Je suivis des yeux le petit coin d'arbres qu'il me montrait du doigt. Il n'y avait rien d'autre autour de nous, pas même une ruine dans laquelle nous aurions pu nous abriter. En somme, nous allons devoir passer la nuit dans ce petit endroit exposé sans aucune protection. Je sentais déjà l'inquiétude poindre, mais je savais que je ne devais rien montrer… Nous étions deux dans cette galère et même si nous ne nous apprécions pas, il fallait que l'on soit capables de compter l'un sur l'autre. Si l'un de nous deux flanchait, l'autre ne tarderait pas à faire de même. Alors je pris sur moi pour paraître forte, quand bien même mon cœur et mon estomac se serraient.

–Tu veux de la viande séchée ? J'en ai un peu, me lança-t-il si subitement que j'en sursautais de surprise.

Sa famille lui avait donc laissé de la nourriture ? Quel chanceux. J'hésitais quelques secondes en regardant les morceaux de viande qu'il me tendait…Je n'avais rien en échange, ce ne serait pas correct de le priver de sa nourriture…

– Non merci, je n'ai pas faim, mentis-je alors que mon estomac se mit à gargouiller. Le traître !

Afin de ne pas trop perdre la face, je me relevais pour récupérer une couverture. La nuit tombée, la température ne tarderait pas à baisser… Et privés de la possibilité de faire un feu, nous risquions fort d'en souffrir. Je savais que la meilleure solution serait de nous tenir prêt près, l'un de l'autre, sous la même couverture, mais je me doutais qu'il n'accepterait jamais.

– C'est vraiment nul, pas vrai ? De se retrouver là, tous les deux… Cet endroit... il est vraiment effrayant.

Dire que j'avais toujours voulu voir ce qui se trouvait derrière les murs de Rhéa...

Mais quelle gamine. Jakob avait parfaitement entendu le ventre de la jeune femme juste après son refus, soi-disant qu'elle avait pas faim. Quelque part, il savait qu'elle n'allait pas lui simplifier les choses, mais pas au détriment d'elle-même ! Eh bien si elle voulait la jouer gamine, il n'allait certainement pas rentrer dans son jeu. Même si ce n'était pas franchement le moment de la jouer petite peste, Jak était d'accord pour la traiter comme telle. Vraiment insupportable.

"Hum ouais, c'est ça."

Il rangea dans le torchon les tranches de viande restantes. Il fallait bien être raisonnable - et il avait pris des forces avec le repas de la veille au soir, bien que frugal. Et puisque Sarah avait décidé de ne pas en prendre, il ne le lui proposera plus. Ca tiendrait bien trois ou quatre jours comme ça. Le prochain problème allait être la soif. Il leur faudrait trouver un ruisseau, un fleuve, n'importe quoi, pourvu que l'eau ne soit pas aussi rose que celle de leur lac. Il espérait tout de même avoir de quoi boire, se laver à un moment donné aussi, bref, le minimum vital.

Sarah pris une couverture, Arthur en fit de même. Les températures fraîches, il connaissait, il avait déjà travaillé les plantes très tôt le matin afin qu'elles soient prêtes à être vendues. Mais une nuit entière, dehors, à la belle étoile ? Jamais. C'était l'aventure. Rien d'aussi fabuleux et facile que les histoires racontées le soir, mais ç'en était une.

Sarah reprit la parole pour dire que c'était nul de se retrouver là, que l'endroit était franchement effrayant. Jakob la fixa du regard une seconde, se demandant sincèrement comment elle pouvait refuser un acte de partage, pour ensuite vouloir partager leur situation.

[b]"Ouais, c'est hyper nul. Comme refuser de la bouffe parce que t'es loyale envers une personne qui n'est même pas avec nous. Une vraie gamin. Bonne nuit."

Sur ce, il disposa son sac à dos comme oreiller et s'engouffra dans sa couverture. Il ne s'endormit pas immédiatement, mais il tournait le dos à Sarah, en guise de refus de continuer à discuter. Elle n'avait qu'à stresser toute seule, ça lui fera les pieds.

Le sommeil lui vint bien une demie heure, voire une heure plus tard, tant il réfléchissait. Il rêva de tous les dangers possibles qui auraient pu arriver durant la journée qu'ils venaient de passer à marcher - les bandits, les plantes toxiques, ce genre de chose-là.

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Lançage du dé
1 - La nuit se passe aussi tranquillement que possible, aucun dérangement.
2 - Ils entendent des bruits au loin, ce sont des bandits qui se déplacent.
3 - Un homme seul les aborde quand ils se réveillent, mais ne veut aucun mal au duo
4 - Un animal s'est approché et tente de mâcher la couverture de Sarah.

Honnêtement, je n'ai pas vraiment compris sa réaction. Pourquoi donc prendre la mouche comme ça avant de m'envoyer bouler comme une vieille chaussette puante. Bon, peut-être était-ce ainsi qu'il me voyait après tout… Bref, plutôt que d'en rajouter, je préférais l'ignorer et le laisser bouder dans son coin. Je comprenais mieux ce que Cathy lui reprochait, en parlant de son sale caractère.

Je passais, évidemment, une très mauvaise nuit. Le moindre bruit m'arrachait au sommeil comme on arrache une mauvaise herbe à la terre. Et comme nous étions dans le noir le plus total, il m'était impossible de voir ce qui provoquait ces divers bruissements plus ou moins lointain. Au matin, je ramenais ma couverture à mon sac et me levais sitôt l'autre boulet réveillé. Nous n'avions pas de temps à perdre et je n'avais pas la moindre intention de lui adresser la parole.

Un peu plus loin, les arbres semblaient plus nombreux. Ils se regroupaient même en bosquet. Nous eûmes enfin la chance de tomber sur un petit ruisseau. L'eau était fraîche et surtout claire. Aussi, nous pûmes en profiter pour remplir nos gourdes et nous désaltérer. Je trouvais également quelques mûres et me remplissais la panse. J'en ai mis quelques-unes de côté, pour plus tard… Je notais l'emplacement du ruisseau sur la carte…

– Oh ! Des lapins ! Il y a des lapins ! m'écriais-je lorsque l'un d'eux me coupa la route pour détaler un peu plus loin.

Je songeais alors au goût délicieux de leur viande. Bon sang ce que je pouvais avoir faim.

– Tu crois que tu peux en choper un ? Avec ton arc ? lui demandais-je le regard plein d'espoir.

Le réveil puis le départ s firent dans un silence total. Jakob n'avait pas bien dormi, du tout, et visiblement Sarah non plus. La seule bonne nouvelle de la journée avait été la découverte d'un ruisseau, dans lequel il but, et remplit les gourdes dont il disposait. Son sac était désormais un peu plus lourd, mais c'était faisable. Puis l'ombre des arbres étaient agréable. Les quelques fruits étaient un plaisir aussi, savourant leur côté sucré dans sa bouche. Quel réconfort !

Il allait proposer qu'on suive le ruisseau en continuant vers le sud, on devrait logiquement trouver quelque chose. Sauf que Sarah l'interrompit en criant qu'il y avait des lapins. Et effectivement il y avait des lapins.

"Mais chuuuuuttttt, tu vas tous les faire fuir !" avait chuchoté Jakob.

Il posa doucement son sac au sol, pour récupérer les flèches rangées dans le carquois ainsi que son arc. Il pria pour que les machins ne bougent pas, car il n'avait jamais appris à viser de cible mouvante. Il se mit à genoux, puis visa comme il pouvait.

Concentré sur sa cible, le plus gros lapin qui mangeait visiblement de l'herbe, il respira doucement, jusqu'à rentrer presque en transe. Et une fois à peu près sûr de lui, il décocha la flèche.

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Lançage du dé
Réussite : Y'a du lapin pour le diner ! Jakob pousse un cri de joie et fait même une danse de la victoire.

Echec : C'est perdu, le lapin a bougé à la dernière seconde, la flèche s'encochant dans le sol : la famille lapin est partie. Jakob lâche un merde très énervé.

– Pardon, pardon, dis-je en posant mes deux mains sur la bouche pour m'aider à me taire.

Mais mince, comment pourrais-je me taire avec une telle joie ! De la viande sur pattes courait juste à côté de nous alors que nous n'avions rien manger de consistant depuis notre départ. J'étais tellement heureuse d'imaginer ce futur repas… Heureuse mais aussi très inquiète de le voir rater son coup. Je n'ai jamais été aussi stressée de toute ma vie… Aussi, pour ne pas le déconcentrer, je m'étais accroupie. Allez savoir pourquoi, j'avais également fermé les yeux et bouchais les oreilles avec le plat de mes mains…

Et puis… le coup parti. Jakob se mit à crier, visiblement très heureux d'avoir atteint sa cible. Il dansait même… et moi, je le regardais totalement choquée. Alors quoi ? Ce planteur coincé, celui que Cathy appelait même le "ruminant" pour son mauvais caractère, était aussi capable de telle expansion ?

– Bravo ! m'écriais-je, sincère. Un lapin pour le dîner !

Il fallait encore le préparer, le dépecer, le vider et surtout le cuire. Et tant pis pour l'interdiction de faire du feu, nous devions manger !

Cette fois, nous eûmes un peu plus de chance. En longeant le ruisseau, nous arrivâmes à une sorte de "grotte", plutôt un abri sous roche qui saurait nous protéger un minimum.

– Tu sais préparer une proie ? lui demandais-je avant de reprendre ma question. Tu veux que je m'en occupe ?

Jakob calma tout de même assez vite ses effusions de joie, n'oubliant pas qui était à ses côtés. Même si elle le félicitait, il fallait dire que ça l'arrangeait bien - voilà une viande qu'elle ne refusera pas. Il se dirigea vers le lapin mort, retirant sa flèche pour la récupérer - disons qu'elles n'apparaissaient pas par magie dans son carquois, il fallait bien qu'il les recycle.

Après quoi, iels reprirent la route. Il ne pensais pas que c'était une bonne idée de faire un feu en plein air, donc il avait l'espoir de croiser un endroit un peu à l'abri, quelque chose de dissimulé pour faire cuire ce lapin qu'il portait accroché à son sac par de la ficelle.

Ils découvrirent une grotte, visiblement vide, pas habitée par un animal un peu revêche. Tout allait bien, et ça tombait bien, c'était la fin de la journée. Un instant, il se tourna vers le nord, pensant à sa maison, sa famille. Tout lui manquait, et plus les journées passaient plus il s'éloignait.

Il avait presque envie de pleurer, mais ça passa vite. Il ne voulait pas montrer de signes aussi flagrants de faiblesse. Fallait rester fort.

Sarah demanda s'il voulait s'occuper de la viande, ou s'il préférait qu'elle le fasse. Il lui tendit le lapin :

"Fait-le. Je vais chercher des branches pour le feu."

Il se sentait dégoûté à l'idée de dépecer un animal mort - alors même qu'il était totalement volontaire pour le bouffer. Simplement, les viscères et tout... Beurk. Alors il ramassa quelques branches, se demandant s'ils allaient réussir à faire du feu. Peut-être que Sarah le saura, car sinon, il ne connaissait que la technique de frotter un bout de bois à l'autre.

Il dû s'éloigner un peu pour trouver des brindilles correctes, et quelques bout de bois un peu plus gros. Il fallait un feu qui tienne bien au moins une heure, avant d'être éteint. Quand il revint, avec les bras un peu chargé, il déclara :

"On a plus qu'à espérer que le feu n'attirera personne hein."

Je le trouvais plutôt injuste, ce planteur. Je ne l'aimais pas, certes. Tout le monde le savait puisque je ne m'en étais jamais caché, pour autant, jamais je ne lui avais parlé comme à une grosse merde. Lui par contre, il ne s'en privait clairement pas. Je récupérais le lapin, lui arrachant presque des mains avant de récupérer mon couteau. J'avais l'habitude, je savais faire et cela ne me pris pas plus de quelques minutes. Une fois terminé, je rinçais l'animal avant de jeter ses viscères un peu plus loin, juste histoire de ne pas avoir à subir les odeurs.

Quand il revint, tout était près. Je récupérais le bois pour l'entasser de manière à ce qu'il prenne vite et surtout qu'il dure. Je fouillais ensuite dans mon sac pour récupérer la vieille pierre à feu de mon père. Une merveille cet outil, il me permit d'allumer rapidement le tas de brindilles et de feuilles mortes qui devait servir à embraser le reste. Ensuite, ne restait plus qu'à faire cuire notre dîner tout en veillant à rester discret.

– C'est le moment où il faut prier.

Lancer de dés : Pile ou face
Pile - Pas de soucis, ils peuvent prendre leur dîner tranquillement
Face - La fumée attire un voyageur solitaire