Je suis vieux , surement bien plus que vous ne pensez un peu partout, surtout sur les routes et dans les auberges . Dans la vie, je suis un Sorcelleur. Attention différent d’un satané Sorcier ou Magicien et je m'en sors très bien. Sinon, grâce à ma situation, je suis occupé quelques soirs, après quelques bières et quelques pièces et je trouve ca .. bien ?..
@MaulCosplay// image@Calville
Une branche qui craque. Une puanteur qui s’élève dans le vent naissant. Un pas lourd devant lui. Voilà les signes qui auraient pu alerter Géralt avant l’attaque.
Pourtant tout avait plutôt bien commencé.
Il s’était éloigné du groupe faisant autant de bruit que possible. Bien sûr pas de cri, pas d’épée qui cogne contre un arbre, pas de monture qui hurle à la mort. Non. Il savait ce qui les suivait. Il savait aussi qu’aucune de ces créatures ne se laisserait abuser par un piège aussi grossier. Alors une trace de pas par ici, une trace de sang sur un tronc, une branche qui se brisait à son passage. De légères choses qui allaient attirer le Fiellon, puisqu’il n’avait aucun doute sur son ennemi. Il en avait combattu un, une fois, mais ils étaient trois sorcelleurs à l’époque à avoir mis un terme à ces séries de morts brutales dans une des forets bordant le village d’Aedd Gynvael à quelques centaines de lieux de Kaer Morhen. Un des siens n’avait pas revu l’aube suivante. Mais c’était ainsi. Ils avaient fait ce pour quoi ils existaient. Tuer les monstres. Ne diton pas que seuls d’autres monstres en sont capables ?
Cette capacité à tuer, Géralt l’avait. Mais seul ? C’était un suicide organisé. Les Fiellons, eux, n’étaient jamais seuls, il le savait mieux que quiconque. Et ce n’était pas toujours les plus gros monstres les plus dangereux. Les nécrophages qui suivaient ce sillage de morts, de muscle et de sang, avaient leur force dans leur nombre. S’il survivait à l’attaque du Fiellon, surement périrait-il dans une des nombreuses vagues qui suivraient ses traces. C’était aussi pour cela qu’il hâtait le pas à l’opposé du groupe qu’il voulait protéger. Ce n’était plus ici une histoire d’argent, mais de survie. Sa propre survie et celle de ses compagnons de voyage. Mais pour l’instant, il devait s’attaquer à un problème à la fois. Il sortit une fiole de la sacoche qu’il emportait n’importe où, et en rependit le contenu sur sa lame d’argent. L’huile suinta quelques instants en un bleu lumineux avant de se fixer au métal. La lame d’argent seule n’aurait pas le dessus sur la Bete, mais peut-être qu’avec cette huile contre les Vestiges des anciens temps aurait-il une chance de s’en sortir. Puis il se releva, continuant un chemin vers … il ne savait trop où, mais plus loin le soleil semblait reprendre vigueur parmi les arbres, une clairière devait surement s’afficher peu après. Tout à la réflexion de sa stratégie à venir, il fit l’erreur de stopper sa marche.
L’attaque avait été extrêmement rapide sous un hurlement qui s’entendait à des lieux à la ronde. Le Fiellon était apparu juste devant lui de toute sa grandeur. On pourrait croire ces créatures empotées par leur poids ou leur taille, mais il n’en était rien. La force brute de ces monstres bousculait tout sur son passage. Ils étaient monstrueux, musculeux et rien ne semblait pouvoir arrêter ce train en marche lancé à plein vitesse. Les arbres pliés sous la force de leur passage, les cornes prêtent à l’embrocher, la gueule bordée de crocs, aucun abri assez important pour reprendre des forces. Géralt n’en était pas encore là s’appuyant sur les arbres et leurs branches pour prendre de la hauteur et frapper le plus haut possible. Le toucher au sommet du crâne n’était pas aisé tant la Bête en imposait. Il lui faudrait trouver autre chose pour le vaincre .. le ventre ? oui ca pourrait le faire, mais comment arriver jusque là sans se faire piétiner. Il était seul. Et son adversaire ne le quittait pas de son regard menaçant.
Mais ce qui avantageait le Sorcelleur par ses prises, le désavantageait par les obstacles que cela formait sur son chemin. Et notre Fiellon semblait avoir faim. Tant pis pour la stratégie, il fallait le tuer rapidement sinon Géralt ne serait plus assez alerte pour en venir à bout. Il savait qu’il ne s’en sortirait pas indemne mais l’idée de se retrouver à bout de souffle ou de force lui donna le courage de retrouver le plancher des vaches pour courir vers le halo de lumière que constituait la clairière. Il prit autant de distance que possible écoutant derrière lui les arbres qui tombaient sous la force destructrice du monstre. Puis peu à peu ce bruit diminua, jusqu’à cesser. Géralt stoppa sa course en avant pour faire face à celui qui hurla à nouveau. Il détailla un peu plus la bete, remarqua sa patte pliée, surement la raison pour laquelle l’odieuse créature ne l’avait pas encore rattrapé.
Pour la première fois depuis son départ du groupe, Géralt sourit. Il avait une chance.
Galvanisé par cette idée, il fonça droit sur le Fiellon, épée en avant en hurlant de toute la force qu’il lui était possible. Le combat à mort venait de débuter réellement. Il glissa entre ses pattes espérant ainsi toucher les parties plus molles de la bete, taillant son flan à son passage, mais son ventre fut hors de sa portée quand une patte racla le sol pour tenter de choper le sorcelleur. Il roula sur le sol, frappa avec force les parties griffues qui allaient l’éborgner avant de s’éloigner se mettant hors de portée de la Bete. Les coups d’épées fusaient aussi rapidement qu’il le pouvait. Droite, Gauche, il sautait, se dégageait, hurlait, revenait au combat, un signe d’Aard utilisé plus pour s’éloigner de la bete que pour le soulever réellement, un signe d’Ignii qui brula un de ses yeux. Mais malgré tous ses efforts, la bête était toujours debout. Son épée commençait à peser, le souffle était plus court et saccadé, sa magie plus compliquée à trouver. Le sourire avait disparu de son visage, la partie serait plus dure qu’il ne l’aurait cru. Malgré ses blessures la bête n’était pas à terre.
Il allait attaquer de front à nouveau, mais un bruit le retient. Un Cheval qui arrivait à vive allure droit sur lui. Plutôt droit sur la bete et une Saskya qui revenait pour .. pour quoi au juste. Elle allait se faire massacrer ! Mais le massacre n’arriva pas aussi rapidement qu’il l’aurait cru. La Beauté venait de taillader la créature et .. un Signe ?
C’était la seconde fois qu’il la voyait faire un Signe. Si il avait douté la première fois, le doute ici se dissipait. Saskya était une élève. Pas encore Sorcelleuse puisque encore humaine et il l’avait vu sous toutes les coutures, mais d’un niveau assez élevé pour que ses Signes aient un impact reel sur les créatures ou hommes qu’elle combattait. Et ses doutes revenaient sur sa mission originale. Conduire une femme à l’échafaud, pourquoi avoir besoin d’un Sorcelleur pour cela ? Et pourquoi Lui en particulier, car on était venu le chercher dans son auberge alors qu’il n’avait rien demandé.
Il avait été floué ! Et en beauté.
La colère le submergea en une vague que rien ne saurait arrêter. Elle avait du bien rire de le charmer de la sorte et de le voir tomber dans son piège. On ne l’y reprendrait plus. Il se jeta sur le Fiellon en des attaques violentes, enragées, meurtrières. La colère, l’adrénaline ou les deux épées , peut-être un peu de tout cela, eurent raison du Fiellon qui tomba bel et bien mort à leur pied.
« On doit vite se barrer avant que d'autres créatures n'arrivent. J'ai envoyé le groupe vers Belhaven, nous y serons en sécurité. »
Il éloigna son arme d’un coup d’épée sonnant pour se rapprocher d’elle, lui attrapant la chevelure qu’elle venait de repousser de son visage. Son regard félin d’une teinte orangée plus sombre, signe de tourments.
- Il va falloir que tu t’expliques Saskya
La voix était froide, furieuse, bouillante. Un mélange de colère et de fatigue. Un mélange empreint de tristesse et de déception. Il s’était affaibli, jamais avant une personne n’aurait pu atteindre un cœur qu’il ne devait montrer. Ils avaient d’autres priorités pour l’instant, mais celle-ci serait bientôt sur le haut de sa liste. Il relâcha sa prise avant de monter sur Ablette sans plus un regard sur elle, et partirent au galop pour s’éloigner autant que possible du Fiellon.. Peut-être que cela lui vaudra une chanson de son ami à plume qui restera dans les mémoires collectives pendant des années. Il ne leur restait que quelques lieux avant Behaven. Ils avaient réussi à s’en sortir. … Presque.
Quelques gargouillis. Et des dizaines .. non des centaines de Nekkers apparurent devant eux, derrière eux.. partout. D’un regard sans autre signe, le couple sauta de sa monture pour faire face. La crainte du Sorcelleur venait de se réaliser. Les Nécrophages n’étaient jamais loin du Fiellon profitant des restes que ce dernier n’avalait pas. Mais cette fois ci il y en avait trop. Pourtant aucune des deux ne fit un pas pour fuir. Non seulement c’était inutile, mais aucun des deux ne mourrait ainsi.
Le combat reprit.. et les épées furent plus efficaces que prévu. Malgré le nombre, aucun des Nekkers ne put passer la barrière que formaient Saskya et Géralt. Comme si ils avaient toujours combattu ensemble, ils frappaient, se relayaient, se protégeaient mutuellement. Meme si la fatigue des deux combats coup sur coup se faisait sentir, aucun ne flanchait et meme ils gagnaient du terrain. Jusque ce que … soudainement une autre monture fit son apparition et un Jaskier en costume framboise ne se jete dans la bataille en hurlant . L’image aurait pu être amusante si ce n’était pas la chose la plus idiote qu’ait fait le barde . Il se retrouva le cul à terre après avoir été désarçonné et en plein milieu d’un groupe bien décidé à en faire son prochain repas.
- Quel idiot ! grogna le sorcelleur avant de se précipiter vers lui, pour faire obstacle aux Nekkers en s’imposant entre eux et leur futur festin emplumé. A trois ils attaquèrent d’un esprit presque coordonnées, si deux d’entre eux eurent la tete coupée, le troisième échappa de peu au cisaillement pour se glisser sous sa garde et l’entailler profondément au niveau du ventre. Un cri .. une douleur qui fuse en lui, le tétanisant l’espace d’un instant. Il est blessé .. gravement .. mortellement … Il le sait et le dernier regard qu’il porte sur son ami. Les forces lui manquant alors qu’il cherche à reprendre une respiration perdue et puis... le noir.
Une douce chaleur se repend en lui. Agréable. Tendre. L’air qui entre dans ses poumons, une grimace alors que son torse se soulève … Il a mal . Partout … Il vit encore. Les paupières commencent à s’ouvrir. La Lumière lui fait mal aux yeux. On le secoue. Brusquement. - Géralt ! Réveille-toi Crénom ! Géralt ! - C’est bon arrête de hurler. - Par Melitele il est en vie - Bien sûr que je suis en vie qu’est-ce que ..
Le Fiellon. La Bataille. Les Nekkers. Tout lui revient en tête en un coup. Plus brutalement qu’il ne l’aurait dû il se relève à moitié portant la main à son ventre. Il était mort .. l’est- il encore et Jaskier chargé de l’emmener vers une hypothétique lumière ? Non ça serait trop cruel. On a voulu le soigner .. Il souffle .. Souffre ….reprenant des esprits qui tentent de s’imaginer ce qui a pu se passer durant le laps de temps où il n’était plus là. Il n »aura pas le temps de poser la question que Jaskier semble envieux de déballer tout ce qui s‘est déroulé depuis l’heure précédent, encore sous le coup de l’adrénaline dans les veines.
- Saskya .. C’est Saskya, elle t’a soigné mais .. Elle ne va pas bien, je ne sais pas quoi faire Géralt.
La voix effrayée de son ami finit de le ramener parmi les vivants. Il jeta un œil circulaire sur les cadavres de Nekkers et sur un autre corps qui se tordait de douleurs. Il se traina sans réussir à se lever vers elle, la retournant sur le dos. Les veines du cou de la jeune femme avaient une teinte violacée, son visage pale ressemblait à un champ de bataille où se mêlaient douleurs et agonies. Le diagnostic était sans appel, Elle se mourrait. - Mais qu’est-ce que tu as fait .. Une main sur sa joue brulante. - Elle a bu une de … - Jask amène moi ma sacoche vite.
Le barde ne s’en fit pas prier et retourna au rocher où se trouvaient sacoche et armes pour la lui ramener . Le Loup en sortit une fiole blanche et une aux teintes grises qu’il déboucha en arracha le bouchon des dents. - Saskya, boit ça. * La jeune femme semblait vouloir éloigner les fioles de sa bouche * - Non. Tu m’écoutes, tu bois ça. Maintenant. A peine lui laissa-t-il le choix que l’embout des deux fioles se trouvèrent introduites au coin de ses lèvres– Boit. La question de vie ou de mort se lisait dans son regard orangé.
Behaven. Le groupe était arrivé plus ou moins intact et avait attendu les trois aventuriers. Comment ceux-ci avaient-ils pu arriver en un seul morceau jusqu’à l’auberge cela restera un mystère pour les compagnons. Géralt tenait à peine sur Ablette, Saskya était portée à travers sa propre monture, c’était Jaskier le plus fringant des trois.
3 jours plus tard
- Bonjour Saskya. Jaskier était penché au-dessus d’elle et la regardait gravement. – Ne t’inquiète pas tu es hors de danger maintenant, il te faut juste du repos. - Non .. Géralt n’est pas là .. Il t'a veillé deux jours et après … * un soupire * il a dit de te rendre ceci * le barde désigna un sac en toile. *- c’est l’argent qui nous a été donné pour t’amener a Métinna. Il a dit que tu saurais le rendre à qui de droit. Je ne sais pas ce qui s’est passé entre vous, mais .. Mais je sais une chose. Je ne verrais plus mon ami pendant longtemps ; et tu en es responsable.
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Mioon
Mer 24 Mai - 18:28
Saskya
J'ai XX ans et je vis à XX. A venir Informations supplémentaires ici.
Yennefer de Vengerberg :copyright: Mioon
« Bonjour Saskya. »
Dans un sommeil lourd et difficile, la Belle s’agitait sans fin, et ce fut une voix familière qui la ramena à la surface. Avec peine, elle s’accrocha à cette voix, à cette lumière qui filtrait sous ses paupières, et elle ouvrit les yeux comme une bulle qui vint crever la surface de l’eau. Ses poumons lui donnèrent l’impression de se déchirer, mais malgré cette horrible sensation, elle tenta aussitôt de se redresser.
« Ne t’inquiète pas tu es hors de danger maintenant, il te faut juste du repos. - Geralt… comment va-t-il ? Je dois lui parler... - Non .. Géralt n’est pas là .. Il t'a veillé deux jours et après … il a dit de te rendre ceci… c’est l’argent qui nous a été donné pour t’amener a Métinna. Il a dit que tu saurais le rendre à qui de droit. Je ne sais pas ce qui s’est passé entre vous, mais .. Mais je sais une chose. Je ne verrais plus mon ami pendant longtemps ; et tu en es responsable. »
À ces mots, la tête de Saskya retomba sur l’oreiller, un soupir lourd franchit la barrière de ses lèvres, et elle ferma les yeux comme pour se couper du monde. Geralt savait, c’était terminé. Quelque part, voir ce mensonge prendre fin la soulageait, mais malheureusement, cela avait aussi des conséquences qui pourraient s’avérer dramatiques. Pour elle, pour lui. Son cœur se serra, mais elle tâcha de repousser ces pensées-là afin d’être la plus pragmatique possible. Serrant les dents pour contrer la nausée qu’elle sentait ramper dans son estomac, la Belle repoussa les draps et se releva sans attendre, mais elle dut s’appuyer de tout son poids sur le bois de lit lorsque le monde se mit à tourner autour d’elle. Elle avait besoin de repos, elle le savait, mais le temps pressait.
« Rassemble tout de suite tes affaires, nous devons partir au plus vite. » déclara-t-elle d’une voix aussi affirmée que possible. « Quoi ?! Est-ce que tu as entendu ce que je t’ai dit ? Geralt est... - Écoute Jaskier, tu pourras m’en vouloir autant que tu veux lorsque tu seras en sécurité, mais ce n’est pas le cas. Alors tu te tais, tu remballes tes affaires, tu vas payer l’aubergiste et tu m’attends à l’écurie. Point. »
Malgré la fatigue et les cernes qui lui mangeaient le visage, son ton n’admettait pas d’opposition, et il n’y en eut pas. Comprenant certainement qu’il se passait quelque chose, Jaskier jugea plus opportun de se taire et d’obéir. Ouvrant la porte à la volée, Saskya retrouva les nains qui buvaient et discutaient au coin de la cheminée en compagnie du garde.
« Zoltan, toi et les tiens, rentrez immédiatement à Mahakam. Emmène aussi Otto avec toi, il sera plus en sécurité là-bas. Laissez passer quelques mois avant d’en ressortir, c’est compris ? »
Le nain le regarda un moment, but une longue gorgée, s’essuya sa barbe d’un revers de main puis hocha la tête avec gravité.
« Il s’passe quelque chose de grave, hein ? Baah, on avait prévu de rentrer dans pas longtemps d’toutes façons, c’est qu’on a aussi du boulot chez nous. Et Jaskier? - Je vais l’emmener plus au nord, il sera en sécurité à Novigrad ou en Oxenfurt. - Et toi ? Parce qu’arrête moi si j’me trompe, mais tout ça tourne autour de toi, hein ? »
Décidément, les racistes se trompaient lourdement en pensant que les nains étaient des abrutis, et la Belle lui adressa un sourire désolé.
« Je suis désolée pour le dérangement occasionné. Rassemblez vos affaires sans traîner, on se retrouve tous aux écuries. »
Zoltan approuva d’un signe de tête, apparemment pas surpris de ne pas avoir obtenu de réponse, et Saskya avait à peine fait volte-face que le petit groupe terminait déjà les chopes avant de rejoindre les chambres. Une demi-heure plus tard, ils étaient tous prêts. Une chaude odeur de foin planait dans l’écurie, les chevaux étaient tantôt scellés, tantôt harnachés. Dans sa chambre, la jeune femme avait coupé en deux la récompense de Nilfgaard, et elle tendit l’une des bourses de Zoltan. « Pour le dérangement occasionné. » précisa-t-elle en donnant l’autre à Jaskier. Le barde semblait bouder, mais il ne dit rien. Bientôt, le groupe partit enfin, chevaucha ensemble pendant plusieurs kilomètres, puis se sépara à son tour.
Sans perdre de temps, Saskya et Jaskier mirent bon train vers le nord, ne s’arrêtant que le minimum, comme s’ils avaient toutes les armées du monde à leurs trousses. Le barde s’en étonna plusieurs fois, râla contre cette avancée trop rapide et trop fatigante à son goût, mais il dut attendre d’arriver à Brugge pour que la Belle consentit à prendre un peu de repos dans une auberge. Depuis des jours qu’ils chevauchaient, Jaskier était totalement fourbu, et il mangea à peine qu’il alla aussitôt se coucher pour dormir près de vingt-quatre heures. Ce fut donc le second soir à Brugge qu’il réclama de nouveau des explications, et que la jeune femme les lui donna. Pas tout, mais une bonne partie.
Son passé d’apprentie Sorceleuse, la destruction de Sarda et le massacre des siens, sa survie, sa capture, sa longue détention puis le changement d’empereur. Ce soir-là, elle parla longuement, s’excusa à plusieurs reprises, puis informa le barde qu’elle comptait bien l’escorter jusqu’à Novigrad ou Oxenfurt, où il ferait mieux de rester pendant quelques mois. Après tout, il était le plus proche ami de Geralt, et il était évident que Nilfgaard serait prêt à tout pour capturer enfin sa proie. Elle mentionna également que si jamais il croisait le Sorceleur, il devrait l’informer du risque qui planait sur sa tête, et Jaskier approuva. La suite du voyage dura encore plusieurs jours, et Saskya accompagna le barde jusqu’aux portes de Novigrad avant de disparaître.
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Île de Spikeroog – Trois mois plus tard
Une odeur épouvantable régnait sur le village dévasté. Des maisons éventrées par quelques griffes démesurées s’étaient effondrées sur elles-mêmes, des crevasses s’ouvraient dans la terre de certains chemins. À l’intérieur de la vaste demeure du Jarl, des dizaines et des dizaines de cadavres pourrissaient lentement. Certains étaient morts depuis des semaines, le dernier avait rendu l’âme ce matin. Un remugle ignoble de charogne, de déjection et de sang saturait l’atmosphère, et l’estomac de Olaf n’avait pas tenu. Penché sur le bord du fossé, il gerbait tripes et boyaux en geignant. Il avait pourtant tenu courageusement la main de la gamine qui avait agonisé en dernier, mais sitôt qu’elle avait rendu l’âme, il avait craqué et avait fuir dehors.
À l’intérieur, la haute silhouette d’un homme chauve et bien bâti inspecta longuement les corps, puis il sortit à son tour. Un tissu posé sur son nez avait filtré le pire de la puanteur, un médaillon à la forme de Griffon brillait sur son armure de cuir clouté. Dans son dos, ses deux épées étaient bien visibles, sans oublier la hache qui battait contre sa cuisse. Thorvald était un homme solide et un Sorceleur réputé, il n’était donc pas étonnant que ce fût vers lui que Olaf se fût tourné.
Retirant le linge de sur le bas de son visage, il rejoignit son client qui avait terminé de vomir et se rinçait la bouche à coup de bière tiède. Sitôt qu’il fut proche, il lui tendit aussitôt son outre, et Thorvald accepta, but une grande lampée, puis s’assit à côté de lui sur l’arrière de sa charrette.
« Parle, je t’écoute. - On avait plus de nouvelles d’mon fils depuis trois bonnes semaines, alors j’suis monté voir si tout allait bien. Quand j’suis arrivé hier avec mon beau-frère, on a trouvé tout comme vous l’voyez maintenant. L’village détruit, tous les cadavres… j’ai envoyé mon beau-frère à Svorlag pour tâcher d’trouver un Sorceleur, et moi j’suis resté ici. Une gosse était encore vivante, j’voulais pas la laisser mourir toute seule… - Elle a dit quelque chose sur ce qui s’est passé ici ? - Elle avait d’la fièvre, elle délirait. Elle a parlait d’un monstre que personne avait jamais vu et qu’avait ravagé tout l’village, des blessures qui guérissaient pas, d’la fièvre qu’a contaminé tout l’monde… elle s’étouffait, c’était pas beau à voir… comme si elle s’noyait... »
D’un geste viril, Thorvald lui serra l’épaule, et le pauvre paysans but une nouvelle gorgée de bière. De la mousse lui coula le long du menton, il s’essuya d’un revers de manche tandis que le Sorceleur était reparti en direction de la demeure du Jarl avant de s’arrêter.
« Je vais effectuer quelques prélèvements mais ensuite, il faudra brûler la maison et tous les corps avec. Tu pourras t’en occuper ? - Les brûler ? Mais… pourquoi ? On devrait pas plutôt les enterrer, c’est plus respectueux… - On ne sait pas du tout quelle créature a provoqué ce carnage, ni si la fièvre qui a tué tout le monde est contagieuse. Dans le doute, mieux vaut tout brûler. - Euh… d’accord maître Sorceleur, j’vais aller demander de l’aide à Svorlag et on s’en occupera. Et… merci... »
Thorvald se contenta d’un signe de tête pour toute réponse, puis il entra à nouveau dans la vaste maison.
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Kaer Morhen – Neuf mois plus tard
Dans la froideur matinale, les vieux os de Vesemir grinçaient désagréablement. Le Sorceleur n’était plus tout jeune, mais il demeurait toutefois en parfaite forme. Aussi parfaite que possible en tout cas. Ce qui n’était pas le cas de Geralt qui, depuis son retour à Kaer Morhen, s’était enfermé dans le mutisme et la solitude. Au début, l’ancêtre avait respecté son besoin d’isolement et l’avait laissé tranquille, mais après près d’un an à ce régime, il en avait assez. Geralt devait se reprendre, et s’il devait le traîner par le fond de son pantalon pour ça, il le ferait, foi de vieux loups !
En armure, les deux lames impeccablement entretenues dormant dans leurs fourreaux, il se mit ainsi en quête de son ‘’fils’’ dès les premières lueurs du jour. Sans surprise aucune, il le retrouva près d’une des tours effondrée de la forteresse, là où il passait le plus clair de son temps depuis son retour, et il se flanqua devant lui en se raclant la gorge.
« À la bonne heure Geralt, tu es déjà levé et tu as l’air en forme. Je pars en chasse et tu viens avec moi, alors dépêche-toi de te préparer. »
De sa voix rauque et usée par les années, Vesemir avait légèrement insisté sur le ‘’tu viens avec moi’’, lui signalant ainsi qu’il s’agissait d’un ordre et que son opinion n’était pas demandée. Bras croisés sur son torse, il attendait, un air déterminé plaqué sur son visage ridé.
"Une nouvelle terreur a émergé de la mort, une nouvelle superstition a conquis la forteresse inexpugnable de l'éternité. Je suis une légende."