Le regard noir de la petite serveuse glisse sur toi sans que tu n’y portes aucune importance. Tu t’en moques. Ou, en tout cas, tu feins de t’en moquer. Elle ne dit rien mais tu peux sentir sa colère jusqu’ici et tu jubiles. C’est génial. Tu lui fais encore cet effet-là et t’avais décidé de penser que c’était plutôt bon signe. Sous ton regard franchement amusé, la petite serveuse prépare la boisson de ta compagnie du soir. Tu n’avais pas vu venir ce qui allait suivre. Quelle peste, que tu te dis quand tu vois le verre se briser au sol et éclabousser la superbe femme que tu exhibais partout comme un trophée. T’avais levé les yeux au ciel. Que d’enfantillages. Est-ce que tu avais dit quoi que ce soit à son crétin de fiancé ? Non, t’étais resté civilisé. Pas elle. Comme quoi, tu avais sans doute des qualités qu’elle n’avait pas. Charlie s’éclipse après quelques mots bien lancés et tu es contraint de t’occuper de Magda et de trouver une solution pour sa tenue. Et puis t’étais là pour des raisons professionnelles donc après avoir à peu près arrangé la situation pour Magda, tu avais fait le tour des convives pour échanger sur les affaires. T’étais dans ton élément, tu n’aurais pas du penser à elle… mais tu pensais à elle. T’avais envie d’aller la voir, de lui dire qu’elle n’était qu’une gamine, de la serrer dans tes bras… Euh, non, pas de la serrer dans tes bras. Ça sortait d’où ça ?! Décidément, elle ne te quittait plus la garce. Tu fais ce que tu peux pour vaquer à tes occupations mais après quelque temps, tu avais craqué et cherché du regard la petite Brown. Et c’était moins une ! Elle était en train de s’éclipser de la soirée. Seule, qui plus est. Ni une, ni deux, tu avais abandonné ton verre sur une table. Tu avais aussi laissé derrière toi Magda mais ce n’était qu’un détail. Arrivé dehors, tu la retrouves sur le trottoir à attendre très certainement un taxi. Bien. Cette fois, tu n’allais pas la louper. Elle était seule et tu te ferai un malin plaisir de la titiller. « Mademoiselle Brown ! Vous nous quittez déjà ? Quel dommage… » que tu t’étais exclamé, feignant la sympathie en écartant tes bras vers le ciel. Tu t’étais approché. « Je n’ai même pas eu le temps de vous complimenter sur votre tenue. Franchement, bravo, vous m’épatez ! Ils sont loin les jeans déchirés et les t-shirt troués. On dirait… quelqu’un d’autre. » Et bizarrement dans ta bouche, ça ne sonnait pas comme un compliment. Plus arrogant que jamais, tu avais glissé une de tes mains dans la poche du pantalon de ton costume en t’approchant un peu plus. « Alors, vous lui avez dit à monsieur Parfait à l’intérieur ? » Et tu parlais évidemment du baiser que vous aviez presque échangé. Est-ce qu’il savait ? Sans doute pas puisque tu n’avais pas reçu son poing dans la figure ce soir. A vrai dire, tu cherchais surtout à la tourmenter. Tu voulais lui rappeler sa culpabilité et, surtout, le fait qu’elle avait presque succombé à ton charme.  

Tu n’avais pas su t’en empêcher. Que tu le veuilles ou non, elle t’avait obsédé toute la soirée. T’avais à peine prêté attention à la magnifique blonde que tu promenais à ton bras. C’était pathétique comme comportement. Et ça ne te ressemblait pas. C’était bien la première fois qu’une femme retenait autant ton attention. Etait-ce parce qu’elle s’était refusé à toi ? Tu ne savais pas le dire, c’était trop nouveau. C’était bien pour ça que tu étais si en colère contre elle. Elle te mettait dans tous tes états, elle te forçait à vivre tout un tas d’émotions dont tu te serai bien passé. Et le plus dur dans tout ça, c’était sûrement de te dire que ce n’était pas réciproque. Alors tu avais ressenti le besoin de te prouver le contraire, de voir que toi aussi tu pouvais la mettre dans tous ses états. Et elle avait l’air si furax, que tu jubilais « Disons que pour une simple serveuse, vous vous en sortez bien. » Tu prenais un malin plaisir à enfoncer le couteau dans la plaie. Si elle réagissait, c’était bien parce qu’elle s’intéressait au moins un peu à toi, non ? C’est comme ça que tu l’interprétais. Elle te regarde juste du coin de l’oeil, comme si elle n’allait pas s’attarder plus longtemps sur toi. Mais c’était hors de question. Tu n’allais pas la lâcher comme ça. « Bien sûr que non ! Magda est une femme vraiment adorable. Pourquoi je ferai ça ? » Ce que tu sous-entendais était absolument odieux et ça tombait bien. Être odieux, c’était quelque chose que tu savais très bien faire. Il fallait être fait de glace pour ne pas s’énerver devant les saloperies que t’étais capable de balancer presque gratuitement. Elle parvient à rester calme et ce n’est pas ce que tu veux. Tu t’approches un peu plus. Doucement mais sûrement, tu n’es plus qu’à quelques mètres d’elle. « C’est vraiment ce que vous voulez ? » Un pas de plus, tu n’étais plus qu’à un mètre. « Que je vous laisse tranquille ? » Tu te pris le temps de la détailler du regard, la petite serveuse dans sa robe de soirée. Elle était vraiment radieuse. Comment ça se faisait que son crétin de fiancé ne la raccompagne pas ? Tu devais avoir du bol, sûrement. En tout cas, tu n’avais aucune envie de laisser filer l’opportunité qui se présentait à toi. « Je veux dire, quand on y réfléchit bien… » Et avec un pas de plus, tu n’étais plus qu’à quelques centimètres d’elle. Une drôle de sensation électrique te parcourut. « Votre fiancé est à l’intérieur, ma petite amie aussi… Et on est ici. Tous les deux. Je n’émets qu’une hypothèse mais peut-être qu’ils ne nous branchent tous les deux pas tant que ça ? » Et ta voix s’était faite plus rauque, voilà par la séduction que tu essayais d’instaurer de nouveau entre vous. Tu perdais totalement la boule et cette fois, tu ne pourrais pas blâmer l’alcool de te faire dérailler.

Tu vois bien les efforts de la petite serveuse pour ne pas te montrer à quel point tu l’énerves. Tu ne sais pas pourquoi tu te sens obligé comme ça de le titiller. T’aimes ça. Tu trouves pas ça méchant mais elle ne prend pas la blague aussi bien que toi. Elle te somme de rejoindre miss Formidable et tu plantes les mains dans tes poches avec désinvolture. Etrangement, non, tu n’avais aucune envie de la rejoindre. T’étais bien là. C’était hautement perturbant mais tu te sentais bien. Tu ressentais un mélange de sentiments tout à fait déstabilisant à son égard. T’étais en colère d’avoir été refoulé, ton égo en avait pris un coup. T’étais déçu aussi. Mais, quelque part… t’étais juste content d’être là, content qu’elle te parle même si c’était pour te dire à quel point tu l’exaspérais. Et mon Dieu, tu l’exaspérais. Plus tu la faisais sortir de ses gongs, plus tu jubilais. T’es un sacré tordu, monsieur Feldman. « Mouais. » que tu avais répondu avec l’air détaché de quelqu’un qui se croit au dessus de tout. Ta manière de rester calme devait être absolument insupportable face à la tempête Charlie qui se déchaînait devant toi. Tu mentirais si tu disais que ce n’était pas étudié. Tu t’amusais. Tu t’approches et elle tourne la tête, t’affirmant qu’elle souhaitait que tu la laisses tranquille. Donc c’était que l’alcool qui l’avait rendu susceptible de tomber dans tes bras ? Elle n’avait vraiment pas envie que vous vous rapprochiez ? T’étais légèrement déstabilisé. Mais pas ébranlé. Pas encore. Il t’en fallait un peu plus encore pour abandonner. Et tu ne fus pas déçu. Tout un flot de paroles t’arrive en pleine tronche et elle débite avec tant de véhémence que tu as du mal à suivre. Elle défend son fiancé, sa bague de fiançailles, l’engagement… avant de te démonter toi. Un pauvre type. T’avais été habitué à ce qu’elle te traite de salaud mais ça ne t’avait jamais fait cet effet. Elle te poussait, comme pour t’éloigner d’elle, mais tout ce que tu sentais toi c’étaient ses mains sur ton torse. L’espace d’un instant, tu redescendais de ton piédestal. La vérité, c’est plutôt que tu te cassais la gueule de ton piédestal. Ton air narquois et malin t’avait quitté. Tu la regardais, plus sérieux que jamais, étudiant son minois furieux qui te toisait sévèrement. Elle a mis toute cette force pour te pousser mais quand on fait un mètre cinquante pour trente kilos, on fait pas bouger grand monde. T’avais pas cillé. En apparences, en tout cas pas. A l’intérieur de toi par contre, c’était tout à fait autre chose. Tu comprenais enfin ce qui te plaisait tant chez elle : la manière qu’elle a de te tenir tête. Tout le monde va dans ton sens. Par intérêt, par peur… Peu importe. Pas elle. Avec une douceur qui contrastait avec la force qu’elle avait mis pour te pousser, tu avais attrapé ses mains dans les tiennes pour les décoller de ton torse. « Vous avez raison… » que tu avais commencé, ton timbre trahissait pour une fois une certaine sincérité. Oh, comme tu aurais aimé lui dire que tu la laissais tranquille à ce moment-là. Elle le méritait. Si elle avait envie de vivre sa vie avec un mec ennuyant à crever, qui étais-tu pour l’en empêcher ? Mentalement, t’avais pris ta décision. Malheureusement, ta raison ne s’était pas alignée avec tes envies. « Vous méritez d’être heureuse. Qui suis-je pour gâcher ce bonheur ? » Un peu tristement, tu avais souris en posant tes yeux sur sa bague de fiançailles. Tu ne comprendrais jamais pourquoi les gens se sentaient obligés de faire ça… Mais tu gardas ce commentaire pour toi. « Je vais vous laisser tranquille. Ce sera comme si je n’avais jamais existé. » Ton cerveau continuait de parler pour toi. Tes mains, elles, avaient gardé les siennes. Qu’est-ce qui te prenait ? C’était le bon moment pour la lâcher et partir. Il n’y avait que ça à faire, c’est ce que tu venais de lui dire ! Pourtant, ton corps réclamait tout autre chose. Maintenant que tu avais dévié ton regard de sa bague, tu ne voyais plus que ses lèvres. T’en avais malgré tout terriblement envie. Et elle aussi, tu crois. Elle pouvait dire le contraire, tu sentais quelque chose entre vous qui passait. Ça faisait sûrement de toi un connard incorrigible mais… Tu ne pouvais pas ignorer plus longtemps la sensation que ce serait de l’embrasser. Alors, tout en douceur, t’étais venu l’embrasser. Putain Luke, t’as vraiment l’art et la manière de foutre la merde.

T’avais abdiqué. Fini le grand numéro de monsieur Connard en chef. T’étais redescendu de ton piédestal, elle t’avait collé la baffe mentale qu’il te fallait pour reprendre tes esprits. Ça aurait du te suffit pour faire demi-tour et retourner à l’intérieur là où la soirée battait son plein. Elle t’y attendait très certainement Magda, elle devait se demander ce que tu fabriquais. Ou peut-être bien qu’elle s’en foutait. Peut-être bien que tout ce que vous représentez l’un pour l’autre est à l’image du reste de ta vie : creux et vide. C’est Charlie qui avait raison. Elle vivait quelque chose de vrai, elle. Tu ne pouvais pas débarquer et tout gâcher… Pourtant, c’était précisément ce que tu faisais. Tu n’avais pas su faire autrement. Elle t’avait littéralement obsédé toute la soirée, au point que tu n’avais pas pu faire autre chose que de la rejoindre ici sur ce bout de trottoir. Hautement tourmenté par la proximité que la petite serveuse avait instauré entre vous, tu avais retrouvé ses lèvres avec une douceur que tu ne soupçonnais pas chez toi. Ça avait été plus fort que toi, plus fort que tout ce qui vous séparait. T’aurais aimé avoir la galanterie de la laisser tranquille et de t’éclipser définitivement de ta vie. Ton cerveau te l’avait ordonné mais l’information n’avait pas passé la barrière de tes actions qui n’étaient dirigées que par tes envies. Et tu mourrais d’envie de connaitre la saveur de ses lèvres, le goût de ses baisers. C’était étrangement délicieux, tu n’avais pas le souvenir d’avoir vécu quelque chose d’une telle intensité. Tu étais ailleurs et tu ne pensais plus à rien. T’as des étoiles plein les yeux quand votre baiser prend fin. Elle ne t’avait pas repoussé, elle avait répondu avec la même ardeur que toi. Elle est à court de mots et, à vrai dire, tu n’as plus très envie de parler non plus. Rien de ce que tu as envie de faire là tout de suite ne nécessite de parler. Alors tu gardes le silence mais le prochain rebondissement n’est jamais bien loin. Elle t’attire par la main dans une ruelle alors que des voix masculines auxquelles tu ne prêtes personnellement aucune attention parviennent à vos oreilles. Tu souris. Un sourire un peu niais, le sourire d’un mec qui est bien trop content de la tournure des choses pour être perturbé par ce qu’il se passe autour de lui. Heureusement que Charlie veille pour vous, t’es déjà sur une autre planète toi. Tu tiques seulement quand tu entends qu’il est question de son crétin de fiancé mais vu ta position… Tu t’en moques. Là, tout de suite, c’est toi qui est collé serré contre un mur avec Charlie. Elle a l’air de se sentir si coupable, Charlie. Tu te pinces les lèvres. Est-ce possible pour que ça suffise à la faire changer d’avis ? Tu espères que non. A cause de toi… Ses mots résonnent en toi encore une fois. Elle ne te laisse pas le temps de répondre qu’elle a déjà retrouvé tes lèvres. Vous êtes bien, ici, à l’abri des regards. Une de tes mains commence à remonter l’étoffe de sa robe sur sa cuisse. Quand tu frôles sa peau nue, un courant électrique te parcourt. Oh mon Dieu, ça n’annonce rien de bon… Ou plutôt, ça annonce quelque chose de beaucoup trop bon. Tu soulèves doucement sa cuisse pour la passer autour de ta taille alors que tu prolonges langoureusement votre baiser. « Je peux vous montrer pourquoi. » que tu avais murmuré d’une voix suave à son oreille avant de commencer à parcourir son cou de baisers.

Tout va incroyablement vite maintenant que vous avez enfin cédé à l’appel de vos lèvres l’une sur l’autre. Tu t’emballes. C’est vrai, tu vas vite en besogne. Mais c’est ton mode opératoire habituel, t’es pas du genre à sortir le grand jeu du parfait gentleman. T’as envie de beaucoup plus qu’un simple baiser et tu n’as aucun remord à lui faire comprendre, même si tu venais d’entendre son stupide fiancé. Tout ça n’avait aucune foutue importance. Ton rythme cardiaque s’était accéléré, elle s’abandonnait entre tes mains et c’était délicieux. Tu la sentais se serrer tout contre toi, avide de ta caresse. De temps à autre, elle mordillait ta lèvre et t’arrachait des râles de plaisir. T’avais totalement perdu la tête. Il n’y a pas si longtemps, t’aurais été prêt à faire une campagne pour virer Charlie du Bundy et là tu te retrouvais à la dévorer de baisers. T’étais vraiment un drôle de type. Pourtant à ce moment précis, tu étais bien loin de penser au bar et toutes ses superstitions qui allaient avec. Tu profitais du moment, de ce que Charlie t’offrait. Ton excitation atteignait des sommets. T’aurais pu la faire tienne là, tout de suite, sans même prendre en compte votre environnement. Mais pas Charlie. Elle avait subitement calmé le jeu, te laissant haletant et penaud. Elle n’allait quand même pas de nouveau se dégonfler ? Pas après tout ça ? Elle allait te rendre dingue cette fille, elle te ferait courir à ta perte. Tu soupiras pour tenter de reprendre une contenance mais c’était affreusement difficile, t’avais l’impression de sentir ses lèvres sur les tiennes encore. Et pourtant, Charlie n’utilisait plus sa bouche pour découvrir la tienne. Elle était bien en train de te parler et t’avais du faire un effort colossal pour se concentrer sur ce qu’elle disait. Elle ne peut pas faire ça. Ton coeur s’était serré. Donc elle changeait d’avis… Et puis elle rajouta « ici » et tu soupiras une nouvelle fois. Ouais, c’est vrai, il y avait plus glamour qu’une ruelle, coincée entre deux blocs de béton. Mais il y avait quelque chose de trépidant aussi… Le frisson de l’insolite. Seulement elle n’en voulait pas. Tu avais beau bien saisir le message, tu ne savais sur le coup pas quoi lui proposer d’autre. T’allais quand même pas la ramener chez toi, il y avait des affaires de Magda partout. Vous n’alliez pas non plus allez chez elle, pour des raisons évidents qui impliquaient bien sûr son fiancé. « Ok… d’accord… Je vois. » que tu avais vaguement répondu quand elle t’avait rétorqué qu’elle n’était pas une midinette. Ton cerveau qui s’était éteint pour te livrer à un échange de baisers avec Charlie peinait à se rallumer. Il te fallait une idée et vite. T’étais tout à fait conscient qu’il fallait battre le fer alors qu’il était encore chaud, qu’à tout moment Charlie pouvait se laisser submerger par la culpabilité et faire marche arrière. Et puis elle fit quelque chose de tout à fait surprenant, t’empêchant de faire preuve de logique. Elle s’était blotti contre toi. Tendrement. Elle te faisait un câlin. Comme si t’étais… Un gentil garçon comme Josh ? Pourquoi est-ce que t’aimais ça ? Tu avais instinctivement fermé les yeux pour savourer. T’étais tombé sur la tête, c’était pas possible autrement. Elle t’avait jeté un sort, ou quelque chose comme ça. Après quelques secondes, t’avais réussi à retrouver tes esprits. Tu n’avais de loin pas oublié ce qui se jouait entre vous ce soir. « Ok, dis-moi ce que tu veux. Un hôtel ? » que tu avais demandé d’une voix plus assurée après t’être légèrement écartée d’elle pour la voir.