Aura sourit. Et , ça me suffit pour sourire à mon tour , comme une contagion. Si elle me sourit , c'est que ça se présente plutôt bien , non ? Enfin , j'espère. J'ai envie que ça se passe bien , je suis encore plus tendu qu'un arc qui attend de décocher sa flèche. Je ne peux m'empêcher de regarder avec tendresse son sourire , les courbes de son visage...

"Évidemment que j'ai retenu ce que tu aimes. Tout ce que tu m'as dit a toujours eu de l'importance."

C'est sincère. Mais , peut être pas ce qu'elle a envie d'entendre. Et , je peux l'entendre. Je sais que je ne peux pas vraiment revenir comme une fleur justement , après tout ce qui s'est passé. Elle ne m'invite pas à entrer , mais je m'en doutais . C'est normal. Elle préfère parler. Tout de suite.
Et , de ce qui fâche bien sûr...

"Pourquoi je le fais ? Pour apprendre à me défendre quand j'étais jeune. Pour gagner de l'argent aussi , parce que je voyais mes parents se tué à la tâche . Une fois qu'on est dans ce genre de groupe , on en sort plus. Ils gardent un oeil sur toi , te force à être d'accord avec eux , et tu ne peux pas juste coupé les ponts à moins de partir loin , vraiment très loin , pour qu'ils ne reviennent pas te chercher et menacer tes proches. Mon frère est mort lors d'une action du gang. Je pouvais plus partir. Alors , j'ai essayé de concilier mes deux vies." , je soupire.

"Je t'avais dit que j'étais violent , parfois avec des réactions excessives. Tu me connais , Aura. Je ne suis pas deux personnes différentes. Je pensais que je pourrais te protéger de ma vie , voir même enfin sortir du gang mais...J'ai compris qu'on me gardait à l'oeil alors j'ai préféré coupé les ponts , je ne voulais surtout pas te perdre. Je n'avais peur que de ça."

Je fais une moue quand il ose me dire que mes propos - et moi par extension - sommes importants. Surtout que ça fonctionne intérieurement. Et une voix en moi me disait que c'était mal de fondre encore. Il y avait tant d'ombres et .. Oh j'ai mal au crane. Restons en aux faits et écoutons le. Il n’y a pas de propos fantasques. Il ose reparler de son frère. Tout fait bien plus sens. Ca me peine. - Tu te sens prisonnier alors ? Partir est synonyme de mourir ? Doit-on renoncer a toi Aaron ? Les questions s’enchaînent. Je pense à ma petite fille qui a déjà côtoyé la violence et je ne veux pas lui refaire subir un environnement instable. - Suis perdue Aaron. C’est beaucoup là. Ce ne sont pas que des crises de violence mais ton quotidien. T’es du côté de la barrière que les gens craignent. Et c’est bien le problème. J’ai peur aussi d’être un moyen de pression pour toi. Je masse mes tempes. - Que veux tu exactement ? Regard embué qui se dirige vers lui.

Ses questions s'enchaînent trop vite , et j'ai l'impression que je vais me perdre dans mes propos. Que tout se mélange. Et que finalement, ça ne sert à rien. Elle sait que je l'aime , mais ça doit s'arrêter là, il n'y a pas moyen de faire plus. Je ne sais plus par où commencer , ni même si je devrais. Peut être que je ferais mieux de juste tourner les talons , et la laisser vivre sa vie , ce serait sans doute mieux.

"Bien sûr que je me sens prisonnier. Je n'ai plus la main mise sur ma vie. Et oui , on risque de me tuer parce que...Je sais trop de choses. Ils auront peur que j'aille tout déballer aux flics." , j'ignore volontairement une de ses questions , sachant que je n'arriverais pas à lui dire ce que je devrais , à savoir qu'elles devraient se protéger de moi , sa fille et elle. "Honnêtement , j'ai aussi peur qu'on se serve de toi comme d'un moyen de pression , c'est aussi pour cela que je me suis éloigné. Mais , je te rappelle que c'est toi qui m'a appelé aujourd'hui , je ne suis pas venu m'imposer. Alors...Qu'est ce que toi , tu veux ?" , je soupire. "Je ne leverai jamais la main sur toi ou tes proches. Je t'en fais le serment. Mais pour le reste...Je ne peux rien promettre ."

Tout serait foutrement plus simple si j'étais capable d'être catégorique. Ce que je ne suis pas. Non, il y a en moi une germe d'espoir qu'on puisse continuer comme si de rien n'était. Je suis consciente que c'est impossible. Je sais ce qu'il cache, ce qu'il perpétue. A contre cœur certes, mais je suis au courant. Je ne sais pas quoi faire.

J'aimerais qu'il décide pour nous. Qu'il fuit et ne se retourne pas. Mais il est devant moi et le myocarde flanche plus que prévu. Malgré le revers de notre précédente dispute, mes sentiments pour lui sont intacts. Et ça me fait bien chier. Car si j'avais rancune contre lui, au moins tout serait plus clair, prendre une décision et ne plus tergiverser autant.

Question qui m'est retournée et me retourne aussi le ventre. Tant de vérités à lui avouer. - Ce que je veux .. c'est pouvoir te tenir la main dans la rue sans craindre qu'un flingue nous vise, c'est pouvoir faire les magasins avec toi et ma fille, sans craindre de perdre l'une ou l'autre, c'est t'aimer sans devenir veuve. De ne jamais voir les flics débarquer chez moi parce qu'on sait que je suis affilié à toi. Je t'ai appelé parce que, je n'y arrivera pas loin de toi, parce que tu hantes mes pensées. Et que j'en sais rien .. Que tu finisses par trouver un moyen de te haïr. Je ne sais pas Aaron. J'ai juste envie de me dire que c'est un cauchemar et qu'on va se réveiller. Que tu seras à mes côtés et qu'on rira à gorge déployée. J'ai envie de te savoir libre et non enchainé, de pouvoir élaborer des tas de projets sans devoir y mettre une date de péremption. Je veux être avec toi sans avoir qu'on t'arrache à moi à tout moment.

J'ose le regarder, sans faire couler les larmes. L'envie de le prendre dans mes bras et lui faire promettre que tout ira est aux bords des lèvres. Mais je devais agir comme une femme responsable et une maman.

Je ne sais quoi dire à Aura. Je ne peux rien lui promettre si ce n'est une vie compliquée, dangereuse , et c'est tout ce que je ne veux pas pour elle , ni pour sa charmante petite fille.

Alors qu'est ce que je devrais lui dire ?
Aurevoir à la prochaine ?
Je suis incapable de faire ça. Pourtant , je le devrais.

"J'aimerais avoir ce genre de vie avec toi , Aura. Ce serait...magnifique." , je lui adresse un petit sourire voilé de tristesse. "Je t'aime , je ne veux pas que tu souffres davantage ou que tu ne sois en danger. Mais...Ici , dans la violence de cette ville , je ne peux rien te promettre." , je ne pourrais pas échapper au gang , il règne en maître dans la plupart des quartiers. Mais , ils ne sont pas si puissant au-delà de ces murs alors...ailleurs , peut-être.

"Si..Si je te proposerai de tout quitter , et de nous reconstruire ailleurs , loin de ceux qui m'enchaînent est-ce que...Est-ce que tu viendrais ? Je ne te forcerai jamais à rien.Mais , je suis prêt à tout quitter , à changer de vie pour toi. A te protéger , toi et ta fille."

12.04.22 ~ Nouveau chapitre

Quand Aaron m'a proposé de quitter la ville, je suis restée très bête sur le moment. Je n'avais pas su lui donner une réponse sur le moment. Je lui avais demandé du temps. Ce n'était pas oui, ce n'était pas non. C'était juste du temps pour réfléchir, pour en parler avec Hope et ma famille. Je n'avais pas parlé de la véritable raison de ce possible déménagement. Etonnement, peu de monde s'y sont opposé, encourageant plutôt à changer d'air. Il est vrai que cette ville signifiait la fuite depuis le Brésil... Mon boulot me gonflait et nombre de fois que je m'étais renfermée quand mes copines ne venaient m'extirper de ma léthargie s'étaient accumulées au fil des ans.

Il me suffisait juste d'un dernier feu vert pour dire oui à Aaron. Là aussi, je m’attendais à des larmes de la part de ma petite fille mais ce fut tout l’inverse, elle a dit oui .. Finalement Alberta n’était pas sa grande amie et qu’elle en voulait d’autres. J’ai ri sur le moment, face à son innocence et la joie ultime de lui apprendre que nous allions vivre avec Aaron. Une première pour toutes les deux, d’être avec un homme dans notre quotidien. La peur. La hâte. L’empressement. Tout est confus. J’ai attendu quelques jours avant de lui annoncer la - bonne ? - nouvelle, m’inquiétant tout de même qu’il ait pu changer d’avis. Je n’avais imposé que deux conditions : une école a pas trop loin avec la possibilité de pratiquer une activité extra scolaire (tous les trois ?) et de partir que si on a un nouveau toit sur nos têtes.

Depuis cette décision, le temps me paraissait si interminable. La ville actuelle me semblait si fade. Tout me pesait, un peu plus chaque jour. Nous avions réalisé des visites en visio - une première - avant de jeter notre dévolu sur une maison avec trois chambres (pour les potentiel.les ami.es) et un merveilleux jardin. J’ai encore du mal a y croire. La sensation de fuir n’est pas … Juste un nouveau départ.

C’est lorsque nous avons annoncé la date de déménagement que mon entourage a découvert Aaron. Je me suis sentie tellement gênée sur le moment. J’en avais parlé tant de fois que je pensais l’avoir présenté au moins une fois. Enfin mes copines le connaissaient mais visiblement pas ma famille ; oups ! Les connaissances réalisées Nous avions pris la route, à cinq heures de notre nouvelle Vie, dans une ville où je vais mettre du temps à retenir mais je m’en moque, j’avais l’homme et ma fille. Un grand sourire et le cœur apaisé de mettre la violence loin derrière nous.

Une grosse journée à tout décharger, une soirée entourée, le rêve sublime. Une fois Hope couchée, et nos proches également, je prends le temps de me démaquiller et me défaire de cette journée, de ces tensions accumulées de ces derniers mois et je viens me glisser dans le lit, tete qui pivote vers la moitié. - Comment tu te sens ? Pas trop chamboulé ? Allions nous réussir le pari d'être loin de la criminalité ? Je stoppe rapidement mes négatives pensées, venant l'embrasser avant de sourire bêtement, l'euphorie d'un renouveau. - Demain, on va se promener partooooout !

Spoiler:

Pour être parfaitement honnête , je ne pensais pas qu'Aura accepterait ma proposition. Je me suis dis que je lui ai fait trop de mal , que c'était dangereux , qu'elle ne voudrait pas prendre le risque de se déraciner à nouveau. Surtout que pour notre sécurité , je devais viser une ville à l'autre bout du pays , une ville dans laquelle mon gang n'a pas d'activités. Heureusement pour moi , nous ne sommes pas très influents , et ce ne fut pas si dur d'être loin d'eux en choisissant la côte ouest.
Restait à savoir si je misais sur une métropôle , ou une petite bourgade isolée. En fait , le choix fut assez rapidement fait : Aura souhaitait une école et des activités de qualitées pour sa fille. Vivre en campagne fut donc exclu.
C'est Seattle , que je finis par lui proposer. La criminalité n'y est pas plus élevée qu'à New-York , et le quartier résidentiel que nous avons choisi est tranquille , bien noté sur internet et notre maison sublime.

Pour ma part , j'ai assez facilement trouvé un boulot , dans une agence de déménagement (un peu ironique) , à temps plein cette fois-ci. J'ai promis à Aura , et à Hope que je prendrais soin d'elles , que nous aurons un revenu stable et honnête , suffisant pour maintenir un confort de vie acceptable.
Je m'étonne encore que ma belle ait accepté. Je m'en suis senti flatté dans un sens , car cela montre la profondeur de ses sentiments à mon égard. M'endormir à ses côtés , enfin libéré de mon passé...C'est la plus merveilleuse chose qui pouvait m'arriver.

"Je me sens un peu stressé , je t'avoue...Et toi ?" , je lui murmure en déposant un bref baiser sur ses lèvres. "Mais aussi impatient de commencer cette nouvelle vie avec Hope et toi. J'ai reperé un beau parc à une dizaine de minutes à pieds d'ici. On pourrait aller y pique-niquer tous les trois si ça te dit ? Oh , peut-être que tu aimerais faire du shopping aussi , pour décorer la maison à ton goût ?"


[hrp j'espère que le choix de la ville te va !]

12.04.22 ~ Nouveau chapitre

Je peine à me dire que nous venions de quitter notre ancienne ville ; celle d'un nouveau départ fuyant la violence une première et voilà une seconde fois. Etais-je née pour fuir en permanence ? Cette fois, c'est différent. C'est ce que je me répète en tout cas. Ici, pas d'homme violent pour rendre mon quotidien anxiogène et menacer de me prendre mon enfant. Principalement, sauver l'homme que j'aime de son passé. Allions-nous y parvenir ? Le temps nous le dira mais je prierais pour qu'il en soit ainsi. Me mettre en ménage une nouvelle fois, je ne pensais pas que j'y parviendrais aussi aisément. Les séquelles d'un précédent foyer m'ont bien souvent fait reculer dans l'idée de me remettre avec un homme. Et pourtant, j'en suis là avec Aaron. Avais-je pris la bonne décision de nous redonner une chance ? Sa volonté de tourner la page m'avait franchement convaincu, je ne me voyais pas lui refuser cette tentative. Puis le cœur bat si fort à ses côtés, que j'aurais été meurtrie de ne plus être à ses côtés. Je sais que la Vie n'est pas un livre mais j'ai envie de croire en nous et que nous baignerons de lumières. C'est sur cette note optimiste que je l'écoute me partager ses ressentis. J'ai toujours la sensation d'être une lycéenne se mariant avec son Crush. Et je crois que ça ne changera pas de sitôt. Maintenant, que nous ouvrons un nouveau chapitre dans nos Vies. - Qu'est-ce qui te stress donc ? Je me mets de profil, face à lui, retenant un bâillement. Je voulais encore profiter de lui avant de sombrer dans les bras de Morphée. - On peut commencer par un pique-nique demain et le restant de la semaine, on décore la maison à NOTRE gout. Je fais l'aller-retour entre nous deux de l'index. - C'est chez toi aussi et pas question, de jouer les tyrans de la décoration. En vrai si, je suis un peu comme ca mais je veux que tout ça parfait. - Il faut aussi que je regarde quoi faire de mes journées. Je songe à faire une reconversion mais je n'ai aucune idée de quoi faire. Tu vas faire quoi toi ?

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