J'ai 27 ans et je vis pour l'instant à côté deBâton Rouge , en Louisiane, aux USA. Dans la vie, j'ai étudié l’ethnologie sociale, puis contre toute attente j'ai quitté les miens et mon avenir tracé pour me transporter jusqu'à San Diego, en Californie. Là, après une période difficile où j'ai tenté de vivre en vendant mes dessins, portraits et caricatures (et ai fini par offrir mon corps), j'ai intégré l'équipe du Lorenzo's, une pizzeria minuscule tenue par Larry, un phénomène de 82 ans paternel et volubile. Je suis devenu livreur de pizzas en rollers et je m'en sortais pas trop mal. Sinon, grâce à ma chance, je suis désormais fiancé et je le vis bien. A ajouter ? Je suis l'aîné de quatre enfants, né dans le Nevada dans une petite ville du nom de Sweet Home, la mal nommée. Mon père était -et est sans doute toujours- chirurgien, chef du secteur orthopédie de l'hôpital local, et ma mère femme au foyer. Nous avons été élevés d'une main de fer dans la plus stricte observance des commandements de Dieu ! Jusqu'au jour où j'ai avoué que je suis... homosexuel.
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Mon père n'aurait pas dû être choqué, puisque toute mon enfance il m'a rendu visite, chaque nuit ou presque ? C'est une calamité qu'il doit connaître aussi puisque c'est le plus âgé de ses fils et non une de ses filles qu'il avait élu comme « préféré » ? Ce secret là, je le cache, je n'ai jamais rien dit, ni à mes frères et sœurs, ni à ma mère qui n'a semble-t-il rien vu, ni à Dan, surtout pas !
- Avec moi, parce que tu m'aimes trop ? Je suis déjà parfait, pas besoin de m'accessoiriser ?
Dieu que je l'aime ! Si j'avais le sens de l'humour, mais je crains de l'avoir perdu en trouvant l'amour, je rirais aux éclats et lui répondrais « Prétentieux va ! Mais ce n'est pas faux... ». Au lieu de cela, je rougis à nouveau comme une midinette, me conspuant intérieurement de cette sensiblerie manifeste et nouvelle ? Cela dit ? Étais-je différent quand je n'étais que « le fils préféré » de mon père ? Je pense que dans ma position, le petit Markus aurait crié, hurlé, bataillé, porté ces affronts à la connaissance de tous, fait de cette « préférence » une honte indicible ? Comme il a abondamment -d'après ma sœur Belle- explicité et commenté son départ et l'odieuse attitude de mon père envers son Emma ? J'idéalise peut-être mon petit frère, si lui avait été le « fils préféré » il se serait peut-être contenté de souffrir et de protéger les autres, comme je l'ai fait... Ce faisant, il n'aurait peut-être jamais séduit Emma, ne l'aurait pas engrossée, ne serait pas père ? Des conjectures que tout cela, refaire le passé ne sert même pas à apaiser les âmes, celles qui ont pris des coups restent marquées, au mieux peuvent-elles cicatriser, même obtenir avec le temps une cicatrice qui ne se voit plus... mais ne pas voir ne signifie pas ne pas savoir, ne pas sentir.
Sheridan est parfait et je l'aime trop ! Là, il a tout juste. Mais ce n'est pas pour cela que je refuse d'utiliser ce qu'il m'a offert, je vois dans ces objets non comme il le dit un moyen de multiplier le plaisir, de jouer, mais un avilissement ; pour celui qui domine comme pour l'autre. Comment lui faire comprendre sans le blesser ? Et pourquoi me préoccuper de ne pas le blesser LUI alors que MOI le suis, simplement par les souvenirs que ces jouets véhiculent ? Je lui ai dit lors de notre rencontre que je m'étais prostitué, c'est un mot, et dans un mot tous ne mettent pas le même sens, le même ressenti, la même douleur...
Pour moi, avec l'éducation que j'ai reçue, dans l'environnement où j'ai grandi, le prostitué -ou la- restent des parias, d'abjectes créatures livrées au démon qui les poussent à forniquer avec n'importe quelle âme aussi déchue que la leur... Je n'ai jamais pu m'en défaire, et cela m'a d'autant plus perturbé que j'aime le sexe, j'en ai besoin pour vivre et certains clients étaient presque devenus des amis... Comment lui expliquer que j'aime quelque chose qu'on m'a présenté comme une abomination ? Une preuve tangible de l'emprise de Satan sur ton imparfaite personne ? D'autant que je n'ai jamais rien regretté ! Ni les parties de jambes en l'air tarifées ni les autres, je suis un être physique et avide de sensualité, peut-être un de ces incubes que mon père -lui-même ignoble par son comportement mais porteur de la vérité suprême en tant que pater familias- décrivait comme de monstrueuses exaltations de la luxure interdite par Notre Seigneur ?
Je pourrais pousser la réflexion en me demandant pourquoi une divinité qui me semble-t-il quelque part dans la bible dit « Croissez et multipliez-vous » escompte interdire les relations sexuelles ? S'il a doté l'espèce humaine de genre, et assorti l'acte prohibé de plaisir, n'est-il pas illogique qu'il le pare aussi du péché ? En tout cas, je suis resté trop longtemps exposé à ces niaiseries pour m'être libéré de leur néfaste emprise... Forniquer hors mariage est péché, forniquer dans le mariage dans un autre but que la reproduction est péché, alors que dire de vendre son corps, ou de pousser les autres à une jouissance qui devrait ne pas être, puisque le péché ne devrait pas procurer de satisfaction ? À moins d'être déjà damné dés la naissance ?
Bon dieu ! Aimer un homme et se torturer à refuser l'ultime accomplissement de l'amour parce qu'on a été trempé dans une amertume et un désespoir causés par un supposé péché universel !
Je me secoue, rejetant ces pensées débiles ! Je n'ai pas quitté les miens à la fin de mes études pour retomber dans les stupidités dont ils entravaient leurs vies ?
- Ce sont de bonnes raisons... Je remonte à l'assaut, mais je suis déterminé à ce qu'il comprenne... - Dan... Pour moi ces trucs salissent ceux qui y touchent ? Est-ce que tu peux comprendre ? Je sais que c'est idiot mais c'est plus fort que moi.
Lui ne semble marqué par rien, à ce que j'ai compris, sa mère aimait l'amour autant que moi et n'a jamais fait de la fidélité une nécessité ? J'aurais souhaité grandir dans ce genre de milieu ! La liberté, la pureté de l'amour dénué de toute autre notion, mon père à moi aurait vu sa mère comme la grande catin à abattre ! La prostituée des écritures, une Lillith mère de tous les hommes de mauvaise fame... Je serais donc l'amant d'un demi-démon ? Cette idée me plaît, elle confère à Dan une unicité qui m'émoustille...
Bref, je me laisse aller à des conneries dont je devrais avoir honte ! Je me laisse bercer, par son corps et sa voix...
- ...Bien sûr on peut se passer de tout, mais je serais d'avis qu'on ne se prive pas non plus. Comme la musique, tiens... Notre ami s'en occupe.Il ne faut pas que tu sois jaloux de lui. Ni de Camille, ni de personne. Tu vois ce corps sous tes doigts ? C'est ton royaume. Tu en es le prince.
Je n'en suis pas le prince, j'en suis l'humble servant, je rejette la tête en arrière savourant en effet l'étrange musique qui donne à nos ébats une connotation sauvage et rythmée... Je me fiche de Camille en ce moment, je me fiche de tous et toutes, je veux sentir en moi tout son être, fusionner avec lui, comme cette Lillith effacée de la Bible qui aurait été accrochée par le dos à Adam avant de recevoir une vie propre... Je me veux Sheridan et je veux que Sheridan soit moi ! Puis...
- Qu'est-ce que c'est ?
Stoppé dans mon élan je reste pantois, mes délires mystico-érotiques s'évaporent dans l'air... Le hurlement est suivi d'autres, qu'est-ce qu'ils fichent là-bas ? Il n'est pas en train de la découper ? Ou l'inverse ? Ont-il été attaqués en position vulnérable comme nous pourrions l'être ? Je prends le bras de Dan, le serre d'une main anxieuse, avons-nous eu tort de nous exposer ainsi ? Quelque chose, ou quelqu'un rode-t-il dans le parc ?
- Oh mon Dieu !
Ce ne sont pas les termes que je m'attendais à entendre dans sa bouche ? Mais Dieu à mon avis se contrefout de nous, Camille et la fille sont aussi des pécheurs ? Encore que... Sont-ce les hommes ou Dieu qui ont introduit cette ridicule notion de péché ? J'en reviens là, très confusément, une vague pensée chassée par d'autres...
J'enfile en hâte mon pantalon, mes chaussures je ne sais pourquoi...
- On va voir !
J'entends sans le comprendre ses paroles, tout entier porté au secours du couple là-bas qui semble en difficulté, peu m'importe qu'il s'agisse de Cam et que je sois -effectivement- jaloux de l'attention qu'il génère chez mon amant...
- J'ai déjà tué pour toi, s'il le faut, je recommencerai.
Ma mémoire imprime, ma raison ne décrypte pas. J'ai déjà fait trois pas et me retourne, me suit-il ? Que pourrions nous prendre s'ils sont en danger pour chasser l'agresseur -ou les- ? Je n'ai jamais été très doué avec les armes, je dois être un des rares américains à n'avoir dans aucun tiroir le pistolet qui me sauverai d'un cambrioleur ou accroché au mur le fusil destiné à repousser une hypothétique attaque de voyous...
Mais Dan est fort et intelligent ! Et moi pas vraiment sans ressources malgré mon physique trompeur.
- Qu'est-ce que c'est ? Tu penses ? Pourquoi les attaquer eux et pas nous ? Ils sont dans la vieille maison, Cam' a menti en disant se coucher tôt, j'ai vu la fille...
Pour moi cela sous-entend qu'ils auraient dû être épargnés ? protégés par les murs ?
A moins que ça ne soit justement dans ces murs qu'on les attendait ?
Univers fétiche : Pas de préférence, avatars réels par contre
Préférence de jeu : Homme
Oskar
Mer 17 Avr - 16:27
Camille Grant
J'ai 22 ans et aprés un déracinement volontaire de deux ans, je suis revenu dans la demeure familiale à côté de Bâton Rouge , en Louisiane, aux USA. Dans la vie, depuis ma plus tendre enfance, je vis entouré d'artistes. Ma mère était danseuse classique et a interrompu sa carrière à ma naissance, ma grand-mère était une célèbre tragédienne de théâtre et mon « grand-père » son second époux, de quinze ans son cadet a connu un succès fulgurant au cinéma en tant que jeune premier. Seul mon père, trader et fils d'un riche banquier dénotait dans ce milieu, ça n'a pas eu d'importance bien longtemps puisque après leur divorce mes parents sont partis, chacun de leur côté, laissant à qui en voudrait l'enfant pourtant chéri et comblé pendant ses deux premières années d'existence...
A mon tour je suis monté sur les planches, après avoir étudié la danse, le cinéma, les effets spéciaux. Actuellement, je suis danseur peint dans un cabaret luxueux de Californie. Enfin... j'étais, je me suis mis en congés, d'une durée indéterminée, s'ils me virent je suis suffisamment à l'aise financièrement pour voir venir et attendre. Je m'en sors pas trop mal. Sinon, grâce à ma très grande chance, je suis célibataire et je le vis à merveille, espérant le rester jusqu'à la fin de ma vie !
FC : Nils Verberne - à découvrir sur @Lithunium.snow
A ajouter :
Je suis fils unique, enfin je dois avoir des demi-frères et sœurs, que je n'ai jamais vu et dont je ne connais pas plus le nom que le visage... Subjugués l'un par l'autre mes parents se sont mariés en quelques mois, puis ont découvert que non seulement ils n'avaient rien en commun mais qu'ils étaient incapables d'intégrer la personnalité et l'éducation de l'autre. Amants, déçus, méprisants, haineux... Leur divorce leur a fait tout rejeter des deux années passées ensemble, tout, jusqu'à l'enfant né de l'union. Sans Lianne Auffray et Humphrey Grant mes grands-parents, j'aurais été proposé à l'adoption. Humphrey a péri dans un accident l'année de mes treize ans. Lianne l'a suivi sept ans après, terrassée par ce qu'on appelle « une longue maladie » qu'elle a combattu avec fureur et courage. Leur disparition m'a fait fuir la Louisiane, cette terre où ma famille -celle de Lianne- avait accosté dans les premières années de l'émigration française. L'histoire ne m'intéresse pas, moi, petit blanc abandonné élevé par des gouvernantes souvent noires, j'ai baigné dans une atmosphère surréaliste, solitude, mystère, légende, religion... et cette grande maison, ces maisons, la vieille, demeure de maîtres à l'époque de l'esclavage, celle dite « du gardien » grande bâtisse qui servaient de logement non seulement au gardien mais aux domestiques blancs, et la dernière, celle que Lianne a fait construire à l'aube des 70's, lorsqu'elle a connu ses premiers succès. Particularité ? La maison de mon enfance jouxte une plantation « hantée » par une quinzaine de fantômes que j'ai en vain cherché dés mes six ans...
J'ai 25 ans. Je suis revenue à Bâton Rouge , en Louisiane, aux USA après avoir fait des études sur la Côte Est. Dans la vie, je tiens un magasin de souvenirs, tout particulièrement d'articles "vaudou" plus ou moins réalistes. Accessoirement, je suis aussi... la Mambo Mary, prêtresse qui officie pour les fidèles de la région.
Financièrement je m'en sors pas trop mal surtout depuis que j'ai revu Camille Grant. Sinon, grâce à ma très grande chance, je suis célibataire et je le vis à merveille, dans ma famille, aucune femme n'a l'idée saugrenue de se marier, elles restent indépendantes !
FC : Sira Kanté
A ajouter :
Pour expliquer les « Desoffrey » je dois faire un bref cours d'histoire... ça commence dans les années 1860 à Bâton-rouge et La Nouvelle-Orléans. Une jeune demoiselle fille d'un planteur, fille unique nantie de deux frères plus âgés, s'éprend d'un bellâtre blond aux yeux bleus, bonne présentation, bagou et assurance : Thomas Auffray un « Français ». Le fruit de leurs errances se présentant de façon un peu trop visible, Mary Warrington est mariée de toute urgence au père de son enfant, ils en auront un second au grand dam des parents de la dame... Thomas est un gigolo presque un aigrefin, il vit aux basques de sa femme et de sa belle-famille, joue toute la nuit, trompe son épouse. Tant et si bien qu'il perd en une soirée mémorable tout son avoir, y compris la dot de Mary et presque Anthelme son valet... Presque ? Parce que s'il se fiche totalement de sa femme, il ne veut pas perdre mon aïeul qui sera d'ailleurs affranchi comme tous en 1865. Le mari indélicat et ruiné est mis de côté, Mary retourne auprès des siens et meurt en couches peu après, l'histoire ne dira pas si le nouveau-né coupable d'avoir tué sa mère est vraiment un « Auffray », en tout cas il en porte le nom. Les trois garçons sont élevés par leurs grands parents, l'histoire des Auffray s'arrête là.
Celle d'Anthelme commence juste, en décembre 1865 l'abolition de l'esclavage lui donne une identité, quel nom de famille coller à son prénom ? Il est l'Anthelme « des Auffray », de là vient notre patronyme. Une fois libre, le valet de Thomas reste valet de Thomas, et complice aussi ce qu'il a toujours été. Simplement, il se marie, et l'aventure commence. Il a deux filles, Judith et Mary Desoffrey... Elles seront les premières d'une longue lignée... de reines. Entre temps, en 1875 Thomas désavoué par sa belle-famille, retourne sur ses terres d'origine à NOLA, il y entraîne mon ancêtre et les siens, là-bas, Marie Laveau œuvre, reine incontestée et le vaudou est en plein renouveau.
Cela pour la parenthèse historique, à la mort de Thomas -revenu je ne sais quand ni pourquoi à Bâton-rouge en entraînant son domestique- les Auffray comme les Desoffrey n'en bougent plus. Les uns et les autres sont noyés dans le culte, maîtres et valets unis par la magie et la foi.
Moi ? Je suis donc la fille de Myrtle, seconde fille de Camélia. Je suis née en 1998 des amours de ma mère alors trentenaire et d'un connard nommé Clint Harper... Un peu le même style que le Thomas Auffray des origines, en black, et en fauché. Lui n'épousait pas d'héritière, il se contentait de semer des Harper qu'il ne reconnaissait jamais et de vivre aux crochets des mères -célibataires sans vraiment l'être-. Ça n'a pas dérangé la mienne, il était plus âgé qu'elle mais beau gosse, s'y entendait en amour -en sexe soyons franche- et ne l'emmerdait pas ni par sa présence ni par sa jalousie.
Mon enfance a été particulièrement heureuse, jusqu'à la mort de mon jeune frère abattu presque à bout portant alors qu'il marquait avec quelques jeunes du quartier sa désapprobation pour le meurtre dans le Missouri de Mickael Brown, un afro américain de dix-huit ans. Là, j'avoue que mon monde a basculé... J'ai demandé aux loas la force de conquérir ce monde, LEUR monde ! Un monde où la couleur de peau te met d'office dans le mauvais camp, où tu n'es quoi que tu fasses qu'un citoyen de seconde zone ? Ma mère est parvenue à canaliser ma haine, c'était pourtant le fruit de ses entrailles qui était enterré...
De bonne élève je suis devenue excellente, j'ai œuvré pour obtenir des bourses d'études, pour intégrer une école réputée, continuer mes études quoi qu'il en coûte ! Pourquoi l'histoire de l'art ? Pourquoi l'histoire tout court d'ailleurs, parce qu'elles renferment le sens de ma vie ? Si en son temps une prêtresse vaudou n'avait pas été arrachée à son sol, amenant avec elle sa foi et son pouvoir sur ces terres, je ne serais pas celle que je suis, issue d'une longue lignée de houngans et mambos...
Je suis donc diplômée, doublement, d'histoire des arts et d'histoire des religions. Le genre de diplôme plutôt confidentiel qui auraient dû m'ouvrir les portes de musées ou me permettre de rejoindre des équipes de chercheurs en éthologie ou ethnologie ? J'ai choisi autre chose, j'ai repris une petite boutique à Bâton-rouge pas loin de cette plantation Myrtle qui fait couler tant d'encre, prétendument hantée. J'y vendais des souvenirs de Louisiane, commerce florissant ne vous y trompez pas ! Et … des filtres, envoûtements, maléfices... Cela, pour l'arrière boutique.
C'est la que j'ai eu la surprise récemment de voir entrer Camille, le Auffray de cette époque dont la grand-mère Lianne a eu l'agréable surprise de se voir remettre -en tant que dernière héritière de la famille- la fortune Warrington. Je le connais depuis sa naissance quelques années après la mienne, j'ai joué avec lui, il était l'ami de mon frère autant que le mien...
Pour l'instant j'officie principalement pour lui, mais il y a ici une population de croyants aux oreilles desquels mon retour a été propagé par des bouches amies. Dans mon arrière-boutique, des fétiches, des fioles, tout un assortiment de poupées... Cela, c'est le folklore, la puissance est ailleurs, résumer mon savoir et mon talent à ces objets serait dire que le vent souffle parce qu'on a mis à sa disposition des manches-à-air ? Je suis habitée... Quand je danse, je sens graduellement les loas se mettre à ma portée, les ancêtres appelés ouvrent la porte aux guédés... Accessoirement, je sers les loas « des deux mains » comme on dit chez moi, magie blanche et sombres sorts... Si c'est vraiment nécessaire...
La plupart des gens voient tout cela comme une survivance de croyances superstitieuses, un dangereux amusement -qui sait, si c'était vrai !- moi, je crois, je sais.
Cela dit, pour mes nouveaux voisins, je suis Diane Desoffrey, les femmes trouvent parfois que mon physique leur porte préjudice alors je fais en mesure de paraître quelconque, les hommes... pour beaucoup lorgnent sur ma silhouette oublieux de tout ce qui fait ma personnalité, instruction, profession, intelligence même ? Je hais ces mâles qui restreignent la femme à son rôle de femelle !
Pour d'autres, ceux qui comptent pour moi en fait, je suis la Mambo Mary.
Mes mains continuent de battre la mesure... La mesure de quoi ? Je sens comme des milliers de mouches qui piqueraient mon corps pour y pondre ! Un corps -assurément peu vivant ?- sinon qu'y feraient ces insectes ?! Je sens... des serpents nager dans mes veines et mes artères, répandant leur poison en mordants les cellules sanguines... Je sens, quelque chose d'immonde et insidieux, roder autour de ma cervelle mise à nuit par ma boîte crânienne ouverte comme un œuf à la coque ! La douleur, la peur, que dis-je ? La terreur de me voir de dessus, dans un trou et une boîte ! Un enterrement d'homme seul, pas même mes chats, puis... mes yeux fermés se rouvrent pour voir cinq fourrures emmêlées et sanglantes, et je hurle plus encore !
Qu'avons-nous fait ? Je n'ai pourtant rien pris ? Elle ne m'a pas donné de filtre ou d'herbes à avaler ? Pas même dessiné sur le corps avec une peinture additionnée de je ne sais quelle substance ? Comment puis-je en être là ? Comme un bateau sur un fleuve qui déborde, sans amarres, sans gouvernail, offert aux flots, qui dérive et prend des coups, sans direction logique sinon suivre le cours de la rivière, celui d'aujour'hui, peut-être qu'à la décrue il se trouvera en plein champs, dans le marais, ou posé je ne sais où au milieu d'une ville ?
Je m'accroche à l'âme de la prêtresse que je sens proche, elle me suit, tente de me rattraper ! Je crie encore, éperdu, ma tombe se creuse, le cercueil tombe, des griffes avides essaient de me saisir ! Je vois les visages ou du moins ce qu'il en reste ! Cette Pamela que j'ai refusé d'épouser malgré ses filets tendus avec l'aide de sa mère ! Elle avait la fortune Grant -ou plutôt Auffray- dans le viseur... Ce type qui m'a martyrisé une partie de mon école primaire avant que je ne fabrique de lui une effigie que nous torturions, Mary, son petit frère et moi... Pourquoi ?! Je n'ai jamais fait de mal à personne d'innocent ! Tous les gens auxquels j'ai causé du tort -volontairement ou pas- avaient -parfois beaucoup- des choses à se reprocher ? Ils se trouvent à me harceler et à tirer mes restes vers le bas... vers l'enfer ?
Mais ne comprennent-ils pas qu'il est sur terre !
A nouveau je hurle !
Je n'ai pas mérité ça ! Cela dit je suis certain que tous les damnés arrivent devant Saint-Pierre en le jurant et prennent l'ascenseur vers le royaume de feu en le clamant ! Mais non ! J'en suis sûr ! Je ne suis pas mauvais ! Et puis, je dois vivre ! Je n'ai pas fini mon parcours ! Ce n'est pas pour moi, les gens ont tellement besoin de merveilleux ! C'est ce que je leur offre du merveilleux ? Mes mises en scène, mes sketchs, mes tableaux vivants, mes décors, mes maquillages ?!
J'offre du rêve et on me donne le cauchemar ?
« Mary ! Empêche-les ! Arrête-les ! Ils vont m'emporter ! Ils vont m'emporter ! Mary ! Ils m'arrachent la peau ! Ils veulent me dépecer ! Maryyyyyy ! »
Je me sens secoué, son âme l'est aussi...
Camille ! Camille reviens ! Tiens bon ! Camille!
Je n'entends plus rien, je me tords pour me soustraire aux milliers de doigts à griffes qui me labourent la couenne ! Pas comme ça ! Pas comme ça !
Envoûté ! Possédé ! Il me l'a dit pourtant ! Il décrivait une absence totale d'entrain, d'appétit, de joie ! Des cauchemars, des idées noires, une voix qui ne cessait de l'enjoindre à cesser de lutter et qui l'entraînait à la suivre, là-bas dans l'autre monde ! Quelle folle je suis ! Je ne l'ai pas suffisamment pris au sérieux ! Je le vois se contorsionner, hurler, appeler mon nom et celui de Lianne !
Lianne ? Pourquoi Lianne ?
Elle a été son soutien toute son enfance et une partie de son adolescence mais Lianne réprouvait son attachement à la Religion ? Elle n'a jamais cru en rien si ce n'est en l'acharnement, elle en a usé je le reconnais et a surmonté de durs moments, elle a perdu sa fille partie avec un moins que rien et qui lui vouait une rancune sans limite d'avoir autorisé son premier mariage, comme si les mères d'aujourd'hui pouvaient empêcher une jeune femme d'épouser qui elle voulait ! Elle a perdu un premier mari dont je ne sais rien, Camille non plus, un second l'acteur Humphrey Grant de quinze ans plus jeune qu'elle, puis la santé et a mené un combat dantesque contre la maladie !
Oui, Lianne était une femme forte, si elle avait « cru » elle aurait pu être une puissante mambo, c'était un caractère dur et strict, sûr de ses convictions que n'arrêtaient ni la morale, ni la bienséance, ni rien d'humain ! Elle se fixait un objectif et l'atteignait ! Qui qu'il lui en coûte, et quoi qu'il en coûte à son entourage.
Le Camille que j'ai connu enfant était comme elle ? Quand et comment est-il devenu ce jeune homme pusillanime qui sombre là, sous mes yeux !
- Camille ! Camille écoute-moi, suis ma voix, ne te laisse pas distraire ! Tiens bon ! Camille, guide ton âme jusqu'à mes mots ! Écoute le tambour, écoute le loa ! Écoute le son de mes mots, de mes pas ! Ne laisse rien ni personne te déstabiliser, regarde-les, mets des noms sur leurs visages, nous saurons qui combattre !!
Je continue à danser, mais mes mains tout en mimant les gestes rituels sortent du grand sac fourre-tout que j'ai apporté avec moi des flacons, des senteurs, des pommades... Il me faut le ramener, je n'ai pas pris l'exacte mesure de sa souffrance, de sa faiblesse, de l'emprise de celui ou celle qui l'appelle et le mine !
- Camille ...
Je m'arrête net, la porte s'est ouverte avec fracas, deux énergumènes affolés sont là, bouche bée et les bras ballants ! Du moins c'est l'impression que j'ai !
- Qu'est-ce que vous fichez là ! Vous allez tout foutre en l'air ! Vous ne voyez pas qu'il est maléficié !
Prestement je m'approche de mon ami et lui fait respirer le contenu d'une petite bouteille, le diable en lui doit y être sensible ! Je me suis trompée d'approche, ce n'est pas un botono puissant qui l'a maudit, j'ai invoqué son loa, offert le sacrifice, je ne me demande pas un instant ce que les deux arrivants pensent de la pièce ? Les symboles tracés au sol sur le carrelage dont j'ai retiré le tapis roulé dans un coin, l'oiseau qui se vide de son sang épinglé au papier peint défraîchi... Je ne pense qu'à Camille...
Qui peut vouloir tant de mal à un homme, sinon un guédé en colère ? Il n'a cessé d'appeler Lianne et me suppliait de le sauver... Elle est morte depuis plus d'un an, tous ont cru qu'il ne se remettait pas de cette mort parce qu'il l'aimait avec passion... Une sorte de dépression...
Il est là, pantelant, ses mains ont quitté le tambour, il est au bord du coma !
- Camille ? Poukisa Lianne ta ka fache sou ou? (*)
Je me tourne vers les deux autres et aboie presque :
- Puisque vous êtes là ! Soutenez-le ! Bondye dwe ede l! Je traduis aussitôt - Il faut que le Bondie l'aide ! Pour cela je dois le ramener dans le monde de la vie...
Il est temps pour Papa Legba de lui ouvrir les portes... C'est un loa capricieux, Camille se voyait passant celle du succès, il semble qu'il ne lui ait pas ouvert la bonne ! Mais j'ai confiance dans le blond, quoi que Lianne lui veuille, quelle que soit la raison de sa colère, elle ne pourra pas vaincre à la vois un loa puissant et la volonté de son petit-fils !
Pour la première fois je me demande à quoi je ressemble pour ses deux amis incroyants... Ma peau n'est pas plus sombre que celle de Dan dont il m'a parlé plusieurs fois, Siggy lui doit me trouver d'un noir d'encre mais il paraît qu'il s'en fiche ? Avec un fichu sur la tête, une longue robe blanche rituelle, des peintures sur le visage et les bras nus, des colliers, bracelets, gris-gris...
Guédé : ancêtre Botono : sorcier noir Bondie : Bon Dieu, Papa Legba : Intermédiaire entre les dieux et l’humanité. Il parle toutes les langues humaines. Il est toujours le premier dieu à être invoqué dans les cérémonies vaudou. C’est à travers Legba que les loas vont et viennent du royaume des dieux vers le monde des mortels pour posséder des adorateurs. Il protège la porte et toutes les routes qui mènent du monde des dieux à celui des Hommes. Il détient la clé de cet accès. Par extension, il est considéré comme le dieu de toutes les portes et de tous les carrefours.
Univers fétiche : euuuh aventure, fantastique, city, histo, steampunk...
Préférence de jeu : Homme
Mandrin
Ven 26 Avr - 22:11
Sheridan Roje
Je suis citoyen américain ans et je vis à La Nouvelle-Orléans, USA. Dans la vie, je suis conducteur de calèche et je m'en sors pas mal du tout. Sinon, grâce à ma chance, je suis fou amoureux et je le vis plutôt bien. On m'a donné tous les surnoms possibles sur la base de mon nom existant, alors n'hésitez pas, créez votre propre sauce ! Vous gagnerez peut-être un prix si vous arrivez à me faire rire ! Je suis notamment reconnaissable à ma cicatrice au visage, souvenir d'une époque où j'ai tenté ma chance comme cascadeur et très vite regretté. J'étais ado, on fait tous des erreurs. J'ai laissé tombé la comédie et l'escrime à ce moment-là, pour me consacrer au ranch de ma mère et à un apprentissage d'artisan, mais en arrivant en Louisiane, en construisant ma propre famille, j'ai renoué avec ces vieilles ambitions.
Oh, je ne cherche plus à faire carrière sur vos écrans. Quoique j'ai déjà fait un peu de figuration pour un petit clip de métal que vous n'avez sans doute pas vu. Non, surtout, je transporte les touristes en calèche dans la vieille ville pendant que le guide raconte l'Histoire ancienne, et à force de tout entendre encore et encore, je commence déjà à connaître tout ça par coeur.
Dans la lumière tremblante, Dan assailli par l'odeur du sang et des herbes voit la femme rouge, et dans sa voix il entend les ordres de sa compagne de captivité. La liberté mérite tous les combats. Et il ne doute pas que Camille se bat en ce moment. Est-il vraiment besoin de crier dans sa direction ? Un homme qui sombre se bat toujours, même s'il s'est de sa propre volonté jeté à l'eau ! Pourtant les voilà qui l'entourent tous les trois, comme s'il avait besoin de leurs voix dans sa tête, lui qui est déjà si affreusement hanté. Qu'est-ce qui lui arrive ? Dan ne pose même pas la question. Il n'a pas connu cette même chute mais il a été hanté lui aussi. Et s'il a surmonté cette mauvaise passe, s'il s'en est sorti le cerveau presque intact, c'est parce que Camille, au lieu de le mettre à la porte, l'a invité à passer du temps chez lui et à parler au calme, et à se conduire en être humain, jusqu'à ce que les démons renoncent.
Des démons, c'est ça qu'il y a ici ? Dan s'en fiche bien. Il est dévoré par la haine envers ces entités, quelles qu'elles soient. Une envie de détruire, de brûler, d'écraser entre ses mains. Il ferme les yeux pour la faire taire, ce ne sera pas possible ce soir, ce ne sera pas si simple. Sa voix basse se superpose aux incantations de la fée de sang et trouve même un rythme en accord avec le sien. Il lui semble - mais ça n'a pas de sens - qu'il a déjà fait cela, il y a très longtemps, dans d'autres vies.
"Camille, tu es fort. Tu as chassé mes démons. Quand mon propre frère m'a tourné le dos, tu m'as rendu courage. Tu nous as accueillis dans la demeure de tes ancêtres. Tu es notre protecteur, notre ange gardien. Bats-toi pour nous, et nous nous battrons pour toi."
Son frère. Ce mot a fait déborder ses yeux soudainement, une envie de pleurer lui a coupé la parole. Démuni, perdu, il se tourne vers Siggy pour le serrer contre lui, protection contre la destruction du monde. Dire qu'il y a quelques minutes, ils ressentaient tout ce qu'il y a de plus libérateur et de plus beau ! Et ce sentiment existe encore, et un jour Camille le ressentira lui aussi. Il faut y croire, il faut s'y accrocher. Impossible, au contact de son Siggy solaire, d'arborer autre chose qu'un sourire.
"Tu es plus fort que les maléfices, Camille. Tu m'as délivré du mien. Ta place est là avec nous. Témoin à notre mariage."
Il avait presque l'impression de lui reprocher son état et il ne voulait surtout pas faire une telle chose. Imaginer son ami sombrer dans les ténèbres avec le souvenir de sa voix en train de lui faire un reproche... Ce serait une horrible injustice. Son moral faisait des dents de scie, il était beaucoup trop atteint par les phénomènes à l'oeuvre ici même s'il y évoluait comme un aveugle dans un labyrinthe.
"Et si un jour ils sont plus forts que toi, sache que je comprends. Je comprends." Sa main se posa sur les cheveux de Camille, cherchant à capter son attention. Où était-il parti ? A quelle distance ? Les voyait-il encore ? N'aurait-il pas fallu appeler une ambulance ? Il fallait qu'il réprime sa panique, il ne voulait surtout pas la transmettre. "Parlons pas de ça. Rassure-nous, qu'on puisse se rhabiller, d'accord ?"
Son regard errait sur la scène, il commençait à peine à en percevoir consciemment les détails. Il fallait que cette femme en charge des événements lui donne des instructions. Il revivait son évasion des mains de la mafia, et il ne s'en rendait même pas compte. Tout ce qu'il percevait, c'était l'ombre alentour, et la nécessité d'arriver jusqu'au soleil. Et il avait besoin de son langage corporel pour communiquer à son amoureux dans quel état il était lui-même : il aurait été incapable de le décrire, il le percevait à peine.
"Qu'est-ce qu'il a ? Il y a des esprits mauvais ici, hein ? Comment je peux m'y prendre pour leur faire mal ? Je peux donner mon sang au besoin. J'en manque pas."
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Val
Jeu 16 Mai - 16:52
Sigmar Hensen dit « Siggy »
J'ai 27 ans et je vis pour l'instant à côté deBâton Rouge , en Louisiane, aux USA. Dans la vie, j'ai étudié l’ethnologie sociale, puis contre toute attente j'ai quitté les miens et mon avenir tracé pour me transporter jusqu'à San Diego, en Californie. Là, après une période difficile où j'ai tenté de vivre en vendant mes dessins, portraits et caricatures (et ai fini par offrir mon corps), j'ai intégré l'équipe du Lorenzo's, une pizzeria minuscule tenue par Larry, un phénomène de 82 ans paternel et volubile. Je suis devenu livreur de pizzas en rollers et je m'en sortais pas trop mal. Sinon, grâce à ma chance, je suis désormais fiancé et je le vis bien. A ajouter ? Je suis l'aîné de quatre enfants, né dans le Nevada dans une petite ville du nom de Sweet Home, la mal nommée. Mon père était -et est sans doute toujours- chirurgien, chef du secteur orthopédie de l'hôpital local, et ma mère femme au foyer. Nous avons été élevés d'une main de fer dans la plus stricte observance des commandements de Dieu ! Jusqu'au jour où j'ai avoué que je suis... homosexuel.
- 18:
Mon père n'aurait pas dû être choqué, puisque toute mon enfance il m'a rendu visite, chaque nuit ou presque ? C'est une calamité qu'il doit connaître aussi puisque c'est le plus âgé de ses fils et non une de ses filles qu'il avait élu comme « préféré » ? Ce secret là, je le cache, je n'ai jamais rien dit, ni à mes frères et sœurs, ni à ma mère qui n'a semble-t-il rien vu, ni à Dan, surtout pas !
- Puisque vous êtes là ! Soutenez-le ! Il faut que le Bondie l'aide ! Pour cela je dois le ramener dans le monde de la vie...
- Tu es plus fort que les maléfices, Camille. Tu m'as délivré du mien. Ta place est là avec nous. Témoin à notre mariage.
Je reste estomaqué, pantelant sur le seuil tandis qu'elle m'indique d'un geste péremptoire de fermer la porte ? Une porte ouverte peut-elle empirer les choses ? J'ai l'impression que la pièce est sombre, parce qu'ils ont allumé des bougies en non l'électricité, l'odeur est mêlée d'encens et de celle du sang de ce pauvre poulet qui agonise ! Je me mords les lèvres à les en faire saigner moi aussi, rien ne m'a préparé à ce que je vois. En me baladant dans les rues, que ce soit à Bâton-Rouge ou à la Nouvelle-Orléans, j'ai vu dans des vitrines des accessoires vaudous, de ceux qu'un vieux vendeur m'ayant croisé avec « le Auffray » m'a dit être « pour les touristes »... Abandonnant pour moi son sabir mi-créole mi-français, lui aussi réservé aux visiteurs de la ville, il m'a expliqué dans un anglais parfait que -si l'on pouvait obtenir des résultats à partir de n'importe quel objet, gri-gri ou autre réceptacle- le recours à ceux-ci était bien moins fréquent que la croyance commune. « Pour guérir » avait-il dit « il faut un prêtre ou une prêtresse qui connaît les choses essentielles, des plantes, d'autres ingrédients et surtout, la foi ». il avait souri et ajouté que la foi, n'avait pas besoin de poupée de ficelle tressée, même avec des cheveux du malade mêlés à la fibre... J'avoue que si ses confidences m'avaient intéressé, je les avais trouvées instructives, avant ce soir je n'avais pas pris la mesure du type de « maladies » dont il parlait.
Je regarde la fille dont la robe blanche fait ressortir le teint, je me fais à nouveau la réflexion qu'elle est jolie, pourtant la nature de sa relation à Camille devient bien floue ? Est-il vraiment hétérosexuel ? C'est bien le moment de demander me crie en moi ma conscience !
- Le ramener dans le monde des vivants ? Tu veux dire qu'il est … mort ?
J'ai la certitude d'ouvrir une bouche bée, et de donner de moi une impression de stupidité sans nom ! Mais … Camille mort ? Il y a quelques mois, rien qu'à la description qu'en faisait Dan, je me sentais haïr Cam, puis, au fil des semaines, j'en suis venu à ne plus savoir ce que je ressentais réellement pour lui, mais en tout cas, même au sommet de ma crise identitaire et dévoré par la jalousie, jamais je n'ai imaginé son décès ! Camille est plus jeune que moi, sur scène il déborde de vie, de plaisir, de volonté de se parfaire ! S'il y a dans ce monde un homme dont l'avenir est loin d'être absent c'est lui !
Elle relève la tête, elle était en train de lui faire boire une sorte de potion, en récitant je ne sais quoi, je ne comprends pas le créole moi ! Elle passe les mains sur son corps à lui, sur le sien à elle, elle a l'air de parler à quelqu'un d'invisible...
- Il n'est pas passé encore mais la porte est ouverte, elle soupire, respire, recommence à incanter je ne sais quoi... - Il y a un vent mauvais qui l'attire de l'autre côté, son loa doit l'aider mais c'est un fin matois, il monnaye ses dons très cher...
Je ne sais qu'approximativement ce qu'est un loa, et qu'un dieu puisse faire payer son intervention ? Remarque, est-ce que « mon » dieu ne se fait pas payer ? Quand tu vas à l'église et que le prêtre en matière de pénitence te donne des devoirs du soir ? Prières ? Actes de contrition ? Et tout ce qu'un religieux pervers peut imaginer !? Certes, je suis un apostat, un damné, une créature de l'enfer... J'avoue avoir oublié la liste exhaustive de mes péchés...
- Qu'est-ce qu'il a ? Il y a des esprits mauvais ici, hein ? Comment je peux m'y prendre pour leur faire mal ? Je peux donner mon sang au besoin. J'en manque pas.
Mes yeux s'ouvrent tout grand de stupéfaction ! Du sang ? Jamais ! Son sang est mien ! Toute sa personne, je la veux entière, je sais, c'est égoïste, mais je suis sûr qu'on peut sauver Camille sans perdre Sheridan ! Je soupire quand elle ne répond pas, occupée à discuter sans doute avec le « loa », Camille respire plus régulièrement et plus visiblement. Je pose enfin la question qui me taraude, avant d'être ici je n'ai jamais été possessif, ni jaloux, ni puritain ? Est-ce que cet endroit fait ressortir le mauvais de chacun ? Mon aimé a dit « esprits mauvais » ? y a-t-il dans cette maison des esprits mauvais qui te transforment en ce que tu as de plus méprisable ? Malgré toi, parce que tu ignores leur présence ?
- C'est la maison ? C'est pour ça qu'il redoutait de revenir ? Il disait dans l'avion qu'il avait peur de cet endroit parce qu'il n'y avait pas de bons souvenirs ? Tu crois que ça affecte tout le monde ?
Elle relève les yeux comme importunée, elle est toujours avec Camille, elle dessine sur son corps des trucs qui ressembleraient à des runes de jeux vidéos fantasy... Dans un murmure elle lâche, comme craintive :
- Je crois que c'est Lianne...
Lianne ? Camille parle d'elle avec amour et dévotion ? C'est Lianne qui est en train de le tuer ? Et qui accessoirement fait remonter du fond de ma mémoire des horreurs, m'empêchant de profiter du tête à tête avec Sheridan, de la quiétude de l'endroit ?
Est-ce que je crois aux fantômes ?
Je ne me suis jamais posé la question.
- Mais... elle est morte ?
Elle fait oui de la tête. Elle est morte, bien sûr, et elle veut Camille avec elle ? Non, c'est impossible, je dois devenir totalement frappé...
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Mandrin
Jeu 23 Mai - 8:03
Sheridan Roje
Je suis citoyen américain ans et je vis à La Nouvelle-Orléans, USA. Dans la vie, je suis conducteur de calèche et je m'en sors pas mal du tout. Sinon, grâce à ma chance, je suis fou amoureux et je le vis plutôt bien. On m'a donné tous les surnoms possibles sur la base de mon nom existant, alors n'hésitez pas, créez votre propre sauce ! Vous gagnerez peut-être un prix si vous arrivez à me faire rire ! Je suis notamment reconnaissable à ma cicatrice au visage, souvenir d'une époque où j'ai tenté ma chance comme cascadeur et très vite regretté. J'étais ado, on fait tous des erreurs. J'ai laissé tombé la comédie et l'escrime à ce moment-là, pour me consacrer au ranch de ma mère et à un apprentissage d'artisan, mais en arrivant en Louisiane, en construisant ma propre famille, j'ai renoué avec ces vieilles ambitions.
Oh, je ne cherche plus à faire carrière sur vos écrans. Quoique j'ai déjà fait un peu de figuration pour un petit clip de métal que vous n'avez sans doute pas vu. Non, surtout, je transporte les touristes en calèche dans la vieille ville pendant que le guide raconte l'Histoire ancienne, et à force de tout entendre encore et encore, je commence déjà à connaître tout ça par coeur.
Comment expliquer à Siggy ? Tout ça semble une conclusion logique de ce que Camille a toujours été, ce qu'il a toujours projeté dans le secret de leurs conversations. Mais ces échanges sont restés des confidences abstraites, oscillant entre une explication psychologique sans réelles certitudes et des craintes plus diffuses, jamais une véritable dénonciation des forces occultes. Et Sheridan n'avait jamais été plongé dans ce monde-là, sa mère avait mis un point d'honneur à l'élever dans une vision du monde rationnelle, les pieds fermement plantés dans la terre et rien au-dessus, rien au-dessous.
"Il avait l'impression d'être mort depuis longtemps. C'est la première chose dont on a parlé quand on s'est rencontrés."
Dan parle à voix basse, comme s'il avait peur d'être entendu. Et la sorcière en fait de même. Il est tellement soulagé qu'elle soit présente, elle ancre ces folies dans la réalité. Elle est le pont entre les deux mondes, qui leur permettra d'atteindre Camille là où il est, où qu'il soit. Le nom de la grand-mère est évoqué, ça ne le surprend pas du tout. Il ajoute, la voix hachée :
"Et il était hanté par la pensée de sa grand-mère. J'aurais dû me douter que c'était pas juste... métaphoriquement."
Un sentiment de culpabilité et d'injustice l'abat quelques instants. Il a tout vu depuis le début, Camille lui a tout dit, avec une confiance qu'un simple inconnu n'aurait pas dû mériter. Et il n'a rien fait du tout. Il n'a même pas posé de questions. S'il s'était douté que quelque chose de concret hantait le danseur... il y avait aussi des gens à qui s'adresser, là-bas en Californie, des gens qui trempaient dans la sorcellerie et les mystères de l'au-delà, ou simplement un prêtre ? A ses yeux, les prêtres étaient des charlatans, dans le monde des vivants comme dans celui des morts. Il aurait au moins dû chercher une personne de confiance auprès de qui se renseigner. Tenter quelque chose... même quelque chose de stupide, ça aurait toujours été mieux que rien.
"Je sais pas si c'est la maison ou des fantômes ici ou autre chose. Siggy, il faut qu'on l'aide. Je ne peux pas le laisser comme ça."
Siggy, c'est tout ce qu'il a de magique, cet amour entre eux, ce coup de foudre qui les a réunis dans le simple éclair du premier regard. C'est tout ce à quoi il peut faire appel, l'étincelle qui rallume son espoir à chaque seconde, l'étoile qui le guide dans la nuit. Leur attraction prend bien des formes, et celle de leurs ébats a cédé la place à celle qui les renforce dans l'adversité, ce sentiment à la fois doux et guerrier d'appartenir à quelque chose de plus vaste que les fautes de sa propre vie, d'être davantage que lui-même. Il est ce que Siggy voit en lui, et il en tire un courage que ses propres mésaventures ne lui donneraient jamais.
"Je peux faire quelque chose pour son loa ? Je me propose, dites-lui, s'il vous plaît. Je n'ai pas de religion, mes mains sont libres."
Il ne sait pas s'il est légitime ou si ce genre de pacte existe, mais sa volonté est bien présente et une entité qui évolue dans le monde de l'esprit doit pouvoir la percevoir, et en faire quelque chose. Il l'espère de tout coeur. Siggy et lui, ils sont forts. Comparés à Camille, ils sont capables d'endurer la lutte. S'il faut aller le chercher sur le champ de bataille, il n'hésitera pas, même s'il est aveugle à cet univers. La sorcière elle-même semble effrayée, mais un aveugle ne peut pas avoir peur de ce qu'il ne voit pas.
A moins que ce soit une faiblesse ? Il n'a pas de foi particulière, il l'a dit, pas de foi religieuse, aucun intérêt pour les mondes invisibles. Mais il croit intensément dans le bien qu'il peut faire pour ceux qu'il aime. Sans ça, il n'aurait pas cherché à continuer sa vie après avoir été arraché aux siens. Il n'aurait pas retraversé le désert. Et Camille était avec lui à chaque pas de cette route. Tout cela ne peut pas être arrivé pour rien. Cette conviction brûle dans son âme en ce moment, et il ne connaît pas le doute.
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Oskar
Sam 29 Juin - 15:32
Camille Grant
J'ai 22 ans et aprés un déracinement volontaire de deux ans, je suis revenu dans la demeure familiale à côté de Bâton Rouge , en Louisiane, aux USA. Dans la vie, depuis ma plus tendre enfance, je vis entouré d'artistes. Ma mère était danseuse classique et a interrompu sa carrière à ma naissance, ma grand-mère était une célèbre tragédienne de théâtre et mon « grand-père » son second époux, de quinze ans son cadet a connu un succès fulgurant au cinéma en tant que jeune premier. Seul mon père, trader et fils d'un riche banquier dénotait dans ce milieu, ça n'a pas eu d'importance bien longtemps puisque après leur divorce mes parents sont partis, chacun de leur côté, laissant à qui en voudrait l'enfant pourtant chéri et comblé pendant ses deux premières années d'existence...
A mon tour je suis monté sur les planches, après avoir étudié la danse, le cinéma, les effets spéciaux. Actuellement, je suis danseur peint dans un cabaret luxueux de Californie. Enfin... j'étais, je me suis mis en congés, d'une durée indéterminée, s'ils me virent je suis suffisamment à l'aise financièrement pour voir venir et attendre. Je m'en sors pas trop mal. Sinon, grâce à ma très grande chance, je suis célibataire et je le vis à merveille, espérant le rester jusqu'à la fin de ma vie !
FC : Nils Verberne - à découvrir sur @Lithunium.snow
A ajouter :
Je suis fils unique, enfin je dois avoir des demi-frères et sœurs, que je n'ai jamais vu et dont je ne connais pas plus le nom que le visage... Subjugués l'un par l'autre mes parents se sont mariés en quelques mois, puis ont découvert que non seulement ils n'avaient rien en commun mais qu'ils étaient incapables d'intégrer la personnalité et l'éducation de l'autre. Amants, déçus, méprisants, haineux... Leur divorce leur a fait tout rejeter des deux années passées ensemble, tout, jusqu'à l'enfant né de l'union. Sans Lianne Auffray et Humphrey Grant mes grands-parents, j'aurais été proposé à l'adoption. Humphrey a péri dans un accident l'année de mes treize ans. Lianne l'a suivi sept ans après, terrassée par ce qu'on appelle « une longue maladie » qu'elle a combattu avec fureur et courage. Leur disparition m'a fait fuir la Louisiane, cette terre où ma famille -celle de Lianne- avait accosté dans les premières années de l'émigration française. L'histoire ne m'intéresse pas, moi, petit blanc abandonné élevé par des gouvernantes souvent noires, j'ai baigné dans une atmosphère surréaliste, solitude, mystère, légende, religion... et cette grande maison, ces maisons, la vieille, demeure de maîtres à l'époque de l'esclavage, celle dite « du gardien » grande bâtisse qui servaient de logement non seulement au gardien mais aux domestiques blancs, et la dernière, celle que Lianne a fait construire à l'aube des 70's, lorsqu'elle a connu ses premiers succès. Particularité ? La maison de mon enfance jouxte une plantation « hantée » par une quinzaine de fantômes que j'ai en vain cherché dés mes six ans...
J'ai 25 ans. Je suis revenue à Bâton Rouge , en Louisiane, aux USA après avoir fait des études sur la Côte Est. Dans la vie, je tiens un magasin de souvenirs, tout particulièrement d'articles "vaudou" plus ou moins réalistes. Accessoirement, je suis aussi... la Mambo Mary, prêtresse qui officie pour les fidèles de la région.
Financièrement je m'en sors pas trop mal surtout depuis que j'ai revu Camille Grant. Sinon, grâce à ma très grande chance, je suis célibataire et je le vis à merveille, dans ma famille, aucune femme n'a l'idée saugrenue de se marier, elles restent indépendantes !
FC : Sira Kanté
A ajouter :
Pour expliquer les « Desoffrey » je dois faire un bref cours d'histoire... ça commence dans les années 1860 à Bâton-rouge et La Nouvelle-Orléans. Une jeune demoiselle fille d'un planteur, fille unique nantie de deux frères plus âgés, s'éprend d'un bellâtre blond aux yeux bleus, bonne présentation, bagou et assurance : Thomas Auffray un « Français ». Le fruit de leurs errances se présentant de façon un peu trop visible, Mary Warrington est mariée de toute urgence au père de son enfant, ils en auront un second au grand dam des parents de la dame... Thomas est un gigolo presque un aigrefin, il vit aux basques de sa femme et de sa belle-famille, joue toute la nuit, trompe son épouse. Tant et si bien qu'il perd en une soirée mémorable tout son avoir, y compris la dot de Mary et presque Anthelme son valet... Presque ? Parce que s'il se fiche totalement de sa femme, il ne veut pas perdre mon aïeul qui sera d'ailleurs affranchi comme tous en 1865. Le mari indélicat et ruiné est mis de côté, Mary retourne auprès des siens et meurt en couches peu après, l'histoire ne dira pas si le nouveau-né coupable d'avoir tué sa mère est vraiment un « Auffray », en tout cas il en porte le nom. Les trois garçons sont élevés par leurs grands parents, l'histoire des Auffray s'arrête là.
Celle d'Anthelme commence juste, en décembre 1865 l'abolition de l'esclavage lui donne une identité, quel nom de famille coller à son prénom ? Il est l'Anthelme « des Auffray », de là vient notre patronyme. Une fois libre, le valet de Thomas reste valet de Thomas, et complice aussi ce qu'il a toujours été. Simplement, il se marie, et l'aventure commence. Il a deux filles, Judith et Mary Desoffrey... Elles seront les premières d'une longue lignée... de reines. Entre temps, en 1875 Thomas désavoué par sa belle-famille, retourne sur ses terres d'origine à NOLA, il y entraîne mon ancêtre et les siens, là-bas, Marie Laveau œuvre, reine incontestée et le vaudou est en plein renouveau.
Cela pour la parenthèse historique, à la mort de Thomas -revenu je ne sais quand ni pourquoi à Bâton-rouge en entraînant son domestique- les Auffray comme les Desoffrey n'en bougent plus. Les uns et les autres sont noyés dans le culte, maîtres et valets unis par la magie et la foi.
Moi ? Je suis donc la fille de Myrtle, seconde fille de Camélia. Je suis née en 1998 des amours de ma mère alors trentenaire et d'un connard nommé Clint Harper... Un peu le même style que le Thomas Auffray des origines, en black, et en fauché. Lui n'épousait pas d'héritière, il se contentait de semer des Harper qu'il ne reconnaissait jamais et de vivre aux crochets des mères -célibataires sans vraiment l'être-. Ça n'a pas dérangé la mienne, il était plus âgé qu'elle mais beau gosse, s'y entendait en amour -en sexe soyons franche- et ne l'emmerdait pas ni par sa présence ni par sa jalousie.
Mon enfance a été particulièrement heureuse, jusqu'à la mort de mon jeune frère abattu presque à bout portant alors qu'il marquait avec quelques jeunes du quartier sa désapprobation pour le meurtre dans le Missouri de Mickael Brown, un afro américain de dix-huit ans. Là, j'avoue que mon monde a basculé... J'ai demandé aux loas la force de conquérir ce monde, LEUR monde ! Un monde où la couleur de peau te met d'office dans le mauvais camp, où tu n'es quoi que tu fasses qu'un citoyen de seconde zone ? Ma mère est parvenue à canaliser ma haine, c'était pourtant le fruit de ses entrailles qui était enterré...
De bonne élève je suis devenue excellente, j'ai œuvré pour obtenir des bourses d'études, pour intégrer une école réputée, continuer mes études quoi qu'il en coûte ! Pourquoi l'histoire de l'art ? Pourquoi l'histoire tout court d'ailleurs, parce qu'elles renferment le sens de ma vie ? Si en son temps une prêtresse vaudou n'avait pas été arrachée à son sol, amenant avec elle sa foi et son pouvoir sur ces terres, je ne serais pas celle que je suis, issue d'une longue lignée de houngans et mambos...
Je suis donc diplômée, doublement, d'histoire des arts et d'histoire des religions. Le genre de diplôme plutôt confidentiel qui auraient dû m'ouvrir les portes de musées ou me permettre de rejoindre des équipes de chercheurs en éthologie ou ethnologie ? J'ai choisi autre chose, j'ai repris une petite boutique à Bâton-rouge pas loin de cette plantation Myrtle qui fait couler tant d'encre, prétendument hantée. J'y vendais des souvenirs de Louisiane, commerce florissant ne vous y trompez pas ! Et … des filtres, envoûtements, maléfices... Cela, pour l'arrière boutique.
C'est la que j'ai eu la surprise récemment de voir entrer Camille, le Auffray de cette époque dont la grand-mère Lianne a eu l'agréable surprise de se voir remettre -en tant que dernière héritière de la famille- la fortune Warrington. Je le connais depuis sa naissance quelques années après la mienne, j'ai joué avec lui, il était l'ami de mon frère autant que le mien...
Pour l'instant j'officie principalement pour lui, mais il y a ici une population de croyants aux oreilles desquels mon retour a été propagé par des bouches amies. Dans mon arrière-boutique, des fétiches, des fioles, tout un assortiment de poupées... Cela, c'est le folklore, la puissance est ailleurs, résumer mon savoir et mon talent à ces objets serait dire que le vent souffle parce qu'on a mis à sa disposition des manches-à-air ? Je suis habitée... Quand je danse, je sens graduellement les loas se mettre à ma portée, les ancêtres appelés ouvrent la porte aux guédés... Accesoirement, je sers les loas « des deux mains » comme on dit chez moi, magie blanche et sombres sorts... Si c'est vraiment nécessaire...
La plupart des gens voient tout cela comme une survivance de croyances superstitieuses, un dangereux amusement -qui sait, si c'était vrai !- moi, je crois, je sais.
Cela dit, pour mes nouveaux voisins, je suis Diane Desoffrey, les femmes trouvent parfois que mon physique leur porte préjudice alors je fais en mesure de paraître quelconque, les hommes... pour beaucoup lorgnent sur ma silhouette oublieux de tout ce qui fait ma personnalité, instruction, profession, intelligence même ? Je hais ces mâles qui restreignent la femme à son rôle de femelle !
Pour d'autres, ceux qui comptent pour moi en fait, je suis la Mambo Mary.
Elle était revenue à la charge... « Je ne veux pas ! Imagines-tu ? Camille ! Tu ne peux pas me faire ça ! Regarde -moi ! Tu as vu ce que je suis devenue ? »
Je fermais les yeux, malgré cela des larmes coulaient, en moi se mélangeaient des refus venus de partout... depuis le « Tu ne tueras point » de la Bible à des romans policiers, ou pas, à des morceaux de lois américaines, à Mary qui disait toujours « L'autre monde te convoque, on ne s'y impose pas, les suicidés doivent plaider leur cause tu sais ? »
Je ne voulais pas. Aujourd'hui encore je refuserais si elle le redemandait. À quoi elle ressemblait ? À une femme âgée dont l'âge était doublé par cette maudite maladie... Oui, je la voyais, je savais, je n'étais pas aveugle ! Je sentais sa douleur aussi et sa peur, toujours plus la peur de souffrir, encore et encore, en vain puisqu'aucun traitement ne la soulageait, et pire, ne la guérissait !
Je ne pouvais pas. Je l'aimais, sans doute pas assez puisque je n'étais par capable d'abréger sa douleur, pas assez, pas bien, elle me renvoyait à ce sentiment que je ne faisais rien correctement, elle aussi, comme tous ceux qui l'avaient précédée. J'étais Camille, le petite blond parasite, égoïste et lâche, qui mangeait l'amour des autres sans être capable d'y répondre ! J'avais accepté tout ce qu'elle m'avait donné, depuis la sécurité jusqu'à ce sentiment d'avoir un lien avec un vivant, d'exister, d'avoir le droit de jouir de l'air pur, de la vie, le droit de réclamer un bisou, d'en donner un... de flirter, de raconter mes émois, de me construire un avenir !
Mary me disait « Elle n'est plus elle-même, la maladie rend méchant, il y a des tas d'études et de témoignages, aime-la, elle t'aime elle, je t'assure, c'est juste qu'elle se voit partir et qu'elle est terrifiée, et que la peur est amplifiée par tout ce qu'on lui fait et qui ajoute à ses souffrances... » Il me fallait le croire, j'avais besoin de m'ancrer, de me rassurer, j'avais raison ? On ne tue pas les gens qu'on aime, même pour les aider à partir dignement et à fuir un avenir plus noir encore ?
Et puis... j'avais espoir, je voulais croire ! Je niais l'incapacité des traitements à la soulager et surtout à endiguer le monstre qui prenait possession de son corps, j'avais beau avoir vu les radios, les clichés d'irm, je ne voulais pas ! Je ne pouvais pas accepter qu'elle perdait la bataille ! Pas elle, pas Lianne ! Elle avait triomphé toute sa vie, enfant elle n'avait rien, jeune fille des rêves, et puis... l'argent lui était tombé dans les bras, son talent, et ce cousin éloigné mort sans descendance, elle avait fait des prodiges, acquis l'éducation, le maintien, le savoir suffisants pour devenir une dame, une héritière. Après les premières années, plus personne ne remettait ses droits en question, la fortune familiale venait grossir ses cachets de plus en plus importants... De son premier époux ou compagnon, ses proches même ne savaient rien, seul Humphrey, le divin Humphrey qui avait à peine un an de plus que sa fille comptait, ils formaient un couple d'acteurs, Hollywood et la Tragédie ! Le cinéma et le théâtre, et quel théâtre... Sa vie avait été idyllique, un conte de fée, de ces histoires qu'on raconte aux gamines pour leur donner l'espoir... Humphrey avait trouvé la mort, ma mère était partie sans laisser d'adresse, et je n'étais pas l'enfant facile et mignon que je semblais être... Mais elle avait fait face, calmé mes angoisses, mes crises de panique, mes terreurs d'être abandonné, encore !
Et pour la remercier je lui refusais un service, un service tout simple...
C'est ça qu'elle me reproche. Ça qu'elle me fait payer... Si j'aligne les mots facilement dans ce qui me tient lieu de raison, mon corps lui hurle, se débat, tente de se dégager de l'étau qui le broie ! A croire qu'elle a choisi de me prouver combien sa demande était raisonnable et ce qu'était la douleur qu'elle devait supporter ?
Mais est-ce bien elle ? Cette chose, ignoble, sans forme définie, rampante, hurlante ?
Je gémis, je pleure, je crie...
- Mary ! Mary ne me laisse pas !
Je sens sa main, ferme, presque dure, elle m'agrippe, me tire, loin de ce cauchemar, de cet enfer que j'estime n'avoir pas mérité... J'entends ses paroles, son intercession auprès de Dieu et des loas, des guédés autres que Lianne, elle demande mon pardon, ma délivrance, et prie pour que ma grand-mère soit elle aussi délivrée de cette rage qui l'oblige à me nuire...
Dans la pièce, je sens d'autres présences, d'autres énergies, mon esprit titube entre deux mondes, ai-je raison de vouloir rester ?
J'écoute, ce monde, et l'autre... Dans celui-ci, il y a des voix, trois à ce qui me semble ? Une femme et deux hommes, tous trois me retiennent de toute la force de leurs paroles et de leur cœur... Alors... Pourquoi ai-je tant de mal à rester ? Je m'agrippe à Mary, ma mémoire me fait revoir ce geste, aujourd'hui c'est moi qui serre sa main à la blesser pour ne pas couler, Lianne aussi l'a fait, pour que je la pousse ! Elle me tenait la main, mettait dans ce geste le peu d'énergie qui lui restait, il n'avait qu'un son : fais-moi partir ! Camille ! S'il te plait !
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Lianne... Je revois un passé proche, quand elle a découvert que la maladie malgré son combat allait gagner cette guerre... ça fait dix-huit mois qu'elle est morte ? La pauvre a souffert presque deux ans. Quand le diagnostic est tombé, Camille m'a dit qu'elle avait réagi comme la femme volontaire et courageuse qu'elle avait toujours été, elle avait demandé la vérité, consulté des spécialistes, et mis en place une stratégie destinée à lui apporter la victoire. Elle y a cru, lui aussi y a cru, il voulait qu'elle triomphe, il n'envisageait pas une seconde qu'elle puisse être terrassée...
Les mois ont passé, elle a perdu ses cheveux, qu'à cela ne tienne, elle s'est commandé des perruques, on s'y serait trompé ! Elle ne voulait pas que son public sache... cette maladie, c'était comme un secret inavouable qui si on le taisait disparaîtrait. Au fil des mois, la fatigue s'est installée, je la voyais peu, elle trouvait que je ne méritait pas son petit-fils et que je lui donnait de curieuses idées... mais j'ai d'autant mieux vu l'évolution. Elle avait maigri, vieilli, les traits tirés, la peau marquée... Un jour, elle a dû cesser les représentations, laisser la place, et sa rage de vaincre en a été décuplée !
Lianne a perdu la guerre.
J'ai su avant lui -Camille qui me racontait tout- qu'elle ne parvenait plus à donner le change, la mort qui rode s'annonce à ceux qui savent l'entendre... Elle hante les lieux où attend un malade ou un condamné, elle a beau marcher à pas de loup, elle laisse une empreinte que je ne pouvais ignorer. Je savais, Lianne s'en allait, les derniers mois, couchée la plupart du temps, elle l'avait harcelé « Tue-moi ! Je ne supporte plus de me voir dans un miroir, j'ai mal, je n'ai plus aucune chance... Camille ! Tue- moi ! » Elle disait que c'était un suicide assisté, que personne ne lui en voudrait, qu'il serait relaxé si on l'apprenait...
C'était mal connaître Cam, il ne refusait pas par peur, mais par amour. Elle, disait par peur, par égoïsme, par désintérêt, c'était bien mal le connaître...
Il ne pouvait pas, la vie sans elle l'épouvantait, il redevenait l'enfant solitaire et désespéré qu'il était en arrivant chez elle...
Elle s'est vengée, à sa façon.
D'aucun diraient que c'est impossible, qu'un mort ne vous reproche pas de l'avoir laissé crever, longtemps, agoniser dans la douleur, la laideur, le dégoût de soi... moi, je ne doute pas.
Camille paie sa dette envers Lianne, à le voir se tordre, hurler, pleurer, choqué non de son désespoir et de cette « dépression » qu'on lui attribue mais par la cause de son humeur si noire.
- Je peux faire quelque chose pour son loa ? Je me propose, dites-lui, s'il vous plaît. Je n'ai pas de religion, mes mains sont libres.
Je ne réponds pas, mais je tends la main, les mains, le blond est en attente lui aussi, l'un comme l'autre ne sont pas prêts à le laisser glisser... C'est toujours ça.
Le loa lui, est un serpent glissant, puissant mais capricieux, il va me falloir de la patience, de la sournoiserie, de l'intelligence, du charme et des arguments...
J'ai 27 ans et je vis pour l'instant à côté deBâton Rouge , en Louisiane, aux USA. Dans la vie, j'ai étudié l’ethnologie sociale, puis contre toute attente j'ai quitté les miens et mon avenir tracé pour me transporter jusqu'à San Diego, en Californie. Là, après une période difficile où j'ai tenté de vivre en vendant mes dessins, portraits et caricatures (et ai fini par offrir mon corps), j'ai intégré l'équipe du Lorenzo's, une pizzeria minuscule tenue par Larry, un phénomène de 82 ans paternel et volubile. Je suis devenu livreur de pizzas en rollers et je m'en sortais pas trop mal. Sinon, grâce à ma chance, je suis désormais fiancé et je le vis bien. A ajouter ? Je suis l'aîné de quatre enfants, né dans le Nevada dans une petite ville du nom de Sweet Home, la mal nommée. Mon père était -et est sans doute toujours- chirurgien, chef du secteur orthopédie de l'hôpital local, et ma mère femme au foyer. Nous avons été élevés d'une main de fer dans la plus stricte observance des commandements de Dieu ! Jusqu'au jour où j'ai avoué que je suis... homosexuel.
- 18:
Mon père n'aurait pas dû être choqué, puisque toute mon enfance il m'a rendu visite, chaque nuit ou presque ? C'est une calamité qu'il doit connaître aussi puisque c'est le plus âgé de ses fils et non une de ses filles qu'il avait élu comme « préféré » ? Ce secret là, je le cache, je n'ai jamais rien dit, ni à mes frères et sœurs, ni à ma mère qui n'a semble-t-il rien vu, ni à Dan, surtout pas !
Sigmar Hensen, Sheridan Roje, Camille Grant & Diane-Mary Desoffrey
TW : Racisme - Homophobie - suprémacisme blanc, parfois évoqués
Je suis là, hébété et atterré à regarder Camille Grant se débattre -de plus en plus mollement- contre la mort ? Tout à l'heure il hurlait, s'agrippait violemment à Mary, enfin elle semble s'appeler Mary ? Depuis quelques minutes, il est moins déterminé, ses paroles sont moins impérieuses, moins colériques aussi, il s'interroge, parle parfois à Lianne, sa grand-mère, explique des choses incompréhensibles pour nous du monde des vivants, implore, supplie, se fâche, mais plus que de la colère on sent une profonde tristesse l'étreindre petit à petit.
Qu'est-ce que je fais là ? À tenter d'aider un homme pris à la gorge par le vaudou ? Le vaudou ! Bon sang, je n'ai jamais cru à ce genre de choses, c'était pour moi une sorte de théâtre de rue, une comédie à destination des crédules et des touristes, un individu de sexe indifférent enfilait un masque -souvent spectaculaire- se mettait à danser au milieu de figurants qui eux aussi dansaient, battaient du tambour, appelaient un dieu ou un loa... Pour moi, ça n'avait rien de sérieux, c'était aussi … je ne trouve pas le mot ? Faux ? Factice ? Trompeur ? Que les grandes messes orchestrées par la communauté dont faisaient partie mes parents. Dans les deux cas :
joyeuses bandes d'hommes et de femmes, souvent noirs, battant des mains et jouant du tambour, animés par une foi bruyante et trépidante, permettant parfois de voir un ou une fidèle (ou prêtre-sse) tomber en transe, ou
notables et propriétaires terriens, tous blancs, sérieux et compassés, droit comme des ifs à écouter une prédiction de désastre lié au relâchement des mœurs par un ministre de Dieu,
je ne pouvais m'y retrouver.
Je dois cependant avouer que je n'ai vu les premières qu'à la TV ou sur internet. Le Nevada est un état curieux, j'en ai étudié les mœurs de près pour essayer de comprendre, un bon tiers des adultes croient en Dieu et estiment que c'est capital d'avoir la foi. Les Chrétiens sont majoritaires et parmi les Chrétiens les catholiques sont la première communauté... Les Protestants les dépassent en nombre mais sont disséminés entre plusieurs « sectes » disait mon père, ils se battent sur des écueils de théologie qui les séparent les uns des autres...
Personnellement je m'en fiche, ma famille de toute manière était... spéciale.
Je suis donc là, fils d'un homme aisé, apparemment croyant, très axé sur la pratique religieuse publique et représentative, il voulait être vu à l'église, appartenir à nombre d'associations d'entraide ou de régulation. Il se sentait investi d'un devoir, celui de veiller à ce que personne ne dérape, ne couvre d’opprobre notre paroisse... Quand on le connaît intimement, c'est la pire des hypocrisies mais si je l'avais dit, qui sait ce qui se serait réellement passé ? Il avait réussi à me persuader que nous devions garder le secret mais qu'il n'y avait pas de honte, pour nous...
Fils -donc- d'un abruti irrespectueux, lâche et dissimulateur, je ne vais pas entrer dans les dessous de l'affaire, quand j'ai quitté Sweet Home, je pense que j'étais coincé, rigide et meurtri surtout... J'ai pris le contre-pied, décidé de vivre, libre, oublieux des règles strictes imposées pendant mon enfance... J'ai assumé ce que j'étais, qui j'étais.
Pendant que Camille discute visiblement avec sa grand-mère, le nom de Lianne jaillit de ses lèvres avec toutes les intonations possibles, j'essaie de ramasser des morceaux de moi et de les rassembler, de les assembler plutôt...
Sigmar étudiant, amoureux d'un garçon et ami d'une fille... Fille qui est morte parce qu'il a pris le volant ivre ! Sigmar fils de son père, fils... préféré. Je l'avoue j'ai pris la fuite, ce qu'il m'avait fait subir plus jeune je n'en voulais plus ! Sigmar sans abri, perdu, crédule, malhabile, inadapté au système qu'il découvrait, incapable de se défendre face à ce que mon vieux aurait appelé « le mal ». Sigmar rédempté lorsque j'ai rencontré un italo-américain qui se faisait appeler Larry... Il me manque ce vieux monsieur infatigable, sa compréhension du monde, son empathie, son absence d'idées préconçues, sa tolérance...
Pourquoi ? Je suis ici avec Dan et il a la plupart de ces qualités là, et d'autres...
Je rougis, je lui jette un regard, l'espace d'un instant j'ai totalement oublié Camille.
Je retourne à mes souvenirs... Sigmar papillon volant d'un homme à l'autre, sans gêne ni regrets, Sigmar amoureux ! Moi qui avais pris garde à ne jamais aimer, à ne pas m'attacher, en train de me jeter à la figure d'un inconnu au risque d'être agressé ou rejeté, moqué... Le « coup de foudre » ! Quelle bêtise aurais-je dit ne serait-ce qu'une semaine avant ! J'en aurais ri, profitant de l'instant, heureux... Sigmar abandonné lorsque l'homme de ma vie a disparu sans laisser de traces ni envoyer de messages... Sigmar sauvé à son retour, grâce à Camille paraît-il ?
J'écoute sans entendre, je vois sans regarder...
- Je peux faire quelque chose pour son loa ? Je me propose, dites-lui, s'il vous plaît. Je n'ai pas de religion, mes mains sont libres.
Je me redresse comme foudroyé ! Elle tend la main, Sheridan va la prendre ? Que risque-t-il ?
J'ignore totalement ce qu'un loa peut faire, moi, je crois en Dieu, j'ai depuis longtemps repoussé toutes les pratiques, croyances, tous les rites particuliers... Dieu existe, elle y croit aussi, elle a parlé du Bon Dieu. Alors je tends ma main.
Si Dan est aspiré dans l'autre monde, par je ne sais quelle entité innommable pour moi, nous serons deux !
- Si c'est utile alors j'en suis. Je fixe Sheridan, cherchant en lui la force, Camille est avant tout SON ami, moi je le connais peu... Mais étendu là, comme flottant sans parvenir à trouver une destination, il me semble tout à coup faible et vulnérable. Siggy Hensen est un égoïste, mais quand il aime, il aime sans aucune limite ! Je ne dirais pas que les amis de tes amis sont mes amis, Dan, mais si tu juges nécessaire de l'assister, alors j'en serai ! Pas par jalousie, ni par défiance... Juste par... amour.
- Que pensez-vous faire ?
Son regard me dit qu'elle cherche, frénétiquement... Nous nous tenons les mains, elle a celle de Camille dans la droite, la gauche est à portée de Sheridan... et moi je tiens Dan, il me semble que pour que ça marche -où ai-je pris ça ?- il faut que la chaîne soit bouclée ? D'une main je serre la main de Dan comme si elle risquait de m'échapper, de l'autre je cherche celle de Camille que Mary n'agrippe pas déjà...
Tout à l'heure, quand elle nous a rapidement présenté la situation, elle a parlé de portes ? De loa des carrefours ? J'ai la volonté de construire un Sweet Home qui ne soit pas celui de mon enfance, nous y vivrons, tous les trois, tous les quatre ? Elle semble beaucoup tenir à Camille...
Univers fétiche : euuuh aventure, fantastique, city, histo, steampunk...
Préférence de jeu : Homme
Mandrin
Mer 10 Juil - 4:31
Sheridan Roje
Je suis citoyen américain ans et je vis à La Nouvelle-Orléans, USA. Dans la vie, je suis conducteur de calèche et je m'en sors pas mal du tout. Sinon, grâce à ma chance, je suis fou amoureux et je le vis plutôt bien. On m'a donné tous les surnoms possibles sur la base de mon nom existant, alors n'hésitez pas, créez votre propre sauce ! Vous gagnerez peut-être un prix si vous arrivez à me faire rire ! Je suis notamment reconnaissable à ma cicatrice au visage, souvenir d'une époque où j'ai tenté ma chance comme cascadeur et très vite regretté. J'étais ado, on fait tous des erreurs. J'ai laissé tombé la comédie et l'escrime à ce moment-là, pour me consacrer au ranch de ma mère et à un apprentissage d'artisan, mais en arrivant en Louisiane, en construisant ma propre famille, j'ai renoué avec ces vieilles ambitions.
Oh, je ne cherche plus à faire carrière sur vos écrans. Quoique j'ai déjà fait un peu de figuration pour un petit clip de métal que vous n'avez sans doute pas vu. Non, surtout, je transporte les touristes en calèche dans la vieille ville pendant que le guide raconte l'Histoire ancienne, et à force de tout entendre encore et encore, je commence déjà à connaître tout ça par coeur.
Un nouveau sentiment apparaît sur les traits de Dan alors qu'il serre dans sa main celle de son aimé. Le sentiment d'une fierté indicible, que rien ni personne ne pourra lui retirer. Il ferme les yeux. Il est prêt. Il ne se laisse pas gagner par les voix insidieuses qui lui suggèrent de protéger Siggy avant tout, de le voir comme son bien, comme une créature fragile, avec laquelle se retirer à l'écart de tout ce qui se passe ici, un sourire à conserver pour son agrément personnel. Siggy est son homme et ils marchent côte à côte, et peu importe la route. Ne se sont-ils pas rencontrés sur une plage, à l'extrémité du monde, au coucher du soleil ?
"...Light up the New World," murmura Faltenin avec un doux et étrange sourire, en hissant sa silhouette filiforme hors de son lit à baldaquins. Bien loin de là, dans un autre monde.
Faltenin était, physiquement et à plus d'un titre, ce que l'on appelle communément un elfe. Issu d'une lignée princière quelque peu déchue qui opérait une école d'escrime fanée dans les faubourgs du quartier Perle, il avait été miraculeusement épargné lors de leur massacre suite à une obscure querelle de clochers, et déposé bien loin de là, auprès de parents simples, dévoués mais peu équipés pour l'éducation d'un tel être. Jeune homme, il avait cru un jour se perdre dans la brume au bord de l'eau, et avait franchi un Seuil magique qui l'avait ramené sur les traces de ses ancêtres, dont il avait repris le flambeau, non sans déboires et alliances incongrues. Cependant il se sentait toujours très seul ; c'était ce sentiment qui poussait les elfes de son quartier, les fantômes et autres démons des quartiers voisins à hanter les gens simples de l'autre côté des Seuils, à leur propos des pactes contre-nature et des changelins à élever. Il n'en guérirait sans doute jamais.
Un Seuil, cela pouvait être réellement n'importe quoi, pour peu qu'une âme ait besoin d'un effort conscient et volontaire pour s'y diriger, car il fallait que le passage soit consenti. Oh, bien sûr, souvent les pauvres hères n'avaient aucune idée de ce qu'ils acceptaient vraiment. Dans son cas, ç'avait été la nostalgie confuse d'un soir de tempête sur le rivage. Une porte bien sûr pouvait être une alternative, mais aussi un rêve un peu trop intense et réel. Un film qui vous happe. Une bête qui vous mord. Une mauvaise chute dont vous priez tous les Enfers pour survivre. Un livre pour enfants, un terrier de lapin dans lequel vous vous sentez plonger. Les charmants orifices d'un succube qui joue les ingénues... Et, ce soir, un cercle de mains réunies pour une cérémonie hasardeuse.
Il les entendait, leurs voix résonner dans la salle d'armes désertée de son manoir, leurs visages se refléter dans les miroirs écaillés et le vernis des anciens tableaux. Tant mieux : les visages que ces tableaux avaient autrefois portés ne lui avaient jamais paru familiers, même s'il savait, intellectuellement, qu'il leur était relié par le sang. En prêtant davantage attention, il entendit des voix distinctes répercuter leurs échos dans le tintement du lustre à la brise légère, qui entrait par une fenêtre brisée. Pourquoi prendre la peine d'engager des travaux de réfection, alors qu'il avait le pouvoir de modifier les apparences ? La sienne le plus aisément, mais celle de ses possessions aussi, avec un petit effort. Il ne devait pourtant pas abuser. C'était un être frêle, à peine un filet d'homme, et il s'épuisait vite. C'est ce qui le rendait si mortel au combat. Il devait en finir immédiatement, d'un coup de pointe chirurgical porté froidement comme une morsure de serpent, sans quoi le souffle lui manquait bientôt et il se trouvait en difficulté. Un duel trop prolongé, comme une danse trop soutenue, aurait pu le tuer sans que son adversaire le touche.
Ses nouveaux amis n'étaient pas encore en position de traverser le voile pour jouer avec lui. Il allait donc les rejoindre. Pour cela, il se para d'un visage en adéquation avec leurs attentes - approximativement, car il ne connaissait pas leur religion. Il faudrait qu'il se renseigne dans le quartier voisin, résolument orienté vers les arts de la mort. En attendant, une cape et l'ombre ambiante feraient l'affaire. Il apparut soudainement parmi les vieux arbres enrubannés de mousse, sa chevelure luisant dans les ténèbres avec l'éclat d'un casque de perles noires. Il aimait cette atmosphère. Il reviendrait de temps en temps. Et sans aucun faux-semblant, qu'était-il lui-même, sinon l'ombre d'un regret, le fantôme d'un temps passé ? Une empathie immédiate le porta vers les trois hommes qui se débattaient, soutenus par une femme plus sage et plus apaisée. Il lisait en eux. C'étaient des livres ouverts. Ils pleuraient leur passé mais voulaient un avenir. Ils étaient tous hantés, et c'est pourquoi ils ne pouvaient s'aider mutuellement, uniquement se comprendre sans effort. Ils étaient ses frères.
Faltenin allait les aider. Et puis, parce qu'un pacte avec un elfe est à l'égal d'un pacte avec un démon, il y aurait une contrepartie. Mais lui-même, chaotique qu'il était sous son apparence aristocratique, ne savait pas encore laquelle. C'est ce qui était amusant, n'est-ce pas ? Il les considéra sans un mot, eux, puis les fantômes qui les tourmentaient. Une vieille femme hagarde, un homme couvert de sang- le garçon blond aux cheveux courts était hanté par un vivant, voilà qui serait plus compliqué ; avec les morts, on s'arrangeait toujours si aisément. Oh, eh bien, il n'y avait qu'à souhaiter la mort de ce brave patriarche. Quelque chose lui disait que ces trois jeunes gens étaient liés, et qu'il ne pourrait pas secourir l'un sans les deux autres. Faltenin tendit la main vers la vieille folle que lui seul pouvait voir, et prononça une incantation. Elle se matérialisa momentanément sous la forme d'une statue tordue, bouche ouverte sur un cri silencieux, qui évoquait les statues de cendres retrouvées sous les anciens volcans. De même pour le mort au crâne éclaté. Tiens, comment était-il mort celui-là ? Des coups de batte pour une affaire de chien, c'était amusant, l'escrimeur ne regrettait pas son séjour.
Il se transporta brièvement dans les pensées du jeune homme blond afin de localiser son démon personnel. Ce dernier était au lit à une adresse lointaine et dormait lourdement. Faltenin apparut entre les draps, en adoptant les traits de l'enfant disparu. Il se hissa au-dessus du corps ensommeillé, et déposa ses lèvres sur le front ridé. Sa langue se changea en pointe de rapière. Un simple coup entre les deux yeux, à la faiblesse du front, comme on tue les taureaux. Un soubresaut gémissant et sauvage, un filet de sang qu'il absorba en riant. Et une troisième statue qui apparut là-bas, la main tendue vers son ancienne cible, éternellement figée. Cette âme-là n'aurait pas profité bien longtemps de sa damnation.
A présent, à eux de faire leurs choix. Le poids qui pesait sur leurs âmes et les entraînait vers le fond était là, devant eux. Trois hideuses statues qui semblaient avoir toujours été là. Ils pouvaient décider ce qu'ils en feraient. Le temps d'offrir des présents étant passé, Faltenin était curieux, revenu à son espièglerie coutumière. C'était la partie du pacte qu'il préférait. Il s'assit en tailleur pour les observer avec de grands yeux d'enfants et un sourire sans malice. Il n'avait pas prononcé un mot.
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Oskar
Mar 13 Aoû - 12:09
Camille Grant
J'ai 22 ans et aprés un déracinement volontaire de deux ans, je suis revenu dans la demeure familiale à côté de Bâton Rouge , en Louisiane, aux USA. Dans la vie, depuis ma plus tendre enfance, je vis entouré d'artistes. Ma mère était danseuse classique et a interrompu sa carrière à ma naissance, ma grand-mère était une célèbre tragédienne de théâtre et mon « grand-père » son second époux, de quinze ans son cadet a connu un succès fulgurant au cinéma en tant que jeune premier. Seul mon père, trader et fils d'un riche banquier dénotait dans ce milieu, ça n'a pas eu d'importance bien longtemps puisque après leur divorce mes parents sont partis, chacun de leur côté, laissant à qui en voudrait l'enfant pourtant chéri et comblé pendant ses deux premières années d'existence...
A mon tour je suis monté sur les planches, après avoir étudié la danse, le cinéma, les effets spéciaux. Actuellement, je suis danseur peint dans un cabaret luxueux de Californie. Enfin... j'étais, je me suis mis en congés, d'une durée indéterminée, s'ils me virent je suis suffisamment à l'aise financièrement pour voir venir et attendre. Je m'en sors pas trop mal. Sinon, grâce à ma très grande chance, je suis célibataire et je le vis à merveille, espérant le rester jusqu'à la fin de ma vie !
FC : Nils Verberne - à découvrir sur @Lithunium.snow
A ajouter :
Je suis fils unique, enfin je dois avoir des demi-frères et sœurs, que je n'ai jamais vu et dont je ne connais pas plus le nom que le visage... Subjugués l'un par l'autre mes parents se sont mariés en quelques mois, puis ont découvert que non seulement ils n'avaient rien en commun mais qu'ils étaient incapables d'intégrer la personnalité et l'éducation de l'autre. Amants, déçus, méprisants, haineux... Leur divorce leur a fait tout rejeter des deux années passées ensemble, tout, jusqu'à l'enfant né de l'union. Sans Lianne Auffray et Humphrey Grant mes grands-parents, j'aurais été proposé à l'adoption. Humphrey a péri dans un accident l'année de mes treize ans. Lianne l'a suivi sept ans après, terrassée par ce qu'on appelle « une longue maladie » qu'elle a combattu avec fureur et courage. Leur disparition m'a fait fuir la Louisiane, cette terre où ma famille -celle de Lianne- avait accosté dans les premières années de l'émigration française. L'histoire ne m'intéresse pas, moi, petit blanc abandonné élevé par des gouvernantes souvent noires, j'ai baigné dans une atmosphère surréaliste, solitude, mystère, légende, religion... et cette grande maison, ces maisons, la vieille, demeure de maîtres à l'époque de l'esclavage, celle dite « du gardien » grande bâtisse qui servaient de logement non seulement au gardien mais aux domestiques blancs, et la dernière, celle que Lianne a fait construire à l'aube des 70's, lorsqu'elle a connu ses premiers succès. Particularité ? La maison de mon enfance jouxte une plantation « hantée » par une quinzaine de fantômes que j'ai en vain cherché dés mes six ans...
J'ai 25 ans. Je suis revenue à Bâton Rouge , en Louisiane, aux USA après avoir fait des études sur la Côte Est. Dans la vie, je tiens un magasin de souvenirs, tout particulièrement d'articles "vaudou" plus ou moins réalistes. Accessoirement, je suis aussi... la Mambo Mary, prêtresse qui officie pour les fidèles de la région.
Financièrement je m'en sors pas trop mal surtout depuis que j'ai revu Camille Grant. Sinon, grâce à ma très grande chance, je suis célibataire et je le vis à merveille, dans ma famille, aucune femme n'a l'idée saugrenue de se marier, elles restent indépendantes !
FC : Sira Kanté
A ajouter :
Pour expliquer les « Desoffrey » je dois faire un bref cours d'histoire... ça commence dans les années 1860 à Bâton-rouge et La Nouvelle-Orléans. Une jeune demoiselle fille d'un planteur, fille unique nantie de deux frères plus âgés, s'éprend d'un bellâtre blond aux yeux bleus, bonne présentation, bagou et assurance : Thomas Auffray un « Français ». Le fruit de leurs errances se présentant de façon un peu trop visible, Mary Warrington est mariée de toute urgence au père de son enfant, ils en auront un second au grand dam des parents de la dame... Thomas est un gigolo presque un aigrefin, il vit aux basques de sa femme et de sa belle-famille, joue toute la nuit, trompe son épouse. Tant et si bien qu'il perd en une soirée mémorable tout son avoir, y compris la dot de Mary et presque Anthelme son valet... Presque ? Parce que s'il se fiche totalement de sa femme, il ne veut pas perdre mon aïeul qui sera d'ailleurs affranchi comme tous en 1865. Le mari indélicat et ruiné est mis de côté, Mary retourne auprès des siens et meurt en couches peu après, l'histoire ne dira pas si le nouveau-né coupable d'avoir tué sa mère est vraiment un « Auffray », en tout cas il en porte le nom. Les trois garçons sont élevés par leurs grands parents, l'histoire des Auffray s'arrête là.
Celle d'Anthelme commence juste, en décembre 1865 l'abolition de l'esclavage lui donne une identité, quel nom de famille coller à son prénom ? Il est l'Anthelme « des Auffray », de là vient notre patronyme. Une fois libre, le valet de Thomas reste valet de Thomas, et complice aussi ce qu'il a toujours été. Simplement, il se marie, et l'aventure commence. Il a deux filles, Judith et Mary Desoffrey... Elles seront les premières d'une longue lignée... de reines. Entre temps, en 1875 Thomas désavoué par sa belle-famille, retourne sur ses terres d'origine à NOLA, il y entraîne mon ancêtre et les siens, là-bas, Marie Laveau œuvre, reine incontestée et le vaudou est en plein renouveau.
Cela pour la parenthèse historique, à la mort de Thomas -revenu je ne sais quand ni pourquoi à Bâton-rouge en entraînant son domestique- les Auffray comme les Desoffrey n'en bougent plus. Les uns et les autres sont noyés dans le culte, maîtres et valets unis par la magie et la foi.
Moi ? Je suis donc la fille de Myrtle, seconde fille de Camélia. Je suis née en 1998 des amours de ma mère alors trentenaire et d'un connard nommé Clint Harper... Un peu le même style que le Thomas Auffray des origines, en black, et en fauché. Lui n'épousait pas d'héritière, il se contentait de semer des Harper qu'il ne reconnaissait jamais et de vivre aux crochets des mères -célibataires sans vraiment l'être-. Ça n'a pas dérangé la mienne, il était plus âgé qu'elle mais beau gosse, s'y entendait en amour -en sexe soyons franche- et ne l'emmerdait pas ni par sa présence ni par sa jalousie.
Mon enfance a été particulièrement heureuse, jusqu'à la mort de mon jeune frère abattu presque à bout portant alors qu'il marquait avec quelques jeunes du quartier sa désapprobation pour le meurtre dans le Missouri de Mickael Brown, un afro américain de dix-huit ans. Là, j'avoue que mon monde a basculé... J'ai demandé aux loas la force de conquérir ce monde, LEUR monde ! Un monde où la couleur de peau te met d'office dans le mauvais camp, où tu n'es quoi que tu fasses qu'un citoyen de seconde zone ? Ma mère est parvenue à canaliser ma haine, c'était pourtant le fruit de ses entrailles qui était enterré...
De bonne élève je suis devenue excellente, j'ai œuvré pour obtenir des bourses d'études, pour intégrer une école réputée, continuer mes études quoi qu'il en coûte ! Pourquoi l'histoire de l'art ? Pourquoi l'histoire tout court d'ailleurs, parce qu'elles renferment le sens de ma vie ? Si en son temps une prêtresse vaudou n'avait pas été arrachée à son sol, amenant avec elle sa foi et son pouvoir sur ces terres, je ne serais pas celle que je suis, issue d'une longue lignée de houngans et mambos...
Je suis donc diplômée, doublement, d'histoire des arts et d'histoire des religions. Le genre de diplôme plutôt confidentiel qui auraient dû m'ouvrir les portes de musées ou me permettre de rejoindre des équipes de chercheurs en éthologie ou ethnologie ? J'ai choisi autre chose, j'ai repris une petite boutique à Bâton-rouge pas loin de cette plantation Myrtle qui fait couler tant d'encre, prétendument hantée. J'y vendais des souvenirs de Louisiane, commerce florissant ne vous y trompez pas ! Et … des filtres, envoûtements, maléfices... Cela, pour l'arrière boutique.
C'est la que j'ai eu la surprise récemment de voir entrer Camille, le Auffray de cette époque dont la grand-mère Lianne a eu l'agréable surprise de se voir remettre -en tant que dernière héritière de la famille- la fortune Warrington. Je le connais depuis sa naissance quelques années après la mienne, j'ai joué avec lui, il était l'ami de mon frère autant que le mien...
Pour l'instant j'officie principalement pour lui, mais il y a ici une population de croyants aux oreilles desquels mon retour a été propagé par des bouches amies. Dans mon arrière-boutique, des fétiches, des fioles, tout un assortiment de poupées... Cela, c'est le folklore, la puissance est ailleurs, résumer mon savoir et mon talent à ces objets serait dire que le vent souffle parce qu'on a mis à sa disposition des manches-à-air ? Je suis habitée... Quand je danse, je sens graduellement les loas se mettre à ma portée, les ancêtres appelés ouvrent la porte aux guédés... Accesoirement, je sers les loas « des deux mains » comme on dit chez moi, magie blanche et sombres sorts... Si c'est vraiment nécessaire...
La plupart des gens voient tout cela comme une survivance de croyances superstitieuses, un dangereux amusement -qui sait, si c'était vrai !- moi, je crois, je sais.
Cela dit, pour mes nouveaux voisins, je suis Diane Desoffrey, les femmes trouvent parfois que mon physique leur porte préjudice alors je fais en mesure de paraître quelconque, les hommes... pour beaucoup lorgnent sur ma silhouette oublieux de tout ce qui fait ma personnalité, instruction, profession, intelligence même ? Je hais ces mâles qui restreignent la femme à son rôle de femelle !
Pour d'autres, ceux qui comptent pour moi en fait, je suis la Mambo Mary.
Sigmar Hensen, Sheridan Roje, Camille Grant et Diane-Mary Desoffrey
Soudain, je me sens comme happé vers le haut, comme je le serais après avoir sauté dans le vide un élastique autour de la taille -ou de je ne sais trop où, ce n'est pas le type de sport que je pratique-. La comparaison s'impose à moi, mais je pourrais tout aussi bien dire -et cela je l'ai expérimenté- que j'ai plongé dans une mer de rêve et qu'ébahi par le beauté des lieux je me suis laissé couler, en oubliant de respirer, pour soudain réaliser que si j'essayais d'aspirer de l'air je me noierais dans cette splendeur... Un rêve, je viens de vivre un rêve ? Certes, mais à l'opposé de cette presque noyade dont j'ai encore tant de plaisir à me souvenir, je viens de faire un des pires cauchemars de mon existence. Je suis pourtant un expert en horreur, du fond de ma mémoire ne remonte rien de bon, manque d'amour, trop de solitude, des mensonges, des dissimulations, et toujours, ce sentiment d'inutilité, de comédie -ou tragédie- parce que je ne suis ni celui qu'il faut ni là où il faudrait. Pourrai-je dire un jour que j'ai touché le fond aujourd'hui ? Mary m'a-t-elle aidé à rebondir ? Comme lorsque tu sautes à l'eau pour donner un coup de pied vigoureux sur le sol de la piscine ? Je ne saurais l'affirmer...
Toutefois,
Mes yeux s'ouvrent, ma raison renaît, les ombres autour de moi se figent puis s'estompent, les cris se taisent... Je suis libéré, je suis LIBRE ! Je regarde la prêtresse, ma gratitude perle comme autant de larmes de joie puis... je m'immobilise, interloqué. Ma mambo est mécontente ? Son but n'était-il pas de me sauver ? Pourquoi soudain parait-elle furieuse de me voir revenir à la vie ?
Ce n'est qu'une impression fugace, ça a duré quelques secondes, Mary est une fille bien, elle peut mentir mais c'est toujours pour la bonne cause, là elle ne cherche pas à dissimuler et j'en comprends le motif en voyant les statues, puis l'individu ? Qu'est-ce que ce type fait là ? L'a-t-elle invoqué ? Est-ce un guédé revenu de l'autre côté, un hounsi dont elle a sollicité l'aide ? Je ne comprends rien, je ne sais qu'une chose, je sombrais et le bateau s'est remis à flot, les trous dans la coque sont réparés comme par magie, le navire ne prend plus l'eau.
Pour qui ne connaît pas Mary, elle semble juste surprise et soucieuse, soulagée aussi de me voir à nouveau présent.
Oui, pour qui ne connaît pas Mary, tout est normal, satisfaisant.
Mais moi... je ne la connais que trop, son visage calme et réfléchi cache l'éruption imminente du volcan intérieur qu'elle abrite. Elle sait comme nulle autre cacher ses émotions, ses craintes comme ses plaisirs, ses succès comme ses défaites... Mary, est elle aussi une statue, ses traits sont modelés une fois pour toute, ceux d'une très jolie femme, instruite, cultivée, puissante d'une magie qu'on perçoit même lorsqu'on est ignare.
Il est évident que ça ne va pas. Inutile de se leurrer, elle n'essayera pas de tromper son monde. Quelque chose ou quelqu'un l'a contrariée, monstrueusement contrariée, elle jette aux statues un regard noir et à l'homme un coup d’œil meurtrier, pourquoi ?
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Il est apparu... Demander au seigneur des portes d'en ouvrir une et voir la chose se faire, je devrais être comblée ? J'ai fait ma demande et il m'a exhaussée ? Pourtant, en moi immédiatement se fait l'idée que ça n'est pas la bonne, toujours pas la bonne ! Comme si le maître des carrefours continuait à jouer avec Camille, à le faire s'égarer ? Ce que j'ai invoqué, en admettant que ce soit moi qui ai ramené dans notre monde cet être, n'est pas un loa, pas un guédé, ce n'est pas une créature... souhaitable.
Très jeune j'ai rangé Cam dans la catégorie des hommes trompés par l'apparence, à l'origine je le verrais lié à la divinité de l'eau, c'est son élément, l'eau, c'est curieux, elle porte parfois le nom de Dan ? Est-ce pour cela que Camille s'est tant attaché, sans raison visible, à ce grand type qui a offert son sang pour le sauver ? Dan : la divinité de l’eau, de la prospérité et du bien-être.
Dan, c'est le serpent, non le serpent retors et pervers de la Bible des Chrétiens mais un animal sacré qu’on ne doit pas tuer. C'est pour cela que j'avais prévu avant que la possession empire soudainement de lui tendre l'animal encore dans son panier pour le réconcilier avec sa nature, et obtenir enfin qu'il soit lui et non la créature modelée par Lianne. Dans la version chrétienne du vaudou pratiquée ici, Dan correspond à Saint Patrick l'inlassable évangélisateur de l'Irlande. Malgré moi je jette un œil sur le seul autre « homme de couleur » présent ? La prospérité, le bien-être, l'endurance, la patience, la foi en sa valeur et la volonté ? Est-il tout cela ? Dan -le loa- a assisté à la création et soutient l’univers. Il règne non seulement sur la santé et la vie, mais aussi sur la maladie et la mort.
Camille lui, a choisi de s'en référer à Lègba. L'élément qui est le sien en a-t-il pris ombrage et permis à Lianne de prendre le dessus ? Ma grand-mère m'a appris que le loa te choisit et non l'inverse, Camille malgré sa foi et ses connaissances a voulu forcer le destin... J'ignore s'il en a payé le prix, en tout cas ce n'est aucun des dieux connus qui se dresse devant moi, pas même le sulfureux dieu des croisements et de la réflexion auquel mon ami a choisi de lier son destin.
Papa Lègba est descendu sur terre sans instructions ni but véritable. On dit de lui qu'il a bafoué Dieu en lui manquant de respect. Il a erré dans des lieux inconnus, ne sachant que faire. Comme il connaît les langues des deux mondes, il est le messager entre le divin et le profane. Que Cam s'y soit reconnu est presque naturel, tous les deux errent en se donnant une apparence de sérénité, d'assurance et de joie... Tous les deux ne sont que des proscrits.
Camille, perdu entre deux mondes, puis soudain ce... Je ne sais pas si un baka peut se présenter sous une forme humaine, je n'ai jamais entendu parler d'une telle chose mais ma mère me dirait que je suis bien jeune pour tout savoir ! En tout cas, je sens dans ce nouveau venu de la malice, de l'impiété, et une bonne dose de pouvoir maléfique !
Il y a là trois statues.
Trois effigies pour trois hommes ? L'une est Lianne et une autre un homme âgé dont Sigmar a repris bien des traits... Cam m'a raconté ce qu'il sait de Siggy, si Lianne est morte, le père et tortionnaire du blond lui est encore vivant. Était ?
Et le troisième ? Qui est-il ? Pourquoi ces trois là ?
Je recule précautionneusement, vais ouvrir la cage du serpent que je tends au danseur miraculeusement remis, je prends une boîte et m'enduis les mains d'une pâte blanche à base de farine et accroupie je commence à tracer les vévés -symboles de protection- en un cercle dans lequel, sans ménagement j'inclue mes compagnons, repoussant brutalement en dehors l'individu apparu par magie.
- Je ne sais ce que tu es mais si tu veux invoquer les guédés de chacun ici, il en manque un... Fais revenir d'entre les morts tous ceux qui le doivent et peut-être que je t'accorderai mon oreille ?
Tous … A moins que dans le monde qui est le sien seuls les mâles comptent ? J'ajoute, à la foi en colère et pleine d'une crainte irrationnelle.
- Tout se paye, tu dois le savoir ? Tout, même l'attention.
Moi, j'ai choisi la vie, la joie, la création, le miracle des naissances et renaissance... Il veut jouer à un jeu ? Jouons ! Puisqu'il semble rappeler de l'au-delà des êtres chers à tous, qu'il me rende ce qui me manque le plus et qui est à l'origine de mes choix d'existence.
Restant dans le cercle, je trace sur son front d'autres vévés pour guider les esprits jusqu'à son âme et savoir enfin ce qu'il est ...
Par une étrange magie, le graphisme en change et j'assiste effrayée à cette mutation...
Camille voulait ouvrir une porte ? Celle qui s'offre à nous n'est -comme je le sentais pas la bonne-. Devant nous s'ouvre ce que les plus anciens parmi les anciens, des entités d'avant notre monde, nommaient...
un seuil.
Ma science comme ma foi ne me seront d'aucun secours. Déjà, l'être qui a modelé les statues est entré. Avec lui s'est révélée une autre dimension.
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Ce que je sais du vaudou...
Ici:
C'est à dire très peu, je ne suis qu'un profane qui énonce peut-être des invraisemblances !
Mambo : prêtresse, maîtresse de cérémonie. Hougan : son homologue masculin Guédé : esprits des morts, ou ancêtres revenus Vévé : les symboles tracés par le/la prêtre/sse pour faciliter le passage des esprits loa : divinités baka : mauvais esprits bokor : sorcier maléfique Hounsi : assistant de cérémonie initié ...
J'ai 27 ans et je vis pour l'instant à côté deBâton Rouge , en Louisiane, aux USA. Dans la vie, j'ai étudié l’ethnologie sociale, puis contre toute attente j'ai quitté les miens et mon avenir tracé pour me transporter jusqu'à San Diego, en Californie. Là, après une période difficile où j'ai tenté de vivre en vendant mes dessins, portraits et caricatures (et ai fini par offrir mon corps), j'ai intégré l'équipe du Lorenzo's, une pizzeria minuscule tenue par Larry, un phénomène de 82 ans paternel et volubile. Je suis devenu livreur de pizzas en rollers et je m'en sortais pas trop mal. Sinon, grâce à ma chance, je suis désormais fiancé et je le vis bien. A ajouter ? Je suis l'aîné de quatre enfants, né dans le Nevada dans une petite ville du nom de Sweet Home, la mal nommée. Mon père était -et est sans doute toujours- chirurgien, chef du secteur orthopédie de l'hôpital local, et ma mère femme au foyer. Nous avons été élevés d'une main de fer dans la plus stricte observance des commandements de Dieu ! Jusqu'au jour où j'ai avoué que je suis... homosexuel.
- 18:
Mon père n'aurait pas dû être choqué, puisque toute mon enfance il m'a rendu visite, chaque nuit ou presque ? C'est une calamité qu'il doit connaître aussi puisque c'est le plus âgé de ses fils et non une de ses filles qu'il avait élu comme « préféré » ? Ce secret là, je le cache, je n'ai jamais rien dit, ni à mes frères et sœurs, ni à ma mère qui n'a semble-t-il rien vu, ni à Dan, surtout pas !
Sigmar Hensen, Sheridan Roje, Camille Grant & Diane-Mary Desoffrey
TW : Racisme - Homophobie - suprémacisme blanc, parfois évoqués
Je fais face à la statue, une reproduction étonnamment ressemblante de mon père, malgré son immobilité synonyme d'absence de danger, mon sang s'est figé...
Je regarde les deux autres « totems ? », comment peut-on appeler cela ? C'est si... glaçant au fait, mon contrôle de mes peurs petit à petit s'engourdit, je suis à la fois dans un bad-trip et dans un état étrange de presque stoïcité...
Une vieille femme que même moi je ne peux que reconnaître, doublement, parce qu'elle a gardé les traits de la tragédienne si connue qui fut maintes fois honorée par l'attribution de prix dont le nom m'échappe, l'équivalent des oscars pour le théâtre je pense ? Je n'y connais pas grand chose, ma famille tenait théâtre et cinéma comme des lieux de perdition où l'on mettait en scène des histoires païennes et subversives. J'ai donc reconnu l'actrice parce qu'on ne pouvait l'ignorer, la moindre revue people ouverte chez le dentiste ou le coiffeur imposait son visage, son corps mince et parfait, vantait sa présence sur scène, sa merveilleuse et scrupuleuse interprétation des rôles... Puis, si j'avais voulu l'oublier, ses portraits : photos, aquarelles et huile sont partout dans la maison de Camille qui est restée la sienne...Il a fait de ce lieu un mausolée... Lianne, Lianne Auffray, la grand-mère adorée qui hante le blond danseur !
Qui est l'autre ? Un homme ? Celui de Dan je suppose ? Est-ce l'homme qui l'a livré à des tortionnaires, vendu et voué à la séquestration ? Étrangement ses traits me sont familiers ? Je n'ai pas le temps de chercher, en plus des trois statues si réalistes, est apparue...
Une porte !
Nous sommes là, tous les quatre, en cercle... Nous tenant les mains comme pour une ronde d'enfants dans une petit espace circulaire lui aussi, délimité par de drôles de symboles. Mary pour les tracer a lâché la main de Camille -quelques minutes- et Dan aussitôt m'a fait signe de reformer la danse... La prêtresse, une fois ses protections inscrites sur le carrelage bi-centenaire nous a rejoint, Dan l'a laissée s'insérer, il tient Camille et Mary, Mary tient Dan et moi. Je tiens Mary et Camille... Elle a tracé son cercle en y enfermant les statues...
Face à nous, un homme, le sourire aux lèvres. Il n'a l'air en rien menaçant, il regarde les statues, il semble convaincu que nous avons un lien, lui, Dan, Cam', moi … et ces représentations qui paraissent en lave sombre.
La mambo elle enrage, il semblerait qu'elle voit la porte pourtant ?
- Je ne sais ce que tu es mais si tu veux invoquer les guédés de chacun ici, il en manque un... Fais revenir d'entre les morts tous ceux qui le doivent et peut-être que je t'accorderai mon oreille ? … /... Tout se paye, tu dois le savoir ? Tout, même l'attention.
Je ne comprends rien, j'avoue, je suis largué... Jamais je ne me suis senti autant... livreur de pizzas. Un mec sans cervelle, un mec de l'immédiat, dont la seule préoccupation est d'arriver avec la marchandise mangeable, c’est-à-dire chaude et intacte ! J'avais choisi la sécurité, le présent, repoussé la pensée, les remords éventuels, même les visages et les voix du passé ! Je m'étais forgé une nouvelle famille... Larry me manque, ses accueils en italien de pacotille, ses blagues foireuses et ses sentences si justement assenées... Je m'étais trouvé un père, un foyer, puis les choses ont commencé à bouger... D'abord, Belle a jailli de nulle part ; elle a manqué me tuer en roulant comme une folle au volant d'un coccinelle tout droit sortie des 70's, à la carrosserie peinturlurée de fleurs, de cœurs... n'y manquait que « Peace and love », mais il n'empêche que ma sœur, la plus jeune des deux, conduisait comme elle chantait, en hard rock metalisant ! Ce jour-là je n'ai dû qu'à mes réflexes de sauver ma peau, tandis que la voiture s'arrêtait et qu'une blonde échevelée, vêtue d'une jupe plus courte qu'un string et un haut transparent sortait en claquant la portière « Mais vous pouvez pas faire attention ! J'aurais pu vous rouler dessus ! Espèce de … tocard !» . Elle avait hésité, cherchant un « gros mot » vraiment ignoble ! Je n'ai gardé mon calme que parce qu'il me fallait livrer -vite- puis la harpie que j'avais à peine regardé a balbutié « Sigmar ? » et j'ai levé les yeux, stupéfait, personne à San Diego ne m'appelait par mon prénom, la plupart de mes connaissances ignoraient de quoi « Siggy » était le diminutif et même s'il s'agissait bien d'un diminutif. Belle m'avait sauté au coup, ma marchandise n'est jamais arrivée au port... Elle m'a dit qu'elle allait à un concert, un concert de metal qu'elle donnait avec un groupe dont le nom me laissait de marbre, que Markus notre benjamin avait fait un gosse à une gamine de son âge, noire de surcroît, et qu'il s'était tellement pris le bec avec notre père qu'il avait pris ses affaires, entraîné sa femme et était venu ici dans l'espoir de la retrouver elle...
Pourquoi tout ça me revient ? Après cela j'ai rencontré Sheridan, et plus rien n'a eu d'importance... Quand il m'a largué, ou du moins que je me suis égoïstement cru largué sans imaginer une seule fois qu'il pouvait être retenu contre son gré, c'est Belle qui m'a consolé en partie... Puis, Dan est réapparu et de nouveau j'ai plané sur un nuage, laissant ma rockeuse de frangine se dépêtrer de ses engagements, ses potes et l'amie qui l'hébergeait... De Markus, je n'ai jamais eu la moindre nouvelle...
Je suis là, à former un cercle pour enfermer trois statues, parce qu'elles seraient dangereuses, pour Camille, pour nous peut-être ? Et tout à coup, les enfants Hensen rescapés de la terrible éducation que nous ont administrée nos parents, aussi dégueulasse que les cuillères d'huile de ricin que ma mère s'entêtait à nous donner « puisque dans la famille tout le monde en avait pris, et s'en était bien porté » , me sautent à la gueule ?
Je ne comprends rien...
C'est comme un rêve, un mauvais rêve, qui sauterait du coq à l'âne. Cela arrive, un rêve qui commence avec Dan qui me ramène un cadeau que je juge TRES coquin, TROP... Puis Camille et son vaudou, la possession, cette divine Mary comme infirmière et repousse-démon, le cercle, enfin ce type né du néant en quelques secondes, sorti d'un trou noir d'un coup ? Comme ces diablotins qui bondissaient d'une boîte dans les vieux jouets du grenier chez mes parents et qui avaient tant effrayé Sarah lorsqu'elle n'était encore que mon unique sœur et qu'elle n'était pas devenue aussi conne que ma mère...
Je ne comprends rien, mais rien à rien !
Mais il y a la porte !
Je ne peux croire que personne ne l'a vu apparaître ?
Elle brille comme une étoile dans la nuit ?
Je suis attiré par une force indéfinissable... Quelque chose que je ne peux définir, si je disais à un toubib que présentement j’entends des voix ? Elles sont pressantes, impérieuses, à la fois fluettes et nettes, je les connais ! Ce sont les miens qui m'appellent ainsi ! Ma famille, la vraie ! Je ne peux résister, je ferme les yeux, ivre d'un effet que je ne peux définir ?
- Ouvre la porte ! Reviens-nous ! Ouvre la porte !
Soudainement j'oublie tout, Dan, Camille, Mary, le vaudou, la vie, la mort, la douleur, la peur !
Je lâche la main de Camille d'abord, puis à contrecœur celle de Dan.
La porte est là ! Lumineuse ! Irrésistible !
Le bel homme fin aux cheveux naturellement entrelacés est toujours là à essayer d'établir un contact malgré les remparts de Mary... Je le regarde, je regarde Dan, me suivra-t-il ? Je n'ai pas parlé, à personne, juste rompu ce cercle protecteur sous l'emprise d'un désir impossible à réfréner !
J'ouvre la porte et franchis le seuil !
Puis
Je réalise que je suis tout seul... Si Dan m'a suivi je l'ai perdu. Mais ce pays … je le connais. Je suis juste revenu... chez moi. Autour de moi, la forêt, des clairières, des ruisseaux, une sorte de grand étang à l'eau étrangement claire ? J'ai marché, sans même m'en rendre compte, me suis enfoncé dans la verdure malgré l'absence de chemins. Je crois que je sais où je vais. L'eau me renvoie mon reflet...
Je souris, je suis moi. Ce moi perdu il y a … tant de temps pour avoir voulu connaître l'humanité !