Mary comprenait pourquoi Severus voulait se réconcilier avec Lily. Elle était sa seule amie. Pour autant qu’elle se souvienne, elle ne l’avait jamais vu avec qui que ce soit d’autre, pas même de sa propre maison. Comme quoi, les serpentards n’étaient guère du genre à se soutenir, sauf lorsqu’ils s’agissaient d’attaquer les gryffons. Et encore… personne ne se souciait des brimades que subissait Severus. Si les rôles avaient été inversé, Mary n’avait aucun doute que les Or et Rouge auraient déjà réagi pour défendre l’un des leurs. Bon, c’est vrai que savoir que parmi sa maison il y avait des harceleurs n’avait rien de glorieux non plus, mais chaque maison avait ses membres les moins reluisants, non ? Quoi qu’il en soit, la septième année trouva que faire des choses plus intéressantes plutôt que de se mettre aux pieds de Lily était une bonne idée. En tout cas, ça le faisait monter dans son estime. Pas qu’elle considérait que sa meilleure amie ne mérite pas d’excuse, c’était tout le contraire, mais disons que les chiffe-molles, ce n’était pas son délire. Or, elle avait eu tendance à le considérer de la sorte à force de le voir se faire maltraiter par les maraudeurs. Elle avait maintenant la preuve qu’il n’était pas que le toutou de Lily et le souffre-douleur de James et sa bande. A sa réflexion, Severus répondit d’un « Peut-être pas... » avec un sourire en coin aux lèvres. Mary l’observa avec intérêt. Elle appréciait beaucoup son côté narquois. Finalement, il n'était pas aussi insipide qu'elle l'avait cru de prime abord. Lily en avait toujours parlé en bons termes, mais Mary ne l'avait jamais vraiment écoutée. Elle s'était arrêté à sa maison, et pensait que sa meilleure amie était juste naïve de ne pas voir le serpent qu'il était réellement. Du moins jusqu'à ce qu'il montre son vrai visage en l'insultant avec les mots les plus humiliants qui puisse exister pour un né-moldu. Même la gentillesse et la bienveillance de Lily ne pourraient pas suffire à lui pardonner. Il avait signé son arrêt de mort, d'une certaine façon. Et cette situation avait plu à Mary. Son amie arrêtait enfin de fréquenter l'ennemi. Pourtant, maintenant qu'elle lui faisait face en tête-à-tête, la jolie blonde devait bien avouer qu'il l'intriguait. Il ne réagissait pas du tout comme si elle s'y était attendue. Sans doute une ruse de Serpentard... Mais... et si ça ne l'était pas ? Après tout, pourquoi tenait-il tant à Lily ? Ne pouvait-il pas se trouver des amis dans sa propre maison ? Les réponses étaient évidentes, cependant Mary avait besoin de se les poser, de méditer sur elles.

Puis elle décida de partir, non sans lui lancer une dernière phrase pleine d’un presque espoir, à laquelle il réagit. « Sans doute... Mais il n'y a pas d'autre vie. » entendit l’étudiante juste derrière elle. Se retournant, elle l’aperçut qui descendait derrière elle. Fronçant d’abord les sourcils, le serpentard balaya rapidement sa crainte qu’il ne veuille la stalker maintenant qu’il n’avait plus Lily. « Tu es condamnée à faire un bout de chemin avec moi, je te rappelle que ma salle commune est dans les cachots. » C’était donc cela. Il avait raison, et Mary se sentit bête d’avoir pensé qu’il allait la suivre comme un pervers. « Tu veux que je te jette par la fenêtre ? Ça te ferait gagner du temps. » sourit-elle, mais cette fois-ci ce n’était pas méchant, son ton était complice, le même qu'elle aurait employé avec un ami. Après tout, pourquoi pas ? Une fois n'est pas coutume, comme disait l'adage.

Il allait peut-être falloir qu’elle cesse d’être parano. Tous les mecs de cette école n’étaient pas des pervers qui cherchaient à gratter quelques instants de son attention après tout. Certes elle remarquait les regards qui s’attardaient parfois sur elle et s’était déjà faite agresser, mais tout le monde n’était pas une sorte de taré en liberté qui n’attendait que le bon moment pour passer à l’action. Du moins l’espérait-elle. D’autant que lorsqu’on y réfléchissait bien, la gryffondor n’était pas mal dans le genre agressif. Son mode de communication préféré étant le sarcasme et le mépris, elle passait pour une garce arrogante, ce qu’elle était peut-être en fait. Elle s’était déjà pris des réflexions comme quoi elle ressemblait plus à une serpentard à jouer les princesses intouchables qu’à une véritable gryffondor. Sans se démonter et selon la personne qui portait ces accusations, soit Mary ignorait la remarque, soit elle y répondait de manière cinglante, avec ou sans sortilège comme point final. Si le Choixpeau l’avait fait aller dans cette maison, ce n’était pas pour rien. Certes elle n’était pas la plus amicale et la plus sympathique des personnes sur qui on pouvait tomber, il n’empêche qu’elle avait du caractère et du courage à revendre. Quant à ses ambitions, la seule qu’elle ait réellement était d’être libre et de conserver son indépendance dans un monde patriarcal. Aussi, dans la société actuelle, Severus aurait toujours plus de porte ouverte qu’elle, simple femme. Elle était ainsi en droit de se venger, à sa manière. En attendant, le Vert et Argent s’en prenait beaucoup dans la tronche grâce à des nulles comme James et sa bande, qui trouvaient qu’humilier les plus faibles était un amusement sans conséquence. A moins que ce ne soit juste parce qu’il était ami avec Lily ? Toujours est-il que Mary se proposa de le jeter par la fenêtre pour lui faire gagner du temps. « Non trop haut, mais au quatrième étage tente toujours. » La septième année ne put s’empêcher de rire. D’habitude les gens prenaient toujours la mouche dès qu’elle disait quelque chose, mais lui semblait non seulement le prendre bien, mais en plus il en rajoutait une couche. Doucement mais sûrement, Mary commençait à comprendre pourquoi Lily l’aimait bien. Il avait beaucoup d’humour, et c’était quelque chose de bien trop rare. « Très bien, j’attends le quatrième étage. » fit-elle avec un sourire, amusée. « Tu comprends mieux pourquoi je voulais camper devant la salle commune... Je me voyais mal faire les allées et retours, puis ça change des cachots. » expliqua-t-il ensuite, mais toujours avec une pointe d’humour. « Oui je comprends, mais ça fait de la cardio. Par contre je comprends que tu veuilles changer d’air. Vivre dans les sous-sols doit être déprimant. C’est peut-être pour ça que les serpentards tirent tous la tronche. Si ça se trouve, si on vous installait ailleurs, vous deviendriez des personnes supers sympas. » lança-t-elle et à la fois sincère et à la fois pour le faire réagir. Car la gryffondor se demandait ce qu’il pouvait bien penser de cette guerre des maisons, alors qu’il était justement ami avec une personne qu’il était sensé voir comme une ennemie.

Solitaire, voire carrément sauvage, Mary se surprenait pourtant à apprécier la compagnie du serpendard. Non seulement il acceptait son humour sans se vexer et sans partir bouder, mais en plus il ripostait, lui rendant son sarcasme avec autant de fougue qu’elle en possédait. Autant dire que ça l’amusait beaucoup et que ça lui changeait de tomber sur quelqu’un qui avait enfin de l’esprit. Si elle avait su que Lily se trainait un tel ami, elle aurait sûrement trainé avec eux à l’occasion. Bon, il était fort possible que la rouquine lui ait dit mais qu’elle ne l’ait pas écoutée. Comme pour beaucoup de gryffondor, pour ne pas dire la totalité, Mary ne voyait pas d’un très bon œil que la douce Lily passe du temps avec un serpentard. Pourtant, il s’avérait que l’étudiant était plutôt sympathique. Mary décida donc de savoir ce qu’il pensait des siens, et des préjugés qui existaient contre sa maison. « Tu sais la majorité des serpentards vivent dans des manoirs, donc je pense que ça leur fait pas trop de mal de connaitre les cachots... Après oui, cachot ça ne fait pas envie. Mais nous sommes sous le lac et ça a son charme, faut pas être claustrophobe. » C’est vrai que contrairement à la majorité des snobs qui étaient envoyé dans cette maison, Severus était un sang-mêlé de petite condition. Ça au moins elle s’en souvenait. Il vivait près de chez Lily, et de ce qu’elle savait son père était un moldu qui détestait les sorciers. Un type pareil, la septième année aurait bien des idées de sortilèges à lui balancer pour lui faire regretter son racisme… et le fait qu’il maltraite son fils, si elle avait bien compris. Pas que Lily lui ait raconté sa vie en détail, mais elle avait énoncé certaines choses pour la convaincre que Severus n’était pas le grand méchant loup que tout le monde voulait qu’il soit. A présent, elle commençait doucement à se dire que, peut-être, elle s’était trompée à son sujet. « Tu crois que le fait qu’on ait mis les serpentards dans les sous-sols c’est une métaphore pour leur apprendre l’humilité ? Genre, c’est eux qui se trouvent en bas de la pyramide ? » C’était plutôt parce qu’à l’instar du fondateur, c’était des personnes à la langue fourchue qui aimaient faire leurs manigances dans l’ombre. Ceci étant, c’était une façon de pensée réductrice. Tous les serpentards n’étaient pas d’arrogants personnages et beaucoup de ministres venaient de cette maison. Après tout, la ruse et l'ambition étaient des qualités lorsqu'elles étaient bien utilisées. « C’est comment votre salle commune ? Il parait que c’est tout en cuir, le truc pour enfants de riche. Tu confirmes ? » s’enquit-elle, se demandant à quoi pouvait bien ressembler le repaire de manipulateurs ambitieux, et se demandant si un tel endroit pourrait lui plaire.

On partait toujours du principe que les personnes aimaient la maison dans laquelle ils avaient été envoyées. Mais peut-être que ce n’était pas forcément le cas ? Peut-être que les personnes s’en convainquaient pour mieux s’intégrer ? Par exemple Severus avait été envoyé à Serpentard et son amie Lily à Gryffondor, pourtant ils avaient nécessairement des points communs pour s’entendre aussi bien. Mary savait que le Choixpeau Magique parvenait à lire dans l’esprit des élèves pour s’avoir quelles étaient leurs plus profondes motivations, mais c’est vrai qu’elle ne pouvait s’empêcher de se demander comment aurait été sa vie si elle avait été dans une autre maison. Et pour Severus, est-ce que les maraudeurs se seraient autant acharnés sur le serpendard si ce dernier avait été dans leur maison ? Et si Lily serait allée à Serpentard, est-ce que James se serait intéressé à elle ? C’était fou de se dire que la vie dépendait majoritairement d’évènements indépendants de son contrôle. Mais avec des si, on mettrait Poudlard en bouteille. En attendant, vu qu'elle faisait face à un serpentard autre que pour s'échanger des insultes ou de l'indifférence, Mary trouvait que c'était une bonne occasion pour en apprendre davantage sur la maison de Salazar et leurs différences. « Salazar a préféré opter pour un lieu caché. On voit souvent le serpent comme un animal froid, humide, sombre... Ce que beaucoup ont oublié, c'est que même les serpents ont besoin de chaleur, on a dû nous confondre avec des rats, voire des chauves-souris. » Mary sourit. Il avait raison. On voyait toujours ce reptile comme vivant dans l’obscurité, alors qu’il avait besoin de se dorer la pilule au soleil pour se réchauffer le sang et ne pas mourir. Severus était ainsi plus intelligent qu’il ne le paraissait. Du moins, il pouvait enfin se montrer tel qu'il était maintenant qu’elle lui en laissait l'occasion. La gryffondor en profita également pour lui demander si leur salle commune était aussi classe et riche que les familles dont les rejetons peuplaient majoritairement la maison. « Oh oui... Soi-disant ça fait chic, qu'est-ce que c'est inconfortable. » Inconfortable, le cuir ? Mary haussa un sourcil, ne sachant s’il était sérieux ou non sur ce point-là. Ce serait bien la première fois qu’elle croiserait quelqu’un qui n’aimait pas ça. « Peut-être parce que tu n’es pas habitué au luxe ? » tenta-t-elle, sachant que c’était un sang-mêlé qui venait d’un foyer pauvre. « Et chez les lions c'est comment ? D'ailleurs pourquoi la grosse dame ? Tous les lions chantent faux ? » Mary s’esclaffa. « Non, je ne pense pas. Mais si tu poses cette question en espérant me faire pousser la chansonnette afin de te montrer que tu te trompes, c’est loupé ! » sourit-elle avec amusement. « Par contre, si tu trouves qu’elle chante horriblement faux – et c’est effectivement le cas – imagine ce que c’est quand elle décide de te faire un récital privé avant de t'autoriser à entrer… » La pauvre étudiante en avait déjà été victime, et ses oreilles en saignaient encore rien qu’à ce souvenir. Puis ils atteignirent le quatrième étage et Mary se planta devant le Vert et Argent, un sourire en coin. « Bon, on y est. Je te pousse ou pas ? » demanda-t-elle, rieuse et malicieuse en faisant référence à leur conversation de tout à l’heure.

Généralement les gens courraient toujours après le luxe et le pouvoir, du moins pour une bonne partie d’entre eux. Et sans même parler de luxe, il était tout à fait normal de vouloir habiter et vivre dans un endroit confortable, où l’on se sentait à l’aise. Mais de ce qu’elle savait, le serpentard venait des bas quartiers, avec des parents que l’on qualifiait de cas-sociaux. De fait, Mary s’était attendue à ce qu’il adore passer du temps dans sa salle commune, là ou tout ne devait être qu’élégance. Après tout, il fallait bien que les rejetons des familles nobles, majoritairement envoyés dans cette maison, puissent poser leurs fessiers sur les mêmes canapés confortables que ce qu’ils connaissaient chez eux non ? Quelle tragédie ce serait s’ils devaient connaître « moins bien » en venant étudier ici. La gryffondor en roulait des yeux juste à cette pensée. Pourtant, à sa grande surprise, le serpentard qui lui tenait compagnie n’avait pas du tout ce point de vue. Il prétendait même ne pas aimer ça. Était-ce seulement possible ? Il n’avait pas l’air de mentir, et n’avait de toute façon aucune raison de le faire. Autant dire que son attitude l’intriguait. Mary avança donc l’hypothèse la plus probable, à savoir qu’il n’était pas habitué à vivre dans le confort. Pourtant ce n’était pas entièrement vrai. Au bout de sept années à Poudlard, il avait largement eu le temps de s’y accommoder. « Hum oui, peut-être... Après je ne vais pas m'en plaindre non plus. C'est agréable de trouver du confort, même si là c'est trop. » Trop ? Sans doute. Mais n’était-ce pas ce qui caractérisait cette maison ? Trop de ruse, trop d’ambition, trop d’abrutis… Pour elle, rien ne pouvait l’étonner venant de la maison Serpentard. Mais elle savait aussi que c’était ses préjugés qui parlaient. Si Severus n’était pas un ami de Lily, elle n’aurait sans doute même pas daigné lui adresser la parole. Et encore, elle le faisait par nécessité ou par moquerie. Aujourd’hui cependant, la voilà bien attrapée. En discutant avec lui, elle commençait à se rendre compte qu’il n’était pas du tout comme elle se l’était imaginé.

Du côté des Gryffondors, leur salle commune était agréable, chaleureuse et c’était un pur plaisir d’y passer du temps. Même si Mary aimait surtout se balader en extérieur, n’étant pas du genre sociable. Cependant, il fallait reconnaître que le portrait de la Grosse Dame n’était clairement pas à leur avantage. Elle se prenait pour une diva et cassait les oreilles de tous les élèves voulant simplement rejoindre leur dortoir, année après année, sans jamais se lasser. Severus avait eu le déplaisir d’en faire les frais à force d’attendre l’arrivée de Lily près de l’entrée. Il n’empêche qu’après coup, cela l’amusa et il se sentit obligé d’interroger la belle blonde pour savoir si tout le monde chantait aussi faux dans leur maison. L’intéressée répondit par la négative, en appuyant bien sur le fait qu’il n’arriverait jamais à la faire chanter. « Arf... Bon, j'aurais essayé. » s’amusa-t-il, ce qui fit aussi sourire la gryffondor.

Le plus intéressant arriva finalement. Désormais au quatrième étage, Mary pouvait redemander à son compère si elle pouvait le jeter par la fenêtre et elle ne s’en priva pas. « Oh allez vas-y, je sais que tu en meurs d'envie, puis ça va changer des maraudeurs. » A l’énoncer de ces derniers, la septième année se sentit mal. Maintenant qu’elle avait pu discuter avec Severus, elle le voyait autrement et comprenait pourquoi Lily tenait tant à leur amitié. Il avait de l’esprit et il était fidèle en amitié. Mais elle préféra masquer son embarras et jouer le jeu qu’ils avaient lancé entre eux. Mary se dirigea vers la fenêtre et tenta d’en pousser la vitre, mais rien ne bougea. « Mmm, c’est fermé. Il faut croire que je ne suis pas la première à avoir eu cette idée, ou que tu n’es pas le premier suicidaire à accepter d’être poussé. » constata-t-elle en se retournant vers lui. « Pas trop déçu ? » demanda-t-elle, faussement soucieuse de son opinion sur le sujet.