Tu n’aurais pas dû fermer les yeux. Tu le sais. Le lieu immaculé qui était désormais en face de toi, te brûlant les rétines, n’était pas anodin. Il s’agissait du Rêve. Ce même Rêve qu’avait décrit tes parents quand ils s’étaient rencontrés. Ce même Rêve qui berce d’illusion beaucoup de personne, qui forge les couples et futures familles. Ce même Rêve qui t’a toujours effrayé, connaissant la peur qu’éprouvait ton peuple envers les autres, ces Yeux Noirs porteurs de malheur. C’était ton tour désormais. C’était à toi de faire ce lien, de rencontrer un ou une inconnue et de devoir créer un lien pour finir ta vie avec.

Tu grognes et râles contre toi-même, frappant du poing contre un mur invisible. Tu maudis les Dieux, aussi existant ou inexistant soient-ils, qu’importe, il fallait un coupable. Tu jures, blasphèmes aussi fort que tu peux, dans ce lieu sans écho et remets ta capuche par-dessus ton visage. Tu sais que d’un instant à l’autre, tu ne serais plus seul. Tu devras faire face à quelqu’un d’autre, quelqu’un qui aura tout juste dix-huit ans. Un ou une gamine qui aura sûrement imaginé pour son lien un Prince Charmant, une Princesse des mille et une nuits, un riche héritier, une fille de bonne famille… Qu’importent les yeux.

Mais avec la malchance légendaire que tu as actuellement, ce sera quelqu’un qui ne viendrait même pas de l’Underground, quelqu’un d’Au-Dessus. Tu grimaces et te tournes pour être dos au mur que tu as cogné pour te laisser glisser contre, tel un animal apeuré dans un monde qu’il ne maîtrise, un monde dont il ne connaît pas l'environnement. Tu es mieux dans le noir. Le silence ne te dérange pas, mais l’angoisse de ne pas savoir où tu es te rend malade. Tu fermes alors les yeux, cette fois dans le Rêve. Tu ne pourras pas revenir à la réalité avant de l’avoir croisé au moins une fois.

Tu pourras essayer de repousser cette personne, après tout. Essayer de le réveiller… Mais te voilà, à attendre. Attendre… Avant d’entendre un bruit, un souffle. Tu redresses la tête et te relèves en grognant, voyant un peu sa silhouette en dessous du tissu. Tu serres les dents et te redresses, priant pour qu’il y ait un mur entre vous… Puis tu t’es souvenu que le Rêve pouvait se modeler selon vos envies… Alors tu décides de le faire… De bloquer cette personne et de hurler.

- Recule !

Il y avait mieux comme première approche, mais tu n’avais pas le choix… Par peur…

Tu connais le Rêve, tu le connais depuis toujours. Ton lien avec la Bibliothèque t’y emmène chaque nuit, dans ce lieu que tu as fait tiens, qui a grandi et évolué avec toi. Tu as appris à le modifier au grès de tes envies, de tes émotions. Tu sais que tu es la seule à pouvoir faire ça, que tu es exceptionnelle. La Bibliothèque te donne tous le savoir dont tu as besoin et les Archivistes qui t’ont élevés. Tu n’es pas censé pouvoir Rêver comme d’autre. Tu n’es pas censé pouvoir te lier de par ton statut. Et pourtant…

Les choses ne se passent jamais comme elles le devraient. Tu en as encore la preuve quand cette nuit ce n’est pas dans la Bibliothèque que tu ouvres les yeux. Tu es perdue, regardant autour de toi en cherchant un instant à comprendre où tu te trouves. Ce n’est pas un lieu que tu connais, en fait, il n’y rien, tout est un blanc impeccable qui te met un peu mal à l’aise. Instinctivement, tu commences à comprendre où tu te trouves. Tu es dans le Rêve que tu n’aurais pas dû rejoindre. Celui qui n’est censé que les gens normaux. Mais tu y es, tu es visiblement liée à quelqu’un et tu comptes bien comprendre de qui il s’agit.

Le voyant dans un coin, en boule, tu te demandes un instant si c’est normal que les gens réagissent comme ça. Doucement, tu t’approches, ne voulant pas l’effrayer… En vain. Avec un mouvement de recul, tu sursautes quand il se redresse et met un mur entre vous en te hurlant de reculer. Tu ne vas pas mentir, ce n’est pas vraiment à ça que tu t’attendais comme réaction et tu es presque vexée.

- Oh, ça va, je suis pas si horrible que ça…

Tu ne sais pas si faire ce trait d’humour va aider à détendre l’atmosphère, d’autant que celui qui semble être un jeune homme au vu de la voix. Tu soupires, vous ne pourrez pas quitter le Rêve comme ça et il va bien vous falloir vous voir avant de pouvoir vous réveillez chacun de votre côté.

Tu décides de te poser sur un fauteuil que tu fais apparaître. Il faut dire que tu maîtrises la manipulation du Rêve assez bien. Peut-être le seul véritable avantage à être la Guide.

- Tu sais qu’il va falloir qu’on se fasse face avant de pouvoir se réveiller… Moi, j’ai l’habitude du Rêve donc je peux trouver à m’occuper facilement, mais ce n’est pas ton cas… Du coup, est-ce que tu pourrais arrêter de jouer les maçons et au moins me regarder ?

Tu hésites à te faire venir un livre, de quoi t’occuper, mais tu as peur que faire appel à la Bibliothèque cause des problèmes. Tu te demandes déjà comment tu vas bien pouvoir expliquer aux Archivistes que tu es lié avec quelqu’un et qu’ils ne savent visiblement pas tout...

Il faut que tu te réveilles. Que tu sortes d’ici. Peut-être qu’en face, la personne prendra peur et se réveillera aussi, comme sorti d’un mauvais rêve, un cauchemar sans nom. Mais non. Tu redresses la tête, entendant la voix d’une jeune femme. Horrible ? Peut-être pas. Sûrement pas. C’est toi qui es horrible, c’est toi le monstre. Tu restes adossé au mur créé et attends de voir ce qu’elle fera, ce qu’elle dira. Et elle n’a pas tort. Elle a bien été éduquée, préparée au Rêve. Tu serres les dents, pas prêt à devoir détruire ce mur qui vous sépare. Tu grognes, sachant très bien qu’elle avait raison.

Tu t’étais, de ton côté, préparé pour faire une nuit complète. Une bonne nuit de huit heures, complètement réparatrice, pour pouvoir attaquer ta nouvelle journée à racler le fond de l’Underground pour gagner de quoi survivre un jour de plus. Ou pour nourrir l’orphelinat du Sud, si tu passes par là-bas dans la soirée. Quitte à ne pas manger pendant une journée, autant que ça serve pour les plus petits qui en ont besoin. Mais bon. Là n’est pas la question, là n’est pas le problème. Tu grimaces un peu, tapant un peu du poing.

- Ça sert à rien qu’j’te regarde. J’sais à quoi m’attendre. Vaut mieux refuser l’lien et basta. Ca t’rendra service, crois-moi.

Que tu dis en essayant de trouver un moyen pour te réveiller. Tu secoues la tête et commences à regarder autour de toi. Tu ne sais plus ce qu’on t’avait raconté. Il avait dit quoi, Wendell ? Ah oui. Tu peux manipuler la réalité du Rêve, créer que tu désires, comme tu le désires. Le but est de ne pas empiéter sur la liberté de ton partenaire aussi. Avec le mur, ça devrait le faire. Tu soupires et regardes tes mains un instant avant d’imaginer comme une balle anti-stress que tu serres dans ta main. À voir ce qu’elle dira, ce qu’elle répondra, ce qu’elle en pensera.

Bon, au moins, tu as obtenu une réponse. Même si ce n’est pas vraiment celle à laquelle tu t’attendais. En même temps, à quoi est-ce que tu aurais pu te préparer ? Tu n’étais pas censée te lier, c’est bien ce que les Archivistes n’ont censé de te répéter en t’enseignant ce que tu avais à savoir. Pourtant, tu es bien là, à parler à un mur, au sens propre, créer par un jeune homme qui ne semble pas vouloir du lien de son côté.

Cela peut sembler bien futile, mais tu commences à t’inquiéter des conséquences. Tu sais bien, par expérience que ceux qui vivent avec toi à Novas ne sont pas les plus compréhensifs pour ce qui est des changements qu’ils n’ont pas décidés. Et ils n’en décident pas souvent. Tu pouffes quand même quand il te dit que vous feriez mieux de refuser le lien. Tu en avais entendu parler de ça, que certains refusent des liens, mais ce n’est pas le sujet que tu connais le mieux.

- Mais qui te dit que c’est pas à toi que cela rendrait service ? Enfin, pour savoir ça, faudrait que tu enlèves ce mur…

Le pire, c’est que tu ne mens même pas. Tu reste aussi calme que possible, te doutant qu’il ne vaille mieux pas lui montrer que tu n’es pas dans la situation parfaite de quelqu’un de normal qui découvre son âme-sœur. Tu cherches d’ailleurs dans ta mémoire si tu as déjà lu quelque chose qui pourrait t’être utile lors de tes nuits à parcourir la Bibliothèque. Mais rien ne vient pour le moment, peut-être parce que tu ne sais pas vraiment quoi chercher. Il faudrait que tu en saches plus sur lui pour commencer, mais ça… C’est une autre paire de manche...

Elle pouffe. Elle trouve la situation drôle ? Comment ? Tu ne vois pas ce qui pourrait être amusant, mais qu’importe. Elle tient vraiment à te voir hein ? Elle tient vraiment à savoir ? Tu soupires et grognes avant de reculer pour taper l’espèce de balle contre le mur. Tu grimaces, entendant le bruit que cela produisait, s’échouant comme un écho sans fin au confins du Rêve. Tu regardes autour de toi, toujours ce blanc immaculé qui pourrait te rendre fou. Tu serres les dents et grognes.

- T’y gagnerais quoi à c’qu’j’pète ce mur ? Hein ?

Bon, possiblement à jauger la situation, savoir ce qui est le mieux pour vous, mais sinon. Tu réajustes ta capuche sur toi et te regardes un peu. Des vêtements rapiécés de partout, sale, noirs, plein de poussière. Des mitaines pour te protéger les mains, tes lames à la ceinture et ton grappin pour pouvoir escalader les falaises indomptables de l’Underground. T’as pas du tout l’attirail qu’il faut pour rencontrer quelqu’un. T’es habillé comme tu t’es endormi. D’ailleurs. Tu dors comment déjà ? Tu ne t’en souviens plus. Peut-être que tu t’es juste allongé chez toi, dans l’espèce de baraque où les murs sont des taules et creusé dans la roche. Où tu es accroché en hauteur dans un arbre mort. Tu ne sais plus.

- Puis t’sais c’qui arrive si on s’touche dans l’Rêve ! Hein ? Tu l’sais ! Et j’ai pas envie !

Non. Tu ne veux pas. Vous touchez, ne serait-ce qu’un instant, du bout des doigts, c’est signer son arrêt de mort. Elle aura un œil noir et sera une paria là où elle vit. Tu soupires un peu avant de grimacer et de secouer la tête.

- J’vais trouver un moyen d’me réveiller. T’auras pas à m’supporter longtemps.

Tu te demandes un instant s’il se rend compte de ce qu’il dit. Est-ce qu’il a vraiment l’habitude du Rêve ? Tu te redresses et fais quelques pas devant le mur, te demandant si te dois lui répondre avec honnêteté ou sarcasme. Mais il ne te laisse pas le temps de poser ta question que déjà il te demande si tu sais ce qui se passera si vous veniez à vous toucher au sein du Rêve. Tu t’es renseigné en effet. Même si tu n’étais pas censé te lier.

- Je sais… Mais pourquoi tu ne veux pas ? Tu penses vraiment que c’est moi qui n’aura pas envie de t’avoir comme âme-sœur ?

Tu t’arrêtes devant le mur et retournes à ton fauteuil et te poses à nouveau.

- Tu ne sais rien de moi, mais tu penses savoir que c’est toi qui va poser problème.

Tu te pince un peu l’arrête du nez en te demandant comment tu vas pouvoir faire en sorte de désamorcer la situation. Même s’il dit qu’il trouvera un moyen de se réveiller, tu doutes qu’il y parvienne.

- Tu sais qu’on ne pourra se réveiller que lorsqu’on se sera vu au moins une fois… Ou qu’on se réveille naturellement dans de longues heures… Tu es vraiment prêt à attendre ?

Tu te lèves et viens toquer au mur comme si cela pouvait changer quelque chose.

- Alors enlève ce foutu mur qu’on voit qui pausera le plus de problèmes à l’autre...

Malheureusement, elle a raison. Sur toute la ligne même. Tu l’écoutes attentivement et te ronges un ongle, te maudissant doucement. Non, tu n’es pas prêt à attendre toute la nuit, voulant juste sortir de ce cauchemar. Tu soupires et reprends la balle pour la faire disparaître avant de poser une main sur le mur en serrant les dents. Tu baisses la tête en inspirant avant de te redresser pour de bons et de laisser le mur fondre sur lui-même, comme s’il n’était plus que liquide, un souvenir lointain, tombant sans écho, dans un silence profond. Plus comme un souffle sur vos visages.

Tu baisses alors la tête, capuche bien enfoncée et la regarde du coin de l’œil. Tu remarques ses vêtements plutôt propres. Blanc. Peut-être fais de matériaux bien plus riches et rares que tu n’aurais pu imaginer. Tu déglutis, te rappelant dans quel état tu as. Cette cape de cuir à poils d’une créature des profondeurs et un mauvais cuir mal entretenu, volé sur une carcasse de bandit. Tu soupires un peu et oses. Tu oses lever la tête pour croiser son regard, laissant apparaître le noir profond de tes iris, mélangés à tes pupilles. Presque aussi noir que la nuit, les abysses.

Ce noir qui fait peur, ce noir qui est synonyme de folie, maladie, malédiction et autre joyeuseté qu’on vous a toujours attribué. Oui bien sûr. Toutes les plaies de l’univers sont de votre faute, tu l’as toujours appris. Et pourtant… Tu es enfin à hauteur de ses yeux à elle et… Tu écarquilles les tient, voulant reculer sous la surpris, manquant de tomber en arrière. Par tous les démons de l’Underground… Comment est-ce possible ? Tu ouvres la bouche, voulant parler, dire quelque chose, mais la surprise te laisse sans voix. Une… Archiviste ? C’est une Archiviste ?!

Tu finis par tomber à la renverse, laissant ta capuche partir en ailleurs pour montrer ton visage en entier, ta cicatrice sur ta joue, tes cheveux long, blonds, attachés en arrière. Tu fais signe, reculant.

- Dra-Elek !

Que tu jures, dans ce vieux dialecte perdu que seul l’Underground parle. Tu secoues la tête.

- Tu.. T’es…

Tu pourrais sauter de joie quand tu parviens finalement à le faire céder. Enfin, tu l’entends bouger derrière son mur et un petit sourire quelque peu nerveux apparaît sur tes lèvres. Doucement, le mur fond pour laisser place à un jeune homme aux habits en mauvais état. Tu étais préparé à l’idée de passer ta vie seule, alors tu ne risques pas d’être déçu. En fait, tu es même triste pour lui et tu ressens comme une injustice profonde en voyant la différence de qualité de vos vêtements.

La capuche couvrant son visage t’empêche encore de voir réellement la couleur de ses yeux, mais lui n’a rien qui le gêne pour apercevoir la couleur des tiens. Ce que tu craignais arrive alors. Le voilà qui recule comme pour te fuir.

Tu voudrais faire un pas, mais tu restes figée comme tu parviens enfin à voir ses yeux. Les deux iris noirs qui te fixent te surprennent. Pas que cela te choc, tu fais partie des rares personnes à savoir que ce peuple existe encore, juste que tu ne t’attendais pas à tomber un jour sur l’un d’entre eux.

Finalement, vous aviez raison tous les deux. Le destin semble avoir décidé de réunir deux ennemis naturels, ce qui te fait un peu peur, comme tu sens bien que ta vie ne sera plus jamais la même.

Sans un mot, tu avances doucement vers lui. Tu sais très bien ce qu’il se passera si tu le touches et cela est bien ton but. La Bibliothèque avait bien commencé à te mettre en garde sur des événements qui changeraient la face du monde. Tu comprends un peu, mieux maintenant.

En quelques pas, te voilà devant lui et tu te baisse pour te retrouver à sa hauteur. Tu espères qu’il puisse voir à cette distance les stries dorées qui parcours tes yeux alors que doucement tu viens poser ta main sur sa joue, celle qui n’est pas marquée par la cicatrice. Tu ne lui laisse pas vraiment le temps de réagir, le temps de reculer encore pour t’empêcher de vous lier. Un jour, il comprendra, mais tu ne veux pas lui laisser le choix.

- J’ai de la chance… Tu es beau...

Figés. Vous êtes tous les deux figés, comme stupéfait. Elle est aussi surprise que toi, aussi silencieuse. Mais contrairement à ce que tu pensais, elle avance vers toi. Tu écarquilles les yeux, incapable de bouger, hypnotiser par le blanc de ses iris. Tu lèves un bras pour te protéger, mais c’est trop tard. Tu es assez proche pour planter tes yeux dans les siens, remarquant avec stupeurs les stries dorés qui traversent ses yeux. Elle est… Tu n’as pas le temps de faire la remarque, de demander qu’elle pose ta main sur ta joue gauche. Trop tard. Tu ne réagis même pas à la remarque que tu sens une espèce de vague de chaleur t’emporter, ressentant des émotions confuses, qui ne sont pas les tiennes, voyant un passé rapidement qui ne t’appartient pas.

Tu vois la Bibliothèque, tu croises les regards d’Archivistes, tu vois l’éducation qu’elle a reçue… En quelques secondes. Et elle ? Verra-t-elle donc l’orphelinat délabré où tu as grandi ? Où tu t’es battu avec tes camarades ? Changeant de famille au rythme d’un âge avançant ? Tes premiers pas dans les Abysses de l’Underground ? À racler le sol pour sortir les déchets du Monde ? Peut-être. Elle verra les monstres que tu abats chaque jour, espérant tirer le plus de viande comestible pour nourrir les orphelins, trimant pour avoir un peu de crédit pour payer des conserves périmés.

Elle verra aussi ce peuple oublié, qui essaye de survivre avec des lampes UV anciennes générations que le peuple des yeux Bleus et Gris ont jetés des usines, pour raison défectueuse. Et toi… Tu grimaces de tout ce blanc et cet Eden factice. Le lien est fait. Tu recules… Avant de t’enfoncer dans le sol, comme happé par quelque chose… Ailleurs.

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Réveil surprise. En sueur. Tu te redresses, passant une main sur ton visage, te levant rapidement pour rejoindre un miroir sale, craignant de voir quelque chose qui confirmera que tu n’as pas rêvé… Cet œil blanc qui transparaît à droite. Cet œil blanc qui est la preuve ultime que c’est trop tard... Au-dessus du Monde, une jeune femme à le tient, noir comme l’ébène. Tu rages, tapant du poing contre la roche à tes côtés… Il faut cacher ça avant que tu ne te fasses lyncher, exilé… Et attendre le soir pour te reposer, dormir et la rejoindre… Il faut que vous parliez.

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Tu grimaces en ouvrant les yeux, reconnaissant le Rêve. Tu soupires, alors que tu es allongé au sol. Tu te tournes un peu, pour pouvoir être sur le dos en regardant le plafond absent. Tu pourrais l’imaginer, y voir ce que tu n’as jamais cru observer. Un ciel ouvert, les étoiles que l’on t’a décrites comme magnifique, par les marchands ambulants qui remontent à la surface, espérant troquer ce qu’ils peuvent avec ceux d’en Haut. Puis la lune… C’est quoi exactement comme astre ? Tu y penses. Mais tu ne sais pas à quoi ça ressemble, tu ne peux donc le créer ici. Alors tu te contentes de ce ciel blanc. Tu inspires doucement et poses tes mains sur le ventre.

- J’sais pas si j’t’en veux pour hier... Ou si j’t’en veux vraiment.

Que tu dis, sachant très bien qu’elle est déjà là, quelque part. Tu serres les dents.

- C’est donc vrai ? T’es née avec ces yeux ?

Que tu demandes, montrant ton œil partagé. Oui, tu as des questions maintenant. Il faudra qu’elle y réponde… Bien sûr, tu t’es préparé aux siennes… Après tout, avant que vous ne puissiez réellement vous voir… Le Rêve est fait pour ça… Apprendre à vous connaître… Vous apprivoisez…