malingre et cette frange qui lui tombait sous les yeux. Eiji se tenait tout juste sous la lumière blafarde d’un réverbère d’une petite ruelle mal éclairée, qui rendait la présence de la lame qu’il tenait de sa main gauche quelque peu en retrait, tout aussi évidente que les intentions qu’il lui portait. Ritsuko s’approcha néanmoins de lui, aussi proche qu’il lui permit de l’être, puis s’arrêta lorsqu’il leva l’arme devant elle en même temps que ses yeux possédés d’une haine compacte et débordante.
— Toi… Tu ne comptais jamais le tuer, c’est ça ? T'as fait exprès de le manquer chez les yakuaza, pas vrai ?
— Il n’était pas la cible à ce moment-là.
— Assez avec ces conneries Ritsuko !! »
Avait aboyé Eiji. « Ne le sera-t-il jamais ?! T’as laissé Yuri se faire tuer pour lui ! Et Hideo est…
— Je sais.

Il parut désemparé que si peu de mots puissent se valoir foncièrement sincère et à la fois si vide. À Ritsuko, la colère qu’il lui portait était aussi pesante que le poids de l’eau sur ses vêtements. Le déclic du cran de sécurité d’un revolver derrière elle lui fit comprendre la nature du piège. Hajime s’était glissé dans son dos tandis que son cadet s’était fait passer pour la menace.
— Maruo ne mourra pas de ta main. Ça n’a rien de personnel Ritsuko. » Avait dit Hajime d’une voix beaucoup plus posée que le plus jeune et qui la visait à quelques centimètres seulement de sa tête. « On a un but commun, et tu nuis à son objectif. C’est tout.
Ritsuko ne put examiner son visage à ce moment-là, mais baissa les yeux au sol et put y percevoir le reflet brouillé d’Hajime sur une flaque. Il avait une attitude faussement réconciliatrice avec son calme habituel, mais était en réalité tendu. Elle le sentait. Ritsuko songea que la révélation de ce matin devait avoir eu son effet et regretta qu’Hajime ait choisi le parti pris de se venger d’elle. L’intelligence était le trait de caractère le plus aiguisé de l'aîné. Il devait se douter que ses chances de parvenir à ses fins ce soir étaient minimes et que de l’échec, s'ensuivrait assurément un dénouement tragique et irréversible. Néanmoins, sans rancune, elle accepta son choix. C’était une variable hors de son contrôle et son droit légitime que de vouloir lui faire payer à son tour le prix du sang. Quant à elle, elle savait ce qui devait être fait. Ce qui doit être fait lorsqu’un chien a la rage.
— Si tu tires, il n’y aura pas de retour en arrière possible… Je devrais vous tuer tous les deux.
Il se ria d’elle dans un souffle étouffé. Il n’y avait que Ritsuko pour se retrouver en position d’infériorité et continuer de croire qu’elle avait l’avantage.
— Adieu, Ritsu.
Il eut une seconde d’hésitation tout juste avant d’appuyer sur la détente et à laquelle Ritsuko ne réagit pourtant pas. Le coup parti, mais sans la balle et le revolver explosa dans la main de celui qui avait tiré. Hajima hurla de douleur tandis que la Mante profita de sa confusion et de l’horreur de la scène qui le figeait sur la vue de ses os et ses chairs en lambeau pour lui asséner un puissant coup de coude à l’estomac et lorsqu’il se plia sur lui-même, abattit son poing sous le menton du jeune homme qui tituba par en arrière avant de s’écraser lourdement parmi les détritus éventrés sur le sol non loin. Eiji lâcha un hurlement guttural, presque animal et réagit au quart de tour. Il sortit de sous sa veste un revolver qu’il ne s’attarda pas à viser pour tirer hâtivement, laissant à Ritsuko un temps de réaction salvateur qui lui évita un impact mortel, mais pas la balle de lui arracher le lobe de l’oreille. Elle ne cilla toutefois pas sous la brûlante douleur de sa tempe et fondit sur lui à la seconde. La Mante le désarma d’un solide coup au poignet qui le fît desserrer son emprise sur l’arme. Eiji se rabattit toutefois sur le couteau qu’il tenait de sa main gauche, tentant de l’égorger d’une saillie horizontale que Ritsuko évita en se reculer vivement. Il profita de cette ouverture pour l'assaillir en une série d'assauts désespérés qu’elle évitait ainsi à la suite. La pluie qui s'abattait sur eux affectait la vitesse de leur mouvance saccadée, tout particulièrement Eiji, haletant de cette succession d’offensives vaines et qui abattait sa lame rageusement dans le vide. De cette inconstance irréfléchie de sa part et de la lenteur du geste, la Mante profita d’une charge malhabile par la fatigue pour se saisir de son poignet et pressa de son autre main sur l’articulation de son bras pour le forcer à se plier sous sa force. Le bras tremblant de résistance, Eiji vit avec terreur son poignard se retourner lentement contre lui. Les yeux de l’adolescent s'écarquillèrent à la vue de la lame qui se rapprochait fatalement de son cou et dont il ne parvenait à se soustraire, la poigne de Ritsuko recouvrant fermement la sienne. La Mante soutient son regard suppliant sans une lueur de pitié pour son chiot alors qu’elle pénétrait la lame dans sa chair pour l’enfoncer jusqu'à la jugulaire. Le jeune homme balbutie quelques mots à son attention dont elle ne chercha pas à comprendre le sens, tandis que son sang se déversait sur son buste et le sien. Puis la Mante se recula, laissant le corps s'affaisser à terre.
— Comment t'as su ?
Hajime qui s’était redressé, spectateur las et impuissant de l'exécution de son cadet, semblait avoir un peu oublier de sa douleur. Il comprit qu’elle devait se douter depuis quelques temps de la traitrise pour avoir préalablement trafiqué son arme. Ritsuko s’avança doucement vers lui, récupérant du même coup le revolver d’Eiji qui traînait au sol.
— Je ne savais pas. C’était un scénario possible, j’ai pris des dispositions.
Elle vérifia le chargeur tout en s’approchant de lui et rechargea l’arme sous ses yeux sans lui cacher ses intentions. Hajime se mit à rire doucement de sa propre crédulité. Ne les avait-elle pas prévenus ? Depuis le premier jour ?
— C’est vrai. Tu n’as confiance en personne. Même pas en lui, n’est-ce pas ?
— Personne. »
Confirma-t-elle en levant droitement le bras vers lui à bout portant, le canon pointant à seulement quelques centimètres de son front.
Le bruissement assourdissant de la pluie couvrit le coup de feu dans la nuit. Ritsuko demeura un instant penché au-dessus du corps d’Hajime à observer son cadavre avec attention. Juste au moment où elle avait pressé la détente, elle avait cru voir ses traits s’arquer d’une expression déconcertée. Il lui semblait alors qu’il fixait quelque chose sur son visage. Ritsuko porta une main à celui-ci, découvrant avec stupéfaction la présence d’une entaille sur sa joue dont elle n'avait pas pris connaissance dans le feu de l’action. Elle sourit doucement pour elle-même et se consola de leur perte, fière que ses chiots soient morts en homme.

La pluie se chargea d'effacer leur souillure des rues et seul Ritsuko emporta avec elle, le souvenir qu'ils aient un jour vécu sur cette terre en dépit de n'avoir jamais existé.



Le dernier acte est sanglant


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- B.P.

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Maruo Takeda
J'ai 42 ans et je vis à Sado, Île de Sado, Japon. Dans la vie, je suis mercenaire yakuza et je m'en sors aisément. Sinon, grâce à mon charisme, je suis concubin et papa et je le vis plutôt tortueusement.


Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 Captur16

On le connaît parmi tous les criminels et les autoritiés sous ce surnom : la vipère à deux têtes. Deux lames, un coup, et il coche ses victimes en plein torse d'une croix qui signe sa morsure. Une survivante, qui deviendra son élève, qui deviendra sa rivale. Qui toujours dans le vent sifflant, siffle avec lui l'agitation. Et l'angoisse pour l'homme qu'un passé guerrier ne dégouline son sang sur son présent marin.

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 9b9d2189584f9d49c13664157e13a8b5

Verse à leurs pieds le flot de tes larmes sacrées,
Brûle tous tes parfums sur leur mystique autel.
Mais si l'amer venin est entré dans tes veines,
Pâle de volupté pleurée et de langueur,
Tu chercheras en vain un remède à tes peines :
L'angoisse du néant te remplira le coeur.
Ployé sous ton fardeau de honte et de misère,
D'un exécrable mal ne vis pas consumé :
Arrache de ton sein la mortelle vipère,
Ou tais-toi, lâche, et meurs, meurs d'avoir trop aimé !

- Leconte de Lisle


Sanada Hiroyuki :copyright: Jo'

"Un jour.
Un jour, bientôt peut-être.
Un jour j’arracherai l’ancre qui tient mon navire loin des mers.
Avec la sorte de courage qu’il faut pour être rien et rien que rien, je lâcherai ce qui paraissait m’être indissolublement proche.
Je le trancherai, je le renverserai, je le romprai, je le ferai dégringoler."


*

"Tu ne veux pas savoir pourquoi on veut le faire disparaître ?
- Je veux jamais savoir, c'est pour ça qu'on m'embauche."


Tsukasa fit glisser vers lui la photo d'un homme dans la fin de la trentaine, tenant dans ses bras une enfant et une femme par la taille. Maruo y jeta une oeillade puis rendit le cliché - il sentait venir de loin que Shinobu Tsukasa ne serait pas là pour du long terme. Fraîchement oyabun, fraîchement contesté, un terreau constamment retourné s'aère, mais rien n'y pousse. Il laissait juste assez de place pour que les ambitieux s'insèrent. Le père de Ritsuko était un de ceux-là.

"Quel est ton prix, Vipère à deux têtes ?
- Une somme qu'Hiroshi ne risquera pas de pouvoir me proposer pour le laisser en vie."


Tsukasa partit d'un fou rire avant de se rasséréner. "Hiroshi est un sans-sou, il ne risque pas de t'acheter !"

Le mercenaire quitta le siège trop cossu sur lequel il avait été installé pour se poster à la fenêtre. Au dehors, le printemps chantait son renouveau, quelques passereaux venaient s'ébattre dans la fontaine du jardin, deux lézards réchauffaient leurs sangs sur les carrosseries ensoleillées des Rolls Royce garées au pied du portail. Non, Tsukasa n'allait pas durer. Trop d'exubérance. Il avait beau être un cador, il n'avait pas les codes des clans. Bientôt, quelqu'un paierait peut-être la Vipère pour le mettre à sac.

"La moitié de ta fortune et je tue tous ceux qui feraient ne serais-ce que penser à ta fin."

Shinobu s'empourpra d'une colère sourde qui lui montait depuis les oreilles et vociféra postillonnant sur le flegme de Maruo. "Espèce de petite sangsue, la moitié d'un Empire pour quatre péquenots qui ambitionnent la grande vie ? Tu te fous de ma gueule, j'espère ? Va voir te faire dépuceler et ensuite tu viendras parler affaire ! Les autres, ils tombent peut-être pour les légendes qui t'ont fait naître, mais je suis pas de ceux-là, je suis pas un putain de couillon !"

Maruo n'était pas du genre susceptible. Comme un chat qui s'aplatit pour éviter qu'on le touche, il haussa les épaules, sachant que le temps ferait son chemin.

Deux semaines et une cargaison d'armes détournées plus tard, Shinobu le rappela. Son prix serait le sien. "Avec l'inflation, c'est maintenant 75% que je veux."

Une chance pour l'oyabun que Ritsuko en réchappa, et que la Vipère ne vint jamais quérir sa récompense !

*

"Je l'ai rencontrée à l'heure où s'épanouit la disgrâce.

*

Maruo faisait des allées et venues hystériques devant le bâtiment plongé dans la nuit. Personne n'était là pour le voir parcourir les cent pas, les sang pas, couvert de l'écarlate de deux victimes. Mais pas de  la troisième. Pourquoi pas la troisième ?

Que fallait-il faire ? Y retourner ? Finir le travail ? Risquer de recroiser ces yeux défiants, ces yeux qui présageaient la fin ? Les crédits, les noms des réalisateurs ? Ces yeux pour le punir ? Ceux-là même qui le fixeraient, seize ans plus tard, dans un salon-catalogue sans vie ? Alors quoi, laisser la petite se vider de son sang sans savoir ? Sans deviner si elle s'en sortirait ou pas ? Pourquoi n'était-il pas allé plus loin ? Pas plus loin que la peau ? Pourquoi n'avait-il pas fait céder le plexus comme il lui était pourtant si facile - sur des enfants bien plus jeunes, et bien plus beaux ?

"Bonsoir, j'ai entendu des gens crier. Du genre qu'on égorge.
- Vous êtes sur place ? Que s'est-il passé ?
- Non, je passais en voiture, je suis déjà reparti."


Il donna l'adresse et s'évanouit dans la nature. Les secours arrivèrent et sauvèrent l'enfant.
Il ne l'avait pas "loupée" : il s'était assuré qu'elle survive.

*

"Le jour au fond du jour sauvera-t-il le peu de mots que nous fûmes ensemble ?"

*

Il n'était pas d'emblée certain qu'elle soit réelle et non sortie de son sommeil, mais les lueurs changeantes de la rue donnaient pourtant bel et bien sur le détail de son être, tour à tour bleues puis violacées, projetées sur la blancheur de son teint et le carmin du sang qui la poissait. Une traînée d'eau la suivait depuis l'entrée dans la moiteur de ses pas et il se figura que ça rendait limace plutôt que Mante. Il sourit un peu pour dédramatiser la scène : Ritsuko s'appesentait toujours d'une solennité qu'il prenait à la rigolade. Lorsqu'elle se vexait, elle ajoutait à son comique.

Enfin il s'extirpa du canapé dont la forme basse et enveloppante semblait l'avoir avalé. En se levant, il pesait largement ses quarante ans, et s'assurait moins bien que son centre de gravité avait été perdu avec son bras. Il alluma la lumière comme pour briser la scène et témoigna du sang sur sa chemise - il n'était pas difficile de comprendre ce qu'il s'était passé. A vrai dire, il s'étonnait qu'ils ne l'aient pas acculée plus tôt : car enfin, elle les avait quelque peu trahis en refusant de leur donner la paye pour laquelle ils avaient perdu une des leurs et estropié un autre. La paye, c'était la tête de Maruo.

En fin de compte, la Vipère la trouva plus irascible qu'il ne l'était à bien des égards. Lui avait un code moral discutable mais qu'il appliquait avec minutie : ne pas faire de veuve ou d'orphelin transpirait d'une volonté utilitariste à ne pas laisser d'innocents souffrir - de l'absence, des retombées financières, des risques de représailles qui pourraient découler de la mort d'un père véreux. Les deux orphelins qu'il avait laissé derrière lui, Ritsuko et lui-même, avaient été de suffisante preuves à son sens que c'était la chose à faire. Et surtout, il ne tuait pas par affliction personnelle, simplement pour le travail. La Mante qui était prompte au jugement et à chercher le plus grand bien en annihilant les clans yakuzas, était-elle aussi pieuse que son complexe de Dieu voulait lui faire croire ?

N'avait-elle pas tué les enfants et la femme de Kobata par simple vengeance ? N'avait-elle pas laissé en vie les Chiens seulement pour se servir d'eux ? N'avait-elle pas tué leurs parents avec la même neutralité que la Vipère, dont elle se gaussait d'être si différente ? Maruo était un salaud mais Ritsuko était manipulatrice, elle tordait les vertus pour les faire coïncider avec ses ambitions. C'était ce qu'il voyait en elle à cet instant. Mais il la détaillait avec tendresse plutôt qu'avec méfiance. Elle était à la fois comme lui à son âge, et totalement différente.

"Les clans sont décapités, Tokyo n'a jamais aussi bien dormi."

Il alluma une cigarette et pointa du menton vers le long sac dans lequel reposaient ses sabres. "Ce qui ressemble le plus à un héritage." Puis, pouffant pour lui-même. "Je parle pas des katanas. Il y a les codes des comptes offshore." Animé d'un visage sympathique et qui contrastait avec la gravité de celui de la Mante, il poursuivit. "Tu ne t'es jamais demandée pourquoi on vivait dans un appartement pourri alors que je me faisais les contrats les plus juteux du pays ? Ben voilà. Tout est là." Il tira une taffe, le regard rivé sur la pointe incandescente qui s'allumait. "Saito ... Kobata ... les Chiens ... c'est mon tour. J'ai finis ce que j'avais à faire sur cette Terre de toutes façons. Tu veux qu'on en finisse tout de suite, ou tu préfère prendre une douche et qu'on se mange une pizza avant ?"

Sa sérénité n'était pas feinte. L'ironie non plus.
Maruo exécrait le sens et le chassait par l'absurde. Il refusait que quelque chose puisse justifier d'avoir été traité comme un cyon par ses parents, que tuer des enfants innocents puisse vouloir dire quelque chose de quoi que ce soit, que l'on puisse naître et mourir et qu'entre ça nous ayons des récits à fabriquer avec des bouts de hasard. Ces choses là, il les laissait à Ritsuko.
Il était en paix avec le non-sens de son existence.

"Vidé de l’abcès d’être quelqu’un."



Spoiler:


Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 16532433Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 16532434
"Le plus clair de mon temps, je le passe à l'obscurcir" - Boris Vian
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Jeu 20 Oct - 0:19

Ritsuko Takeshi
J'ai 26 ans et je vis à Tokyo, Japon. Dans la vie, je suis Mante assassine et je m'en sors avec brio, constance et tourments. Sinon, grâce à ma hargne, je suis en quête de vengeance et je m'en sors tant bien que mal.

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 Buet

La flétrissure de cette terre
Ne touche pas les fleurs du ciel,
Et la rosée, dans la chaleur,
Ne sèche pas sur elles.

Ce qui fleurit ici ne fane pas toujours,
Et ce qui fut ici ne passe pas toujours.

Mais cette foi est chose rare,
Et la grâce n'en est donnée
Qu'à ceux qui, dans les heures noires,
Ont su, comme vous, souffrir d'aimer.

- F.T.


Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 Be7932b26a7d68fc0fda01d42f42d969




Chanson thème 2 (Ritsuko)

Effigie : Mika Schneider


Rien ne ravive mieux le passé que l’odeur qu’on lui a autrefois associée.
- V.N.

La lumière jaillit du plafond. Ritsuko du plisser des yeux pour y voir ironiquement plus clair. À l’autre bout de la pièce, Maruo déambulait avec maladresse dans son salon et semblait aux antipodes de sa légende. Elle était défaite par son manque de vigilance et blasée une fois de plus face à sa diligence. Les jeux étaient faits et ressasser le passé n’avait plus son importance. Ritsuko ria silencieusement suite à ses propos, mais ce ne fût pas pour la bonne blague. L’insouciante légèreté de Maruo la flinguait plus que tout. Depuis toujours. Elle posa les yeux sur le sac avant de remonter à ses yeux, le regard droit.
— Il y a bien des choses pour lesquelles j’ai cessé de chercher des réponses. » Ses paroles lui arrachèrent une petite quinte de toux étouffée.

Et puis, il y eut ces mots.

«... c'est mon tour. »

Un instant elle demeura interdite, puis son expression s’abandonna subitement à cette rage insoupçonnée, d’accoutumé effacée et qui s’était fin dépossédée de ses yeux pour s’emparer de son visage. Ce même visage adolescent que par le passé. Cette mine renfrognée et ce pincement de la lippe lorsqu’elle était révoltée. Ritsuko s’approcha de lui puante de danger par l’insondabilité de ses pensées comme elle l’avait toujours été et flirtant toujours avec cette colère meurtrière dès lors qu’elle se retrouvait en sa présence, jamais assurée elle-même qu’elle puisse tout à fait la contenir.

« J'ai fini ce que j'avais à faire sur cette Terre de toute façon. »

Ce sentiment n’avait jamais cessé d’être malgré les années, qu’importe sa source. Qu’il fût né du rejet ou du meurtre de sa genèse.

« Tu veux qu'on en finisse tout de suite, ou tu préfères prendre une douche et qu'on se mange une pizza avant ? »

Mais alors que l’amour était mort, que l’affection s’était tarie et qu’il ne restait qu’eux dans cette pièce, si pas cette haine intarissable en elle qu’elle lui portait depuis le premier jour, que restait-il pour exister ? Pour les faire exister.

— Est-ce que tu es vraiment en train de me demander de te tuer, Maruo ? » Sa douleur fut trahie par la fureur dans sa voix et cette colère aux mille raisons dont s’ajoutait cette fois le sentiment d’abandon.

Cette haine, c’était le nœud de leurs existences et ce qui les reliait entre elles. C’est ce qui faisait perdurer les choses en leur état et surtout, qui le faisait exister lui plus que quiconque dans son sombre univers. Ritsuko était blessé qu’il puisse vouloir s’y dérober si facilement. Aussi simplement que l'on puisse décider d'aller manger une pizza dans la nuit. Elle lui arracha la cigarette des lèvres pour la pincer entre les siennes. Ses yeux étaient incendiés et l’émotion tiraillait encore ses traits. Après une longue inspiration, Ritsuko souffla sur le visage de Maruo la nuée blanche de ses lèvres laissant le voile blanc un instant rompre le contact de son regard défiant. Puis de nouveau, cette toux l'assaillit. Elle s’éclipsa dans la salle de bain, pris soin de refermer la porte derrière elle et fît couler l’eau de la douche pour couvrir les bruits gutturaux de sa trachée obstruée. Elle recracha l’amas de sang qui lui était monté à la gorge depuis la dernière heure. Penchée au-dessus de l’évier, la Mante se raidit sur la quantité qui s’y trouva, comprenant sur le tard l’acharnement d’Eiji dans cette ruelle glissante et ce qu’elle n’avait su lire dans les yeux d’Hajime. Amère de réaliser qu’une si petite entaille était ce qui la condamnerait infailliblement à sa perte, plutôt que cette autre qui surplombait tout son corps depuis seize ans.

Elle sortit une quinzaine de minutes plus tard, vêtue des vêtements les plus simples. Une paire de joggings et un débardeur noir dont les tissus collaient à la moiteur de sa peau. Ses cheveux humides plaqués derrière sa tête s’égouttaient sur le plancher. Elle était un incendie.

— Va pour la pizza.


Depuis six mille ans la guerre
Plait aux peuples querelleurs,
Et Dieu perd son temps à faire
Les étoiles et les fleurs. - V.H.


Dehors, la fraicheur du soir anesthésie un peu sa fièvre. Son temps est compté et elle le sait. C’est une mort lente, mais elle veut la vivre. Car, elle a encore des choses à te dire. Elle s’arrête un instant pour humer l’air comme s’il avait été des plus pur et lève les yeux au ciel vers les quelques étoiles que la lumière de la ville n’a su engloutir de ses artifices. Elle se dit qu’il est étrange comme l’on prend le temps pour les choses les plus simples lorsque l’on prend conscience du temps qu’il nous reste. La rue est animée pour cette heure avancée de la nuit. Un artiste de rue parvient de sa musique à agripper quelques passants en mal de sommeil. Elle l'écoute d'une oreille distraite, car de ta démarche mal orchestré, elle t’entend arriver. Elle réajuste sur son épaule la ganse du sac qui constitue cet héritage dont elle ne sait que faire. Quant aux sabres… Leur poids lui pèse. Mais ça, ça ne date pas d’aujourd’hui. Le menton toujours relevé vers le ciel, elle te tend un regard du coin de l'oeil. Tes yeux sont pleins de patience. Tu l’attends. Et elle sait que tu n’attends d’elle que le coup de grâce pour partir loin d’elle, loin de tout ça. Mais plus que ta mort, Maruo, son désir est ta souffrance tu le sais, non pas ta délivrance. Ce leitmotiv, c’est sa raison de vivre même s’il lui est un mensonge insoutenable. Alors si vivre te devient insupportable et que partir lui est inconcevable, peut-être méritez-vous bien ce qui vous arrive. C’est là la dernière ligne droite. Un dernier détour avant la fin des fins. La fin des fins ? Non. Juste la vôtre. La sienne. Elle ne sait pas encore si tu mérites qu’elle t’emmène avec elle. Ses jours sont des heures, et ce qu’elle ne te dit pas Maruo, c’est qu’elle espère de toi que tu puisses l’aider à se faire à l’idée qu’elle ne verra peut-être pas l’aube au matin. Qu’aujourd’hui est un jour sans lendemain. Peut-être parce que sa colère est feinte et que le moteur de son existence a implosé avec tout le reste ? Peut-être attend-elle que tu lui tendes la main. Et alors seulement, peut-être te tendra-t-elle la sienne. Ce sera celle d’une naufragée qui t’offrira la promesse de sombrer à ses côtés.
Elle te tend ce regard, car elle aussi t’attend.



Le dernier acte est sanglant


quelque belle que soit la comédie en tout le reste: on jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais.
- B.P.

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Jo'
Jeu 27 Oct - 15:13
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Maruo Takeda
J'ai 42 ans et je vis à Sado, Île de Sado, Japon. Dans la vie, je suis mercenaire yakuza et je m'en sors aisément. Sinon, grâce à mon charisme, je suis concubin et papa et je le vis plutôt tortueusement.


Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 Captur16

On le connaît parmi tous les criminels et les autoritiés sous ce surnom : la vipère à deux têtes. Deux lames, un coup, et il coche ses victimes en plein torse d'une croix qui signe sa morsure. Une survivante, qui deviendra son élève, qui deviendra sa rivale. Qui toujours dans le vent sifflant, siffle avec lui l'agitation. Et l'angoisse pour l'homme qu'un passé guerrier ne dégouline son sang sur son présent marin.

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 9b9d2189584f9d49c13664157e13a8b5

Verse à leurs pieds le flot de tes larmes sacrées,
Brûle tous tes parfums sur leur mystique autel.
Mais si l'amer venin est entré dans tes veines,
Pâle de volupté pleurée et de langueur,
Tu chercheras en vain un remède à tes peines :
L'angoisse du néant te remplira le coeur.
Ployé sous ton fardeau de honte et de misère,
D'un exécrable mal ne vis pas consumé :
Arrache de ton sein la mortelle vipère,
Ou tais-toi, lâche, et meurs, meurs d'avoir trop aimé !

- Leconte de Lisle


Sanada Hiroyuki :copyright: Jo'
J'en ai vus des morts. De toutes sortes.
Tabassés, poignardés, fusillés, empoisonnés, vieux.
J'ai reconnus, j'ai provoqué tous les signes de la mort.

Et je croyais être en paix avec elle.
J'avais accepté ma fin comme celles de ceux que j'ai achevés.
J'avais accepté que la vie était une marchandise parmi les autres.
J'avais accepté, malgré la paternité, que la naissance et le déclin n'étaient qu'une multitude de riens.
Et j'ai crus que je serais solide ainsi.

Mais je n'ai pas pensé que la mort viendrait pour elle.
Qu'on me la prendrait, aussi.
Et j'ai refusé de la voir toquer à ses paupières enfiévrées.

"On ne peut plus dormir tranquille
quand on a une fois ouvert les yeux." - Pierre Reverdy


*

"Va pour la pizza."

Le marché avait été d'une simplicité enfantine : ils s'allieraient pour faire tomber les clans puis se battraient à mort dans un affrontement que Maruo avait décidé de perdre. D'abord, cette perspective lui était apparue dans l'amertume, empli de fiel pour celle qui venait menacer l'écrin de normalité qu'il s'était construit à Sado. Puis il avait compris que ses choix étaient les responsables du malheur autour de lui et dont il semblait esquiver, indolent le croyait-il, les gouttes. Alors il avait entrepris de régler ses dettes et de se donner à Ritsuko pour la soulager de sa haine. Que pouvait-il savoir de cette complexité de leur union qui les maintenaient en vie et liés, quoiqu'à l'agonie de leurs impossibles, deux êtres dépossédés de tout que l'on s'acharne à faire survivre ? La violence l'avait poussé à vivre en noir et blanc. S'il savait que la vengeance ne réglait ni colère ni souffrance, s'il s'avait que, les vies passant, le fond du ressentiment de la Mante n'était plus tout à fait - ou uniquement - la mort de sa famille, il n'apercevait que cette solution binaire à leur libération respective. Il devait mourir. Parce que ça correspondait au non-sens qu'il s'imaginait être. Parce que leur érosion devait prendre fin. Parce qu'il ne savait pas l'aider mieux.

Il se préparait à leur repas de condamnés sans savoir que la sentence ne tomberait pas pour lui cette nuit.

*

Ils s'étaient installés comme ils le faisaient parfois, les jours où la tête libre de la jeune Ritsuko ne supportait plus l'enfermement de l'appartement, du foyer ou des familles d'accueil. Ils s'armaient de mal bouffe au possible et se rendaient au bord d'un fleuve pour déguster leur diabète en sachet. Burgers, pizzas, poulet pané et généralement tout ce qui tâchait les doigts et engraissait les vêtements. Ils s'installaient dans l'herbe et la dorure du soleil couchant, les volutes verdies de l'aube, le zénith d'un jour d'hiver ou bien en pleine nuit. Météo, plaies et peines ne venaient jamais traîner dans ces moments hors de la vie et si Maruo pestait d'abord, en la voyant plus lumineuse engloutir des beignets, il finissait par se taire. Puis ivre de sucres rapides elle lui proposait des choses d'adulte ou s'allongeait auprès de lui comme une enfant. Qu'elle vive autour de lui et il était, sans le réaliser encore, touché par la grâce.

Ritsuko déclinait avec les minutes mais il s'y refusait. Leurs sabres étaient oubliés au pied d'un chêne, la musique d'un joueur de rue sérénait pour eux au loin, un carton immense maculé de gras s'ouvrait entre eux sur un mets décadent. Ils ne parvenaient pas à se saisir de l'instant comme ils le faisaient autrefois néanmoins. Aucun d'eux ne fut capable de manger. Maruo manquait de mots pour les circonstances, sentait dans la tension qui parcourait Ritsuko qu'elle attendait quelque chose de lui, mais quoi ? N'étais-ce pas là toute l'histoire de leur lien ? Une expectative angoissée confrontée au plus pur dénuement ? Allait-il échouer une nouvelle fois, dans leur dernière nuit à tous les deux ? Avait-il quelque humanité de plus que ses lames, enfin, quelque part ?

*

Comment t'exprimer que je sais ?
Que je sais pour ton front noyé de sueur.
Que je sais pour cette toux qui creuse ton ventre sous tes côtes.
Pour tes pupilles grande ouvertes sur la lune.
Comment t'exprimer que je sais et ne te dit rien ?

Parce que je ne sais pas ce que l'on souhaite entendre.
Quand vient la mort.
Quand l'aube s'éloigne.
Parce que je ne sais pas ce que tu aurais aimé que je dise ces quinze dernières années.
Parce que j'ignore si ce que tu souhaitais alors tu le désires aujourd'hui.

Comment rassurer ta peur ?
Celle qui te noue la gorge.
Celle qui te voit pantelante.
Comment apaiser ton enfer quand je tremble ?
De te savoir partir.
Là, t'étioler entre mes doigts qui n'osent même pas t'approcher.

J'aurais peur, Ritsuko.
Peur, si je te touchais.
De sentir ta fièvre te consumer.

Ces choses n'ont aucun sens.
Mais leur absurdité ce soir ne me console pas.

*

Il épongea, d'une serviette en papier offerte par le service de livraison, une coulée de sueur qui descendait les tempes de la Mante. Elle accueillit le geste dont la fraîcheur devait la soulager.

Il recouvrit son horreur de simplicité feinte, de désinvolture absente, de ce qu'il avait de couches d'ignorance pour ne pas ajouter à l'enfer qu'elle traversait. Il se contenterait d'être là. Jusqu'à ce qu'elle en décide autrement, ou qu'elle s'éteigne. Il s'accrochait à la simplicité de la mort pour ignorer que le monde s'écroulait sur eux. Il lui tendit de son mauvais alcool pour l'aider à faire passer son mal-être.

"Ca me semble un peu tard pour aller à l'hôpital, observa-t-il en constatant son état. Tu préfères que je reste avec toi ou finir le travail ?" Il entendait par là ce qu'il pensait demeurer être l'objectif pour la Mante, se venger de lui, et était disposé à offrir ce dont elle avait besoin. Du même temps, sa stature indifférente s'était mue d'une tendresse qu'elle ne lui connaissait pas, et qu'il n'avait pas même eue pour Kumi. S'il avait cru aux concepts d'âme soeur, peut-être aurais-ce été Ritsuko. Il aurait aimé croire en revanche à la réincarnation pour se promettre de la retrouver et de faire mieux.

"La mort toujours avec sa trace devant nous
parmi les arches modernes et les voitures.

D'un battement en avance
vers l'horizon.

D'une déchirure de nuage.

Le soir
une douceur se mêle au monde.

Quand le moment sera presque trop tard
et cependant tout plein de notre vie passée

quand nous serons au bord de nous et que la terre sera fruit prêt à se détacher
la mort se tournera vers nous avec le vrai visage d'Eurydice

Elle nous rejoindra.

Nous foulerons ensemble notre patrie totale et blanche."
- Marie-Claire Brancquart


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Dim 11 Déc - 22:28

Ritsuko Takeshi
J'ai 26 ans et je vis à Tokyo, Japon. Dans la vie, je suis Mante assassine et je m'en sors avec brio, constance et tourments. Sinon, grâce à ma hargne, je suis en quête de vengeance et je m'en sors tant bien que mal.

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 Buet

La flétrissure de cette terre
Ne touche pas les fleurs du ciel,
Et la rosée, dans la chaleur,
Ne sèche pas sur elles.

Ce qui fleurit ici ne fane pas toujours,
Et ce qui fut ici ne passe pas toujours.

Mais cette foi est chose rare,
Et la grâce n'en est donnée
Qu'à ceux qui, dans les heures noires,
Ont su, comme vous, souffrir d'aimer.

- F.T.


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Chanson thème 2 (Ritsuko)

Effigie : Mika Schneider

Je revois encore ton ombre m’avaler tout entière. Ta stature surplomber tout le reste, le décor, leurs corps. La scène est irréaliste lorsqu’elle resurgit dans mon esprit. Une part de toi vit en moi depuis. Tu m’as donné une partie de ton âme à travers ces lames, j’en suis certaine. Enfant, j’étais déjà mauvaise. J’avais cette gangrène au cœur, étouffante et grandissante qui ne connaissait pourtant aucun fondement. Ou s’il y en avait un, je n’en ai pas le souvenir. On pourrait blâmer la misère, la tristesse de ma mère, la négligence de mon père faute de n’avoir eu d’elle un garçon pour porter et faire perdurer son nom, les brimades de mes camarades pour ces vêtements délavés et ces souliers usés. Une liste d’excuses qui se valent toutes et qui n’excusera pourtant jamais le tort que j’ai causé. La vérité Maruo, c’est que je devais déjà être comme toi avant même ta venue. Et cela, tu as dû le voir ce jour-là. Je devais être disposée par je ne sais quelles forces, dans l’intention de te révéler ton propre reflet. Un terrible miroir de vérité, révélant au-delà des apparences, ce à quoi tous deux aspirons vraiment.

J’aurai pu suivre un chemin tout autre que celui de la vengeance. Accepter de recommencer de zéro, loin de ce passé macabre la première fois que tu m’as remballé, fracassé le crâne contre ce mur. Le message était assez clair de ta part. Un avertissement venu d’en haut peut-être, me disant que vivre était encore possible, pour peu que j'accepte de faire un trait sur ce qui était arrivé et renoncer à te revenir. Mais si les choses en avaient été ainsi, tu ne m’aurais jamais laissé entrer dans ton monde par la suite. Puis, pour la première fois de ma vie, cette colère, je la sentais légitime. J’aurai pu continuer ainsi encore longtemps, tu sais. À te détester, à t’aimer, à vouloir ta peau, encore et toujours, jusqu’à la fin. Jusqu’à la fin des temps, mais pas au terme de la mienne puisque me voici, au précipice de ma vie et cette vieille amie m’a abandonnée elle aussi. Ce soir je suis vide d’elle, car je sais que là où je vais elle ne me sera plus d’aucune utilité. Car là où je vais, tu n’y seras pas.

Ce que nous étions, tout au fond de moi, je sais que c’était quelque chose de rare. Et pourtant, j’ai voulu l’égarer en chemin. Pourquoi ai-je voulu l’égarer en chemin, Maruo ?



Je brûle.
De la fièvre sûrement, ou de ton contact qui me fuit. Je ne te refoule pas, ta maladresse me touche. Elle me rappelle ce que je pensais avoir oublié de cette humanité qui te fait défaut, ou que j’ai refusé de voir. Ma mère me disait sans cesse que l’on ne peut réduire la vie d’une personne à un seul moment de sa vie. Aussi laid, aussi terrible puisse-t-il être, ce moment ne définit pas qui l’on est. C’est pourquoi elle n’a jamais condamné les actions de mon père, même s’il lui en couta la vie. Pendant longtemps, j’ai voulu te réduire en cet instant sale, cette heure sombre où tu m’as tout arraché. Je ne souhaitais pas te pardonner. Je réalise maintenant que c’était non pas pour te détester sans retenue de ton crime, mais parce que je craignais le pardon signifier la fin de ce « nous ». Pour ce soir, je veux oublier. Je veux croire que je suis née à l’heure où l’on s’est rencontré.


Elle brûle.
Elle retient un petit rire d’outrepasser ses lèvres. Ces lèvres vermeilles du sang qui lui monte à la gorge. Les pensées affluent dans son esprit tandis que le poison lui dévore les tripes, et elle sent venir l’hémorragie, car soudain l’incendie dans ses yeux s’est éteint et elle frémit. Elle accepte cette eau de vie que tu lui tends, bois à gorge déployée espérant amputer le mal ainsi.
— Finir le travail ? J’ai déjà perdu Maruo.
Elle qui pensait ne jamais prononcer ces mots, elle pose sa tête épuisée contre l’écorce du chêne, se laissant succomber au poids et à la fragilité de son être. « Et c’est mieux ainsi, tu le sais. » Car Ritsuko aurait fini par incendier le monde plutôt que de t’en faire disparaître. Ce n'est désormais plus un secret pour quiconque. Et il ne reste plus que vous deux. La trace de son hilarité au coin de ses lèvres se dissipe lorsqu’en glissant sur toi ses yeux, elle croit reconnaître sur ton visage ce qui s’y trouvait sur le sien autrefois, que d’attention et d’affliction insoutenable pour un seul être. Elle était pourtant prête à porter seule ce fardeau à une époque où tu ne la regardais pas de cette manière. Où elle était prête à aimer pour deux sachant que tu n’avais pas le cœur pour le faire.

— Maintenant seulement, Maruo ? C’est un peu tard, non ? » Son sourire se teinte d’une mélancolie lointaine, tandis que le silence s’installe du départ de la musique et de ses mélomanes tardifs. La soirée s’est rafraîchie et en toute quiétude, Ritsuko laisse choir sa tête sur ton épaule. Aux frontières de la fièvre et du sommeil, repoussée dans ses derniers retranchements, elle peine à garder les yeux ouverts. Mais peut-être n’es-tu pas sans savoir qu’en ces derniers instants ensemble, tu es ce qui la retient de partir dans la nuit. Car pour la première fois de sa vie, elle peut tout simplement se rattacher à ce lien sans le remettre en question. Elle veut s’abandonner sans honte à ce que vous pouvez être ensemble dans cette dernière heure de la nuit où la haine est une chose révolue. Alors elle se soulève avec langueur, se hisse jusqu’à toi pour finir par s'asseoir à califourchon sur tes jambes. Le regard défiant, ce qu'elle te demande alors n'est pas de lui faire un enfant, mais de faire de ces instants impossibles et sans avenir, un instantané du peu qu’il vous reste, de cette humanité tronquée. D’obliger la mort à reculer, à se fondre dans les ombres et guetter, car la vie est encore là tant que ce « nous » existe encore quelque part. C’est tout ce qu’il lui reste et elle s’y rattachera jusqu'à l'aube.


« J’ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité.
Est-il encore temps d’atteindre ce corps vivant
et de baiser sur cette bouche la naissance
de la voix qui m’est chère ?
J’ai tant rêvé de toi que mes bras habitués en étreignant ton ombre
à se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas
au contour de ton corps, peut-être.
Et que, devant l’apparence réelle de ce qui me hante
et me gouverne depuis des jours et des années
je deviendrais une ombre sans doute. »

R.D.




Le dernier acte est sanglant


quelque belle que soit la comédie en tout le reste: on jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais.
- B.P.

KoalaVolant
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Jo'
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Jo'
Lun 2 Jan - 10:03
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Maruo Takeda
J'ai 42 ans et je vis à Sado, Île de Sado, Japon. Dans la vie, je suis mercenaire yakuza et je m'en sors aisément. Sinon, grâce à mon charisme, je suis concubin et papa et je le vis plutôt tortueusement.


Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 Captur16

On le connaît parmi tous les criminels et les autoritiés sous ce surnom : la vipère à deux têtes. Deux lames, un coup, et il coche ses victimes en plein torse d'une croix qui signe sa morsure. Une survivante, qui deviendra son élève, qui deviendra sa rivale. Qui toujours dans le vent sifflant, siffle avec lui l'agitation. Et l'angoisse pour l'homme qu'un passé guerrier ne dégouline son sang sur son présent marin.

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 9b9d2189584f9d49c13664157e13a8b5

Verse à leurs pieds le flot de tes larmes sacrées,
Brûle tous tes parfums sur leur mystique autel.
Mais si l'amer venin est entré dans tes veines,
Pâle de volupté pleurée et de langueur,
Tu chercheras en vain un remède à tes peines :
L'angoisse du néant te remplira le coeur.
Ployé sous ton fardeau de honte et de misère,
D'un exécrable mal ne vis pas consumé :
Arrache de ton sein la mortelle vipère,
Ou tais-toi, lâche, et meurs, meurs d'avoir trop aimé !

- Leconte de Lisle


Sanada Hiroyuki :copyright: Jo'
Tu as perdu Ritsuko. C'est vrai. Tu as perdu une guerre que tu étais seule à conduire mais que tu n'avais pas choisie. Tu as affronté mon regard ce soir-là. Tu as affronté les foyers, les familles, les gosses de rue. Tu t'es mise en tête d'affronter la mafia. Les Mantes en les quittant. De m'affronter, moi. Saito, Kobata. Mais le plus gros poisson de tout ce beau monde c'était toi. Personne n'était de taille à te vaincre. Y compris toi-même. Et je serai le dernier debout de cet Armageddon levé en 2006.

C'est ainsi, dans ma nature ou dans celle du hasard : je suis toujours le dernier debout des carnages.
J'aurais aimé qu'il en soit autrement cette fois-ci.

☂

Elle palpitait de toute sa mort, chaque reflet de sa peau comme une frontière d'au-delà qui luisait de brûlures enfiévrées. Hissés sur lui ses cils plissaient sur des bouts d'êtres qui la fuyaient et jamais il n'avait vu quelqu'un s'opposer au départ avec tant de dignité. Il arrivait toujours un moment où, la vie devenant insupportable, même les plus vaniteux se hâtaient d'être happés. Ritsuko agonisait mais campait des fers pour demeurer envers et contre tout. Quelque part, peut-être, elle avait gagné au contraire - elle partait dans la confirmation de cette union ineffable. De leurs vies inextricables. Elle embrassait la frétillante Vérité tandis que Maruo se déchirait à son contact. C'était là toute sa superbe : la Mante avait une âme. Et tous les efforts fournis à l'en séparer s'écrasaient sur sa ferveur. La mort même ne semblait pas la désunir de son corps, là partie dans le feu de la dilection.

Elle s'était toujours montrée lascive hors de propos - infante, adolescente. Devenue femme, elle s'était refusée à lui, et au seuil de sa mort, la voilà étrangement enroulée à ses cuisses. Il l'accueillit sur ses jambes et l'aurait presque anticipé. Elle le surplombait légèrement alors qu'un filet de sang s'échappa du carmin de ses lèvres, pourpre mêlé tour à tour à la passion et la violence. Ils s'étaient rencontrés dans l'effusion, il était normal qu'ils se disent adieu ainsi. Il aurait en lui deux images d'elle : celle du sang sur le pyjama Astro Boy ; celle du sang sur le glabre de son menton.

Le raisiné s'en alla chuter sur son visage à lui, au coin d'une pommette creusée par la lune et les années. Il avait cent ans et elle deux. Elle avait quatre vingt ans et lui quatre. Il savoura la chaleur de son être se répandre sur sa joue - cela, plutôt que des pleurs - puis sa main rencontra son visage à elle, des doigts comme des couleuvres serpentant sur le rebondit de sa joue vidée. Il approcha son visage du sien avec toute la douceur du monde, que pas un froissement ne vienne perturber le silence de plomb de la ville en sommeil, et embrassa ses paupières incandescentes. Cela se passait de mots. Maruo ne savait parler qu'avec son corps de toutes manières.

Il embrassait ces yeux donc puisqu'il n'y avait rien à dire, il scellait les lèvres sur les paupières.

Mon Dieu, qu'est-ce qui ne va pas
nous arriver encore.

Je reste là je reste.
Il pleut sans pleuvoir
comme quand de l'ombre
nous renvoie corps.

Je reste là je reste.
Moi là, en face mon coeur
et plus loin
ma relation fatiguée.
Comme ça, histoire de faire nombre
chaque fois que le vide nous compte.

C'était nouveau et étranger, ces traits qu'il avait pourtant vus mûrir, se mouvoir. Cette âme qui s'était détournée de lui chaque fois pour mieux y revenir, cette âme que longtemps il était seul à comprendre et qui avait fini par l'égarer absolument ; elle s'accrochait mieux à lui qu'à la vie alors il offrit toute la digue dont il était capable. Sa bouche quitta ses yeux que la fièvre ou le sentiment embuaient soudain, il sentit comme physiquement le vent qui l'en secoua : la fébrilité du regard de Ritsuko était une annonce terrible du trépas, plus tangible encore que le sang ou la toux. Il lui vint une panique, ou une impatience peut-être, de profiter de sa vie maintenant qu'elle lui annonçait des iris qu'elle déclinait pour de bon.

Le pouce de Maruo s'arma de feutre pour dessiner le contour de sa bouche, une supplique dans les sourcils.

Chambre vide venteuse.
Je m'accroche bien fort
à ma façon d'être balayé.

Pas de nouvelles de toi.
Ta photo, stationnaire.
Ton regard comme si tu arrivais,
ton sourire, non.
Des fleurs sèches à côté
te répètent sans cesse
leur vrai nom
immortelles
immortelles - pour si jamais tu oubliais
ce que tu n'es pas.

S'il l'embrassait il n'y survivrait pas. Si leurs lèvres se rencontreraient alors la vacuité l'emporterait avec elle. Il confesserait ainsi la victoire la Mante si sa bouche venait rejoindre le sang sur la sienne. Il n'y avait plus rien pour lui en ce monde si elle en disparaissait. L'auteur de son empoisonnement n'était plus et il n'y avait pas même l'énergie de la vengeance pour porter Maruo s'il accouchait de l'aveu ultime de l'aimer comme une femme.

Finalement, c'était conforme. Tout cela composait avec ravissement avec les décisions de Ritsuko. Ils mourraient tous deux. Il n'y aurait plus personne à venger, elle achevait le cycle. Ils mourraient et ce serait la paix sur la Terre, il aimait le croire. Elle avait tout sauf perdu, en y repensant.

Le temps me demande
où je voudrais qu'il passe
et si j'ai pour nom Hélas ou Est las.
Laissez-moi rire.
Aucune fin ne connaît l'orthographe.

Pas de nouvelles de toi.
Ta photo, stationnaire.
Comme quand il pleut sans pleuvoir.

Comme de l'ombre me renvoie au corps.
Comme notre rencontre future
là-haut.
Dans une vacuité bien boisée
à l'ombre d'inespérances
et d'atermoiements toujours verts.
La traduction du violent
silence que nous éprouverons
- forme évoluée de la violente
ivresse causée par une rencontre
ici-bas - nous sera faite par un vide.

Il se condamne. Il l'approche. Tend son visage et tout son être vers la perforation de leurs vies. Ca devait finir ainsi. Comment vivre sans l'énergie de l'autre ? Il restera pour la regarder mourir. Et puis lentement, en retard, il rejoindra le nulle-part où il n'a pas la conviction qu'elle ira. Son corps mutilé d'un effort mû par ses lèvres épouse chaque relief de sa vie sur le départ. Il l'embrasse enfin. Sa main rassure les omoplates frêles qui frissonnent. Depuis quand n'a-t-il pas senti qu'elle comptait sur lui ? Quel orgueil de se réjouir d'être celui qui aura eu l'honneur de voir la fin de sa légende.

Alors nous serons pris
d'une impétueuse inconnaissance
- forme évoluée de l'étreinte
que la rencontre instaure ici-bas.
Oui nous nous retrouverons. Respirant large, à l'insu
de l'attraction. Sous la forte pluie
d'une soudaine apesanteur. Peut-être
lors d'un voyage de l'infini dans le sans fin ;
à la cérémonie de remise des pertes au connu
pour sa grande contribution à l'inconnu.
- Kiki Dimoulà


Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 16532433Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 16532434
"Le plus clair de mon temps, je le passe à l'obscurcir" - Boris Vian
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Sam 7 Jan - 14:18

Ritsuko Takeshi
J'ai 26 ans et je vis à Tokyo, Japon. Dans la vie, je suis Mante assassine et je m'en sors avec brio, constance et tourments. Sinon, grâce à ma hargne, je suis en quête de vengeance et je m'en sors tant bien que mal.

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 Buet

La flétrissure de cette terre
Ne touche pas les fleurs du ciel,
Et la rosée, dans la chaleur,
Ne sèche pas sur elles.

Ce qui fleurit ici ne fane pas toujours,
Et ce qui fut ici ne passe pas toujours.

Mais cette foi est chose rare,
Et la grâce n'en est donnée
Qu'à ceux qui, dans les heures noires,
Ont su, comme vous, souffrir d'aimer.

- F.T.


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Chanson thème 2 (Ritsuko)

Effigie : Mika Schneider

J’ai tant rêvé de toi qu’il n’est plus temps sans doute que je m’éveille.
Je dors debout, le corps exposé à toutes les apparences de la vie
et de l’amour et toi, le seul qui compte aujourd’hui pour moi.

Quand tu seras grande, si tu éprouves encore de la haine pour moi, tu me trouveras - Page 6 35d9b175-2f33-4db3-8475-b540d80ea3b3

D’abord, tes yeux embrassent son corps fragile d’une caresse pleine de réserve. Tu crains la briser s’ils venaient à s’accompagner du geste. Ces passions lui font violence et seront sa perte. Cette vérité existait déjà quelque part dans les annales de votre histoire. Parce que l’on vient au monde muni de rien et repartons de la même façon, il est naturel que la mort arrache les masques. Si Ritsuko vivait cette nuit, sûrement n’aurait-elle pas fait le choix de s’abandonner à cette union. La grâce de ses mains qui somnolent ira bientôt toucher ton âme. Pour l’heure, son corps enfiévré balance par moment de spasmes qu’elle accueille avec extase. Là, recueilli sur tes jambes, tandis que tu clos ses paupières ardentes de l’effluve de tes lèvres.

— Dis mon nom. » qu’elle souffle dans un supplice.

Elle s’accroche à chaque minute sous cette nuit sans fin. Te veut sans faim, te veut à bout de souffle si tu es à bout de mots. La pensée atrophiée par le désir des désespérés, elle embrasse le déclin avec la même ardeur que cette étreinte silencieuse. Presse volontiers son corps au tien. Votre embrassement sera son embrasement, mais le poison n’en découlera pas de ses yeux pour autant. Même la panacée déposée gracieusement sur ses lèvres ne saurait y faire. Quoique l’offrande de ta bouche sur la sienne trouve remède à sa rancœur, peut-être, il reste de la violence en elle et tu n’as pas encore purgé la tienne. Doit-elle donc s’en libérer ou emporter dans la tombe vos tendres afflictions ? Sa tête renverse par en arrière du poids d'une telle décision et s’étire à toi la marque de votre lien macabre sur ses chairs. Pourtant, en cette heure fatale, elle n’est pas celle responsable de ce feu qui la dévore de l’intérieur ni ne sera celle responsable de sa mort.

Elle te revient doucement, comme il est chaque fois question. Ramené par la force de ses bras qui luttent du vertige et s’accrochent à ta nuque. Et là sont ses lèvres qui frôlent à leur tour les tiennes. Mais elle ne les unit pas à elles. À leur seuil, elles se dérobent de l’attraction mortifère d’un ultime baiser de damné. Elle se refuse à te céder son dernier souffle. Non pas par fierté comme elle croit si bien le prétendre, mais par crainte de t'insuffler son amertume. Ritsuko ne souhaite pas t’infliger cette double peine.

— Dis mon nom… » qu’elle murmure de nouveau.

Sa bouche vagabonde sur ce visage sans le toucher tout à fait. Puis elle remonte jusqu’au front où elle dégage de la caresse de ses doigts quelques-unes de tes mèches. C’est là, sur cette autre croix presque oubliée, vestige d’une colère tendre qu’elle s’arrête et qu’elle est prête à y laisser un peu plus de son être en y déposant la chaleur d’un infini baiser. De ce contact, elle t’absout de tout. De sa colère, de sa rancœur, de sa haine, de sa peine. Elle cherche à y croire puisque sous cette nuit où elle n’est née de rien ni personne, mais d’une rencontre, il n’y a ni Dieu, ni mère, ni père. Qu’elle se trouve faible, qu’elle se trouve laide. La Mante n’est plus. Pas même l’ombre d’elle-même. Mais, elle aime.

J’ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé, couché avec ton fantôme
qu’il ne me reste plus peut-être, et pourtant,
qu’à être fantôme parmi les fantômes et plus ombre cent fois
que l’ombre qui se promène et se promènera allègrement
sur le cadran solaire de ta vie.
- R.D.

Il n’y a que dans la nuit qu’une telle paix puisse exister. Car sous son voile elle uni sous une seule ombre celles dont la lumière refusait l’union. Ritsuko est ton ombre et tu es la sienne.

Son âme à vif est écorchée. Paupières mi-closes, calme et ébranlée, elle n’a même plus les larmes pour pleurer. Il y a le sang. Le même qui vous a lié un soir, et qui ici au jour, délie de tout. Il y a cette angoisse de l’absence et du manque qui guette. La peur dissimulée qu’il ne reste d’elle ici-bas que ce qu’elle a arraché aux autres. Que sa vie ne puisse n’avoir signifié qu’un incendie sur de nombreuses autres. La tienne, surtout. Il y a tant, et à la fois si peu à se dire. Soit. Cela se passera d’aveux, cela se passera d’adieux. Tais-toi, Vipère. Prive-toi du chagrin en le cadenassant sous silence, mais n’interdit pas son nom de survivre dans la nuit. Elle a besoin de toi que tu la fasses exister encore une fois avant que le jour ne l’arrache à l’obscurité pour jamais. Avant que l’ombre de vos silhouettes ne soit désuni face à lui. Avant que la tienne, partie danser sur les désillusions de vos vies passées, s’élève avec l’aube rejoindre les fleurs du ciel.




Le dernier acte est sanglant


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