J'souris, j'sens que les brumes de l'alcool commence déjà à m'remplir le cerveau. Je vois un peu flou et ces mots ça m'fait du bien. J'sais pas pourquoi mais c'le cas. J'pose une main affectueuse sur la tête du p'tit et j'lui frotte les ch'veux. J'sais pas vraiment c'qui m'arrive mais j'les trouve doux. Sans vraiment y penser j'commence à déblatérer. Ça m'arrive s'vent quand j'suis bourré. J'soupire, la situation est chiante ce soir. J'me sens pas bien et évidemment parce que l'petit mousse est là, j'pense à Maggie.

"T'sais mousse, tu m'fais vachement penser à quelqu'un que j'aime beaucoup." Je fais un peu la gueule parce que c'est aussi quelqu'un que j'ai laissé derrière. "J'ai pas été un vrai ami avec elle. J'l'ai laissé là bas à se faire tripoter les fesses par des pochards. Oh c'est pas qu'elle a pas le caractère pour s'défendre mais c'est une pirate dans l'cœur. J'le sais et j'l'ai toujours vu en elle mais.. Voilà j'ai fait ma tête de con. J'l'ai pas emmené parce que j'avais peur des superstitions. Pourtant, j'suis sûre qu'elle serait super. Tu verrais mousse, elle est courageuse, têtue c'est sûr, mais intelligente, drôle pis jolie mais faut pas lui dire qu'j'ai dit ça, elle va m'frapper avec une poêle. C'est la meilleure." J'me rends compte que j'souris malgré moi et pis p'têtre que j'l'apprécie plus que je l'pensais. En fait, j'sais pas trop, c'est mon ami depuis si longtemps, on se battait avec nos épées en bois en rêvant d'la mer quand j'étais jeune. C'est l'alcool, ça m'embrouille le cerveau.

"L'prend pas mal mais j'aimerais qu'elle soit là. Chaque fois que j'te vois, j'pense à elle. Après j't'aime bien mousse hein ! Pas que je t'aime pas, au contraire, fin' pas que jt'aime non plus tout court mais tu m'fais penser à elle."  Putain, vous savez c'moment où vous pouvez plus vous arrêtez de parler et vous dites conneries sur conneries. (enfin plus que d'habitude faut croire) Là c'est moi en train de me ridiculiser face au mousse. Il va perdre tout respect pour moi à force. Il aurait sans doute raison. Et puis pourquoi, j'ai envie de l'serrer dans mes bras comme ça. C'pas vrai, qu'est-ce qu'y s'passe à la fin ?  Sans que je réfléchisse, ma main a glissé et j'me rends compte que je suis en train de lui caresser rêveusement la joue. J'arrête mon mouvement et je me fige dans cette position l'observant bizarrement. Vous savez comme un de ces moments qui semblent importants sans qu'on sache pourquoi.

Putain qu'est ce qu'il pouvait être chiant quand il picolait le Sal'. Là il était entrain de partir en mode pleureuse et c'était assez lourd. Pire qu'une gonzesse. Vous voulez un commentaire détaillé de pourquoi je râle après lui? C'est bon j'arrive.

Le fait qu'il était pas un vrai ami avec moi, ça je l'avais remarqué. Ouais c'était un con et une petite bite pour avoir voulu me laisser à terre à me faire tripoter par ces bandes de moins que rien qui puaient et pas que l'alcool. Et elle m'avait planté. Alors qu'il savait très bien, comme il venait de le dire, que c'était mon rêve depuis qu'on était gamins d'être pirate. Mais non, monsieur refusait pour une histoire de superstitions à la con. Ca lui allait bien de faire comme si il regrettait devant un mousse. Ce connard il avait voulu me laisser à quai sans aucun état d'âme. Espère de raclure.

Mais continuons. Bien sur que je serais super, je l'avais déjà prouvé jusqu'à présent. J'étais courageuse, ça ne faisait aucun doute ça. C'était qui qui avait réagi et tué la sirène pendant qu'ils étaient comme des loques devant? Bah oui c'était moi. Intelligente, comparé à lui c'était certain que ce n'était pas difficile de faire mieux. Têtue, il fallait au moins ça pour réussir à supporter cette tête d'abruti. Drôle j'approuvais aussi. Jolie je le savais, comment je gagnais autant de pourboires à votre avis? Mais venant de lui c'était nouveau ça. J'avais toujours l'impression d'être une personne asexuée à ses yeux, sauf bien sur quand il était question de monter sur son bateau à la con, là je redevenais une femme. Mais quand il était question de se battre avec moi dans la boue là par contre aucun soucis.

Et nia nia nia j'aimerais qu'elle soit là. Espèce de fils de chienne. Tu n'avais qu'à m'accepter sur ton bateau j'aurais été là. Et il ne serait pas entrain de pleurnicher dans les bras du mousse à boire du rhum bon marché. Il n'était pas mauvais mais ce n'était clairement pas le meilleur que j'avais bu jusque là.

Bref, il était entrain de me saouler, dans tous les sens du terme, avec ses paroles et avec le rhum qu'il me refilait. Je ne sais pas comment l'ambiance changea tout d'un coup. J'étais là entrain de ruminer dans mon coin, me retenant de lui faire bouffer ses couilles puis...

Non je sais en fait ce qui s'est passé. C'est la faute de cet enfoiré!! Depuis quand on se met à caresser la joue du mousse, avec ce regard à la con. Mais si!!! Ce putain de regard que j'aimais pas, qui me perturbait un peu trop quand il le faisait. Puis il était là à le faire, sa putain de main ne décollant pas de ma joue, le rhum commençant à me monter à la tête, la lumière feutrée et le dos roulis du bateau...

C'était donc entièrement de sa faute, si à cet instant j'ai lâché la bouteille de rhum pour me jeter sur lui et l'embrasser à perdre haleine. C'était toujours de sa faute de toute façon.

Une chaleur super agréable m'enveloppe. J'me sens bien à moitié réveillé collé contre cette incroyable source. Putain ! Qui fait un putain de baroufe comme ça d'bon matin ! J'grogne avant de réaliser qu'l'bordel est dans ma tête. Tous les bruits sont des putains d'agression. J'ai l'impression qu'on m'écrase le crâne avec un marteau. J'me souviens pas d'grand-chose d'hier. Fin, j'crois que je me rappelle qu'j'ai rêvé que je me tapais une nana qui ressemblait à Mag….quoi ? Mon cerveau fait un blanc immense. J'suis là en train de regarder la paire de seins qui est à côté d'moi. Des..des des seins ?! Sur mon rafiot. Mais bon dieu, j'sais pas si je dois remercier le seigneur ou la jeter par-dessus bord. J'fais pas les connexions dans le bon ordre…Maintenant j'vois que c'est bien Maggie qu'est à côté de moi en train d'dormir. Là j'avoue que j'suis sur l'cul. Il est où l'mousse ? Oh putain… Maggie c'était l'mousse tout'ce temps. Je suis vraiment un putain d'abruti, c'est ça ? Mon dieu mais comment j'ai fait pour être aussi con. Y'a quand même pas mal de problèmes d'un coup là.

1 - Y'a une femme sur mon bateau
2 - Cette femme c'est Maggie
3 - J'ai couché avec Maggie.

Ok je sais pas quel est le chiffre qui vient après mais là, je suis sacrément dans la merde. Je sais pas trop bien pourquoi d'ailleurs. J'ai l'impression que tout tourne encore plus que quand j'étais beurré comme un petit gâteau hier. Y'a trop de trucs qui sont pas clairs dans cette histoire. Et puis j'fais quoi moi de tout ça là ? Putain dire que j'ai cru que j'étais pd pendant plusieurs semaines. J'ai une brusque envie d'aller me jeter aux putains de requin là. D'ailleurs, en vrai, pour qui elle se prend pour v'nir sur mon bateau comme ça sans m'en parler. Elle s'est bien foutue de ma gueule quand même. J'ai peut être pas été très malin mais j'aurais pas imaginé qu'elle ferait un truc aussi perni..pernic enfin nul quoi. Je la vois qui bouge un peu pour se redresser.

T'es contente de t'être foutu de ma gueule aussi longtemps Maggie ? T'as du bien te marrer franchement. J'sais pas si tu vas autant te marrer quand je vais te débarquer au prochain port. Peut-être que j'aurais du fermer ma gueule parce que là j'sais pas si je suis prêt à me prendre un cataclysme dans la gueule de bon matin.

Je me sentais bien. Je dormais bien, allongé sur un lit confortable, enveloppée d'une douce chaleur. Mon cerveau ne s'était pas encore complètement relancé. J'étais à moitié endormie, profitant de ce petit moment de bien être sans me souvenir de tout ce qui avait pu se passer la nuit dernière.

Mais mon petit moment de relaxation éclata rapidement quand j'entendis l'autre connard se mettre à hurler. Je me redressais le regardant alors que tout me revenait en mémoire. Et à part putain de merde je ne voyais pas trop quoi dire de plus sur le moment. J'avais été conne, vraiment trop conne. J'avais laissé l'alcool parler et je m'étais jeté sur lui pour l'embrasser. Après ça avait rapidement fini en grand n'importe quoi. On s'était déshabillé et ni lui ni moi n'avions réagi au fait que je n'étais pas vraiment un mec. Il devait être trop alcoolisé pour remarquer que j'avais une paire de seins et une chatte. Mais là de toute évidence il se rendait bien compte que j'étais une femme, et que c'était moi.

Je le regardais, à moitié assise sur son lit avec un petit sourire.

- Honnêtement? Ouais c'était assez drôle de me foutre de ta gueule comme ça. T'es tellement con mon pauvre Sal' t'as jamais capté que c'était moi.

Quand je le disais que c'était un abruti quand il s'y mettait, je ne mentais. Il était trop con et trop imbu de lui même pour voir plus loin que le bout de son nez. J'étais là, juste sous ses yeux, celle qui était sensée être sa meilleure amie et il n'avait rien capté. Mais si il pensait pouvoir me débarquer, il se trompait.

J'attrapais un poignard avant de me jeter sur lui. Je m'en foutais un peu d'être à poil à cet instant là. De toute façon après cette nuit, je n'étais plus à ça près. Je m'installais à califourchon sur lui, pressant la lame de mon poignard sur sa gorge.

- Par contre si tu penses pouvoir me débarquer au prochain port tu te trompes espèce de pourriture. Je pense avoir prouvé que vos superstitions c'était de la merde. Que j'étais un bon marin sur ce bateau de merde. Et que putain si je n'avais pas été là vous vous seriez tous fait tuer par cette salope de sirène. Alors avises toi de me virer de ce bateau et je te coupe les couilles avant de te les faire bouffer!!

Et j'étais parfaitement capable de le faire, meilleur ami ou pas qu'il essaye un peu de s'en prendre à moi et il verrait.

En tant normal, j'aurais été d'humeur à jouer ou à répondre une connerie sans me soucier de la situation. Mais là, ça allait trop loin. J'veux dire, je suis pas le dernier à déconner et ouais j'suis probablement un abruti de pas avoir qu'elle était là tout ce temps. Se faire menacer sur son propre bateau par la femme avec qui on vient de coucher, c'était en vérité pas véritablement ma première fois. J'avoue que parfois dans la vie en mer, quand on arrive en port, on a un peu oublié les coutumes de la terre ferme si vous voyez c'que je veux dire.  

Je prends un sourire vachard qui donne suffisamment le change pour donner l'impression que j'en ai rien à foutre de sa petite menace. J'suis bon à faire semblant que tout va bien, c'est sans doute pour ça que j'me suis retrouvée à être capitaine quand j'y pense. L'art de l'esbrouffe, ça me connaît. "Et quoi, tu penses que tu pourras rester si tu butes le capitaine ? Même en tant que mousse, tu te ferais virer aussi sec et au milieu de l'océan, et je te dis pas ce qui se passerait en tant que femme... P't'être que je suis un abruti mais tu voudras pas être aussi conne que moi non ? Si oui, t'as qu'à me buter si tu crois que t'es la première à me menacer avec un couteau. Tu t'trompes." Je réalise que malgré la vie en mer et le temps qui s'est passé depuis son arrivée sur le bateau, elle n'a jamais vraiment vu ce Salomon là. D'ailleurs, elle connaît pas cette facette. Je suis pas un enfant de cœur et je suis certainement pas quelqu'un qui cède sous la pression et ce même d'un poignard. Je préfère crever que d'être contraint de faire quelque chose. La vie de pirate c'est une existence dure avec la mort qui vous fait coucou régulièrement. J'ai passé de nombreuses années à m'endurcir pendant qu'elle était à quai. Elle a son caractère mais elle m'a manifestement sous estimée. Il serait temps qu'elle le réalise.

"Là je suis encore le capitaine, si j'appeler les marins, tu crois que c'est lequel d'entre nous qui va vivre un sale moment ?" Quand je suis mécontent, c'est presque comme si j'étais une autre personne. Fin je me sens différent, j'suis obligé de faire l'adulte et d'être sévère. Pas ma partie préférée de moi mais ça m'a permis de survivre jusqu'à présent. Si de colère, elle ne décidait pas quand même de me couper les roubignoles. Il fallait avouer qu'elle en était capable juste parce qu'elle s'était levée du mauvais pied. Le mal de crâne me vrille l'estomac en plus, c'est pas très agréable de se concentrer dans ces conditions." Du coup, je te propose que tu ranges ton cure-dent, et qu'on essaie de discuter sans s'insulter pour changer. Ça nous changerait."

Il exposait un point intéressant. Il était clair que je ne pouvais pas me permettre de le tuer. Mais je ne comptais pas le faire. Il était mon ami malgré tout et je ne voulais pas sa mort. Même si c'était carrément un abruti quand il s'y mettait, je voulais qu'il continue de faire partie de ma vie. Mais par contre si il pensait qu'il sortirait blanc comme neige de cette histoire si jamais ses marins débarquaient et nous voyaient ainsi, il se trompait lourdement.

Je consentis à descendre et allais attraper mon pantalon pour l'enfiler. Je serais quand même plus à l'aise pour parler habillé que complètement nue. J'attrapais mon bandage et commençais à l'enrouler autour de ma poitrine pour l'aplatir à nouveau.

- Et tu comptes leur expliquer comment à tes hommes que le mousse que tu as engagé est en fait une femme sans passer pour un abruti?

Qu'eux se soient fait avoir encore c'était assez normal ou du moins pas trop dérangeant. Mais leur si beau et si grand capitaine s'était fait rouler comme un bleu, ça passerait beaucoup moins bien ça. Sa crédibilité descendrait rapidement là. Et ça ne tomberait pas vraiment bien, après la raclé qu'ils s'étaient pris avec la sirène, le pirate qui était mort... Il avait tout intérêt à ce que ça ne se sache pas.

- Je ne vais pas te tuer Salinou. Tu es mon meilleur ami. Jamais je ne ferais ça.

Je le foudroyais du regard, nullement impressionnée par les airs de grand méchant pirate qu'il se donnait. Si il savait le nombre de connard du même genre que j'avais vu dans les tavernes, qui avaient tenté de me toucher ou d'aller encore plus loin qu'une main aux fesses. Je ne m'étais jamais laissé faire. Ce n'était pas maintenant que j'allais me laisser intimidé par tout ça.

- Comprends moi... j'en avais assez de ma vie de merde à quai. Je rêvais d'aventure, de monter sur ce bateau avec toi, comme on en avait toujours rêvé étant gamin. Ce n'est juste que parce que je suis une femme je n'ai pas le droit de le faire. Alors je me suis dit que si je te montrais ce que je valais, que j'étais capable d'être un bon marin, tu finirais par changer d'idée.

Je terminais de cacher mes seins avant d'enfiler ma chemise, la fourrant dans mon pantalon, faisant un petite bosse à l'entre jambe pour simuler un service trois pièces.

- Et reconnais que je m'en sors bien. Je vous ai même tous sauvés hier. Si je n'avais pas été là, vous seriez morts. Alors laisse moi continuer à me faire passer pour le mousse. Personne ne saura que tu t'es fait rouler par une femme.

Ca lui éviterait au moins cette honte. Si il était pas con il accepterait. Mais avec lui je me méfiais justement.

J'avoue que je savais pas comment j'allais faire pour justifier ce qui venait de se passer. En vrai, j'étais pas trop dans mon assiette présentement. Ma tête me hurlait que j'avais trop bu. Mon corps était ravi d'avoir pu profiter d'une petite accalmie en mer et mon cerveau…. Et bah pour changer, c'était un bordel  sans nom. J'savais même pas ce que je ressentais. J'veux dire, on avait même pas parlé du fait qu'on venait de coucher ensemble. Ça semblait même pas le principal problème. Avoir une femme sur un navire ça portait malheur. Les autres s'ils le découvraient se barreraient c'était sûr. Déjà, le marin qui meurt, c'était pas super pour mon image. J'étais pas assez cruel pour proposer qu'on la jette en pâture pour qu'ils se défoulent. De toute façon, j'avais jamais été ce genre de personnes. Enfin…disons que ça avait pu arriver qu'un gars ou deux passe par-dessus bord mais c'était des crevures. Personne les avait véritablement regretté. J'aime pas passer pour un con. Là c'était certain qu'elle m'avait pris pour un con…En même temps, c'était certain que j'en avais été un. Et d'ailleurs pas qu'un peu et pas qu'une fois.

Je me rappelais toutes les fois qu'on avait passé à faire semblant qu'on était des marins. Et puis on avait grandi, on avait découvert que les femmes ça part pas en mer. C'était ça la vie. Rien que d'imaginer de la laisser retourner dans un bar de merde d'un côté ça me donnait presque le mal de mer. Et pourtant j'avais certainement le pied marin avec le temps. A tel point d'ailleurs, que c'était souvent retourner sur terre qui m'rendait un peu malade. La terre ça avait jamais été pour moi et vu l'air farouche qu'elle me collait, ça avait jamais non plus sa tasse de thé. A mon avis, j'aurais pu tout à fait faire en sorte qu'elle se barre quand même. Contrairement à ce qu'elle pensait, j'étais pas con. Il aurait suffi que quelqu'un la découvre, que je me démerde pour gagner sa confiance et la mettre en position de faiblesse quand j'aurais besoin. Mais une fois de plus, j'étais pas ce con. Voyager en mer avec elle, c'était aussi réaliser un de mes rêves d'enfant. Et c'était la rendre heureuse. Sauf qu'évidemment, elle comprendrait jamais ça et que si je lui disais elle m'enverrait probablement chier. Alors j'écoute son argumentaire et décide de faire semblant que ça m'a convaincu. Dans le fond, j'ai les miquettes mais elle a pas besoin de savoir ça. Je veux pas qu'il lui arrive un truc grave ou qu'elle soit blessée. Que les autres le découvre et décident de s'amuser avec elle. C'était pas des lumières pour la plupart.

"T'as raison sur certains points." Je m'approche d'elle et pose une main sur son épaule avec un air sérieux et définitif.
"Si tu te fais gauler, je pourrais pas faire grand-chose pour toi alors fais attention." Est-ce que je pouvais m'en sortir sans parler du fait qu'on venait de coucher ensemble ? Pour le peu que je m'en rappelais en tous les cas. Cela dit, ça n'empêchait que je la voyais pas pareil maintenant. Je m'imaginais déjà retirer sa chemise et défaire la ceinture qu'elle venait de remettre autour de ses… Je me frappais mentalement, c'était pas une bonne chose que ça arrive de nouveau, non ? En plus de compliquer les choses pour ne pas qu'elle se fasse gauler, ça rendait notre relation plus complexe. J'avais jamais considéré que j'étais un homme fait pour l'attachement ou pour une relation. J'ai pas ce qu'il faut pour rendre heureux quelqu'un. C'était aussi pour ça que j'étais parti sans me retourner et sans regretter la vie qui se serait offert à moi si j'étais resté.

"Merci de nous avoir sauvé Maggie. Je pense que je te l'avais pas dit avant. On a tous une dette envers toi, donc si je peux faire un truc pour toi, t'as juste à demander." J'sens mon corps qui bouge malgré moi. Foutu impulsivité. Sans que je le réalise, mon corps est collé aux siens dans une étreinte douce mais ferme.
" Tu m'avais manqué, Moussaillonne." Je l'avais cherché dans les traits de ce mousse. Et c'est sans doute pour ça aussi que je m'étais vite attaché à lui. Et c'était pour ça que sa présence me rassurait sans doute. C'était nul à chier pour un homme de se dire que la présence d'une femme lui était nécessaire pour se sentir mieux mais c'était ce que je ressentais. Bien que je me gardais évidemment de le préciser.

J'avais gagné.... ahaha j'étais trop forte. Je le savais que j'étais plus forte que cet abruti. De toute façon il était obligé de se ranger à mon avis, c'était moi qui avait raison. Il ne pouvait pas balancer que j'étais une femme sans passer pour un con auprès de son équipage. Il risquait une mutinerie si jamais si s'apprenait. Et j'avoue, je comptais un peu sur notre amitié pour espérer qu'il ne me jette pas en pâture à ses hommes. Je n'avais pas vraiment envie de me faire tripoter par ces mecs.

Je me retenais de l'envoyer chier alors qu'il parlait de me faire gauler. J'avais été prudente jusqu'à présent. Personne n'avait rien remarqué et ce n'était pas prêt d'arriver. D'ailleurs si je n'avais pas bu et si on n'avait pas couché ensemble, il continuerait encore de croire que j'étais juste un petit mousse. Et pourtant lui c'était mon meilleur ami. Il était sensé me connaitre par coeur. C'était une belle bande d'abrutis sur ce bateau alors ils n'étaient pas prêts de me démasquer.

Je fronçais les sourcils et me décollais de lui alors qu'il venait se la jouer à nouveau aguicheur. Je le connaissais bien ce petit ménage, je l'avais vu faire assez souvent avec ses maitresses. Je n'avais seulement jamais cru que je ferais un jour partie du lot. Quelle déchéance... coucher avec cet abruti, ce coureur de jupons. Bon je devais reconnaitre qu'il était assez doué et qu'il méritait sa réputation. Mais non merde je ne recoucherais jamais avec cette tête de noeud. J'avais fait cette connerie une fois, ça me suffisait.

- Je dois retourner bosser. Et toi tu dois tenter de te rendre un minimum présentable. Il y a encore des zones de l'île qu'on n'a pas exploré. Je suis certaine qu'on peut trouver un trésor ailleurs. Ca remonterait le moral de tout le monde après ce qui s'est passé hier.

Je le saluais d'un signe de tête avant de quitter sa cabine. Je pensais rapidement voir le coq pour prendre quoi grignoter avant de me mettre au travail l'air de rien. Un petit moment plus tard il finit par sortir, donnant des ordres pour que nous repartions à terre. Je glissais un petit poignard à ma ceinture avant de descendre à terre avec les autres hommes. Je sentais la tension, la peur bien présente cette fois. L'excitation de la veille s'était envolée. Ils repensaient tous à leur camarade mort et se demandaient si ils seraient les prochains.

Je n'avais rien répondu. Elle était contente et comme d'hab, tout ce que j'avais pu dire avait servi à me faire passer pour un con. Enfin, c'était pas comme si c'était pas une habitude. Avec Maggie, je me sentais souvent plus con que j'l'étais. Et pourtant, même moi j'savais que j'étais pas toujours le sabre le plus affûté du bateau. Le lendemain, j'avais décidé qu'on retournait sur l'île coûte que coûte. Il nous fallait une victoire et la mort de Bobby aurait servi à rien si on bottait pas les fesses de cette île qui s'croyait meilleure que nous. Dès le matin, j'avais lancé le petit speech d'encouragement. J'avais bien senti que l'ambiance était pas au beau fixe et en même temps la mienne non plus. J'avais à peine décuvé de la soirée d'hier et j'avais des flashs qui revenaient de la nuit que je venais de passer. Autant dire que c'était plutôt gênant. J'avais donc décidé de faire ce que je faisais de mieux : regarder ailleurs jusqu'à ce que ça disparaisse tout seul.

J'étais très bon à ce jeu, d'ailleurs j'espérais que la prostituée que j'avais "oublié" de payer à Carthage car je comprenais rien à ce qu'elle disait avait disparu depuis un bout de temps. Nous nous sommes enfoncés de nouveau sur l'île. On a décidé d'en explorer une autre partie. J'pense que personne voulait retourner dans cette foutue grotte pour le moment. La végétation au cœur de l'île était épaisse et on voyait pas grand-chose à quelques mètres devant nous. On se frayait un passage à coups de lame tranchante en soupirant. L'avancée fut longue et fatigante. Le soleil était bien levé mais dans la forêt, l'humidité faisait oublier ce détail. Les gars suaient devant moi et j'avais l'impression qu'on marchait depuis des heures. (ce qui était probablement le cas). Je me tenais le plus loin de Maggie possible prétextant que je devais être devant pour mener les opérations. On avançait à tâtons depuis ce qui semblait une éternité quand un des gars longea une paroi épaisse de roche. C'était l'autre flanc de la crique où on avait fait un tour hier. Je passais mes mains sur la pierre espérant trouver quelque chose d'intéressant. C'était peut être à moitié pour me retenir de pas taper dessus de frustration. Tout ce chemin parcourut pour arriver au caillou central et toujours rien d'intéressant.

Je continuais de ruminer dans ma tête lorsque mon bras s'enfonça complètement dans une sorte de terre humide. Je lâchais un bruit pas très capitainien pour réaliser que la zone sur laquelle je m'étais appuyée n'était pas exactement comme de la roche. C'était de la terre tassée. Je tourne la tête vers mes camarades qui me regardent dépités, plusieurs d'entre eux avaient manifestement tentés de me prévenir de ce changement d'état. Toujours était-il que sans plus tarder, on se met à creuser avec les hommes pour découvrir une entrée de grotte. Ça sent le renfermé. Ce qui nous incite à y aller, c'est qu'il y a de la luminosité au fond du tunnel. Comme s'il y avait une torche allumée au bout du couloir. Je demande au gars de venir en rang d'oignons et on s'engouffre dans ce tunnel.

Ils n'étaient pas serein, je pouvais le sentir. Leur peur, la tension environnante commençait à me saper les nerfs aussi. Je n'aimais pas ça. Nous étions sensés être des pirates, n'avoir peur de rien et surtout pas de la mort. Mes illusions étaient entrain de voler en éclat. Ce n'étaient que des hommes, pas meilleurs que les autres, peut être pire par certains aspects. Je pensais, parce qu'ils avaient décidé de partir à l'aventure, de risquer leur vie pour de l'or, qu'ils avaient cette dose de courage en plus que celle du commun des mortels. Mais une partie d'entre eux était plus avide d'argent que courageux. Il y avait aussi qui n'avait plus rien, qui étaient parti là parce que c'était le seul endroit qui voudrait encore d'eux, qui leur éviterait la prison pour certains. Et c'était entouré de ces hommes que je m'avançais vers cette île mystérieuse. J'avais peur moi aussi. La peur était normale après tout. Elle faisait partie de tout un chacun. Mais j'étais déterminée. Je ne voulais pas rentrer les mains vides. Je ne voulais pas me laisser tuer facilement. Je vendrais cher ma peau si cela devait arriver, j'en étais certaine. Et c'était cette détermination qui parvenait à tenir à l'écart la peur qui se tapissait au fond de moi.

On accosta. Je les sentais se pisser presque dessus pour certains. Deux hommes furent désigner pour surveiller les barques. Je pouvais sentir leur soulagement à cette idée. Moi je suivais Sal', m'enfonçant derrière lui dans la forêt. Je devais au moins lui reconnaitre ceci, si il flippait il n'en laissait rien voir. Il avait pris la tête de notre expédition, endossant son rôle de capitaine, menant ses hommes au travers du danger. Je pouvais sentir que le fait de le voir ainsi prendre la tête avait contribué à faire baisser les tensions chez les hommes. Même si parfois il pouvait agir comme un véritable abruti, c'était un bon chef, tous les hommes le reconnaissait. A les entendre, être sur son bateau était une des meilleures places qu'on pouvait s'offrir en tant que pirate. Et je devais admettre qu'ils avaient raison.

Je le suivais, restant dans le gros de la troupe, tous les sens en alerte. Je voulais être prête à agir si jamais il y avait une autre sirène qui se pointait et qui venait leur brouiller les sens. Mais pour le moment le seul danger c'était la chaleur et les moustiques. Certains hommes avaient commencé à se mettre torse nu, ne supportant plus que leur chemise leur colle à la peau. Moi j'étais resté habillé, remontant juste mes manches. Ils s'étaient foutu de moi, avant que les moustiques ne leur dévore la peau et qu'ils ne finissent par remettre leur chemise.

On finit par longer la paroi extérieure de la grotte. Je restais plus que jamais les sens en alerte alors que Sal' laissait passer sa main sur la paroi. Puis sa main plongea à l'intérieur, traversant ce qui semblait être de la terre. Je le regardais faire alors qu'il continuait d'avancer. Je laissais les hommes me distancer, sortant ma carte pour la détailler. Je finis par m'avancer vers Sal', ma carte dans les mains avant de la lui montrer.

- Capitaine... regardez la carte. Vous voyez ça... je crois qu'on est là et... je crois que le symbole là indique un trésor... on pourrait... on pourrait regarder?

Je le voyais réfléchir attentivement avant de se redresser et de donner l'ordre aux hommes de creuser, sans même me lancer un regard. Je comprenais. Il était encore gêné de notre nuit. Moi même je n'étais pas en meilleur état. Je le laissais rapidement, rangeant ma carte avant d'aller me mettre à creuser. J'étais le mousse, c'était normal que les tâches les plus ingrates me reviennent.

Je creusais le plus rapidement possible aux côtés d'autres hommes. Ma chemise déjà poisseuse ne tarda pas à se mouiller davantage. Heureusement que mon bandage cachait bien mes seins parce que vu comme mon vêtement me collait à la peau, ils auraient pu tout voir facilement. Puis finalement, au bout de plus d'une heure d'effort, je sentis ma pelle toucher quelque chose de dur. Nous nous fixâmes un instant avant de creuser avec une frénésie nouvelle. Quelques minutes d'effort supplémentaire et nous sortions un coffre dont le poids laissait augurer plein de bonnes choses.

Nous le déposâmes au pied de Sal', le souffle court, le corps ruisselant de sueurs, les mains et le visage maculés de terre mais le sourire aux lèvres. Nous attendions avec patience qu'il ouvre, histoire de savoir si un trésor allait ou non récompenser nos efforts.