Face à son bureau, Diana gonfle ses joues. Puis, elle soupire avant de recommencer. Il est insupportable pour elle de rester à l'intérieur alors que la fenêtre qui se trouve juste sous son nez lui dresse un panorama magnifique. Les jardins sont beaux et bien agencés. L'herbe est verte, les arbres sont encore majestueux et le soleil de la fin de l'été brille encore, si bien qu'elle peut en sentir la chaleur, même à l'intérieur.
Si seulement elle n'était pas l'aînée, elle n'aurait pas tous ces travaux, ces règles de bienséance et tout le reste à faire et connaitre sur le bout des doigts... Il est agréable d'avoir une vie de princesse mais lorsque l'on est une future reine, les devoirs sont bien trop nombreux et rapidement pesants. Elle ne peut même pas choisir elle-même son futur époux, ce qui l'enrage d'autant plus. Elle se sent comme un oiseau privé de liberté, sans ailes. Elles ont été coupées.

Diana pose sa plume et balaye discrètement la pièce du regard. Elle est seule, complètement. Il ne faut pas attendre plus de quinze petites secondes pour qu'une idée lui traverse l'esprit. Après avoir passé un été majoritairement enfermée, elle peut bien se permettre de prendre l'air. Après tout ! Qui le saura ? Tout le monde a l'air de s'occuper de ses affaires, même son cousin qui reste pourtant souvent dans les parages. Elle voit ça comme un signe divin.

Sans attendre plus longtemps, Campbell attrape sa robe d'une main afin de légèrement la relever et ainsi, mieux filer en douce. De l'autre, elle prend son livre pour se donner bonne conscience.
Quelques couloirs à traverser, des escaliers à descendre et une porte à franchir : voici un léger avant-goût de liberté. Dès qu'elle pose le pied dehors, elle se sent mieux respirer et prend une grande bouffée d'air vivifiante.

Campbell commence son périple vers la fontaine, glisse le bout de ses doigts dans l'eau clair et continue vers les jardins. Quand elle était petite, elle aimait grimper aux arbres. Qu'est-ce qui pourrait l'empêcher de recommencer ? Ce n'est pas une attitude de princesse ni même d'une fille de bonne famille. Quelle honte !

Elle pince ses lippes, hésitante face à ce grand pin. Si elle se fait attraper, elle signe son arrêt de mort, sûrement le prix de la liberté. Pire encore, si elle ose monter. Pourtant, elle pose le bouquin au sol et agrippe l'écorce à l'aide de ses deux mains. Il ne manque que le plus dur, avoir le courage de jouer avec les règles et les principes aussi effrontément. Ce n'est pas qu'elle a une très forte envie d'escalader, c'est plus pour se prouver qu'elle est encore libre de certains de ses choix. À cette pensée, elle y pose désormais un pied. Diana n'a plus envie de reculer et commence à grimper dans le but d'atteindre une branche pour s'y assoir et profiter de la vue...

Stefan avait observé le manège de la jeune femme. La princesse, se dit-il de manière agacée. Il l’observait avec ses grands yeux curieux et sa bouche pincé. Elle allait faire une bêtise. C’était une certitude, et bien qu’il ne travaille avec elle depuis peu, il le savait. Il travaillait pour l’oncle de cette princesse, et il n’avait jamais cru pouvoir approcher la royauté d’aussi prêt. Son chapeau sur la tête, il l’observa encore en délaissant le livre qu’il était en train de lire.

Un livre ? Ce n’était pas seulement un livre pour lui, c’était un rêve. Le journal de bord d’un capitaine qui lui avait été offert. Tous les journaux de bord n’étaient pas importants. La plupart finissait dans l’océan, grappillait par les poissons. Celui-ci avait survécu à un naufrage et son père lui avait ramené. Il y avait quelque chose de pratiquement magique à lire les mots couchés sur le papier d’un homme travaillant au milieu de la mer. Il rêverait d’avoir le droit à un journal de bord d’un capitaine pirate, ou d’un matelot simplement là par erreur. Une histoire simple. Il n'avait pas besoin de beau discours, de longes phrases alambiqués. Il aimait la simplicité des journaux de bord, leur manière de dire ce qu’on ne pense jamais devoir exprimer.

La peur, la crainte, la faim, le courage, le levé de soleil un jour de tempête, toutes les petites choses qui rendent la navigation difficile mais si importante. Et il devait délaisser ce moment de tranquillité, qu’il avait le droit de prendre deux fois par jour pendant quelques minutes, pour s’occuper d’une éffrontée ? Il n’en avait aucune envie.

Cependant, il était évident que s’il ne décidait pas de faire quelque chose, et que quelqu’un observait la culotte de la gente dame, cela risquerait de faire crier. Il se releva doucement et s’approcha de l’arbre. De là où était la jeune femme, elle ne devait pas l’avoir vu, caché qu’il avait été par les rosiers. Il s’avança pour ramasser le livre et le mettre par-dessus le sien.

- Puis je proposer à votre Majesté de descendre de son perchoir ? Dit-il de l’air guindé qu’on lui avait demandé d’avoir pour toutes les situations où la noblesse était sujet.

Après tout, pourquoi n’avait-elle pas le droit de monter sur cet arbre ? Il semblait assez solide pour être utiliser pour grimper. Il se mit juste sous elle, au cas où elle tomberait, il pourrait la rattraper…. Bien que cela l’obligerait à jeter ses livres sur le sol et ça ne lui plaisait pas. Il décida de les reposer sur un coin pour protéger les ouvrages.

- De préférence avant que sa dame de compagnie ne surprenne cette action et en tombe à la renverse, reprit-il en cachant un sourire imaginant la femme tombé dans les pommes.

CADEAU :