Réajustement de ta cravate verte et argent, symbolisé par ce serpent significatif, geste répété maintes fois, comme une habitude qui ne s'est pas perdue. Tu inspires, te regardant une dernière fois dans le miroir de l'entrée, nerveux. Tu serres les dents, entendant cette maudite horloge faire ton tic tac incessant, signe de l'avancement du temps inébranlable. Tu soupires, regardant l'heure. Tu n'aimes pas ce que tu vois. Toi qui déteste être en retard, te voilà à attendre ta moitié. Tu t'approches de l'escalier, visage vers l'étage. Une inspiration. Deux. Tu portes ta voix, pour être certains que ton interlocuteur puisse t'entendre.

- Ollie! Par Merlin et Salazar, dépêche toi! Nous allons finir par être en retard!

Tu te pinces le nez, entendant des pas à l'étage. Au moins, il t'a effectivement entendu, n'ayant pas répondu de suite. Qu'importe. Tu retournes vers l'entrée, faisant les cent pas, la tête baissée. Quelque chose te dérangeait avec l'idée de sortir, participer à cette soirée réunion de la promotion 1994 de Poudlard. Voilà vingt-ans que tu etais diplômé, seize ans que la guerre avait pris fin, que l'un des plus grand mage noir de ce siècle avait péri et pourtant… Pourtant, un poids est encore sur tes épaules. Ce stupide poids de ton nom, ta maison… Tu avais pourtant participé à la défense de l'école, caché sous un voile d'illusion pour que personne ne te reconnaisse…

Mais c'est plus fort que toi… Tu as encore peur. Tu as encore cette peur te rongeant les veines. Après tout, tes parents, tes oncles et tantes étaient de l'autre côté pendant tout ce temps… Et puis, l'idée que tes anciens camarades de classe te voient venir au bras d'un ancien rival ne t'aide guère à te calmer. Ils pourraient s'en prendre à lui. Pas ouvertement, pas physiquement. Mais ils le pourraient. Tu le faisais bien jadis, qu'est-ce qui leur empêcherait cette fois? L'âge? Tu secoues la tête et entend qu'on descend les escaliers. Tu te redresses pour te retourner.

- Ah, enfin! Tu vas me dire ce qui… 

Oh… Tu restes figé un instant. La vision que t'offrait ta moitié semblait sortir d'un rêve tant sa beauté en ressortait. Tu es donc resté là… Interdit… Sourire aux lèvres…

Une mélodie nostalgique encombre actuellement ton esprit, faisant remonter à la surface des souvenirs de tes années d'insouciance à Poudlard tandis que tu agites distraitement ta baguette magique devant le miroir, te conférant pour la énième fois une coiffure différente et oh, cette fois, il semblerait que ce soit la bonne. Les boucles brunes se bousculent un instant sur ton front avant de s'harmoniser dans un fini flou, tout juste artistiquement décoiffé. Au loin, tu entends ton amant s'époumoner pour que tu descendes ne serait-ce qu'une seconde plus tôt et un rire vient caresser le coin de ta bouche. Marcus n'était pas des plus sereins au sujet de cette soirée. Un dernier coup d'oeil à la boucle d'oreille couleur d'émeraude qui orne ton oreille pour honorer le serpentard qui t'attend en bas et tu daignes enfin le rejoindre dans le hall.

"Marcus, parce que tu te contentes d'un rapide coup de baguette avant de partir ne veut pas dire que je dois en faire autant! On n'a pas tous la chance d'être né avec... eh bien, ça!"

Et tu agites subtilement la main vers ce qui fait ton amant tout entier, un sourire au bord de ta bouche. Tu viens le déposer sur la sienne tout en desserrant légèrement la cravate verte et argent qui semblait faire insulte à la tienne, rouge et or. Et finalement, tu te recules pour lui laisser un peu d'air. Après tout, plus qu'une réunion d'anciens élèves, c'était la première fois que vous vous affichiez en 'public' tous les deux. Personne n'était au courant si ça n'était vos familles et si pour toi, être gay avait été très tôt une évidence, Marcus n'était pas de ceux à le crier sur les toits.

"Ca ira ce soir? On n'est pas obligés de leur dire aujourd'hui, si tu es si stressé."

La nature un peu sanguine de Marcus, tu connaissais sur le bout des doigts et contrairement à ce qu'on pouvait penser, ce côté parfois impulsif voire carrément incontrôlable n'était pas pour te déplaire. C'était même sans doute ça qui t'avait éveillé à ton penchant pour le poursuiveur des verts et argents. Mais ce soir, selon les réactions de leurs anciens amis, cela risquait de faire des étincelles.

*Depuis quand le smoking lui va aussi bien?*

Première pensée qui te traverse, qui passe dans ton esprit alors qu’il vient vers toi. Il descend les escaliers avec fluidité, grâce et élégance. Tu te contentes alors de le suivre du regard, sans un mot. Ce n’était pourtant pas la première fois que tu le voyais ainsi. L’avait-il fait exprès pour te faire plaisir ? Simplement se faire beau, sachant qu’il allait revoir de vieux amis ? Tu ne sauras pas la réponse de suite. Tu plisses un peu le regard quand tu essayes de comprendre à quoi il fait allusion en te montrant d’un geste de la main. Tu soupires, main dans les poches de ton pantalon.

- Qu’est-ce que tu...

Question qui ne trouve pas de finalité alors que tu sens ses lèvres sur les tiennes. Le temps de la surprise se fait court, te laissant alors le temps de fermer les yeux pour apprécier ce doux geste d’affection. Tu manques un frisson quand tu sens ses doigts se rapprochant de ton cou. Tu grognes presque un peu trop fort quand tu sens qu’il défait un peu ta cravate. Tu grimaces quand il recule et essaye de nouveau d’arranger ce fichu bout de tissu à tes couleurs alors que tu sens tes joues chauffer. Oliver avait cette fâcheuse tendance à savoir quoi faire pour te faire rougir ou te déstabiliser, te poussant dans tes retranchements que lui seul connaît et pouvoir ainsi affronter chaque jour l'extérieur avec tout l’amour que vous vous portez. Nouveau soupire alors que tu cherches ta chevalière rubis, l’égal de sa boucle d’oreille, que tu places à ton annuaire droit.

- J’en sais rien… De toute façon, ils se poseront bien la question en nous voyant arriver en même temps…

Regard furtif vers ta moitié. Tu reprends une grande inspiration et redresses complètement la tête.

- Quand faut y aller… Balai ou transplanage?

Tu retiens un rire amusé alors qu'il grogne sous ta bouche et te contente de l'observer essayer de serrer à nouveau la cravate directement contre les pulsations de sa carotide tout en regrettant qu'il se refuse à avoir l'air même un poil négligé. Marcus était tellement plus sexy lorsqu'il était légèrement débraillé.

"Si tu es mal à l'aise ou que tu veux rentrer dis le moi! On va transplaner, j'ai pas passé 30 minutes devant le miroir pour tout ruiner en arrivant en balai."

Tu lui adresses un sourire confiant et prend sa main gauche dans la tienne, faisant tinter vos alliances comme pour lui rappeler que quoiqu'il se passe désormais, vous étiez dedans ensemble. La sensation t'agrippe au niveau du nombril et le monde disparaît autour de vous. Tout ce qui existe, pendant un moment, c'est son visage, fier et sauvage, et tout au fond de ses yeux, encore l'étincelle incertaine. Et c'est à ton qu'il revient de l'effacer. Lorsque le monde reprend forme autour de vous, vous êtes juste devant la salle abritant votre réunion.

"Marcus. Les gens qui sont ici sont nos amis. Ils comprendront. Ils savent ce que tu as fait, ils sont heureux de nous voir."

Tu poses une seconde ton front contre le sien avant de tendre une main vers la poignée et de la saisir. Le brouhaha de la réunion vous parvient très clairement quand le battement s'ouvre et tu souris une dernière fois vers Marcus alors que tes lèvres s'articulent autour des mots 'je t'aime' prononcés en silence. Et tu te retournes enfin pour être directement salué par d'anciens camarades. Parmi eux, une tête rousse sort du lot, s'avançant droit sur lui pour le serrer dans ses bras non sans jeter un oeil curieux au grand brun présent dans son dos.

'Oh... Oliver, tu es arrivé en même temps que Flint.'

Un peu ennuyé et ne sachant pas à quel point Marcus était prêt à t'assumer en face de vos amis, tu préfères sourire largement vers le rouquin avant de tenter un regard inquisiteur vers le vert et argent.

Tu lui souris doucement en même temps que tu verrouilles la maison de l’intérieur, d’un coup rapide de baguette, avant de la ranger. Tu oses lâcher un petit rictus quand Oliver te parles du temps passer pour sa coupe de cheveux. Mains gauches unies, bruit des alliances qui tintent en unisson, comme un rappel à ce lien qui vous est gravé dans vos cœurs.

Un instant.

Il suffit alors d’un instant pour que plus rien n’apparaissent autour de vous. Vos regards se croisent et tu vois en lui tout cet amour qu’il te porte depuis le premier jour. La raison qui te pousse à te battre contre toi-même un peu plus à chaque fois.

Clignement des yeux et vous voilà devant la grande porte de la salle abritant cette réunion. Tu sens déjà qu’elle est pleine à travers le bois, qu’il y a sûrement des rires, des verres qui tintent et beaucoup trop de monde. Ton cœur commence alors à s’affoler d’un coup, mille questions te frappant le crâne. Tu manques un sursaut nerveux quand tu sens son front contre le tien alors qu’il essaye de te rassurer. Tu hoches doucement la tête en simple réponse alors qu’il ouvre la porte. Tu serres la mâchoire et n’arrives même pas à lui rendre la déclaration silencieuse qu’il t’offre.

Main dans les poches, tu suis un peu ta moitié comme une ombre, alors qu’il est déjà salué. Tu vois une grande asperge qui s’approche de lui. Le dos qui commence à devenir un peu rond, tu grimaces en entendant ton nom de famille. Tu oses alors un sourire mauvais, digne de toi, gardant tes yeux rivés vers le rouquin. Tu avais déjà un air de mauvais garçon à l’époque, mais là… Les vieilles habitudes et rancoeurs semblent revenir comme si de rien n’était.

- Bonsoir à toi aussi, Weasley.

Tu te souvenais pas à quel point ce maudit préfet de Gryffondor pouvait être un peu arrogant dans son style. Tu te redresses un peu et arrives dans le dos de ton amant, toisant ton interlocuteur.

- Oui, nous sommes arrivés en même temps, cela te pose un problème ?

Bien entendu, tout ne pouvait pas simplement se passer sans accro et Percy, bien haut perché sur ses grands airs, n'était pas du genre à tenir sa langue dans sa poche. Alors c'était naturel, lorsque toi, son meilleur ami, tu avais décidé de te pointer à la même seconde que celui qui avait été votre ennemi juré au fil des années passées à Poudlard, il n'avait simplement pas pu s'empêcher de l'ouvrir bien grand. Et il ne fallait pas compter sur Marcus pour calmer le jeu non plus puisque tu pouvais presque sentir son souffle sur ta nuque alors qu'il venait rétorquer sans se priver. Une seconde, tu retrouves le Marcus de vos années d'études et un frisson vient caresser ta colonne vertébrale, trahi immédiatement par les cheveux de ta nuques hérissés en un instant.

"Merlin, Perce! On n'est pas là pour se chercher des noises. Marcus et moi sommes en effet arrivés en même temps! Pas de quoi en faire un drame."

Tu marchais dans le sens de ton amant, sans un mensonge, mais sans dévoiler complètement la vérité sur votre arrivée simultanée. Pourtant, tu vois les yeux du rouquin s'arrondir sans comprendre jusqu'à ce qu'il l'ouvre de nouveau.

"'Marcus'? Depuis quand vous vous appelez par vos prénoms? "

Il était vrai que d'aussi loin que tu puisses te rappeler, tu avais toujours appelé Flint par son nom en présence de Percy. Par la suite même lorsque vous parliez du poursuiveur tu faisais attention à ne pas utiliser son prénom pour ne pas choquer le rouquin encore trop habitué à vos querelles juvéniles. Mais te retrouver en présence de Marcus dans cette pièce remplie de vos anciens camarades alors que vos alliances mouraient d'envie de hurler votre secret.

"Oui, bah tu sais on est bien forcés de se voir souvent puisqu'on bosse dans le Quidditch tous les deux. Puis on n'a plus quinze ans. N'est-ce pas Marcus?"

Toujours incertain quant à la position que voulait adopter ton amant, tu tentes un nouveau regard vers lui afin qu'il vienne confirmer ou infirmer tes dires. Et face à vous, Percy, lui, ne semblait pas plus convaincu que ça et continuait de vous observer, un sourcil levé.

Tu as la légère… Très légère impression de retourner vingt ans en arrière… Toi, face à Percy Weasley, le regard noir presque prêt à lui jeter une malédiction quelconque, une insulte bien formulée et qui toucherait un point faible. Lui, te toisant avec arrogance, avec un statut d’autorité sans nom. Et Oliver au milieu. La seule personne qui est encore capable de vous empêcher de finir par terre dans une bagarre à la moldue, sans baguette et juste des poings. Il essaye de se mettre au milieu, haussant le ton. Tu recules un peu, laissant ta moitié prendre les devants.

La réaction de surprise de l’ancien préfet lorsque que ton prénom est utilisé vaut de l’or et tu continues de sourire, le narguant presque. Tu essayes de baisser tes épaules, tentant vainement de ne pas redevenir le cauchemar de certains de tes vieux camarades. Tu lâches même un rictus nerveux quant à l’excuse donnée par Oliver. Tu le toises et secoues doucement la tête.

- Et après, c’est moi qui était stressé de venir ? Sérieusement, Ollie ?

Tu te mords la joue intérieure pour ne pas en rajouter, levant ta main droite pour te pincer le nez, prendre une inspiration pour te calmer. Tu te fiches bien pour le moment de montrer à tous ta chevalière rubis, couleur des braves lions. Tu grimaces un peu. À l’époque, les rabaisser était une habitude, un jeu. Là… Tu avais tout sauf l’envie de retrouver tes vieux démons, surtout pas envers l’amour de ta vie.

- Je vais vous laisser vous retrouver avant de faire honneur à ma vieille réputation. Là, j’ai besoin d’un verre… Je te ramène quelque chose ?

Que tu demandes presque trop naturellement à ton âme-sœur. Tu sembles avoir complètement oublié la présence du rouquin à vos côtés. Ou alors tu te forces à l’oublier au risque qu’il finisse avec le nez déformé.

Tu pourrais te sentir mal en voyant l'état pas plus apaisé que ça de Marcus, après tout, peut-être que le serpent aurait préféré que tu avoues être arrivé au même moment parce que vous aviez transplané main dans la main depuis cet appartement dans lequel vous viviez tous les deux. Tu avais sans doute voulu être trop prudent avec les nerfs du vert et argent et ça n'avait vraisemblablement pas réussi. Et pourtant, alors que le rubis de sa chevalière attrape un rayon de lumière et que ton mari te propose de te ramener un verre, un sentiment de fierté gonfle ta poitrine et adoucit ton regard.

"Je veux bien Marc', quelque chose de sans alcool pour moi."

Tu serais tenté de poser ta bouche sur la sienne, même pour un chaste baiser, encore sous le coup de l'émotion de retrouver les travers de jeunesse de ton serpentard tout en sachant que tout était différent maintenant que vous étiez ensemble. Bien sûr, tu n'échappes pas au regard inquisiteur de Percy qui t'assaille de questions au moment même où Marcus n'est plus à portée de voix. Tu essaies tant bien que mal de répondre sans trop en dire.
Alors qu'à quelques mètres de là, au bar, Terence Higgs attendait Marcus, un sourcil arqué entre surprise, curiosité et malice.

"Tiens donc, Marcus... Quelle coïncidence que tu arrives ici exactement au même instant que Wood, hein?"

Dans son ton, pas de moquerie, pas de suffisance, simplement une petite pointe de taquinerie, comme s'il savait. Terence n'était pas idiot, il était de ceux qui avaient un minimum d'instinct et une logique implacable, aussi additionner la chevalière de Marcus, la boucle d'oreille d'Oliver et leur arrivée simultanée était pour lui un jeu d'enfant.

"Il y a quelques années le simple fait de vous trouver dans la même pièce suffisait à lancer le duel du siècle."

Tension qui se calme lentement. Tu souris un peu en coin à la réponse de ton époux, reculant pour aller te diriger vers le bar. C’est lorsque tu te retournes que tu fais un grand sourire satisfait. Tu as cette douce victoire dans le regard, ayant l’impression d’entendre la belette rousse hurler "Ollie ? Il vient de t’appeler Ollie ? Oliver, je veux bien, mais Ollie ?!". Enfin, le temps de respirer de nouveau, te calmer, tu regardes le barmaid et souffle doucement.

- Un jus de citrouille et … un Pur Feu...

Tu avais hésité un instant, mais vu le début d’ambiance de la fête, autant prendre un whisky assez fort pour tes nerfs. Nouveau pincement de nez avant d’entendre une voix plus que familière. Tu as un sourire un peu sincère en comprenant la pique qu’il venait de lancer. Tu te retournes pour croiser le regard du blond, sachant très bien à quoi il fait allusion. Il a longtemps été l’un des témoins de vos piques, vos batailles de regard et vos joutes verbales hors ou sur le terrain de Quidditch.

- Et durant ces mêmes années, je t’aurais planté la tête dans le comptoir, rien que pour avoir prononcé son nom en provocation.

Tu rigoles un peu et te tournes pour de bon pour tapoter l’épaule de ton ancien camarade de classe en guise de salutation.

- Je suis content aussi de te voir, mon ami. Viens, allons parler au calme, avant que je finisse par exploser pour de bon...

Que tu lui dis avant de reculer, prendre les deux verres et lui fait un geste de la tête pour qu’il te suive. Le temps de repérer de nouveau la tête du lion pour aller sur sa droite. Sans un mot, sans un regard pour son interlocuteur, tu lui tends son verre de ta main gauche et la positionnes ensuite sur ses reins avant de lui dire à l’oreille :

- Je suis sur un des balcons dehors avec Terrence, si tu me cherches. Donc ne panique pas.

Nouveau sourire un peu mauvais et satisfait vers l’ancien préfet, un je t’aime caché dans le regard pour ta moitié avant de t’éloigner, passant ta main dans son dos, comme une habitude, une promesse. Tu inspires doucement en sortant, sentant la fraîcheur du soir sur ta peau et va t’adosser à l’une des rambardes du balcon en soupirant avant de te reconcentrer sur l’ancien attrapeur de ta maison, prenant une gorgée de ton verre.

- Et toi alors ? Depuis le temps ? Toujours avec ta brunette de Serdaigle?