Elle ne parle pas. Elle contemple la scène comme si elle n'en était qu'une spectatrice, alors que Lisa et Andrew monopolisent la conversation. Il n'y a qu'eux qui s'y investissent réellement à vrai dire, alors que la patineuse et le goalie restent dans leur coin. C'est bien, c'est mieux. Au moins, Sachs ne lui sort pas pique sur pique comme il en a l'habitude. Il est presque supportable comme ça, même s'il est toujours très bizarre. Enfin, il l'est depuis la dernière fois, au moins. Et elle ne comprend pas. Elle grimace. Y'a trop de choses qui ne tournent pas rond et trop de choses qui la laissent perplexe. Elle grimace. Lisa évoque ses vacances, un séjour dans les îles. De l'humanitaire. Cornelia n'écoute qu'à moitié, mâchouillant distraitement ses nuggets.

Portant son regard sur la boite, elle s'étonne d'en voir encore autant dans celle-ci, ne s'étant pas aperçu du mouvement d'Aayden. Elle fronce les sourcils en en prenant un, tournant son attention vers Andy et Lisa qui sont devenus curieusement silencieux et elle lève un sourcil, ne comprenant rien de ce qui se passe, rien de ce silence soudain. Leurs regards étant portés sur Aayden, elle fait de même, regardant l'homme qui ne tarde pas à remarque qu'il est devenu le centre de cette attention muette et s'en étonne. Elle, elle ne fait que suivre le mouvement. Elle ne sait pas ce qu'il a fait, elle ne sait pas pourquoi ils le regardent. Est-ce qu'il a dit une bêtise qu'elle n'a pas entendu ? Elle lève plus haut son sourcil. Tout ça est des plus perturbant. Et elle finit par rompre le silence, regardant tour à tour Andy et Lisa d'un côté et Aayden de l'autre.

"- Qu'est-ce qui vous arrive ?" s'étonne-t-elle en fronçant un peu plus les sourcils, avant de prendre un nouveau nuggets qu'elle observe une seconde avant de se tourner vers Andy. "Dis... J'avais pas pris une boite de six ? J'crois que je me suis planté... Désolé. T'as encore le ticket de caisse ?"

Il semble impressionné quand elle mentionne les îles Fidji et réellement intéressé par le programme de son été, même si ça ne l'occupera que deux semaines - le temps que durent les vacances pour les écoliers dans les Fidji, à vrai dire - en tout et pour tout. Lisa acquiesce d'un mouvement de la tête et lui adresse un grand sourire.

"- Cette année oui. L'été dernier c'était le Népal. L'année d'encore avant, l'Ethyopie."

Des pays, Lisa en a vu quelques uns avec sa mère, toujours dans le but d'apporter un peu d'aide et de réconfort aux civilisations sur place tout en apprenant à les découvrir, à se nourrir de leurs cultures. Si elle est la personne qu'elle est aujourd'hui, c'est indéniablement en parti le fait de ces rencontres, de ces voyages, de ces valeurs que sa mère lui a transmises par ce biais.

"- J'en prendrai, bien sûr !" affirme-t-elle avec un sourire.

Chaque années, elle prend des photos qu'elle place dans des albums de voyage. Un moyen de se souvenir, pour toujours, de ces voyages qu'elle a fait, de ces visages qu'elle a croisé, de ces enfants, de ces femmes et de ces hommes qu'elle a pu être amenée à aider.

"- T'en fais pas pour ça, vous en aurez !" assure-t-elle. "Je ne voudrai pas que ce monsieur déclenche une alerte internationale pour disparition !" elle a un petit rire. "Enfin. J'peux te faire un peu de place dans la valise si ça peut te rassurer !" elle rit avant d'attraper son coca pour se noyer dans celui-ci.

L'attention d'Andy se tournant vers Aayden, Lisa suit son regard. Elle avait presque oublié la mission, toute happée par le regard et le sourire d'Andy. Presque, seulement, puisqu'elle avait toujours conscience de la présence du goalie à ses côtés. Goalie qui... Elle écarquille un peu les yeux. Il était vraiment en train de donner des nuggets à Cornelia ? Il ne le faisait jamais, en général il terminait son menu. Mais le plus étrange est sûrement qu'elle ne remarque rien. Lisa reste perplexe mais el mutisme soudain autour de la table semble alerter les deux tourtereaux qui s'ignorent.

"- Oh non rien on... on s'étonnait juste de pas vous entendre." tente Lisa. "N'est-ce pas, Andy ?" l'appelle-t-elle en renfort avant de se crisper comme Cornelia évoque ses nuggets.

Non, non, non, Lisa panique. Il ne faut pas qu'elle voit le ticket. Il ne faut pas qu'elle voit quoique ce soit, ou qu'elle comprenne. Elle va le prendre pour un fou et... Ils n'ont pas besoin de ça, vraiment pas. Elle observe le plateau d'Andy devant elle et subtilise le ticket en profitant que l'attention de Cornelia soit rivée sur le jeune homme.

"- Non non tu... T'avais une grosse boite. T'en a peut-être juste mangé moins que tu penses." essaie de plaider Lisa, stressée.

Elle doit absolument tenter de reprendre le contrôle de la conversation. Elle ou lui. Tenter de faire en sorte qu'elle laisse tomber ses questions, qu'elle n'y pense plus. Lisa cherche, réfléchie.

Népal, Éthiopie, Fidji… C’est qu’elle voyage la rouquine, c’est qu’elle voit de ses paysages. Cela te fait rêver, te donne envie de voir ça de tes propres yeux, à ses côtés. Tu es là, à boire ses paroles en souriant, avant de rigoler un peu qu’elle sous-entend que bien sûr, les nouvelles, il y en aura… Et que si ce n’était pas le cas, Aayden le saura. Bien sûr qu’il saura. Tu rigoles nerveusement avant de te mordre la lèvre à la réflexion de la valise.

- Pas sûr que je rentre, mais cela aurait été avec plaisir.

Que tu dis avec un petit clin d’œil caché avant de te tourner vers le duo de l’improbable à vos côtés. Avant que tu ne te figes sous la scène qui se déroulait devant toi. Non. Tu n’avais pas rêvé sur le coup. Brutus était vraiment en train de filer sa bouffe à Corny, qui elle, bien trop tournée vers vous, n’avait pas vu la manœuvre. Tu clignes lentement des yeux, encore confus et surpris avant de redresser la tête en entendant la voix du blond. Tu rigoles nerveusement avant de laisser Lisa répondre. Apparemment, elle aussi avait suivi la manœuvre cachée de Sachs. Tu souris un peu en croisant son regard, l’air de dire que tu savais, mais que tu ne diras rien. Tu allais répondre d’ailleurs avant de blanchir un peu quand Cornelia demande pour le ticket. Par réflexe, tu poses ta main dessus, mais rien. Tu baisses le regard, il a disparu. Dans le plus grand des calmes.

- Oh je.. Merde. J’ai dû l’faire tomber en arrivant ici. Mais Lisa a raison.

Tu pouffes un peu en te grattant la nuque, te concentrant sur ton amie pour détourner son attention.

- Mais hey ! Aucun souci, j’ai payé puis, tu étais tellement stressé hier que t’as rien mangé, tu te souviens ? Donc c’est pas grave si tu compenses aujourd’hui avec une grosse boite d’nugget. Profite plutôt … Et prend donc des...

Tu allais lui tendre un paquet de frites avant de voir que son plateau en possède déjà. Attends quoi ? Tu lèves un sourcil et regardes de nouveau Sachs qui te fusille du regard. Tu déglutis et tentes en souriant.

- Prends donc l’paquet d’frites que je t’ai posé là… C’bon pour c’que t’as.

Tu mâches doucement, voyant bien que les deux tentent un truc. Ils t’auraient vu faire, mais pas Corny ? Tu avales ta bouchée et suis du regard le geste de Lisa avant de soupirer. Tu poses ton burger entamé sur son emballage, t’essuis les mains et attend que la brune en face de toi ai le visage rivé sur Andrew pour tapoter sous la table la cuisse de ta meilleure amie en tendant la main pour qu’elle te file le ticket. Sans regarder. Tu sais qu’elle le ferra, tu lui fais confiance pour comprendre sans un mot ton plan.

Tu recules un peu dans ton canapé, sens le bout de papier entre tes doigts et commences gentiment à le déchirer dans tes mains pour le cacher dans ta propre boite de nuggets vide. Ni vu, ni connu. Pas vu, pas pris. Tu jettes un regarde à Lisa, hochant la tête légèrement avant de te remettre à manger comme si de rien n’était. Tu lèves un peu la tête quand tu entends Myers parler des frites et vois qu’il sait ce que tu sais et lui fait savoir qu’il doit se taire… Tu n’as pas vraiment envie qu’il se noie dans son coca, pas devant ta meilleure amie qui fait de son mieux pour t’aider…

Le mieux que tu puisses faire pour lui rendre la pareille est de ne pas réduire ses chances avec le brun. Mais il comprend et ment ouvertement devant la brune. Tu te redresses un peu en finissant et fait signe à Lisa.

- Bouge un peu, s’t’eup.

Que tu demandes, sans plus. Tu vois son regard et fais un air blasé. Tu soupires. Tant pis si c’est devant eux ou pas… Quoi que tu ne vas pas améliorer le merdier, mais bon. Le naturel revient au galop. Quoi que, tu n’es pas non plus des plus agressifs, c’est Lisa. Ton parler est juste… Pas très sortable.

- J’vais juste aller pisser. J’vais pas m’enfuir, j’ai pas fini, j’ai encore faim. Et j’dois encore te ramener chez toi après, j’ai pas envie qu’ta mère m’enterre si c’est pas l’cas. Maintenant, bouge.

Non mais super. Et devant Corny. Déjà qu’elle avait un peu peur de toi, maintenant, elle ne verra qu’un abruti malpoli et incapable de faire une phrase grammaticalement correcte à l’oral. De mieux en mieux.

D'après Lisa, elle a simplement mangé moins de nuggets qu'elle ne le pense. Mais... Elle n'est pas vraiment convaincue. Pourtant, Andy dit la même chose et fait remarquer qu'elle n'a rien mangé la veille, ou si peu, ce qui justifie sûrement qu'elle ait commandé un gros déjeuner. Peut-être. Ou elle aura appuyé trop rapidement sur la borne. Qu'est-ce qu'elle veut que ce soit d'autre, de toute façon ? La nourriture n'arrive jamais par magie sur un plateau. Donc... Elle ne peut que l'avoir commandé, en effet.

"- J'ai probablement pas fait attention..." se justifie-t-elle.

Bon sang. C'est normal qu'elle se sent à ce point largué dans la conversation, dans la situation ? Elle a l'impression de ne rien suivre, de ne rien comprendre. Il faut dire qu'elle ne s'attendait pas vraiment à ne pas être en tête à tête avec son meilleur ami et qu'elle s'attendait encore moins à manger en ayant Sachs juste en face d'elle. Qui se montre curieusement calme, trop calme d'ailleurs, pendant ce déjeuner. Corny cherche à comprendre ce qui lui échappe mais... C'est compliqué. Il manque trop de pièces du puzzle pour qu'elle puisse le reconstituer. Elle mâchouille donc un nuggets, quand Andy lui propose des frites qu'il a posé devant elle, sur son plateau.

"- Merci !" lance-t-elle avec un sourire, avant d'en grignoter une. "Promis je dirais pas au coach que tu engraisses une de ses patineuses !" plaisante-t-elle en essayant de se mêler à la conversation.

Sachs sort de son mutisme d'un coup, s'adressant à Lisa sans grande politesse et Corny lève un sourcil. Donc... Sachs pouvait même s'adresser comme ça à sa meilleure amie ? Décidément... Elle ne comprend vraiment pas d'où Lisa affirme qu'il est gentil et plus qu'un p'tit con. Jamais Andy ne lui demanderait de bouger comme ça, avec une onomatopée plus qu'un mot. Enfin, elle espère.

"- Tu crois que ça passe si je t'enregistre en guise de bagage cabine ?" elle rit, abandonnant son coca comme l'homme ne semble pas se moquer de son propos, ni la trouver bizarre.

Leur attention est détournée par Aayden, le regard de Lisa suivant celui de son interlocuteur et elle assiste, muette, à la scène qui se déroule devant elle et qu'elle aurait aussi du mal à croire si elle ne l'avait pas vu de ses yeux. Les seules fois où Aayden lui donnait de la bouffe, c'était quand elle était mal à cause de son père et de l'indifférence de ce dernier. Autant dire qu'il ne donnait pas facilement sa nourriture. Et Corny, elle, semblant perdue dans ses pensées, ne se rend compte de rien. Lisa avale sa bouchée un peu difficilement, réalisant avoir trop peu mâché son sandwich, pour le coup.

La jeune femme se posant des questions, ils tentent de noyer le poisson comme ils peuvent et, alors qu'Andy affirme avoir perdu le ticket, Lisa sent un petit coup discret sur sa jambe, un tapotement. Comprenant ce qu'Aayden veut, elle lui donne le ticket qu'elle vient de subtiliser et le laisse le déchirer tandis qu'Andy s'occupe de sa meilleure amie, essayant de lui faire penser à autre chose. Lisa retrouve son souffle, alors, quand Cornelia plaisante avec le patineur.

Aayden lui demandant de se pousser, Lisa tourne la tête vers lui, levant un sourcil. Il se justifie immédiatement, mais elle ne l'aurait pas accusé de vouloir fuir le restaurant, non. Elle sait bien qu'il ne ferait pas ça, qu'il n'oserait JAMAIS lui faire ça. Il ne la plante jamais. Ce n'est jamais arrivé, ça n'est jamais arrivé. Il sait trop comme elle souffre au plus profond de son être d'avoir perdu son père. Comme ses cauchemars sont remplis de portent qui claquent. Comme elle a peur, Lisa, effroyablement peur de l'abandon.

"- Tu peux redemander mais cette fois gentiment ? Genre "Sil te plaît Lisa, peux-tu me laisser passer, s'il te plaît ?"" répète-t-elle, la voix ferme mais le sourire aux lèvres.

Crush ou pas crush devant eux, Lisa ne va pas laisser passer ça. Elle sait dompter le petit con qu'il sait être. Depuis qu'ils sont enfant, elle a dû le faire plus d'une fois. Ce n'est pas pour rien qu'on la voit comme la seule capable de le dompter. C'est parce qu'elle l'est. Qu'elle est la seule capable de le canaliser. Qu'elle est la seule qui ait su l'apprivoiser. Bien sûr, leur jeune âge avait été un avantage, parce qu'à l'époque il n'était pas encore le petit con que son père avait si bien façonné. Il sait quand il a merdé, parce que si Lisa sourit toujours, elle parle plus fermement. Comme aujourd'hui. Il sait qu'il a merdé, parce qu'il y a cet éclat dans ses yeux, qui lui dit quand il va trop loin.

Elle attend que l'homme s'exécute et se lève alors, le laissant passer avant de se rasseoir. Elle attend quelques minutes - peut-être seulement deux - et s'excuse à son tour, prétendant un besoin urgent d'aller aux toilettes. Andy aura compris que ce n'est pas vrai, qu'elle part seulement voir comment va Aayden. Pour Corny... Elle n'en sait rien.

Elle entre dans la pièce et la porte battante se referme derrière elle. La rouquine s'appuie à un mur, attendant patiemment que son meilleur ami sorte des toilettes pour homme et, quand il le fait, elle le suit jusqu'au lavabo, posant sa main sur son épaule.

"- Denden..." elle souffle, consciente qu'elle doit le rassurer. Consciente que tout ce qui vient de se passer n'est que la manifestation de son stress. "Tout va bien se passer, d'accord ?" souffle-t-elle en le prenant dans ses bras, après qu'il ait passé ses mains sous le souffleur. "Je sais que tu es stressé. T'es pas obligé de la regarder si tu n'y arrives pas mais... Participe ? Intéresse toi à ce qu'elle fait ? Elle a dit qu'elle allait s'entraîner, demande lui ce qu'elle prépare pour la saison prochaine, sur quoi elle patine..." Elle murmure. "Tu peux le faire, j'ai confiance en toi." souffle-t-elle en le pressant plus fort, déposant un baiser sur sa tempe non sans s'être hissé sur la pointe de ses pieds. "Montre lui le garçon génial que je sais que tu es... Ok ?" Et se faisant, elle perd sa main dans ses cheveux, sachant pertinemment l'effet que ça lui fait en général et le besoin qu'il a de se détendre.

Tu peux souffler, respirer et ne pas en rajouter pour mentir à ton amie. Elle n'a rien remarqué et met ça sur le fait qu’elle n'a pas fait attention. Tu pouffes ensuite et tires la langue quand elle dit qu’elle te balancera au coach. Mais tu sais qu’elle ne le fera pas et trouvera un moyen de perdre tout ça comme si de rien n’était. Tu te retournes rapidement quand tu entends cependant le naturel de Sachs qui grogne sur Lisa. Tu fronces les sourcils, t’apprêtant à t’en mêler avant de rester un peu sur le cul sur ce qui se passe devant tes yeux. Tu bug même.

Tu vois une autre Lisa, ferme, qui ne prend pas de gants pour répondre à une tête à claques qui n’est pas connu pour son calme légendaire. Tu ne sais même pas comment ce dernier va réagir tant, il est assez imprévisible. Mais il semble s’exc… S’excuser ? Il s’excuse à Lisa ? Il rend même son sourire, avant de faire preuve d’une politesse jamais vue. Tu clignes des yeux, incapable de résumer ce que tu venais de voir et suit Sachs du regard jusqu’à disparaître avant de regarder Lisa, abasourdi.

- Tu … Hein ? J’veux dire… Je sais qu’il est pas tous le temps agressif, mais, t’es toujours obligée de lui tenir tête comme ça ?

Que tu demandes, curieux avant de voir qu’elle aussi a besoin d’y aller, au petit coin. Tu souris, disant que ce n’était rien et la laisse partir en soupirant. Tu te tournes alors vers Cornelia et te grattes la tempe.

- J’ai compris à c’qui vient de se passer. Et toi ?

Tu secoues la tête en pouffant nerveusement avant d’attraper ton paquet de frites pour piter dedans, machinalement.

- M’enfin. Je t’avais dit que ça irait. Il est plutôt calme finalement.

Que tu dis comme ça, essayant surtout d’avoir l’avis de ton amie pour prévoir comment amener la chose vis à vis de ce dernier. Il y a encore le rapprochement entre les deux à faire.

Évidemment que tu n’as pas pu te retenir, que tu as mal parlé à ta meilleure amie, mais comme tu le ferais à chaque fois. Comme un jeu, une taquinerie entre frère et sœur. Rien de grave. Tu serres les dents quand tu vois son regard, comprenant que tu avais peut-être fait ou dit une connerie, malgré le fait que tu te sois expliqué. Tu prends une grande inspiration, lui rendant son sourire et incline la tête. D’accord.

- Mademoiselle Hampton… Veuillez pardonner mon horrible langage et pouvez vous, s’il vous plaît, vous poussez que je puisse me soulager avant de me vider sur ce canapé ?

Un peu de sarcasme dont tu as toujours fait preuve avec elle, depuis que vous êtes enfant. Tu inspires un peu quand elle se lève et peut enfin te libérer de cette place, de cette petite prison qu’elle avait confectionnée en te coinçant contre la fenêtre en face de celle qui faisait battre ton cœur. Tu souris un peu.

- Merci.

Que tu siffles entre tes dents avant de marcher tranquillement, les mains dans les poches vers les toilettes dont tu pousses la porte un peu violemment avec l’épaule. Bien sûr, tu n’avais pas vraiment envie d’aller pisser. Tu avais juste besoin de te pauser au calme, sur la lunette fermée des toilettes, pour soupirer. Tu voudrais hurler, mais tu es encore dans un lieu public. Tu ne peux qu'inspirer profondément, en cachant ton visage dans tes mains. Tu râles et soupires, te maudissant. Ce repas était un fiasco complet. Du début à la fin. Tu ne sais pas ce que Lisa avait en tête, mais tu vois juste que c’est foireux.

Tu te retiens juste de pleurer devant ton incompétence à ne pas être juste… Comme Lisa. Avenant, bavard et… Pas agressif… Tu grimaces et te lèves pour sortir te laver les mains, te passer un peu d’eau sur le visage et grimaces en entendant la voix de ta meilleure amie. Tu redresses un peu la tête quand tu sens sa main sur ton épaule et te tournes vers elle.

- Tu parles...

Que tu souffles quand elle dit que tout ira bien. Tu secoues tes mains au-dessus du lavabo avant de les passer sous le souffleur et t’adosses en croisant les bras devant toi, le regard baissé. Tu l’écoutes, sachant très bien quelle raison. Plus que raison. Tu te mords l’intérieur de la joue et soupires alors qu’elle est dans tes bras, mais tu recules rapidement. Tu pourrais craquer et tu n’en a pas envie.

- J’y arrive pas… J’essaye… C’est juste...

Tu hausses les épaules, ne trouvant pas tes mots, comme à chaque fois que cela concerne la patineuse. Tu grimaces un peu quand elle dit qu’elle a confiance en toi, que tu peux montrer qui tu es vraiment. Tu souris légèrement au baiser sur la tempe et fermes les yeux quand tu sens ses doigts dans tes cheveux. Ça le don de te calmer, de faire comme un espèce de reset dans ta cervelle d’hyperactif. Tu prends une grande inspiration et hoches la tête.

- Ouais j’vais.. J’vais tenter… J’promet pas qu’elle me répondra, mais… J’peux demander, ouais…

Pas comme si tu n’allais pas comprendre si elle parlait de programme et de nom de figures de patinages… Tu avais fini par les apprendre par cœur à force de voir les entraînements de Lisa donc… Tu pourras échanger avec la brune avec plus de facilité… Qui sait. Tu fais signe.

- Vas y avant moi … J’arrive… Promis...

Que tu dis en souriant, la laissant partir pour reprendre un peu tes esprits… Aller.. Tu inspires, compte jusqu’à trois et sort de la pièce pour aller retourner à la table, attendre que Lisa te laisse passer pour te retrouver de nouveau face à Corny. Tu serres un peu les dents, le cœur tambourinant dans ta poitrine. Vas-tu y arriver ? Tu te baisses un peu, pose ta main sur la table, attend que Lisa et Andrew reprennent leur conversation et.. Tapotes doucement du doigt le plateau de la brune devant toi… Drôle de manière d’attirer l’attention de quelqu’un, mais soit...

"- Alors là..." souffle la demoiselle. "J'ai rien compris non plus ! Et t'as vu comme elle l'a recadré ? J'en crois pas mes yeux."

La scène lui avait semblée surréaliste et ce d'autant plus que Lisa était restée très calme. Le sourire aux lèvres, la voix ferme, elle avait dit ce qu'elle avait à dire sans grogner, sans agresser l'homme. Cornelia n'est pas sûre qu'elle aurait put réussir la même prouesse. Elle n'est pas sûre qu'elle aurait pu se montrer si calme et si douce, si Andy lui avait demander de bouger, sans ménagement.

"- Elle s'est plantée de carrière, c'était dresseuse de fauves qu'elle aurait dû faire !" commente Cornelia en buvant son coca et grimaçant. "Pouah c'est toujours dégueu leur sirop, pourquoi je prends encore ça moi ?" soupire-t-elle avant de reporter son attention sur Andy. "Non mais sérieusement, t'as vu ce que j'ai vu ? Sachs s'est... il s'est excusé ! Si ça c'est pas une prouesse, je ne sais pas ce que c'est !" affirme la brunette.

Andy fait remarquer qu'Aayden est plutôt calme en fin de compte et elle acquiesce. Oui, il l'est. C'est même presque inquiétant qu'il le soit autant parce qu'elle n'a pas l'habitude qu'il ne dise rien. D'habitude, le jeune homme mord. Il pique. De préférence, là où ça fait mal. C'est comme ça depuis qu'ils sont enfants. Mais depuis la dernière fois... Elle le trouve bizarre. Il ne m'a pas habitué à ça, loin de là. Elle sait composer avec sa haine, avec sa colère, avec tout ce qui le compose habituellement mais... Cette facette de lui qu'il présente, elle ne sait pas comment la gérer.

"- C'est presque inquiétant non ? Genre... il est malade ou... ?" demande-t-elle. "Il m'a pas habitué à ça et... Je sais pas... Je sais pas gérer ça. J'arrive pas à savoir d'où le coup va venir je... je sais juste qu'il va venir..."

Elle soupire. Le duo revient déjà. Lisa d'abord, qui attend un peu et Sachs, juste derrière la patineuse, reprenant sa place en face d'elle. Corny l'observe. Il a comme de l'eau sur son visage et elle lève un sourcil, avant de se détourner pour observer Andy et Lisa, qui recommencent à discuter, jusqu'à ce qu'un bruit sur son plateau lui fasse tourner la tête. Sachs qui pianote sur le plastique. Elle le regarde, confuse, sans comprendre ce qu'il lui veut.

"- Mh ?"

Maintenant, bouge. Il n'aurait pas dit ça, peut-être que Lisa n'aurait pas réagit, qu'elle aurait laissé coulé et se serait simplement écartée pour le laisser passer. Ce n'était pas ce qu'il avait pu lui dire de plus gentil ou de plus poli de sa vie, surtout en considérant qu'elle avait prit la honte devant Andy pour sauver ses fesses. Si c'était sa manière de la remercier... Alors elle attend des excuses et une formulation correcte, aussi, que le duo en face puisse constater que le jeune homme sait faire ça aussi. Satisfaite, malgré son sarcasme, elle se lève finalement, le laissant passer, lui rendant sa taquinerie.

"- Vas donc, ça m'embêterait de devoir prendre des couches pour toi quand on sort, à l'avenir." souffle la demoiselle, sourire au coin des lèvres.

S'il taquine, elle taquine aussi. Deal. C'est l'équilibre qui fait fonctionner leur amitié depuis tout ce temps. Enfin, ça et le soutien indéfectible dont ils font preuve l'un pour l'autre, au point que Lisa, en le laissant s'éloigner, projette déjà de le rejoindre. Elle doit juste attendre quelques secondes, pour que ça ne soit pas trop... bizarre. Ce qui donne à Andrew le temps de la questionner.

"- Oh non, pas tout le temps. Juste quand il déconne. C'est plutôt rare."

Avec elle, bien sûr. Avec les autres... Mais ils savent très bien ce qu'il en est, alors elle ne précise pas sa pensée et s'éclipse rapidement aux toilettes, prétendant avoir besoin d'y aller, quand elle veut simplement retrouver son meilleur ami et le réconforter. Entrant donc dans les toilettes, elle attend patiemment qu'il sorte de la cabine pour lui parler. Il n'a pas besoin de dire qu'il est stressé, angoissé, Lisa le sait. Elle le devine. Et c'est exactement pour ça qu'elle est là. Pour apaiser tout ça. Pour l'apaiser lui. Pour le réconforter. Pour le soutenir. Et le conseiller. Parce qu'elle ne le laissera pas tomber. Elle ne le laissera jamais tomber.

Il a beau dire qu'il n'y arrive pas, qu'il essaye mais qu'il n'en est pas capable, Lisa elle n'en croit pas un mot. Il manque d'assurance oui. Mais il va y arriver. Elle a confiance en lui, elle y croit dur comme fer. Il en est capable. Tout ce dont il a besoin, c'est de se détendre. Après, il y verra plus clair. Elle l'espère, en tout cas et, quand il dit qu'il va tenter, elle dessine un sourire sur ses lèvres. Voilà qui est mieux, même si la notion de tentative ne la satisfait pas tout à faire encore.

Il lui dit d'y aller et Lisa s'avance vers la porte sans la franchir toutefois, s'arrêtant juste devant pour faire volte face et se retourner vers lui, réduisant la distance entre eux d'un pas décidé. Elle a vu son coach faire des dizaines de fois. Elle L'A fait des dizaines de fois. Chaque fois qu'il est tombé, elle était là pour le rattraper, comme il l'avait fait des années plus tôt. Comme il le faisait toujours. Elle pose un doigt sur sa poitrine.

"- Ecoute moi bien Aayden. T'es un putain de champion ok ? T'es un putain de champion et t'es né pour gagner ! Pour obtenir tout ce que tu mérite ! T'es Aayden Sachs et tu peux tout faire, ok ? Parce que tu es le garçon le plus incroyable que je connaisse et j'ai peut-être plus quatre ans, mais t'es toujours un putain de héro à mes yeux, d'accord ? Alors vas-y. Brille. Défonce tout. Montre lui que t'es pas le petit con que ton père veut faire de toi. Soit cette putain de météorite que je sais que tu es. Tu peux le faire. Et tu vas le faire. Parce que tu la veux. Et parce que bordel Aayden, t'es un gagnant. Ok ?"

Et, alors, seulement après ça, Lisa sort de la salle, le pas rapide, rejoignant leur table comme si de rien était, lançant un grand sourire aux deux autres l'air de rien. Elle s'installe, fait mine de ne pas savoir qu'il arrive puis se lève et reprend sa place à ses côtés. Et, sous la table, elle prend sa main dans la sienne et exerce une légère pression sur celle-ci, comme un dernier encouragement muet. Elle est là. Il n'a pas à s'inquiéter. Elle est juste à côté, prête à le rattraper comme elle l'a toujours fait.

Tu rigoles un peu avec Cornelia qui s’ouvre plus facilement depuis que le duo est parti aux toilettes. Tu pouffes doucement à ses dires, ses mots. Oui non, dresseuse de fauve, c’est pas mal pour décrire la rouquine. Tu ne vas pas essayer de l’imaginer avec la tenue, ce serait bizarre. Ni avec un fouet. Tu lèves un sourcil quand elle parle du coca et lui donne un petit coup de coude amical.

- Tu aimes les bulles. Et le sucre. Surtout le sucre.

Que tu rajoutes en pouffant, prêt à te recevoir le gobelet sur la tronche, habitué à ce qu’elle râle pour sa boisson alors qu’elle va la finir quand même. Parce que c’est Cornelia et parce qu’elle n’aime pas non plus gaspiller la nourriture alors qu’elle fait très attention pour maintenir son statut d’athlète pour pouvoir obtenir une place en compétition prochainement. Et son but ultime étant les Jeux olympiques… Tu reprends d’ailleurs ta propre boisson et hoches la tête.

- Je ne l’avais encore jamais entendu s'excuser. Et non, j’pense pas qu’il soit malade juste… Peut-être différent quand il n’est pas entouré de la meute de hockeyeurs, c’est tout. Sont un peu cons eux aussi, faut pas croire.

Tu redresses la tête quand ils reviennent et fronces un peu les sourcils en voyant le regard un peu triste de Sachs. Tu essayes de ne pas relever, priant pour que ça se passe bien et voit qu’il tente d’attirer l’attention de ton amie d’une façon plutôt discrète. Tu te remets alors à te concentrer à nouveau sur Lisa. Peut-être qu’en faisant semblant de ne pas l’écouter, il pourra parler avec la patineuse. Tu souris alors à la rouquine et approche ton visage, appuyé sur les coudes.

- Mais du coup, Lisa… Raconte plus en détails. Tu vas proposer quoi avec ta mère comme activités aux gamins ? Vous êtes genre, encadré par une association et tout ?

Tu serres les dents, encore trop anxieux pour ouvrir la bouche. Tu continues de tapoter, comme pour te déstresser plus que pour attirer l’attention de la patineuse au final. Tu lèves les yeux vers elle en entendant sa voix, voyant bien qu’elle avait remarqué ton petit jeu. Tu serres les dents, stressé d’un coup. Ta jambe gauche commence à bouger toute seule alors que les mots commencent à s’entrechoquer dans ta cervelle. Tu dois commencer par quoi ? Comment ? Tu le dis comment ? Tu essayes d’entrouvrir tes lèvres, espérant trouver le courage et manque de sursauter en sentant la main de Lisa dans la tienne sous la table.

Les mots de ta meilleure amie te reviennent alors en tête. Comme un espèce d’électrochoc, comme un écho des mots du coach quand tu perdais espoir en fin de match. Comme un rappel du peu d’affection que te montrait ta mère quand elle se souvenait que tu étais là. Tu inspires doucement. Un champion… Ouais, bah, là, le trophée est assez inaccessible. Tu ne sais même pas si tu la mérites vraiment cette fille. Tu te mords la lèvre et vois qu’Andrew semble t’ignorer, absorbé par l’adolescente à tes côtés. Tu souris intérieurement, le remerciant. Tu y arrivais sûrement mieux si tu savais qu’il n’écoutait pas.

Peut-être que tu ne veux pas paraître idiot aussi devant son meilleur ami et crush de Lisa, qui sait. Tu te racles un peu la gorge et t’avance un peu, serrant la main une dernière fois de la rouquine pour la lâcher, posant ton bras libre sur la table, te permettant alors de continuer à piter tes frites.

- M… m’demandait si… enfin.. vu qu’tu… pour… t’entraîner…

Oula alors… Les mots, les phrases… Il manque quelques mots, tu n’es pas sûr d’avoir la voix assez haute pour qu’elle entende tout aussi.. Mais on note. Face à douze ados surexcités en tenue et protection, crosse en main, il y a du monde, mais face à une petite patineuse de ton âge qui doit faire bien trente kilos de moins que toi, il n’y a plus personne, c’est ça ? Tu soupires alors que tu sais pertinemment que tu dois être en train de rougir doucement. Rosir des joues au moins.

- Tu… Quoi qu’tu prépares… en programme...

"- Dixit le mec qui se ballade avec des bonbons dans le sac en permanence ? Bon ok... C'est vrai. Mais je crois que le coca c'est vraiment la boisson la plus horrible du mcdo genre... Comment ils font pour que ça ait tout sauf le goût du coca ? Fait moi penser de ne plus en prendre la prochaine fois, ça a vraiment un goût horrible !"

Mais comme d'habitude, elle va finir. Et comme d'habitude, aussi, elle recommencera la prochaine fois et se fera avoir, encore une fois. A croire que pour ça, elle n'apprend jamais de ses leçons. Mais il a l'habitude et elle aussi, dans le fond. C'est toujours comme ça que ça se passe. Elle se dit toujours que c'est la dernière fois. Mais ça ne l'est jamais. C'est plus fort qu'elle, elle aime le coca. Elle ne comprend simplement pas comment la chaine de fast food arrive à le rendre aussi mauvais.

"- En même temps avec tous les coups que ça prend, que ça se donne... On va pas leur demander d'avoir encore des neurones."

Ouai, les hockeyeurs sont débiles, c'est pas nouveau. Elle n'avait rien contre eux à l'origine mais... Elle en a soupé, avec ces parfaits petits crétins et ce depuis... longtemps. Vraiment longtemps. Trop longtemps pour qu'elle n'ait pas, désormais, un peu de ressentiment envers eux et envers celui qui lui en a le plus fait baver en fin de compte... Aayden Sachs. Qui non content d'être un petit con qui la bully à la patinoire, habite juste en face de chez elle, sa fenêtre donnant sur la sienne. Un plaisir. Et combien de fois cette proximité involontaire a-t-elle été gênante ? Trop souvent. Elle se souvient de l'avoir aperçut parfois, une simple serviette autour de la taille, ses muscles saillants... Aayden Sachs était bien fait, sans aucun doute et il n'était pas étonnant que Karine lui courre après. Elle n'était pas la seule. Pour Cornelia, c'était plus compliqué. Admettre qu'il avait du charme... elle avait l'impression de trahir la fille qu'elle avait été, qu'il avait prit plaisir à rabaisser.

Le duo revenant à quelques secondes d'intervalle, Cornelia s'intéresse à la conversation de Lisa et son meilleur ami, avant que Sachs n'attire son attention par quelques coups sur son plateau. L'observant, elle lève un sourcil sans comprendre. Il semble vouloir dire quelque chose mais hésiter et elle n'est pas sûre de comprendre ce qui lui arrive. C'est grave ? Un AVC, à son âge ? Personne n'a l'air de s'en soucier. Ni Andy. Ni Lisa. Elle fronce un peu plus les sourcils, l'observant alors qu'il se met à parler sans être très clair, dans un premier temps. Ok... Qu'est-ce qui lui arrive; vraiment ? Elle a presque peur. Jusqu'à ce qu'il finisse par poser une question presque claire, qui lui fait se demander depuis quand ce genre de choses l'intéressent.

"- Oh... Euh... je vais patiner sur Gisèle en programme court. Un ballet." précise-t-elle. "Et Lay all your love on me, en programme libre."

Revenant à table, elle remarque rapidement que l'homme à ses côtés reste un peu tendu et elle lui prend alors la main sous la table, espérant par cette petite pression lui donner un peu de courage, lui rappeler qu'elle est là, de toute façon, qu'elle ne le laissera pas tomber. Mais, pour lui faciliter les choses, pour le laisser dans une sorte de bulle avec Cornelia, elle accorde toute son attention à Andy, non pas que ce soit vraiment difficile, ce dernier s'intéressant de près au programme de son été et à ce qu'elle allait faire avec les enfants.

"- Oh globalement ça va dépendre un peu de l'ensemble de l'équipe mais il y aura sûrement des activités de motricité comme la construction de châteaux de sables par exemple. Du sport au bord de l'eau. Beach volley et autre. Et puis des activités artistique, ça dépendra un peu de ce que l'on aura à disposition. Le plus souvent l'association d'accueil a un peu de matériel via des dons et autre. Après... c'est beaucoup de la débrouille, avec des ressources locales." explique Lisa avec un sourire.

La perspective de ce voyage l'excite déjà. Elle sait que, comme toujours, elle en ressortira grandie. Qu'elle en ressortira heureuse et satisfaite d'avoir pu être utile, d'avoir allumé des sourires sur ces visages. Elle sait qu'en revenant à New York, elle ne sera plus tout à fait la même. On ne rentre jamais comme on est parti. Jamais.

"- Et puis avec maman on prévoit pendant les temps libres de faire un peu de snorkeling et puis voir le jardin du Géant Endormi, essayer les sources d'eau chaude... Et ce sera un programme déjà bien rempli parce que les journées font facilement dix à douze heures avec les enfants..."

Vous êtes là, à quatre, dans deux bulles différentes. Tu le sais, tu le sens, tu le vois. Tu jettes quelques regards à Sachs, alors que tu écoutes avec une certaine attention la rouquine en face de toi. Tu lui souris, à la demoiselle. Comme si c’était facile, inné. Après tout, il ne t’en fallait pas beaucoup pour rester concentré sur elle. Tu l’admires depuis trop longtemps pour t’en rendre vraiment compte à quel point ton regard pouvait désormais te trahir. Peut-être que le club le sait. Peut-être que les autres le savent. Toi, tu as mis un peu plus de temps.

Tu t’es rendu compte de tout ça il y a trois ans. Mais tes frères sont certains que tu l’aimes depuis bien plus d’années que cela. Mais le déni est plus fort, bien entendu. Tu essayes de ne pas y penser alors que ses explications t’emportent un peu, loin d’ici, à laisser refroidir ton cheeseburger et tes frites, laisser les glaçons fondre, se mélangeant allégrement à ton coca.

- Tu vas nous revenir bronzée, on va rien comprendre.

Que tu dis en rigolant doucement. Tu te mords la lèvre, te disant que cela devait être une belle expérience à vivre, au moins une fois et en même temps, être à ses côtés en la voyant aider des enfants devait être un beau spectacle. Quelque chose de rare et précieux à garder en mémoire. Tu jalouses doucement Sachs, encore une fois. Il a dû en vivre des aventures avec elle, à la voir forte, courageuse et sûre d’elle, la voir grandir, s’améliorer et être une nouvelle facette de sa personnalité de jour en jour. Tu bois une gorgée de coca avant de froncer les sourcils.

- Du quoi ? C’est quoi du snorkeling ?

Vrai question au moins. Tu te coucheras moins bête ce soir sûrement. Nouveau regard vers Sachs. Il se dépatouille comment avec Corny ?

Un temps. Il y a un temps de silence entre vous alors qu’à côté, la discussion continue de tourner en fond sonore, comme une musique qui ne s’arrête pas, un disque oublié. Tu soupires, envieux de la facilité de ton amie à pouvoir parler à Myers sans risquer de perdre ses moyens au moindre problème. Tu grattes le plastique du bout des ongles, nerveux alors qu’elle ose te répondre doucement. Tu bascules la tête sur le côté. Gisèle ? Gisèle… Ce nom te dit un truc. Elle précise pour le ballet et tu vois un peu plus. Peut-être que Lisa t’avait déjà fait écouter le morceau une fois, tu ne sais plus.

Tu hoches doucement la tête, voyant un peu le temps que cela lui prendra donc pour le court et le libre. Si ta mémoire ne te fait pas défaut, pour le chrono, elle sera dans les clous. Reste à savoir si elle tiendra selon la composition de son programme. Tu te grattes un peu la tempe et continues doucement, espérant être assez clair dans ce que tu racontes, mangeant entre deux souffles une frite, plus pour te calmer qu’autre chose.

- T’as.. déjà ta compo ou...

Tu déglutis doucement, cherchant tes mots alors que tu réfléchis à plus de deux cents à l’heure parmi une multitude de questions qui passent dans ta cervelle d’hyperactif. Tu essayes de te raccrocher à quelque chose de concret, qui pourrait paraître logique, alors que tu essayes d’avoir le courage de prononcer tous les mots.

- Je… J’sais qu’Lisa.. voulait tenter… Gisèle.. Une fois.. mais…

Tu te redresses un peu, pris d’un coup de chaud soudain. Ou juste parce que tu rougissais un peu trop, encore. Toujours essayant de croiser son regard sans grande conviction, plus par timidité qu’autre chose.

- Elle… Elle avait du mal avec ses Axel à la fin et… a préféré changé de morceau…M’enfin...

Que tu dis en te massant la paume de la main.

Alors là... Aayden Sachs qui lui fait la conversation comme si tout était normal, c'est pas loin d'être une première. Non, correction, s'en est une. La première fois qu'il lui parle sans chercher à la rabaisser, l'humilier ou rappeler à quel point il est tellement meilleur que tout le monde parce que lui pratique le hockey, tellement supérieur au patinage artistique à ses yeux, quand bien-même c'est aussi le sport de sa meilleure amie. Elle ne peut pas vraiment ignorer qu'il tient ce discours de son père puisque leurs deux familles se détestent depuis des décennies, mais... Quand même. Et, de fait, elle ne comprend pas ce soudain revirement de situation, avec un Aayden calme et... presque agréable, oui. Pour autant, elle ne baisse pas tout à fait sa garde, consciente qu'il peut probablement mordre à tout moment, surtout quand elle ne s'y attendrait plus.

"- Le chorégraphe travaille à la terminer."

Elle connait déjà le début et pourra bientôt commencer à s'exercer, maintenant que les examens sont passés, même si c'est la trêve pour tout le monde. Elle ne compte pas attendre gentiment plus d'un mois que les cours reprennent. Elle ne compte pas, surtout, prendre le risque que son corps perde l'habitude de la tension de l'exercice, ou qu'il perde sa souplesse. Le patinage, comme n'importe quel sport, demande de la rigueur et puisqu'elle sera à New York, elle aura tout le loisir de s'exercer, ne serait-ce que dans ses figures.

Il évoque Lisa, un programme passé, et elle hoche la tête. Elle se souvient de ça. Y'a sept ans. Y'a mille ans. A l'époque, elle avait dansé sur un arrangement de la valse des fleurs en programme court. Elle aussi, avait encore du mal avec ses doubles Axel. C'est une technique à prendre. Depuis, ils ont fait du chemin, aussi bien Andy qu'elle ou Lisa. Tout ça semble tellement loin.

"- C'était y'a longtemps ça... On rentrait avec des hématomes sur tout le corps à cause de ces sauts, sans savoir comment on pourrait survivre aux triples voire aux quadruples."

Et maintenant... Maintenant, ça semblait presque trop facile même si le risque de chute n'était pas non plus absent. A l'époque, ils cherchaient déjà à réussir le saut. Aujourd'hui, ils cherchaient à les parfaire encore et encore, toujours plus loin dans la perfection. Ce qui n'était pas le même travail, elle l'avait apprit à la longue.

"- Et moi je vais vous voir enchaîner des quadruples les doigts dans le nez, je ne vais rien comprendre !" rit-elle comme l'homme affirme qu'elle va revenir bronzée.

Il y a des chances que ça arrive, oui, même si ce sera l'hiver aux Fidji quand elle sera sur place. La température en cette saison est tout de même aux alentours des 27-30°, permettant largement d'envisager des baignades et de prendre des couleurs au soleil, même si ce n'est pas pour cette raison qu'elle voyage, que ça ne sera pas le plus gros de son activité sur place. Avec sa mère, elles espèrent bien pouvoir en profiter un peu tout de même pour faire les incontournables de l'île, comme le snorkeling qu'Andy ne semble pas connaître.

"- C'est une randonnée aquatique palmée, en eaux peu profondes. Un peu comme de la plongée mais en restant en surface, juste avec masques et tubas."

Non pas qu'elles ne puissent pas faire de plongée, elles ont leur diplôme niveau un depuis deux ans maintenant et ont toutes deux accompli la moitié du parcours pour le niveau 2, leur donnant la qualification «plongeur encadré 40 mètres». Le snorkeling est juste une autre manière de découvrir d'autres beaux espaces subaquatique.

Tendant l'oreille en entendant son prénom, Lisa prend un air faussement outragé en entendant son meilleur ami critiquer ses axel et affirmer qu'elle avait changé de musique. Elle se souvient de ça, oui. Du haut de ses dix ans, elle avait voulu inscrire Gisèle dans son programme. A l'époque, les doubles axels lui posaient encore problème. Les doubles Lutz et Salchow étaient des réussites mais ses axels... Le saut de base le plus difficile du répertoire avait été comme pour beaucoup de patineurs sa bête noire. Finalement, la coach avait décidé de laisser tomber Gisèle pour proposer un extrait du pas de deux de la fée Dragée, en proposant un programme plus délicat, plus poétique, qui avait permit d'abandonner le double axel pour ne se consacrer qu'aux sauts maîtrisés, toute la portée de la prestation reposant alors d'avantage sur l'interprétation, sur la poésie et des sauts parfaitement exécutés, plutôt que sur une grande technicité.

"- Devrait y avoir prescription pour raconter des trucs pareils, je venais d'avoir quoi ? Dix ans !" proteste la demoiselle pour Andy, en riant.

Tu rigoles un peu quand elle dit que tu maîtriseras sûrement les enchaînés de quadruple avant elle.

- Compte sur Corny pour ça.

Oui, tu jettes des fleurs à ta meilleure amie au passage, la connaissant. Elle savait déjà faire des doubles et triples avant tout le monde, alors des enchaînés de quadruple… tu parierais une place pour les JO.

- Non?! Ça a l'air trop bien…

La seule réaction que tu as quand elle t'explique pour le snorkeling. Tu imagines facilement à quoi cela pouvait ressembler, toi qui aurais pu devenir nageur professionnel si le patinage n'avait pas fait une entrée dans ta vie comme un hockey contre les vitres de protection. Tu te ronges un ongle en souriant, complètement pris dans la discussion.

- J'crois qu'j'adorerai en faire. J'ai un faible pour la plongée sous-marine, j'avoue. Si j'le pouvais, je resterais dans l'eau… Mais hey! J'ai le patin donc j'peux faire d'infidélité à la glace.

Que tu dis avant de rire quand elle parle de prescription. Tu avais pas bien entendu de quoi parlait Sachs et Corny et à la tête du blond, ça devait être un truc qu'il a sorti pour essayer de tenir la conversation. Tu pouffes un peu.

- Laisse-le. Il essaye au moins.

Que tu dis, voyant bien que le blond était assez en galère pour l'abaisser encore plus. Il y a encore quelques semaines, tu en aurais profité, au vu des choses qu'il avait déjà pu balancer. Mais avec le recul, tu sais que ce ne sont pas vraiment ses mots. À le voir avec ta meilleure amie, tu sens qu'il essaye, qu'il tente d'être, peut-être plus naturel. Ou du moins plus avenant.

Tu allais reprendre la parole quand une voix féminine assez grinçante te donne un frisson dans le dos. Tu déglutis doucement et te retournes doucement en passant une main sur ton visage. Oh merde non… il ne manquait plus qu'elle. Tu la suis du regard alors qu'elle vient à votre table, debout du haut de ses talons aiguilles à t'en faire péter des chevilles, ses cheveux longs, blonds, sûrement soignés avec deux mille produits, ses yeux bleus qu'elle sublime comme elle peut de ses mascaras hors de prix…

La "Reine" du lycée… l'une des filles les plus riches et populaires… Karine Smith…

C'était y a longtemps qu'elle dit. Tu baisses la tête et te mords la lèvre quand tu entends Lisa en rajouter. Mais quel con. Tu croises un peu les bras sur ton torse, un peu craintif. Tu ne voulais pas non plus exposer ton amie comme ça, ce n'était pas le but. Juste que tu te souvenais de cet épisode de vie, l'époque où tu n'avais pas encore trop d'heures d'entraînement pour accompagner cette dernière dans les siens, la relever si besoin, lui dire que c'était trop tôt, trop tard ou même qu'elle avait confondu un saut. Tu soupires et te tournes vers Lisa.

- Désolé… j'voulais pas…

Que tu commences à dire à ta meilleure amie, voulant chercher à t'excuser une nouvelle fois. Tu te rends compte que tu foires tout aujourd'hui. Elle voulait sûrement faire bonne impression elle aussi, face à Myers et tu fais tout foirer. Tu soupires un peu. Tu te redresses, voyant que ce dernier voulait ajouter quelque chose.

- AAYDEN CHOU D'AMOUR!!!

Tu manques de cracher ta gorgée d'ice-tea devant toi en entendant ce stupide surnom. Il n'y en avait qu'une seule et unique qui pouvait oser faire ça, en plein milieu du McDo en oubliant totalement le monde extérieur. Tu avales avec difficulté ta boisson et redresses la tête en voyant l'espèce de poupée Barbie sortie d'une usine des années 50 arrivée à votre table.

- Karine… j't'ai déjà d'mandé d'arrêté avec…
- C'est fou qu'on se rencontre ici ! Ça va ? Et tes résultats alors ?! Oh… bonjour vous… J'vois que tu sais choisir avec qui tu manges … M'enfin pas grave. J'te dérange, Amour ?

Qu'elle rajoute en remarquant enfin Lisa, Andrew et Corny. Tu serres les dents au surnom, connaissant assez bien la fourberie de l'adolescence quand il s'agit de personne qui t'entoure. Tu serres les poings et secoues la tête. Putain. Quand elle faisait sa mielleuse comme ça, c'est qu'elle avait un truc en tête. Si au début, tu laissais faire, tu as vite compris qu'elle essayait juste de t'éloigner de Lisa et ça … Tu avais jamais apprécié.

- Qu'est-ce qu'tu m'veux cette fois?

Elle joint ses mains devant son visage faussement angélique. Tu la maîtrises, l'adolescente, depuis le début du Secondaire qu'elle essaye de sortir avec toi. Tu ne sauras jamais pourquoi toi, il y avait d'autres mecs dans l'équipe de hockey, mais non. Elle avait décidé que c'était toi, et ça te pourrissait la vie plus qu'autre chose.

- Je voulais te proposer de venir finir ton repas avec nous… Je pourrais te présenter le copain de Kylie, il est pro et…

Tu fais signe de se taire et remercies intérieurement Lisa d'être entre vous, sinon tu serais déjà debout à lui faire manger ses frites par le nez.

- C'est gentil, mais non. J'suis bien ici avec mes amis et si ça t'plait pas, va voir ailleurs, ok? Et commences pas à dire des conneries dans mon dos… j'suis pas d'humeur.
- Mais… Choubidou…
- Et arrête avec ça putain!! On est pas en couple qu'j'sache ?! Met l'toi dans l'crâne d'moineau qui t'sert à porter ta perruque ! Dégage avant qu'j'devienne vraiment agressif !

Silence dans le restaurant alors que tu as tapé du poing sur la table en finissant ta phrase. Tu attends qu'elle réagisse alors que tu la fusilles du regard. Putain… tu ne voulais pas montrer ce côté-là à Conelia… pas comme ça…