Après deux semaines sans nouvelles , je n'attend plus vraiment de signes d'Aura. C'était une simple soirée sans avenir et c'est sûrement mieux comme ça. J'essaie de ne pas y penser plus que de raison , les affaires dans le gang ayant bien repris ces derniers temps. Entre ça et mon boulot , j'ai de quoi faire pour m'occuper les idées .

Je reprend cette vie assez routinière et , alors que je finis tranquillement ma tournée du jour , je reçois des messages d'un numéro inconnu. Je ne peux empêcher un large sourire de se former sur mon visage . C'est Aura. Moi qui n'espérait plus...Même par téléphone, elle semble toujours aussi gênée.

Messages à Aura:

C'est vrai , me faire patienter deux semaines pour , enfin redonner signe de vie. Qu'elle attende quelques jours , ça me parait normal mais , au moins me donner son propre numéro...Bref. Au moins , ce n'est pas un simple salut ça va mais une...invitation !
Je note tout de suite son contact dans mon téléphone, faisant ainsi un arrêt sur ma tournée .

Messages à Aura:

Heureusement , ma tournée est courte aujourd'hui donc je suis disponible. Il ne faut d'ailleurs pas que je m'arrête trop longtemps , histoire d'éviter que mon patron me cherche des problèmes. J'écris un dernier message à Aura avant de ranger mon portable et de reprendre la route.

Messages à Aura:

Message à Aaron:

C’est en envoyant mon dernier message que je réalise que je viens de le tutoyer. Vais-je réussir à faire autant de vive voix. Non seulement, il accepte mais en plus, il fait de l’humour. Je crois que je suis sous le charme.

Calm down Aura.
On a dit un ami, rien de plus.

Enfin, je me vois plus comme son boulet qu’autre chose. 12h15 quand, je peux enfin quitter mon bureau. Je souhaite un bel appétit aux copains de l'étage. J’espérais pouvoir me faufiler hors du bâtiment. Mais visiblement Docteur A. en avait décidé autrement.

« Alors votre ami, parlez-moi en plus ! » Euh .. Non. Je lui fais un grand sourire. « Il est gentil. » Blanc total. Que voulez que je lui dise ?

Je m’en sers pour éviter que vous me mettiez le grappin dessus. Message reçu qui me sort de ce gênant moment. Merci Aaron ! Je récupère mes affaires, vérifie que je n’ai rien oublié sous l’œil aciéré de mon patron.

Il me met sous pression cet homme.

Pour le moment, ce sont toujours des sous-entendus malgré des refus plus que clairs mais je dois un marathon où il doit franchir l’arrivée. Nous prenons l’ascenceur et heureusement nous ne sommes pas les seuls. Bouffée d’oxygène quand je sors du monte-charge et me dirige vers la sortie. Je badge et me tiens bien droite devant le bâtiment.


« Oh Monsieur n’est pas ponctuel » J'ai presque l'impression qu'il jubile. Haussement de sourcil, atterée de son commentaire. Qu'est-ce que ça pouvait lui faire sérieusement ? Il avait pas un déjeuné avec mes autres collègues ? Que je ne vois pas arriver.

Ah bon , Aura tu aime prendre ton temps ? Bon à savoir. Je note l'adresse dans un coin de ma tête, un petit sourire à sa remarque sur la chemise. Elle finira par devenir vraiment importante cette chemise si ça continue.

Message à Aura:

Je constate néanmoins assez vite que je ne pourrai pas être tout à fait à l'heure. M'arrêter à nouveau pour lui envoyer un autre message me fera perdre du temps alors que je continue ma tournée en essayant d'accélérer pour ratrapper le retard. Finalement , lorsque j'ai terminé et que je dois changer de voiture et de vêtement pour enlever l'uniforme , j'en profite pour prévenir Aura , histoire qu'elle ne pense pas que je lui fous un vent.

Message à Aura:

Et , effectivement, quelques minutes plus tard j'arrive à l'endroit qu'elle m'a indiqué. Je me gare un peu plus loin et je la repère devant un bâtiment et marche vers elle d'un bon pas. Je lui offre tout de suite un sourire sincère , heureux de la revoir.

"Salut Aura ! Je t'ai pas fait trop attendre j'espère !" , je dis en approchant d'elle , hésitant sur la manière de la saluer alors je la joue gentleman de l'ancien temps , prenant doucement sa main pour y déposer un baiser avec un clin d'oeil. Puis , je remarque le mec à côté. Je lui adresse immédiatement un regard plus froid , je suis toujours tendu en présence d'inconnu , vieille habitude du gang. Un oeil vers Aura , je désigne l'homme du doigt , me fichant assez de lui pour ne pas lui demander moi même :

"C'est qui lui ?"

Sûr que j'allais la mettre dans l'embarras mais c'est tout moi.

Je regarde frénétiquement mon téléphone alors que le Docteur A. commente chaque minute sournoisement, tentant de deviner les messages. Malgré cet angoissant moment, je souris niaisement, pressé de le revoir. Enième propos du nuisible, je n’arrive pas à croire qu’il dépasse ainsi les bornes.


Je refreine mes soupirs et ce moment de pression à le voir rester figé près de moi, surtout quand nos collègues le hèlent. Je m’apprêtais à feindre un appel, quand mon visage s’illumine littéralement.

« Salut Aura ! Je t'ai pas fait trop attendre j'espère ! »

Il était .. Je n’ai pas les mots. J’avoue, je devenais une jeune fille crushant littéralement sur l’inatteignable mec du lycée. Et l’homme ne m’aide clairement pas à rester les deux pieds sur terre quand il me fait un baise-main. O seigneur ! Je me retiens de jurer, tant c’est mignon à souhait. J’avais presque envie de tirer la langue à mon boss. Prête à lui dire, de prendre de la graine.

« C'est qui lui ? »

Jusqu’à que le Prince Charmant devienne un peu trop direct et je le fixe, réellement surpris par ce volte-face. Je commence à bégayer.

« Docteur A., supérieur d’Aura, ravi de vous rencontrer. »

Et mon boss ne se laisse pas démonter, voulant serrer la main d’Aaron. Son regard ne baissant pas d’iota. C’est moi où l’ambiance devient électrique ?

« Et vous êtes, à être en retard ainsi ? Ce n’est guère prudent de laisser une jeune femme seule de nos jours »

Je .. Quoi .. Pardon .. Tu .. Viens .. Je perds tous mes moyens devant tant d’audace. Il sort d'où ce côté faussement paternaliste ? Je reste, outrée. Ne me demandez pas pourquoi, il se comporte ainsi.

« On .. Va .. Y .. Aller »

Je viens prendre le bras d’Aaron dans une de mes mains, pour l’inciter à bouger, de peur qu’il surenchérisse. Pas ici le concours de la plus longue s’il vous plait.

C'est ce que je me disais , bien sûr qu'Aura semble un peu gênée par mon petit manège. Au fond , ça n'a pas l'air de la déranger plus qu'il n'y paraît .

Malheureusement , je ne peux m'empêcher de faire le crétin et , l'autre se permet de me répondre comme si je suis un idiot en plus. Toutes ces années à côtoyer les gars du gang ne m'ont pas rendu particulièrement calme face à un pauvre mec qui m'agace. Néanmoins, le regard que je vois sur le visage de Aura fait redescendre mes pulsions. Je ne veux pas la décevoir ou gâcher sa journée. Je calme ma respiration et serre la main du docteur :

"Enchanté. Aaron" , je répond le plus simplement possible.

Sa deuxième remarque m'énerve à nouveau. Me calmer , je dois me calmer. Ne pas foutre cette journée en l'air , Aaron. On respire tranquillement et , tu pourras rêver de refaire la dentition parfaite de cet enfoire plus tard. Je tente un petit sourire en coin , sentant la main de la jeune femme se poser sur mon bras.

"Je ne crois pas que Aura a besoin de baby sister dès qu'elle se trouve seule."

Sur ce , je me retourne vers Aura et hoche la tête en réponse à son "on va y aller". Je l'entraîne un peu plus loin , bien que n'ayant aucune idée de l'endroit où elle veut aller. Je me sens tout à coup stupide d'avoir réagi comme ça . Je ralentis alors le pas , me demandant où elle comptait aller manger.

"Excuse moi pour ça. J'ai deconne , tu m'en veux pas trop , j'espère ?"

« Excuse moi pour ça. J'ai deconne , tu m'en veux pas trop , j'espère ? »

Je ne sais pas quoi dire. D’un côté, j’espère que cela calmera les ardeurs de mon supérieur. Mais de l’autre, je me demande jusqu’où aurait pu aller Aaron. Le frapper ? Je ne veux plus baigner dans la peur de nouveau. Je préfère repousser cet infâme scénario de mon esprit. Je refuse d’associer la violence à celui qui m’a protégé au jour de l’an. Et qui faut bien l'avouer, me plait bien.

« Je dirais que le rôle du chevalier blanc te va plutôt bien tout comme ta chemise du jour. »

Je lui fais un grand sourire, suivi d’un compliment glissé. C'est encore nouveau pour moi ?

« Mais il va encore plus me poser des questions. Je crois que l’idée que je sois encore seule dans ma vie, l’obsède plus que moi. Pour le moment, allons manger et me raconter ta matinée. J’espère que tu connais les menus à volonté. C’est non négociable ! Sinon, je te mords. »

Je ris doucement. Ma main, toujours sur son bras, je l’emmène vers le restaurant le plus proche : asiatique. Désolé mais j’aime trop leur nourriture. Et que je n’avais qu’une heure pour manger. Une femme nous accueille et nous place sur une place de deux. Je regarde le menu, ravie d’enfin manger et relève le regard vers Aaron. Peut-on appeler ça, un rencard ? Hell no .. On est .. Amis ?

« Bon alors, quoi de neuf depuis le jour de l’an ? Tu ne m’en veux pas trop pour les messages ? »

Je fais une tête de chiot, avec une moue boudeuse.

Je suis rassuré , Aura ne semble pas m'en vouloir , m'adressant un grand sourire et , complimentant encore ma chemise. Oui , encore. Elle les aime vraiment ces fouttue chemises. Je lâche un petit rire :

"Il faut croire que je choisis toujours bien mes chemises !"

Son autre remarque concernant son patron me consterne. De quoi il se mêle , après tout ? Quelle soit seule , ne le regarde pas. Tout le monde n'est pas obligé d'être en couple dans la vie pour être heureux. C'est d'ailleurs ce que je me dis , depuis plusieurs années. Je décide de ne pas sur-enchérir sur son supérieur , après tout , je ne suis pas venu pour parler de lui.
Comme ça elle veut me mordre ? Elle est devient plutôt à l'aise avec moi non ?

"Je préfère éviter la morsure !"

La jeune femme m'entraîne vers un restaurant asiatique où nous sommes rapidement placé sur une table de deux. Ça me fait assez bizarre, je ne me suis pas retrouvé dans cette situation depuis longtemps. Je veux dire , ça fait très rendez-vous...surtout que l'on se tutoie comme si de rien n'était.
Bref , je ne vais pas trop penser à cette idée , pour l'instant. Surtout que Aura me pose à nouveau une question avec une moue presque trop adorable.

"Je ne t'en veux pas non. Je pensais juste que j'aurai l'honneur d'avoir de tes nouvelle plus tôt..Sinon , rien de spécial dans ma vie à part le boulot."

Je regarde distraitement la carte des menus. Je viens rarement dans ce genre d'endroits , préférant les classiques fast-fonds. Je ne connais pas la moitié de ce qu'il y a marqué. Je relève la tête avec un sourire :

"Tu prends quoi d'habitude quand tu viens ici ?"

« Tu prends quoi d'habitude quand tu viens ici ? »

Je ris doucement, de le voir perdu. Je ne sais pas si c’est vraiment une bonne idée de me prendre comme une référence. Je viens ici tous les midis, en général avec les filles de mon étage, avec les copines ou même les repas d'affaires. Un veritable QG.

« Alors, je commence par des nems au légume et bœuf puis, je vais au wok, pour faire griller et bouillir les légumes, je prends des patates sautées et après, je me resserre pour prendre des nouilles sautées avec du poulet grillé et le tout avec un jus de mangue. C’est délicieux !! »

Je réalise que je viens de passer pour une grosse bouffe. Sans même avoir évoqué le dessert. Bravo Aura.

« Cela étant, tu es libre de choisir ce que tu veux, t’as tout un buffet pour toi. Tu n’es jamais venue ici ? »

Et je réalise aussi que je le tutoie, je vais passer pour un Goinfrex malpoli. Les filles me pointeraient un zéro niveau élégance et féminisme.

« Je voulais m’excuser de ne pas t’avoir répondu plus tôt. J’avais peur de te déranger. Mais cela ne se reproduira plus. Maintenant, tu as mon numéro. »

Comme ça, je pourrais être encore plus stressée de ne pas avoir de nouvelles. Je ne savais pas trop dans quoi on semblait s’engager. Ou alors, est-ce moi qui me faisait des films ? En tout cas, je ne pouvais nier être sous le charme du monsieur. L’effet chemise, qui sait. Une fois, le fonctionnement expliqué, chacun part se remplir la panse, puis retourner à nos places. Nos boissons arrivent.

« A quoi peut-on trinquer ? »

C'est avec un réel enthousiasme que la jeune femme commence à me décrire son futur menu. Effectivement, elle s'y connaît bien mieux que moi , qui n'a presque jamais mis les pieds dans ce genre d'endroits . Elle me rappelle que c'est un buffet et , que je peux choisir tout ce que je veux. Ce qu'elle m'a décrit ou autre chose qui me tenterai.

"Non je ne suis jamais venu..." , je répond à sa question. Pourtant , je mange assez régulièrement à l'extérieur mais pas dans ce genre de restaurant. Ça a dû m'arriver une ou deux fois mais , ça ne m'a pas marqué tant que cela. Lorsque l'on se lève pour choisir notre nourriture , je prend quelques trucs au hasard et d'autres que je copie sur Aura.
Nos boissons arrivent et Aura propose de trinquer , sans savoir à quoi exactement. Ce n'est pas quelque chose que j'ai l'habitude de faire avec mon groupe , non plus. Je lui adresse un petit clin d'oeil , profitant de chaque occasion pour la taquiner :

"Pourquoi ne pas trinquer au fait que tu ai eu le courage de me déranger ?"

Je suis bien heureux qu'elle ai osé m'envoyer un message. Je me disais , qu'après tout , des tas de gens faisaient ça après une bonne soirée et ne se revoyaient jamais. Dans un sens , ça ne m'a pas étonné. Presque soulagé , en réalité.
Je devrai l'éviter. Ce serait plus sûr , pour elle. Néanmoins , ce n'est pas un petit repas , de temps en temps qui va aggraver les choses , non ?
De temps en temps hein ?

"Je te remercie en tout cas de m'avoir proposé ce déjeuner. Qu'es ce qui t'a décidé alors , au bout de deux semaines ? Je suis curieux."

Pourquoi s'est-elle dit que maintenant , il fallait me rappeler ? Juste une idée passagère , un regret ou une de ses amies qui lui ont conseillé ? Peu m'importe la raison au fond mais je voudrais savoir. On s'apprécie , c'est indéniable.

« Pourquoi ne pas trinquer au fait que tu ai eu le courage de me déranger ? » Monsieur est taquin. Je porte ma main au niveau de mon cœur, mimant d’être blessée. Je fronce le regard et fais une moue boudeuse. « Je ne le ferais plus et puis voilà » Belle repartie ! Je souris en coin, ne rajoutant rien, préférant boire mon verre. Jus de mangue, un délicieux régal pour les papilles.

C’était une sensation étrange. Se sentir bien. Avec un homme. J’ai connu ce moment. Et s’en est suivi la noirceur. Etais-je destiné à connaitre le même schéma ? Je ne l’espère pas. En tout cas, je ne peux détacher mes yeux du bel homme. J’en rougis.

« Je te remercie en tout cas de m'avoir proposé ce déjeuner. Qu'est ce qui t'a décidé alors, au bout de deux semaines ? Je suis curieux. » Je me pince les lèvres et ris doucement. Comment pourrais-je formuler qu’il me sert d’alibi auprès de mon boss ? Un sublime alibi, sans aucun doute. « Tu m’as fait bonne impression au jour de l’an et j’avoue que mon entourage m’y a encouragé alors, je me suis dit pourquoi pas. Et nous voilà ici, à se remplir la panse. Tu vas pouvoir reprendre ton service ? M’enfin, les livraisons, c’est sportif ? Tu les fais comment d’ailleurs ? T’as pas trop de problèmes avec les clients ? » Je noie rapidement le poisson en évoquant son métier, dont j'étais réellement admirative. Dans mon souvenir, je m’étais fait engueuler comme du poisson pourri, j’ai eu la peur de ma vie. C’était à vélo. J’ai duré une semaine. J’avais mis un mois à ne plus avoir de courbatures.

Le repas se poursuit, on rit beaucoup, je me sens de plus en plus à l’aise. On n’hesite pas à se charrier. « Parle-moi de toi ; des frères, des sœurs ? Tu viens d’où ? » J’assouvis ma curiosité, à présent qu’il n’y a aucune musique ou indésirables être pour nous arrêter.

On arrive au dessert sans que je réalise que l’heure tourne. « Alors si un jour, tu fautes, ramène-moi beaucoup de fraises, de chantilly et du chocolat, et j’oublierais tout. » Gourmande ? Je ne vois pas du tout de quoi tu parles. Péché mignon, il faut bien l’avouer. Joker offert, quand on voit mon assiette bien garnie.

Sorry: