Les vacances étaient maintenant finies. Hélas. Et Mary était de retour à Poudlard. Elle aimait apprendre et parcourir le château, ce n’était pas le problème. Simplement, il y avait les devoirs, les règles et il fallait aussi supporter tout ce monde qui s’entassait ici. Heureusement, la belle blonde connaissait désormais les endroits pour être tranquille et en tant que septième année, on venait rarement l’embêter. Dans le cas contraire, son regard assassin dissuadait généralement l’importun de poursuivre son but et tournait les talons. Enfin, elle se plaignait mais c’était sans doute parce qu’elle était pas mal garce sur les bords. Il faudrait qu’elle apprenne à être plus sociable mais malgré toutes ces années passées ici, Mary était restée l’être indomptable qu’elle avait toujours été. Elle s’étonnait souvent de son amitié avec Lily, une fille de son dortoir avec qui elle s’entendait bien. Parce que la rouquine était plutôt du genre calme et studieuse, tout en sachant avoir du caractère lorsque la situation l’exigeait. Sans doute était-ce leurs différences et leurs ressemblances qui faisaient que, justement, elles parvenaient si bien à s’entendre. Lily savait la freiner, tandis que Mary savait la faire réagir au besoin. Et toutes deux savaient combien les études étaient importantes. Quoi qu’il en soit, la première journée de cours était maintenant derrière elle et Mary s’apprêtait à sortir de sa salle commune pour rejoindre la bibliothèque. Elle avait besoin d’approfondir certains sujets, histoire de s’assurer une excellente note à son prochain devoir. C’est alors qu’en sortant, elle tomba nez-à-nez avec Severus. Enfin, pour autant qu’on puisse l’être, étant donné que le serpentard était un grand dadais. De fait, elle tombait plutôt nez-à-torse avec lui. Mais que ce soit sa grandeur, ses répliques acerbes ou tout autre choses, il n'était pas de taille à l'impressionner. « Oh, ça alors ! Mais regardez qui est de retour ! » lança-t-elle à son intention, se doutant que s’il était là, c’était pour parler à Lily et probablement s’excuser. Encore. Pour quelle autre raison aurait-il quitté sa caverne sinon ? Elle ne savait d'ailleurs si elle devait trouver son acharnement adorable ou carrément flippant. Ne pouvait-il pas comprendre que Lily ne veuille plus lui parler ? Pas après cette insulte qu'il lui avait craché au visage ? Il fallait vraiment qu'il n'ait pas d'autres amis pour s'accrocher à ce point... Encore qu'elle pouvait le comprendre. Lily était une personne si douce, intelligente et attachante... Difficile de lui en vouloir de tenter de rattraper sa bourde. Même si au vu de la gravité de la situation, c'était mal barré pour lui. Parfois, elle se disait qu'il avait la ténacité d'un Gryffondor. Néanmoins, si le Choixpeau Magique l'avait envoyé à Serpentard, ce n'était pas pour rien. Il était donc préférable de s'en méfier. Après tout, même leur amitié n'avait pas survécu à leurs différences.

Il y avait au moins une chose que la gryffondor devait laisser à la serpillère, pardon, au serpentard (quoiqu’il n’y avait pas une grande différence entre les deux, si ?) c’était son sarcasme. Il avait beau se faire harceler par les maraudeurs et sa meilleure amie ne plus avoir envie de lui parler, il préférait continuer de se battre plutôt que d’être une victime. Et ça, c’était tout à son honneur. Enfin, ça l’aurait été si un serpentard pouvait avoir de l’honneur, un mot qui ne devait même pas faire partie de leur vocabulaire. Dommage pour Severus d’ailleurs, s’il avait fait partie d’une autre maison, elle aurait sûrement pris le temps d’apprendre à le connaître. Parce qu’il fallait avouer que pour un vert et argent, il était d’une incroyable fidélité envers son amie. Du moins jusqu’à récemment. Malheureusement pour lui, la colère avait pris le dessus et les paroles malheureuses qu’il avait eues à l’encontre de Lily marqueraient peut-être une rupture définitive de leur amitié. Comme Lily le lui avait confié, elle avait été profondément blessée par ses paroles, d’autant qu’elle s’était fait insulter alors même qu’elle cherchait à le défendre. Qu’est-ce qu’il lui avait pris ? Mary s’était contenté de lui rappeler que c’était un serpentard, comme si tout pouvait se résumer à cela, et que donc elle serait forcément déçue par une personne venant de cette maison. Le serpent qui leur servait d’emblème n’était pas là par hasard. Autant dire que l’audacieuse blonde n’avait fait que rajouter des doutes dans l’esprit de son amie au lieu de l’aider à se rabibocher avec cet ami de longue date. Préjugé quand tu nous tiens ! « Bravo Mary pour cette information qui saute aux yeux, je vois que tu as dû avoir de l'entraînement cet été. » répliqua-t-il avec le même ton cynique qu’elle avait employé. Dans une autre vie, ils auraient pu être amis. Dans une autre vie. « Nullement besoin d’entrainement, te voir suffit à m’inspirer. » renchérit-elle, un rictus aux lèvres. « En tout cas, si tu comptes voir Lily tu perds ton temps. Elle n’est pas dans la salle commune et je ne sais pas où elle est. Bien sûr, tu es en droit de ne pas me croire ou de préférer te transformer en statue jusqu’à ce qu’elle revienne. Ça fera de la compagnie à la Grosse Dame comme ça. » finit-elle en se retenant de lâcher un rire sardonique à son attention. Car le portrait qui gardait farouchement l'entrée de son dortoir était une diva incomprise - du moins selon elle - et elle tentait donc régulièrement de démontrer par des méthodes toujours plus farfelues les unes que les autres qu'elle avait du talent. Alors peut-être en avait-elle réellement, mais si tel était le cas, ce n'était sûrement pas dans le chant... ça au moins, tout le monde s'accordait à le dire. Sauf que, voilà, elle s'entêtait et les malheureux gryffondors devaient alors supporter patiemment ces horribles cris stridents que le portrait assurait être de la grande musique. Une véritable torture, et légale avec ça ! Du coup, Mary serait particulièrement satisfaite de voir le vert et argent souffrir d'un récital de la Grosse Dame.

Se faisant face à face, aucun des deux n’étaient prêts à lâcher l’affaire, mais Mary l’était encore moins. Elle était du genre à aimer avoir le dernier mot, et c’était d’autant plus vrai face à un serpentard. Et clairement, elle n’allait pas s’effacer devant LE serpentard qui avait fait du mal à son amie. Hautaine et prête à en découdre, ou à lui tourner le dos – l’indifférence étant pire que le mépris – Mary attendit de voir ce qu’il allait répliquer ou faire. A vrai dire, elle l’imaginait déjà enraciné au sol, telle une statue à côté du portrait de la Grosse Dame. Où mieux ! Pourquoi pas une sorte de bouffon qui serait là pour les distraire ? Oh oui ! Ce serait cool ! Ça lui serait sûrement utile les fois où elle s’ennuie. Il pourrait aussi servir de portemanteau avec sa taille. Oui, Mary pourrait lui trouver bien des utilités s’il décidait de camper indéfiniment ici jusqu’à ce que Lily accepte de lui parler et de lui pardonner. Du coup, ce serait une bonne idée qu’ils ne se revoient jamais. Mary aurait alors une poupée grandeur nature à maltraiter comme elle le souhaite selon ses humeurs. Quoi ? Comment ça elle était méchante ? Mais nooon ! Juste très inventive et capable de trouver du positif dans toutes les situations, même les plus inconfortables ! C'était ce qui faisait son charme, entre autres choses. « Parce que je t'inspire ? Arrête je vais rougir. » Nullement troublée ou déstabilisée par sa répartie, la gryffondor prit un air hautain. Enfin, plus que celui qu’elle affichait déjà. « Impossible. Il faudrait que tu sois capable d’avoir des sentiments pour ça. » fit-elle en lui adressant un grand sourire, tant elle était satisfaite de sa réplique. Niveau joutes verbales, Mary avait toujours été douée. C’était à se demander pourquoi d’ailleurs, puisqu’elle n’avait jamais eu de réels problèmes dans sa vie. Sans doute que son côté misanthrope la rendait plus cynique qu’elle ne devrait l’être. Alors si c’était après elle qu’en aurait les maraudeurs, qui sait de quoi elle serait capable. A n’en pas douter, elle se serait vengée de manière aussi brutale que discrète et se demandait pourquoi le serpentard, qui était sensé être dans la maison des rusés, n’avait toujours rien fait. Peut-être aimait-il cette situation, finalement ? Ou parce que ça lui donnait une bonne raison de les détester ? A moins que messire Rogue ne soit moins courageux qu'il ne le prétendait ? Ce serait logique après tout, puisque sa maison n'était pas réputée pour accueillir les plus enhardis. Cela dit, la rouge et or devait avouer qu'elle était assez stupéfaite par la détermination du serpent. Il devait vraiment y tenir à cette amitié, et elle se demandait bien pourquoi... Pas que Lily ne le méritait pas bien sûr, simplement Mary était pétrie de préjugés et n'avait jamais compris les efforts de l'un et de l'autre pour conserver leur relation, alors même qu'il était évident que ce serait voué à l'échec. Gryffondor et Serpentard ne pouvaient pas être amis, un point c'est tout. La preuve était là, sous leurs yeux.

La gryffondor savait parfaitement qu’elle avait un sale caractère ; non seulement elle ne s’en était jamais cachée, mais en plus elle en était fière. Féministe avant l’heure, elle n’adhérait aucunement au mode de vie attendu par le commun des sorciers. Avoir ses B.U.S.E.S, un travail, puis se marier et vivre dans une belle maison où elle devrait mettre sa carrière de côté pendant qu’elle élèverait ses beaux enfants… qui feront eux-aussi de brillantes études pour avoir une carrière impressionnante… En bref, une vie sacrifiée pour le bonheur de son mari et de ses enfants. Quelle femme pouvait rêver de ça ? Par chance, sa mère n’avait pas exactement suivi ce schéma-là. Certes elle s’était mariée jeune et l’avait eue relativement tôt, mais elle n’avait pas eu à choisir entre son métier et son rôle de mère. Elle était aujourd’hui une médicomage accomplie et n’avait nullement failli à son devoir maternel. Mary n’avait jamais manqué de rien, même si sa mère n’avait pas été constamment à la maison à être à ses petits soins. D’ailleurs, l’inverse l’aurait sûrement plus agacée qu’autre chose. La gryffondor avait l’indépendance qui coulait dans ses veines autant que la magie. Peut-être était-ce pour cela qu’elle avait du mal à s’ouvrir aux autres, principalement aux garçons. Elle n’avait aucunement envie d’être un objet à leur bras, un trophée qu'ils exhiberaient comme une énième victoire du sexe prétendument fort sur le sexe faible. Parce que, par chance ou par malchance, Mary était une belle demoiselle et donc convoitée par plus d'un de ses camarades. Une raison supplémentaire de ne pas céder aux hormones de la jeunesse, chaque refus et chaque geste snob qu'elle leur adressait étant une bataille supplémentaire qu'elle gagnait contre ce système patriarcal qu'on lui imposait. De fait, ses joutes verbales avec le serpentard ne l'embêtait pas le moins du monde, bien au contraire ! D'autant que ce cher Severus n’était pas là pour l’impressionner ou la draguer. Non, il était là pour voir son amie et Mary, en bonne amie qu'elle était, se faisait un point d'honneur à la défendre de ce harceleur. Elle devait cependant avouer qu'elle appréciait ce petit jeu où l’un et l’autre se lançaient des piques jusqu’à voir lequel céderait en premier. « Parce que tu en possèdes toi ? » lui lança-t-il d'ailleurs, imperturbable. Mary lui sourit, heureuse de constater à quel point il pouvait se montrer persévérant et déterminé. Ça expliquait pourquoi Lily arrivait à la supporter, elle avait eu de l’entrainement avec lui. « Ça dépend des circonstances, des jours et de mes humeurs. » fit-elle en toute simplicité, un sourire satisfait aux lèvres et le regard malicieux. « Bon, pas que discuter avec toi soit désagréable, hum hum, mais je dois aller à la bibliothèque. Donc si tu n’as rien d’autre d’intéressant à me dire, je vais te laisser t’enraciner ici. Tu veux peut-être un coup de main d’ailleurs ? » s’enquit-elle en sortant sa baguette et en réfléchissant à un sort qui pourrait lui faire pousser des feuilles sur la tête.

Non, rien ne pouvait la faire vaciller. Ni moquerie, ni tentation, ni les attaques frontales, ni les manipulations et autres conspirations. Elle avait un esprit trop libre pour se laisser enfermer dans quoi que ce soit, y compris des sentiments qui ne l’intéressaient pas ou l’empêchaient d’être pleinement libre. Mary vivait comme elle respirait : sans filtre et en allant droit au but. Pourquoi perdre du temps en futilités ? Mais ça n’était pas au goût de tout le monde, et on la voyait ainsi souvent comme quelqu’un de froid et d'arrogant, imperméable aux émotions et aux sentiments. Si ça les faisait se sentir mieux de penser cela, qu’ils ne s’en privent pas. Après tout, ce n’était pas leur avis qui allait changer sa façon de voir les choses, et encore moins sa manière de vivre. Aussi, face au Serpentard, elle ne se montrait, en définitive, pas si différente qu’elle le serait face à un autre élève d’une autre maison. A la limite, elle prenait plus de plaisir à piétiner sa dignité mais, pour le reste, elle restait fidèle à elle-même. Une fois ce moment de joutes verbales passé, Mary proposa à Severus de l’aider à se transformer en arbre afin qu'il puisse attendre le retour de Lily patiemment et, surtout, parce qu'elle trouvait la blague vraiment drôle. Il faut dire que depuis le temps qu'il poireautait, l'expression prendre racine aurait tout son sens dans ces circonstances. Une belle allégorie aussi, et une métamorphose qui intriguait la Rouge et Or dont la curiosité la perdrait sûrement un jour. En effet, elle aimerait beaucoup voir à quoi il ressemblerait une fois transformé en arbre. Vu qu'il était déjà grand, est-ce que ça influerait sur sa taille une fois changé en plante ? Et en quel arbre il se métamorphoserait ? Malheureusement, il refusa l’offre. Mary mit donc ce sujet d'étude dans un coin de sa tête, tout en se promettant d'y répondre un jour ou l'autre. En attendant, elle devait se rendre à la bibliothèque. Car en dépit de ces délicieuses joutes verbales que Severus lui offrait, ce n'était pas ça qui allait remplir ses parchemins de devoir. « Je vais plutôt jouer la carte de la confiance et quitter cet endroit, une rencontre avec une lionne par jour me suffira. » Il battait en retraite ? Dommage, mais compréhensible. Personne ne résistait aux paroles acérées de la Gryffondor. Il faut dire qu'elle possédait une verve particulièrement étonnante pour une personne de son jeune âge, et qui n'avait pas tant eu de problèmes dans la vie. Mais peut-être que ça n'avait rien à voir. Peut-être était-ce uniquement dû à la génétique, au fait qu'elle possédait un tempérament de feu indomptable. A moins que ce ne soit dû au fait qu'elle se soit toujours débrouillée seule, vu qu'elle était enfant unique et que ses parents étaient très - trop - occupés par leur travail respectif. « Sage décision. » déclara-t-elle alors, plus pour se moquer que pour lui confirmer que ce serait stupide d’attendre l’arrivée de Lily. A moins qu’il n’ait rien d’autre à faire ? Mary tourna finalement les talons en direction des escaliers avant de s'arrêter et de se retourner au bout de quelques pas. « Tu sais, je crois que dans une autre vie, on se serait bien entendu. » lança-t-elle en penchant la tête de côté, pensive en l’observant durant quelques secondes. Puis elle reprit ses esprits et pivota à nouveau pour reprendre sa route en direction du quatrième étage.