Semaine chargée, comme souvent. Gabriel n’a pas réellement vu le temps passé, pour ne pas dire pas du tout. Il a juste eu le temps d’envoyer quelques messages à Camille, lui promettant qu’il se rattraperait sur son jour de repos, de quoi apaiser les quelques remarques comme quoi il n’est jamais disponible. Ce n’est pas comme si elle avait totalement tort, mais peut-il réellement faire autrement alors que tout le restaurant repose sur lui ? S’il veut mener à bien ses projets, devenir le grand chef qu’il rêve de devenir… Il doit travailler d’arrache-pied et réussir à se faire un nom ; mais ça, sa petite amie est loin de le comprendre et de l’entendre, ce qui est source de nombreuses discordes entre eux.

Gabriel enfile ses chaussures et claque la porte de chez lui dans un soupir en regardant le dernier message qu’il vient de recevoir. Finalement, trop de belles promesses ne calment rien. Il relève la tête et dans un mouvement de précipitation, manque de heurter Tessa qu’il n’avait pas vu. « Oh, pardon, je… » annonce-t-il avant de s’apercevoir qu’il s’agit de la New-Yorkaise. « Oh… Hum… Tessa, right ? » Il ne l’avait vu qu’une fois mais en théorie, il se souvient plutôt bien des prénoms des personnes qu’il rencontre. « I’m so sorry… I need to be careful… » Il grimace, sincèrement gêné. « So… how are you since last time ? How are you adjusting to your new life, to Paris, to your work ? » enchaine-t-il subitement les questions.

Cela faisait maintenant plusieurs jours que Tessa avait débarqué à Paris. Si la jeune femme avait toujours adoré la ville dans ce qu’elle entendait dans les films, les bouquins. Elle l’avait aimée dans les reportages aussi mais sur place c’était autre chose. Ce n’était pas les lieux en eux même le problème. Elle avait simplement du mal à se faire ici, à trouver sa propre place. C’était pareil au boulot. Les gens la méprisaient un peu, après tout, une américaine qui débarquait ne pouvait pas imposer sa loi. Ils ne faisaient pas trop d’efforts avec elle, surtout concernant la barrière de la langue. Bon, elle ne devait pas s’attendre à grand-chose puisque c’était elle qui arrivait et qui, à part quelques mots de français, n’y connaissait rien.

La brunette a enfin terminé sa journée et c’était enfin le weekend. Si elle aimait son travail, elle ne pouvait pas niée qu’elle avait attendu ce moment. La jeune femme avait hâte de retrouver son chez elle, quand bien même il était beaucoup plus petit que là où elle vivait. Elle monte les escaliers, tête en l’air alors qu’on finit par la bousculer. Elle eut envie de pester à cause de sa mauvaise journée mais elle finit par se retenir en voyant qu’il s’agissait de Gabriel. « Yes it’s me. You have a good memory. » Elle lui réponds alors. Elle secoue la tête. « Well, if it’s you it’s okay, you have luck. » Elle ne pouvait pas vraiment lui en vouloir alors qu’il l’avait aidée et accueillie quand elle était en galère. Il était d’ailleurs le seul à l’avoir bien accueillie ici. Malheureusement il n’y avait pas assez de Gabriel dans cette ville. Elle grimace un peu à ses questions. « Oh.. if you want to know.. you have time ? » Elle n’allait pas se mettre à déballer sa vie s’il était pressé et puis bon, il n’avait peut-être pas envie de savoir non plus. « Actually not really good but that’s fine. I’m going to lay in my bed with a hot chocolate. » Bon programme non ?

Gabriel émet un sourire à la jeune femme alors qu’elle lui annonce ne pas lui en vouloir. La remarque est amusante et ne manque pas de le toucher, comme s’ils étaient déjà des personnes particulières l’un pour l’autre sans qui ne se soit rien passé de spécial. Malheureusement, son sourire s’emprunt bientôt de tristesse en voyant la mine de la jeune femme alors qu’il lui pose ses questions. Sujet sensible à priori. Il était loin de s’attendre à ça. « I’m so sorry to here that ! » reprend-t-il alors sincèrement. « I’m going to the market. Do you want to come ? » propose-t-il. Il n’a pas vraiment le temps de rester discuter pendant deux heures dans la cage d’escalier mais si elle l’accompagne, il saurait faire deux choses à la fois sans aucun problème. « I’m sure we can find a hot chocolate on the way. » ajoute-t-il en descendant déjà de quelques marches pour qu’elle l’accompagne et ne puisse pas réellement refuser. Bien qu’il ne soit pas toujours le meilleur pour discerner les gens et agir de la bonne manière, il a tout de même quelques dons pour réconforter, parait-il. « If your bed can wait, obviously... » finit-il par plaisanter davantage.

Quand ils se mettent en route, il prend gare à ne pas tomber dans les escaliers. Bien que cela ne soit arrivé qu’une fois alors qu’il avait les bras chargés de course dans une époque lointaine, ça lui est resté de faire attention où il met les pieds. « So… Tell me what’s wrong ? » l’invite-t-il à se confier.

Tessa était contente d’être venue à Paris mais elle commençait un peu à se demander ce qu’elle faisait ici. Elle ne savait pas trop pour le coup. La jeune femme était venue pour le travail mais elle voyait bien qu’elle n’était pas vraiment très accueillie par ici. Elle ne savait pas si c’était parce qu’elle ne savait pas parler la langue ou bien qu’elle était américaine mais bon. Elle finit par tomber sur Gabriel, ou plutôt, c’est lui qui la bouscule. C’est visiblement la seule personne qui l’accueille correctement. La seule personne qui est sympathique avec elle. « It’s not your fault but thank you. » Il ne pouvait rien faire, c’était à elle de se débrouiller avec eux. Elle hausse les épaules à sa proposition. Au moins, si elle est avec lui alors il y a moins de craintes à avoir. Non pas qu’il allait la protéger mais elle se dit que les autres n’essaieraient peut-être pas d’être désagréables, surtout que Gabriel avait un restaurant et devait être un minimum connu ici. « Well.. I have nothing to do and maybe you can give me advices so yes. »  Elle lui adresse un sourire à ses mots. Il semblerait qu’il l’ait cerné aussi un peu à savoir qu’elle aimait les chocolats chauds. Il faut dire qu’elle devrait en avoir bien besoin ici. « Yes I’m sur he is not jealous. » Le lit bien entendu car elle n’en savait rien concernant Gabriel. Il n’avait aucune raison de l’être et encore moins de son lit.

Elle le suit parce que bon elle ne connait pas la ville. Elle arrive tout juste à se rendre à son travail et elle se dit que ce n’est déjà pas mal. « Hum.. How to explain that.. » Elle pousse un soupir. « I think they don’t like me. And I know I don’t speak french very well but they know I don’t understand and keep talking to me in french. » Elle suppose qu’il lui dira qu’elle avait qu’à apprendre la langue avant de venir en même temps et il n’avait pas tort. « I don’t know what to do to make them like me. » Ce n’est pas tant de se faire apprécier qu’elle veut mais que les choses se passent un minimum correctement.

Un signe de tête résolu en guise de confirmation et les voilà tout deux qui descendent les escaliers. Gabriel écoute la jeune femme avec attention, cherchant en même temps quels conseils il pourrait lui donner. Il est vrai qu’il connait mieux la France et donc les français que Tessa, mais il est aussi bien conscient qu’il ne faut pas faire une généralité d’une population comptant plus de 63 millions d’individus. Encore que les parisiens et les provinciaux soient très différents dans leurs modes de vie, caractères, etc. Lui-même avait dû se familiariser à son arrivée dans la grande ville et c’est par ce partage d’expérience qu’il peut sans doute venir en aide à l’américaine.

« Les français… Et encore plus les parisiens… » lâche-t-il en français lui aussi, comme s’il ne se différenciait en rien des personnes que la brune lui décrit. « We don’t really appreciate change in general. » Il lâche un rire. Lui qui tient à sa petite routine, sans doute plus que les autres. « That doesn’t mean they don’t like you. » Comment est-ce qu’on ne pourrait pas l’aimer, d’ailleurs, cette jeune femme qui semble si positive et innocente. « And… we don’t like when we are told what to do. » Mais est-ce que ce n’est le cas qu’en France ? Pas certain. « I’m sure they’re juste testing you. Like a… bisutage ? » Il ignore si le terme se dit de la sorte en anglais mais peut-être comprendrait-elle. « I don’t mean that’s cool… of course. Just saying that’s there’s always two sides of a story. Maybe if you can understand what really bother them, you could figure out the problem ? » et découvrir qy’elle n’est pas le problème, donc.

« What is your role exactly in the farm ? What are you suppose to do ? » cherche-t-il à comprendre afin de tenter d’avoir un semblant de début d’explication. Néanmoins, pas sûr qu’il y parvienne. « And have you try to buy them a coffee in a bar, to get to know each other out of work ? »

Tessa ne regrettait pas d’être venue ici, au contraire. Elle appréciait toujours Paris mais est-ce que Paris l’appréciait tout autant ? Les choses étaient moins sûres. Elle en avait pourtant envie, elle ferait tout ce qu’elle pourrait pour réussir ici. Elle ferait tout pour se sentir intégrée et qu’on l’accepte. Elle ne pouvait pas obligatoirement être aimée. Néanmoins, elle trouvait qu’il était mieux de bien s’entendre dans le domaine du travail. Les choses seraient compliquées sinon.

Au moins, la jeune femme avait quelqu’un qui pouvait l’aider et la comprendre. Bon, comprendre était autre chose puisqu’elle parlait en anglais et que du coup il devait en faire autant. Elle connaissait que quelques mots en français donc rien qui allait vraiment les aider tous les deux. « So french people are better in the south ? » Or whatever. Elle ne savait pas trop même s’il y avait d’autres endroits en France qui devaient être jolis à visiter et pas uniquement Paris. Elle hoche la tête à ses explications. Peut-être oui pour le bizutage elle ne s’était pas renseignée auprès des autres. Elle ne savait pas si cela se faisait autant par ici. C’était plutôt en Amérique mais pourquoi pas. « I understand and I hope they like me. Or not really but I want to work together. » Ils pourraient utiliser leurs idées au moins et réfléchir ensemble. Peut-être que cela donnerait de meilleures choses. « I will try the coffee then and maybe a diner with all of us ? Do you think they will accept ? » Elle avait déjà du mal à leur parler mais peut-être que si elle organisait cela ça pourrait le faire. « Maybe I can come with them to your restaurant ? » Elle n’en connaissait pas d’autres de toute façon et elle faisait confiance à Gabriel. Elle ne voulait pas déranger pour autant il avait sûrement un planning déjà rempli.

Elle réfléchit à comment lui expliquer son boulot. « I work for the social media, I share content and try to have some views. And I work for marketing. They need a new eye. »

Gabriel ne peut s’empêcher de laisser échapper un rire alors qu’elle parle des français du sud. C’est une grande extrapolation de ce qu’il a voulu dire. « Not especially in the south but… out of Paris. It’s the capitale. People are stressed, in a rush all time long. It’s affecting personnalities. » C’est sa vision des choses, bien entendu. Il ne prétend donc pas que sa parole soit universelle. « When I moved in Paris, I have to adjust too. I can’t say it was easy at first. But today… Here I Am, as you can see. » Une tentative de lui montrer que tout vient à point à qui sait attendre. Il n’y a aucune fatalité, il faut juste tenir bon et s’acclimater.

« Yes ! Of course. » Il se ferait une joie de les accueillir. « You know… If there’s something in France we can’t decline, it’s food… » Il lui fait un clin d’œil. La gastronomie n’a de secret pour personne, et il ne dit pas cela qu’en temps que cuisinier. « Try to know what they like to eat and I will cook something special. » Non pas que ses menus ne soient pas plus exceptionnels les uns que les autres selon ses clients, mais il a envie d’aider au maximum la jeune femme.

« So… You get paid to post stuff on Facebook… Nice job ! » Il la taquine bien entendu, large sourire aux lèvres. « For an outside eye… » Gabriel n’a pas sa langue dans sa poche, mais il y a des choses pour lesquelles il sait qu’il doit faire attention à comment il le dit. Il profite de devoir tourner à un coin de rue pour chercher ses mots, surtout en anglais ce qui complique la chose. « Do you know if they accepted that you come or if it was imposed on them ? This could explain their reluctance… » Il fait une grimace. « imagine that someone you don't know comes along and questions all your work ? Don’t want to take their side, of course, but I can imagine how difficult it must be for them. » Il espère ne pas froisser la jeune femme. « If a new chef came in my restaurant and tell me that what i am doing is wrong… I don’t think I’ll like him in firt place. »

Tessa elle n’y connaissait pas grand-chose à la France, au parisiens et tout ça. Elle n’entendait que ce qui se disait et ne voyait que ce qu’on lui montrait. Elle se doute bien que Gabriel allait pouvoir lui donner davantage d’informations. Peut-être que cela lui permettrait de mieux s’en sortir. Peut-être qu’elle pourrait mieux s’intégrer que cela mais c’était mal parti elle avait l’impression. « Oh okay it’s everywhere then. The’y don’t take holidays or something else ? » S’ils étaient stressés à ce point, toujours pressés il fallait quand même faire quelque chose non ? elle hoche la tête à ses mots. Elle se sentait un peu moins seule même si ce n’était pas la même chose. « You are lucky because you don’t have the problem with the language. » Il avait dû s’adapter quand même mais sans cette barrière, elle se dit que c’était plus facile.

Elle ne pouvait que remercier Gabriel en tout cas pour être là et pour l’aider. Il n’était pas obligé d’accepter et pourtant. Elle allait lui apporter de la clientèle alors cela aiderait mais ce n’était probablement pas assez pour le remercier. Elle trouverait quelque chose ensuite mais il fallait qu’elle règle son souci pour l’instant. « I will, thank you. Do you prefer one day especially or not ? » Il avait sûrement des réservations de déjà notées et des jours où il aurait probablement moins de disponibilité.

« Hum.. yes I don’t know how to explain. I do other things too. » Elle n’allait pas lui proposer de venir voir son travail car bon, elle avait déjà du mal à se faire apprécier de ses collègues donc. Si la jeune femme commençait à faire venir des inconnus ça n’allait pas le faire. Elle passe une main dans ses cheveu en l’écoutant. Elle comprenait où il voulait en venir et ce qu’il voulait dire. Elle était d’accord et sûrement qu’elle aurait pu réagir de la même façon le cas contraire. « Yes I understand that and I agree with you. I don’t think they knew it much time before so maybe they were surprised. » Elle le suppose mais elle ne pouvait pas l’affirmer avec certitude. Ils ne lui avaient jamais dit ce qu’ils ressentaient réellement mais elle ne s’en était pas informée non plus. « Maybe you have right and I need to wait a little. »

Gabriel se met à rire à la question de Tessa sur les vacances. « Yeah ! Of course they have holidays. » Il ne sait même pas quoi répondre à ça à vrai dire car les choses sont complexes à expliquer. « But… It seems to not be enough. » résume-t-il en quelques mots, avant de confirmer par un hochement de tête les propos de la brune. « On Mondays or Thursdays, we have less clients, maybe. » Mais peu importe le jour, en réalité, il ferait avec.

Un nouveau rire éclate. Bien sûr qu’il se doutait qu’elle ne faisait pas que ça. « I was kidding. » Lui, l’éternel taquin, une chose que sa petite amie a parfois du mal à comprendre d’ailleurs. « Yeah… How do you say : « wait and see ? » Un petit clin d’œil vient s’ajouter et Gabriel profite du fait qu’ils viennent d’arriver au niveau du marché pour inspecter du coin de l’œil les étals. Bien qu’il ait ses petites habitudes et ses commerçants favoris, il a toujours un regard vers une occasion qu’il ne faudrait pas manquer.

« Is it the first time that you come to a market like this ? » De la vision qu’il a de la gastronomie américaine, disons que les petits producteurs n’existent pas vraiment. « I buy almost everything here. » explique-t-il bientôt. « Sometimes it’s a little more expensive than in a supermarket but the taste is better. » Il ne se dit pas une seconde que la conversation pourrait ennuyer la jeune femme. « Is there any french specialties that you want to try ? »