Je m'étais réveillé en pleine nuit en la sentant contre moi. J'étais resté un instant surpris. Je ne savais pas ce que je devais faire. Je ne me sentais pas le coeur de la virer du canapé. J'allais lui faire du mal je le savais. On s'était fait assez de mal comme ça ces derniers jours, je voulais que ça s'arrête. Je voulais juste qu'on passe des bons moments ensemble, qu'on fasse ce pour quoi je lui avais proposé de vivre avec moi. Alors je l'avais serré dans mes bras, la gardant contre moi toute la nuit. J'avais respiré l'odeur de ses cheveux, cette douce odeur de femme que je n'avais pas respiré depuis longtemps. J'avais fini par sombrer dans le sommeil, retombant dans des souvenirs d'un autre temps, dans l'odeur d'une autre femme...

Je m'étais levé tôt le lendemain. J'avais quitté le canapé discrètement, la laissant dormir pour aller préparer le petit déjeuner, ou plutôt tenter de le faire. Elle avait fini par se lever. Nous avions un peu discuté, parlé de nos projets de vacances surtout. On ne prendrait que le nécessaire pour la Bolivie. On pourrait toujours faire une halte de quelques heures à New York pour changer nos bagages avant de nous envoler à nouveau vers notre prochaine destination. Quelques heures ce serait suffisant. Ca nous ferait du bien de ne pas passer de nouvelles nuits ou plusieurs jours là bas.

On rentra dans ma maison et une petite routine s'installa. On avait passé nos journées ensemble. On avait monté les meubles pour sa chambre et sa salle de bain. On avait d'ailleurs échangé pas mal de fou rires à tenter de comprendre comment le plan marchait. On avait tenté de faire de nouveaux essais cuisine. Là encore on avait ri devant mes tentatives catastrophiques de faire fonctionner la cuisine. Heureusement qu'uber eats était là. On avait passé des soirées dans le canapé, assis l'un contre l'autre à manger du pop corn devant des films.

C'était quelques jours que j'avais beaucoup apprécié. On avait passé de bons moments ensemble, sans se prendre la tête, en profitant juste de l'instant. C'était agréable mais je voulais plus. Je voulais qu'on vive des moments inoubliables ensemble. Je voulais voir son regard pétiller de joie. La voir s'émerveiller devant ce qu'on allait découvrir. Et ça aurait très bientôt lieu..

Le fameux matin arriva. Je m'étais levé de bonne heure, après une autre nuit difficile. J'avais résisté à l'envie d'aller courir, la journée allait être longue et je n'avais pas besoin d'aller m'épuiser comme ça avant de partir. J'avais juste profité du fait qu'elle dormait encore pour aller chercher le petit déjeuner dans une boulangerie française pas loin. J'avais étalé tous mes achats sur la table de la cuisine, là où on mangeait préférant laisser de côté l'immense table de la salle à manger. Je l'attendais, en tenue détente pour être confortable pendant le vol. Je l'accueillis à son arrivée avec un immense sourire, le sourire spécial Carrie qui reflétait mon plaisir de la voir à chaque fois.

- Salut toi, bien dormi? Prête pour l'aventure?

Je souriais comme un gosse. J'avais hâte de partir, de pouvoir fuir cette maison et cette ville. Je n'avais jamais vraiment pris de vacances pour moi, pour juste profiter et me faire plaisir. Il y avait toujours un but dans mes voyages, même si j'en profitais pour visiter, ce n'était jamais que pour le plaisir.

- Non c'est bon tu n'es pas en retard. On a le temps.

Je lui souris pour la rassurer. C'était moi qui était beaucoup trop matinal, comme toujours. Nous avions quelques heures devant nous encore avant que notre vol ne décolle. Je perdis bien vite mon sourire alors qu'elle venait me faire un rapide calin. Nous nous étions légèrement rapproché au cours des derniers jours. Elle venait se coller à moi quand nous regardions un film ensemble, on se taquinait gentiment de temps en temps. Mais les calins ça restait encore étrange pour moi. Ca créé une intimité que je n'avais plus connu depuis longtemps, une intimité dont les souvenirs me faisaient souffrir.

Je la rejoignis à table, me forçant à manger un peu. Je souriais à nouveau en l'entendant me bombarder de questions sur notre voyage. Son excitation était communicative. Elle chassait mes sombres pensées et je retrouvais à nouveau le plaisir que j'avais moi aussi à fuir la ville. J'allais pouvoir partir dans un endroit neutre, un endroit que je n'avais jamais visité. Il serait vierge de tout souvenir difficile. Nous pourrions nous évader, oublier tout ce qui nous avait conduit tous les deux sur ce pont ce soir là.

Je prenais le temps de lui expliquer notre périple entre deux croissants. Nous allions passer une journée épuisante. Il n'y avait pas de vol direct pour se rendre en Bolivie. Nous allions devoir faire escale d'abord au Mexique avant de prendre un autre avion pour nous rendre là bas. Il serait tard quand nous arriverions après avoir passé la journée dans les airs, mais ça en valait la peine.

On termina d'avaler notre petit déjeuner avant de vérifier une dernière fois que nous n'avions rien oublié. Après une dernière vérification je me tournais vers elle. Elle commençait à réaliser, je ne lui avais pas menti. Nous allions vraiment le voir. Et la voir aussi touchée me fit du bien. C'était pour ça aussi que je lui avais proposé ce pari fou, pour apporter un peu de bonheur à quelqu'un d'autre. Si il ne suffisait que d'un peu d'argent pour la faire souffrir, alors je dépenserais sans hésiter toute ma fortune pour la rendre heureuse.

- Oui on y va vraiment. Ce soir on dormira en Bolivie.

Je rejoignis notre chauffeur à l'extérieur, le laissant s'occuper des valises pendant que nous nous installions à l'arrière de la voiture.

Prendre l'avion avait beaucoup trop un goût de déjà vu pour moi. Je l'avais pris un nombre incalculable de fois. Mais je sentais bien que c'était tout nouveau pour Carrie. La guider me permettait au moins de ne plus penser à tout ça. Je prenais le temps de lui expliquer les démarches que nous devions faire. L'enregistrement des bagages d'abord avant qu'on ne les laisse se faire emporter vers la soute. Nous étions plus légers en allant passer les contrôles de sécurité. Je la guidais à nouveau avant que nous n'allions nous perdre dans les commerces. Nous passâmes tellement de temps à faire les cons dans les rayons que nous ne pûmes même pas profiter du salon des premières.

Nous finîmes par embarquer, rejoignant la première classe. Je lui laissais le côté hublot, qu'elle puisse profiter de la vue pendant que je m'installais à côté d'elle. J'allais prendre sa main, la serrant doucement tout en lui souriant.

- Ca va? Pas trop stressée?

Je savais que la première fois, le premier décollage pouvait être effrayant. Mais je savais aussi qu'elle serait tellement heureuse en arrivant là bas.