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LE TEMPS D'UN RP

The Anuirean Covenant (feat Jo')

Jo'
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Jo'
Dim 2 Avr - 18:10
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Mélampe Hildegarde Gertrud
de Lanasthël

J'ai 24 ans et je vis où je peux, dans l'Anuire. Dans la vie, je suis fille aînée d'Aymeric Mosse Gawen de Lanasthël, Roi d'Anuire décédé d'une crise cardiaque et je m'en sors bannie du Royaume puisque j'ai convoité le trône.

Valla (Diablo) (c) Kyrie

"Mélampe. Prends garde de ta rationalité."

Elle prit acte de ces mots en emmaillottant un jarret de sanglier, serrant le lin sur la peau d'une fermeté soucieuse. Elle se trouvait à la veille de manoeuvres politiques capitales non seulement pour le coup d'Etat, mais aussi pour le Royaume dont elle hériterait, et craignait de voir son cap chanceler dans la nuance. Les directives de son père avaient été des moules prêts-à-penser qui lui conféraient selon elle une légitimité, et donc une assurance; d'autre part, elle avait un infini respect pour les capacités de leadership de Malvo qui s'inscrivaient pourtant profondément dans l'idéologie et la foi, boussoles qu'elle s'était refusée à frôler.

Elle remplissait les besaces de tout ce qui avait été laissé au camp et releva rapidement les collets alentours. Les bâtisseurs d'abris, quêteurs de viriale et rassembleurs de vivres eurent fini peu ou proue au même moment. Tous se réunirent et s'installèrent - les grands enfants et Nalin alterneraient entre la marche et les traîneaux pour s'économiser, Mina et le doyen resteraient nécessairement allongés tout le long de la traversée, et enfin les petits et nourrissons seraient lovés eux aussi loin de l'épuisement. Emmitouflés entre deux couches de fourrure, le buste confortablement remonté sur les paquetages, les deux convalescents avaient l'avantage de vivre un trajet aussi commode que possible tout en prévenant aux vivres du groupe de chuter des luges. Les enfants se répartirent par affinités et tranches de poids et en une heure seulement le groupe fut prêt à saigner les dunes neigeuses. Le soleil dardait déjà lorsque leurs silhouettes se découpaient dans le ciel bleu, Malvo ouvrant la voie en créant une traînée dans laquelle Mélampe et Ulwazi à sa suite purent plus facilement y faire glisser leur propre fardeau.

Spoiler:

Chacun priait l'Alun de guider leurs pas et une condensation fumeuse s'échappait de la bouche des hommes de trait, les dos grimaçant leur posture retorse et prolongée. Mélampe tolérait peu de pauses pourtant constamment réclamées par Ulwazi, et pour cause - il fallait tenir la distance avec les raksis qui, ne perdant jamais leur proie, ne peuvent pas la pourchasser. Elle voulait quitter leur menace le plus rapidement possible, car alors la fatigue et le flegme pourraient les engourdir un peu une fois les hauteurs abandonnées, mais leur seraient fatal dans le linceul des neiges. Elle aussi pourtant sentait ses omoplates prendre feu entre ses bras écartelés par le poids de la luge derrière elle, elle aussi croyait voir rompre ses chevilles de devoir les contorsionner dans la poudreuse, elle aussi souffrait du souci qui lancinait sa tête. Qu'allaient-ils faire des Palans ? Comment expliquer à Holt, et à sa tante ? Comment serait-elle reçue ? Et ces non-humains avec elle ?

L'après-midi déclinante étira des rayons grenats dans le ciel, et l'héritière fut confrontée à la réalité d'un voyage avec des vulnérables : il arrivait un moment où les malades et les enfants ne pouvaient plus supporter le chahut de la route, quoiqu'ils ne furent pas ceux ruinant leur échine à faire progresser la caravane. La patience n'est pas la vertu des plus jeunes et il fallut bientôt poser campement ; ironiquement, la princesse cachait mal sa propre agitation de vouloir repartir bientôt. Elle était pourtant lucide - tout le monde était épuisé, choqué et malheureux et il était vital qu'ils passent une saine nuit.

Le feu leur fit à tous du bien et les abris anticipés par Malvo n'étaient pas de trop face aux courants glacés qui s'élevaient dans le soir. Si les palans purent faire montre de leur capacités à endurer le froid, cumulant leur chaleur en se serrant les uns aux autres, ce n'était pas le cas des humains qui en souffrirent beaucoup ce soir-là. Le doyen, auprès duquel Ulwazi redoublait de soins, semblait bien plus agité que dans le confort de sa tente où on le croyait déjà dans le repos éternel. Ses yeux s'ouvraient par moment de concert avec sa bouche, comme frappé soudainement par une surprise indicible, et il donnait l'air d'expectorer quelque chose qu'il n'arrivait pas à sortir. Il refusait toute nourriture et il témoignait enfin d'une quelconque présence d'esprit depuis ce qui paraissait être un millénaire. Mais cette attitude plus alerte n'était pas pour rassurer Ulwazi, ce que personne ne releva - le déclin du vieillard était évident et nul ne voulait donner de faux espoirs, ou de grain à moudre aux angoisses de son descendant.

Les réfugiés faisaient vivre leur communauté sous les abris de fortune et Nalin, Malvo et Mélampe représentaient un genre de Conseil restreint plus affairé autour du feu.

"Il est temps que je sois entièrement honnête avec toi, Nalin, puisque tu places suffisamment d'espoir en nous pour vous mettre en sécurité." Elle attisa le feu d'une brindille, le regard concentré sur la danse du foyer. "Le monde des haks est partagé en d'immenses Royaumes dont tu ne peux même pas imaginer l'ampleur. Ces Royaumes ont tous une personne à leur tête, et cette responsabilité se partage de père ... en fils, normalement." Une moue contrariée. "Il se trouve que par un concours de circonstances, je devais prendre la gouvernance du Royaume dans lequel je suis née. Mais des personnes mal intentionnées en ont décidé autrement." Elle ne précisa rien sur les circonstances de mort de son père - Nalin avait suffisamment d'informations à emmagasiner. "Aujourd'hui je compte me venger et si nous sommes passés par tes montagnes, c'est pour rejoindre des alliés potentiels."

Elle prit le temps de soupeser ses prochaines paroles. "Si je parviens à récupérer mon trône, alors tu peux compter sur moi pour trouver un espace où les Palans pourront vivre, dussé-je les faire protéger. Dans le cas contraire ..." Elle contempla un instant ses perspectives d'échec, sans totalement y plonger. "... Eh bien, les humains ne seront pas tendres avec vous et vous saigneront probablement jusqu'au dernier, mais vous aurez eu un peu de sursis."


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"Le plus clair de mon temps, je le passe à l'obscurcir" - Boris Vian
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Houmous
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Houmous
Ven 14 Avr - 12:34
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Malvo
J'ai 39 ans et je vis en Anuire. Dans la vie, je suis au service de la Flamme et je m'en sors bien.

Je suis un protecteur qui trouve du sens.


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Malvo trainait le traineau à l’avant du convoi. Il était logique que, malgré la perte de son bras, on compte plus sur sa force pour forcer le passage dans la poudreuse et la tasser. Ainsi qu’il avait toujours fait, il mordait sur sa chique sans se plaindre. Chaque pas étant déjà une victoire, la douleur du froid et de l’effort complétait parfaitement ce contrat qu’il passait avec lui-même et avec la Flamme. A mesure que le convoi ralentissait l’exercice devint plus exigeant. En avançant vite, on avait le plaisir relatif de pouvoir compter sur la force du pas précédent pour faciliter le suivant. Et de ce pas, on tirait l’élan d’en faire un autre de plus. Les pas entrainaient les pas et les monts se succédaient patiemment au gré de chaque avancée, si minime pouvait-elle être. Pour Malvo, c’était ces moments d’introspection qui pouvaient être encore les plus dangereux. Son esprit vaquait au gré de ses convictions. Ces dernières, à la manière des premières neiges, n’avaient pas encore eu le temps de cristalliser complètement dans ses pensées. Parfois, il en allait même jusqu’à questionner chacun de ses vœux et chacun des choix qui l’avaient porté jusqu’en cet instant précis. Et puis, un pas mal avisé manquait de le renverser et alors la corvée devint bénédiction, accaparant son attention. Il sentait sur son épaule la main douce de ses errements le guider et alors il ne doutait plus autant et il faisait un pas de plus.

 
Lorsqu’enfin il fut question de poser le camp dans une gorge un peu abritée du vent, il ne ralentit pas le rythme. Le froid fait ralentir jusqu’à l’arrêt donc le meilleur moyen de le combattre reste encore de ne pas ralentir dans un premier temps. Cette leçon, il l’avait déjà reçue en campagne, par le passé, mais le temps qu’il avait passé seul dans une crevasse à manquer de mourir le lui avait rappelé vivement. Quand Ulwazi s’y reprenait à plusieurs fois pour planter le clou dans la glace et tendre la tente de l’abri, Malvo se contentait de les enfoncer en poussant de sa main dans la neige. Les callosités de ses mains se déchiraient à cause des engelures et des frottements mais les petits attendaient de pouvoir se reposer à l’abri et au sec alors il fit en sorte de cesser d’y penser.
 
Les tâches avaient été préparées et réparties à l’avance alors, comme prévu, il n’eut qu’à s’asseoir au plus près du feu une fois que tout le convoi se trouva installé. La chaleur chassait des raideurs si omniprésentes et lasses que Malvo se rendait compte plus de leur disparition que de leur existence passée. Dans un grand soupir, il se laissa aller, assis dans la neige ramollie. Le sang qui coulait légèrement accéléra son flux avec le retour à une décontraction. Nalin le remarqua et, sans même que qui ce soit n’ait le temps de le dire, s’affaira à soigner la blessure tandis qu’elle écoutait patiemment les révélations de son invitée devenue hôte.
 
- Pourquoi les mâles dirigent-ils les haks ? Les femelles ne sont-elles pas aptes à lire les mystères dans vos basses terres ? se risqua-t-elle finalement, surprise de voir donc un homme énorme comme Malvo se laisser diriger par Mélampe.
 
Dans un échange de regards, les deux étrangers commençaient à se jauger l’un l’autre. Nalin voulait montrer la reconnaissance qu’elle avait pour cet inconnu qui sauvait bien la moitié des petits de sa tribu sans sembler rien attendre en retour. La méfiance qu’elle avait s’était bien affaiblie et la laissait en proie à une hésitation. L’idée la plus proche de ce qu’elle ressentait était les bénédictions qu’elle apportait à l’animal qu’on abat et qui transmet sa vie à la tribu pour la rendre plus forte. L’idée qu’il soit un hak et ses intentions étaient, pour leur part, encore des idées trop nouvelles et nébuleuses pour qu’elle parvienne à les fixer avec aisance.
 
Malvo, lui, avait du respect pour cette créature qu’il découvrait à peine. Elle était douée de raison et il était aisé de voir qu’elle portait le feu de la même manière que tous les autres Hommes. Certainement était-elle différente dans sa manière de s’exprimer et de raisonner mais il n’y avait qu’un pas à ses yeux pour la considérer comme faisant partie de la communauté qu’il avait juré de protéger de sa vie. Le dilemme n’en était pas un pour lui : il devait les mener à bon port et il se porterait garant d’eux auprès de qui voudrait encore reconnaitre son statut et son autorité de paladin. Un royaume aussi éloigné que celui du roi Holt ne serait certainement pas encore averti de sa défection et le seul insigne qu’on cherchait pour prouver l’appartenance à l’Eglise pouvait être les épées du Temple. Il pourrait certainement tirer partie de cet état de fait pour influer dans le bon sens.
 
- Mélampe est une sire de confiance, appuya Malvo à l’issue du discours qu’elle avait prodigué. Si elle certifie qu’elle trouvera le moyen de vous offrir une vie nouvelle, c’est qu’elle le fera certainement. Les Palans feront partie de ses sujets mais de la même manière que tous ceux qui portent le feu en eux se doivent de reconnaitre l’autorité des Seigneurs. Mais certainement, vous aurez le temps de voir quelle forme cette coopération prendra en temps et en heures ! Pour l’heure, il nous faut d’abord prendre l’avantage dans la succession pour pouvoir nous offrir une chance face aux ténèbres qui s’étendent. Les raksis ne sont qu’une des nombreuses formes qu’elles peuvent adopter. Chacun sera la proie de ses propres démons sous peu… sauf si on parvient à organiser nos défenses.
 
Pour Nalin, l’idée même de voir une tribu s’entretuer sur un sujet si futile que la domination n’avait aucun sens. Si elle n’avait pas été la prêtresse de son peuple, jamais elle n’aurait pris la peine de se rebeller pour le devenir. Et il lui parut même évident qu’aucun des Palans n’aurait eu cette idée non plus… Alors voir les haks s’entretuer quand ils savaient que des horreurs similaires aux raksis approchées lui parut plus insensée encore. Elle ne prit pas pour autant la peine de questionner plus avant le reste du petit concile et se contenta d’achever un pansement garni de plantes médicinales concassées à la mâchoire.


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"Pourquoi les mâles dirigent-ils les haks ? Les femelles ne sont-elles pas aptes à lire les mystères dans vos basses terres ?"

La question était aussi ingénue que brûlante, et Mélampe sembla en accuser le coup. S'il était vrai qu'elle s'était toujours sentie plus légitime à gouverner que nombreux hommes qu'elle avait vus accéder à des postes de décision, elle n'avait jamais remis en question le paradigme salique de la transmission masculine. En réalité, si elle jugeait des femmes comme elle-même ou Vergile pertinentes à la tête d'une Seigneurie, c'était qu'elle les estimait supérieures à l'idée par défaut qu'elle se faisait des femmes de la cour, en particulier de celles comme sa mère ou sa tante, qui étaient plus diplomatiques que martiales, et plus portées sur les mariages arrangés que sur les alliances commerciales. Le regard externe de Nalin lui fit reconsidérer que la diplomatie et les mariages étaient leurs propres forme de gouvernance, et qu'il était proprement irrationnel qu'elle réserve à ses homonyme un traitement qu'elle exécrait pour elle-même, et qui lui venait généralement des hommes. Elle déglutit, embarrassée par ce que la question lui élevait.

"Disons que les mystères des basses terres ont tous été écrits par des mâles, alors forcément ..."

Elle n'était pas satisfaite de sa réponse et sentait ses socles chancelants. Etaient-ce la fatigue, la maigreur et le froid qui entamaient ses convictions roides auxquelles elle était parvenue à se cramponner jusqu'ici ? Etait-ce la dépossession de toutes ses affaires par les Palans ? Etait-ce d'avoir eu peur de perdre Malvo ? Elle écouta distraitement la confiance ferme du paladin en elle et ses propos au sujet des créatures du Chaos. Cet affrontement, qui serait décisif non pas seulement pour Anuire mais pour la race humaine, devrait davantage la préoccuper - or elle sentait bien ses lacunes spirituelles et martiales en la matière. Sa crispation autour des affaires des Hommes, de la vengeance, de son accession au trône tendait à trop l'éloigner de ces questions pourtant plus vitales encore. Elle mettait en doute son discernement ; décidément, le blizzard de ces montagnes n'ébranlait pas que le corps.

Sa crise de confiance la précipita dans son couchage ce soir là, mais elle ne parvint pas à dormir.

*

Dans un demi somme des insomnies abattues, Mélampe fut sortie de sa torpeur par une sensation étrange auprès d'elle. Elle s'effaroucha prête à poignarder ce qui se trémoussait sous sa couverture mais en adressant un regard à l'intrus, elle ne vit que deux perles tout sourire s'élever vers elle. C'était un enfant Palan qui avait jugé bon de se lover contre elle puisque les turbulences des autres petits l'empêchaient de dormir. Manifestement, s'il avait déménagé pour mieux se reposer, l'excursion l'avait tout à fait sorti de son sommeil.

"Tu m'as fais peur." Le petit garçon se mit à rire, elle lui mima le silence puisque le reste du camp était encore dans la léthargie de la somnolence. "C'est quoi déjà ton nom ?" L'hostilité naturelle des palans envers elle, et son désintérêt pour la jeune génération par ailleurs, lui rendaient nombre de ses compagnons de route totalement étrangers malgré la semaine qu'elle avait passé parmi eux. "Toki, lui répondit-il."

Elle tenta de s'étirer pour défaire son corps des courbatures de la veille, mais le froid lui refusait de sortir le moindre membre de la peau qui les recouvrait - il était vrai qu'à deux, la chaleur se gardait mieux.

"Qu'est-ce que tu dirais qu'on commence, en silence (elle insista sur ce terme), à préparer le réveil de tout le monde ?
- Ouais !
s'exclama-t-il
- Chht !
- ... ouais,
acquiesca-t-il plus bas."

Ils sortirent de leur couchage et Mélampe enveloppa Toki dans la fourrure, s'astreignant à subir le froid de plein fouet, mais se hâtant de s'affairer à l'éveil du feu pour redonner vie à la troupe. Le petit quant à lui se rendait utile à la manière des enfants : par l'inutilité de déplacer les choses en se donnant l'air de les organiser, alignant les brindilles de bois toutes dans le même sens dans leur besace, puis les exposant avec fierté à sa comparse.

Une fois le brasier suffisamment amorcé pour être autonome, l'héritière détacha deux lapins qu'elle avait relevés la veille à l'une des luges. Elle pinça la peau de la nuque du premier, y glissa la lame d'un couteau de chasse, et fit une belle entaille sur toute la largeur cervicale. Elle n'avait plus qu'à se saisir de la toison et tira dessus un coup sec, la détachant nettement de la chair qui perlait sans saigner. Elle fractura du pied l'articulation des pattes et les retira du reste du corps, puis cingla l'abdomen en renversant l'animal tête en bas, laissant chuter les tripes viciées dans la blancheur de la neige. Elle enfonça sa main sans plus de rituels dans le corps et retira sous les côtes les poumons, le coeur et le foie qu'elle réunit dans un baquet en corne. Son poignet changea d'angle et les reins du lièvre virent rejoindre ses viscères au sol. Elle plongea la main dans la neige pour se débarrasser des caillots avant d'empoigner à nouveau son couteau pour détacher la chair tendre de la carcasse - les flancs, les cuisses - puis les embrocha. Elle répéta l'opération avec l'autre animal.

Dans le baquet de corne, elle fit fondre de la neige et prépara les abats en court-bouillon au-dessus du feu. Du même coup, elle installa la broche avec la chair. Quelques oignons sauvages amenés vaillamment par Toki firent semblant de donner du goût à l'ensemble. Plus animal, habitué à la chair crue préservée dans la morsure des glaces, le petit garçon prit son déjeuner avant chacun en vidant les têtes du gibier avec régal. Satisfait, incapable de contenir plus longtemps son impatience, il alla réveiller quelques camarades. Très vite, la rumeur se propagea entre les endormis et avec elle la chaleur du feu puis les exhalaisons de nourriture. Le camp s'anima tranquillement sur la fatigue de la princesse qui se refusait à questionner comment elle réussirait encore à tracter toute la journée, car se poser la question, c'était se donner le choix d'abdiquer un peu.


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Houmous
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Malvo
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Malvo remarqua bien vite sous sa minuscule pelisse que d’avoir perdu un bras lui permettait de moins subir le froid. Chaque part de son corps en contact avec l’extérieur se congelait doucement aux quatre vents. Alors forcément, le fait d’avoir moins de parties du corps éludait ce problème. Malgré lui, il ne parvint pas à trouver le repos. L’inquiétude de garder le camp sans surveillance lui dictait de garder l’œil ouvert pour capter le moindre mouvement suspect dans cette nuit glaciale. Il savait que les créatures du chaos primordiale ne vivaient pas les éléments de la même manière que les enfants de la Flamme mais il ne pouvait s’empêcher de se demander s’ils subissaient le froid d’une manière ou d’une autre. Dans son expérience de foi où il vit de ses yeux le Brasier des Âmes, il avait ressenti cette absence de froid. Peut-être les créatures du chaos ne ressentaient que cette vague sensation de flottement et de glissement ainsi qu’il l’avait vécu ? Et puis finalement, autant les douleurs que les plaisirs rappelaient aux enfants de la Flamme qu’ils étaient, eux, réellement vivants.

 
Ce qu’il y avait de bien avec les réflexions et la philosophie ou la théologie, c’est que le temps passe plus vite lorsqu’on s’y adonne. Tromper son esprit et accueillir la douleur de chaque instant lui permettaient de s’acquitter des tâches les plus rudes de son rôle de paladin depuis le début. Alors, il n’y avait pas de raison pour que cela change. Les nuits sur les montagnes de l’Alun étaient courtes en plus, alors l’effort à fournir s’avérait surprenamment faible pour traverser le mur qui séparait le crépuscule de l’aube. Aussi, lorsque Mélampe se leva pour commencer à préparer le déjeuner avec l’un des petits palans, Malvo s’autorisa enfin à se reposer quelques instants. De toutes manières, il comptait laisser la nourriture à ceux qui en avaient le plus besoin. Il se retourna vaguement dans sa couche et ferma complètement les yeux.
 
Une douce odeur le réveilla alors qu’une main lui bougeait un peu l’épaule. Il ouvrit les yeux aussitôt, réveillé presque en sursaut. Comptant sur ses compagnons pour couvrir ses arrières, il s’était pleinement laissé aller à un sommeil profond. Ulwazi tenait une écuelle devant lui dans laquelle bouillonnait un ragoût d’abats. Malvo s’éveilla avec un sourire et se redressa rapidement. Il ne pouvait se permettre de faire patienter le groupe.
 
« Merci, Ulwazi », fit-il avec une voix à demi-éveillée. Il constata que l’ensemble du groupe était en train de finir de préparer le camp à être levé. Ils l’avaient certainement laissé se reposer le temps de prendre le repas. L’une des choses qui le frappèrent le plus alors qu’il était en train de prendre sa première cuillérée du ragout, c’était que le vieux doyen des Palans-palans le dévorait du regard, ou plutôt l’assiette. Il bavait légèrement d’un coin de ses lèvres, ce qui formait doucement mais surement une écume glacée sur sa joue. Malvo se leva et s’approcha du traineau sur lequel le vieillard était installé pour venir s’accroupir face à lui en posant le bol à son côté. Il prit une petite cuillérée et la mit doucement dans la bouche du vieillard qui ouvrait des lèvres tremblantes. La chaleur de la dernière goutte qui quittait son gosier fit fondre la glace sur son visage. Lentement, il déglutit, à la manière d’un effort important. Le paladin sourit au doyen avant de lui donner à nouveau à manger. Et bientôt, il sentit peser sur lui les regards. Le prêtre sourit de plus belle, allant jusqu’à un pouffement attendri.
 
Lorsqu’enfin, l’assiette se termina, il se releva et la nettoya avec un peu de neige. Alors qu’il la rangeait, il croisa une Mélampe interrogative et franchement inquiète qu’il ait donné sa part pour un grabataire qui pourrait ne pas survivre à la route. Le paladin s’en amusa alors :

- Mélampe, n’oublie pas qu’un arbre qui laisse pourrir ses racines regarde ses branches mourir, déclara-t-il alors, parfaitement sérieux. Chaque goutte que ce pauvre homme a bu a nourri mon âme et renforcé ma Flamme. Tu ne comprends pas parce que tu n’as pas été touchée par la Grâce, mais le jour où cela t’arrivera, tu comprendras, acheva-t-il, le sourire d’un bienheureux collé aux joues.
 

Malvo fit sa part en portant quelques toiles alourdies par l’humidité pour les charger sur les traineaux avant de se saisir de celui qui débutait la file. Il prit le temps de s’assurer que tout le monde s’était bien installé avant de reprendre son labeur, avec un plus grand plaisir que la veille encore. Chaque pas, plus douloureux pour ses jambes engourdies, s’avérait comme une libération de toute culpabilité. Le vent qui frappait ses vêtements ne le ralentissait pas non plus. Il jugea qu’à quelques jours de marche de plus, à cette cadence, ils arriveraient au bout des hauts plateaux de l’Alun et rejoindraient la voie royale qui mènerait au palais du Roi Holt. D’autres épreuves les attendraient mais son sentiment s’était considérablement amélioré. Il avait l’intime conviction qu’un grand péril s’était ôté de leurs épaules.


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Mélampe Hildegarde Gertrud
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Pour les mêmes raisons qui faisaient qu'elle lui confierait son âme, Malvo l'irritait sagacement. Il avait beau respirer la Flamme et sa lueur doucereuse, il ne faisait fondre ni la neige ni la douleur autour de lui, et qu'il partage son repas avec celui dont tous attendaient le trépas (qu'ils le redoutent comme Ulwazi ou s'en impatientent ainsi que Mélampe) avait le prodige de tendre sévèrement la princesse. Le sourire accompli qui perçait le givre de la barbe du paladin, et qu'elle prenait pour un rictus ahuri, ajoutait à la vexation de sa réplique - comment pouvait-elle comprendre donc, elle qui n'avait pas été touchée par la Grâce ? Epuisée, ébranlée dans ses valeurs depuis des jours, et incertaine quant à son avenir, il lui semblait que nourrir les mourants se tenait bien loin de ses préoccupations, tout comme chercher le bonheur d'une flamme pieuse au milieu des neiges. Elle haussa les yeux au ciel ainsi qu'une adolescente embarrassée par son père et prit son poste en fin de caravane pour assurer les arrières de l'anxieux Ulwazi.

*

Deux jours se succédèrent ainsi, dans l'effort et le vent. Heureusement, à mesure qu'ils progressaient, le relief tendait à s'adoucir devant leurs pas et les luges à glisser d'elles-mêmes ; avec lui, les températures remontaient, et la deuxième nuit fut de repos pour tous. Beaucoup des Palans réalisaient seulement, sortis de la torpeur de leur déchirure, ce qu'ils avaient perdu dans l'attaque des raksis. Mais le deuil, et l'anticipation d'un après riche de terres nouvelles, occupaient tout l'espace : personne ne s'attendait plus à voir les monstres à leurs trousses. Ne se s'étaient-ils d'ailleurs pas rassasiés ? Les survivants ne pouvaient-ils pas prétendre à un peu de calme ? L'abnégation enjouée de Malvo contaminait les troupes et Mina put assez rapidement marcher un peu, ou du moins, s'asseoir malgré la plaie. Elle trouvait son utilité dans l'entretien du feu et la préparation des repas. Mélampe restait mutique et renfermée. Elle pensait à l'après.

Une dernière nuit froide les attendaient avant qu'ils ne rejoignent la descente du plateau et touchent une altitude tempérée. Les petits s'étaient habitué mais le doyen vivait sur ses réserves, semblait-il, depuis qu'ils étaient partis. Tout le monde croyait qu'il mourrait d'une minute à l'autre, mais puisqu'il survivait chaque minute supplémentaire malgré cet état léthargique, chacun jugeait ainsi qu'il pourrait continuer à vivoter pour six millénaires de plus. Pis que le froid et le vent, il paraissait souffrir intensément de la sécheresse de l'air à laquelle l'humidité des tentures ne changeait rien. Même l'eau neigeuse qui traversait les vêtements et les articulations avait l'air d'assécher davantage les pores et le souffle.

Parfois, le vieillard toussait à s'en faire chuter vers l'avant, plié sur lui-même, et ses yeux avaient alors l'air possédés. Il semblait que plus son corps était malmené, plus son âme cherchait à s'exprimer - dans la chaleur humide de sa tente, était totalement éteint. Mais d'une vigueur ante-mortem qu'il faisait durer ou d'un véritable éveil, les spectateurs ne savaient pas à quoi s'attendre. Mélampe, dans son fort intérieur, demeurait convaincue qu'il ne survivrait pas à la traversée. Elle mangeait distraitement la pitance du soir, observant Nalin et Malvo sympathiser alors qu'elle s'ostracisait toujours plus. De l'autre côté du camp, Ulwazi dégageait les bronches de son aïeul à main nue, les doigts dans la gorge pour en sortir quelques morceaux de chair coupés trop gros par inadvertance. Amaigrie de froid et sale, désespérément seule alors que dans les faits elle n'avait rien pour elle-même, l'héritière se surpris à rêver de sa noblesse. Elle aurait tout donné pour un bain d'eau chaude, un lit et un véritable plat. Demain, il faudrait marcher encore. Elle se rembrunit toujours plus et s'emmitoufla silencieusement dans sa peau pour dormir - cette fois, le sommeil ne fit pas le difficile.

*

"Grand-père ! Grand-père !!"

La voix d'Ulwazi paniquée l'extirpa de son somme. Elle pensa immédiatement que l'homme avait rendu l'âme, mais le sourire ébahi sur le visage du Palan surexcité questionna son jugement. Il avait réveillé l'ensemble du camp.

"... Il a parlé ! C'est un miracle !!"

Honteusement, le réflexe premier de Mélampe fut une moue écoeurée. Plus l'homme témoignait de signes d'humanité, plus il faudrait se faire une mission de le garder en vie, et correctement qui plus est. Son regard croisa celui de Malvo, qui n'avait semblé jamais douter de l'ancien. Un homme si vieux, et si réduit ... la princesse s'en agaça, et c'était là nouveau dans son attitude. Ses insensibilités avaient toujours au moins servi une voie de raison, mais présentement, elle ne faisait montre que d'un mépris gratuit. Elle le remarqua en elle-même - cela non plus, son père ne l'aurait pas soutenu ... Faramond en revanche, l'aurait peut-être comprise. Elle se répugna elle-même, ou se fit peur, et chassa l'appréhension en se recouchant. Entre réjouissance miraculée et fatigue intense, le camp quant à lui fissura en deux camps, de ceux qui dormirent et d'autres qui allèrent partager la joie. Nalin pria l'Alun pour son don de la vie.


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Sam 22 Juil - 18:08
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Malvo
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Musique:

Malvo contempla les signes divins qui s’offraient à lui. A mesure que la chaleur, la manifestation la plus élémentaire de la Flamme, revenait, le vieillard se ravivait. Il comprit qu’il ne s’était pas trompé en croyant qu’ils possédaient encore la faveur de sa Foi. Malvo était véritablement redevenu le paladin qu’il était. Ou plutôt, il réalisait réellement ce que coûtait la foi et ce qu’elle exigeait de ses fidèles, et la choisissait désormais en meilleure connaissance de cause. A une époque, il croyait parce que c’était ce qui lui avait été inculqué. A présent, il croyait parce que quelque chose en lui croyait. Quelque chose en lui s’était plongé tout entier dans la Flamme quand il rencontra le Brasier des Âmes, là où chacun se plonge pour L’entretenir et maintenir ce phare qui les guidait dans les Ténèbres. Il était ressorti de cette rencontre avec la conviction qui lui était nécessaire pour pouvoir parvenir à son but ultime : sauver ceux qui méritaient de l’être.

 
Lorsqu’Ulwazi s’écria que son grand-père venait de parler, Malvo prit le temps d’observer les réactions dans le camp. Il savait que le sort du plus vieux et faible de leur groupe était devenu celui de l’ensemble du groupe. C’était même devenu une évidence maintenant qu’ils avançaient à la vitesse à laquelle le chariot qui le transportait pouvait briser la glace. Mina, en particulier, était inspirée par cette situation exigeante. Plus qu’aucun autre, elle était partie blessée et s’était remise autant que possible dans des circonstances extraordinairement difficiles, même pour les êtres robustes de son peuple. Pourtant, elle donnait du sien à chaque étape qui lui était permise. Elle se déplaçait en s’appuyant à loisir et débitait les aliments pour en préparer la pitance du groupe avec application. Nalin avait voulu participer à cette élaboration mais elle fut bien mal prise d’être chassée par Mina. Ces deux Palans étaient formidables, chacune à leur manière. Dans ce groupe, chacun était nécessaire.
 
C’est pourquoi Malvo s’approcha de sa protégée pour se camper face à elle au matin venu. Il savait qu’elle ne dormait plus depuis quelques temps déjà bien qu’elle soit restée un peu dans sa couchette. Elle se réveillait toujours aux premières lueurs du jour et s’activait en général pour préparer un prompt départ. Elle souffrait de la distance, de la faim, de la fatigue, du froid, … Comme chacun, ce moment était implacable pour elle. Mais contrairement aux autres, elle refusait de se livrer au moindre optimisme. Malvo avait compris en la côtoyant qu’elle révérait particulièrement la force et le courage. Mais pour cultiver ces valeurs, elle avait mis de côté une expérience plus abstraite et spirituelle de son existence. Maintenant que le groupe s’était centré sur un ancien faiblard et suivait ses moindres mimiques avec attention, elle se trouvait exclue de cette expérience collective. Malvo ne pouvait faire naitre la foi en elle ni même la curiosité envers ces grandes questions auxquelles chacun est soumis à un moment de son existence, fusse-t-elle assez longue pour le permettre. Tout ce dont il était capable, c’était d’offrir une interprétation des signes et le soutien dont il était capable. Il se sacrifiait et le ferait encore à nouveau car sa nourriture se trouvait dans la satisfaction de la vertu.
 
- Mélampe, viens m’aider à relever le gibier de tes pièges, souffla-t-il à son oreille en caressant légèrement le petit qui était venu se lover au chaud contre elle.
 
Ils avancèrent vers l’extérieur du camp, leur route léchant certains des derniers récifs de glace de l’Alun, louvoyant entre les conifères et les pierres gelées pour trouver une zone plus riche en gibier où les collets avaient été installés la veille. Parfois, la proie avait été suffisamment rusée pour se repaitre des quelques miettes de pain qui avaient été mises en place comme appât et parfois, le piège était resté bien frais et dispo. Lorsqu’enfin, ils virent un lièvre qui tentait tant bien que mal de s’extirper en se secouant frénétiquement, ils échangèrent un regard entendu. Mélampe s’empara de l’animal et en acheva les souffrances à la vitesse de l’éclari tandis que Malvo prélevait la brindille qu’ils avaient employée pour la joindre aux autres. Malgré les quelques arbres sombres qui les entouraient, ils pouvaient sentir que l’altitude avait diminué. Ils n’étaient plus tant essoufflés de patauger dans la poudreuse qu’ils avaient pu l’être les jours précédents et, à vrai dire, elle n’était plus tant fournie non plus.
 
- Bien, nous allons pouvoir nourrir toute l’expédition avec ça, s’égaya le prêtre. Merci à toi, Mélampe, ajouta-t-il, je ne sais pas comment nous aurions pu nous en sortir sans ton aide.
 
Il la regarda avec une certaine fierté. Leurs différences ne faisaient aucun doute mais pour autant, il savait qu’ils pouvaient se retrouver sur le fond. Peu importe en quoi elle pouvait croire, elle n’était pas en opposition à proprement parler avec ses idéaux. Elle n’avait pas décidé de faire souffrir le pauvre animal, que ce soit le lièvre ou le vieux palan. Elle continuait à donner du sien et trainait sa part du fardeau pour permettre à tous d’avancer. Pour Malvo, il ne faisait aucun doute qu’une fois qu’elle aurait le temps de prendre du repos et de repenser cette expédition, elle en apprendrait beaucoup sur elle-même. Il voulait tout de même lui faire savoir qu’il appréciait son implication dans l’attente et qu’elle pourrait compter sur lui par la suite si elle continuait à en avoir besoin.
 
Ils reprirent le chemin du camp en silence, appréciant d’observer peut-être pour l’une des dernières fois ces montagnes tant majestueuses que terribles. La beauté fatale de leurs périls resterait gravée longtemps dans la mémoire du paladin. Sous le spectre de sa vision retrouvée, il appréciait les embuches comme autant d’épreuves sur son chemin.
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de Lanasthël

J'ai 24 ans et je vis où je peux, dans l'Anuire. Dans la vie, je suis fille aînée d'Aymeric Mosse Gawen de Lanasthël, Roi d'Anuire décédé d'une crise cardiaque et je m'en sors bannie du Royaume puisque j'ai convoité le trône.

Valla (Diablo) (c) Kyrie

Mélampe ne dormait pas, elle réfléchissait. Ils entameraient leur dernier jour de marche avant la première auberge du royaume voisin - et puis quoi ? Que feraient-ils des Palan, concrètement ? Comment réagirait le peuple face à leur présence qui interroge tous les paradigmes ? Ni hommes ni bêtes, dans cette période de paranoïa, ils risquaient d'être pris en chasse et l'héritière qu'on disait assassine avec eux. Et d'ailleurs, l'émergence des créatures du Chaos s'était-elle généralisée au continent ? Mélampe pouvait-elle encore espérer, superstitieusement, que la débâcle de bêtes sur ses terres n'était que le signe d'une régence illégitime ? Probablement pas : ce qu'elle avait vu jusqu'ici, la présence des raksis sur les frontières et les prédictions sagaces de Malvo ne trompaient pas. L'éveil du Chaos était un phénomène qui ne pouvait se limiter à Anuire. Quelle alliance cette toute jeune reine après un putsch pourrait faire pour s'en prémunir ? Et parviendrait-elle à ses fins, pour commencer ?

Toki était revenu se lover contre elle cette nuit-là et la princesse n'avait pas coeur à le chasser - d'autant que la petite bête irradiait de chaleur. Mais ce fut le réconfort d'une voix connue qui la cueillit dans ses réflexions.

"Mélampe, viens m’aider à relever le gibier de tes pièges."

Ils se levèrent sans bruit et s'essaimèrent autour des collets. Les lièvres morts avaient toujours cette allure horrifique, le ventre naturellement creusé sous l'arrondit des puissantes pattes arrières, les oreilles dégagées à leur base accentuant un faciès émacié sur d'énormes yeux exorbités. Leur pelage agouti, tout discrets qu'il eût fait d'eux, ne les avaient pas sauvés d'un piège. L'héritière le prenait toujours comme une mise en garde - fuir ou se cacher ne protégeait de rien. Elle était demeurée silencieuse, emmurée de mutisme depuis le départ du camp Palan, mais les mots de Malvo vinrent une fois de plus passer leur pommade sur ses récentes nuées de doutes.

"Bien, nous allons pouvoir nourrir toute l’expédition avec ça. Merci à toi, Mélampe, je ne sais pas comment nous aurions pu nous en sortir sans ton aide."

Elle releva la tête de son piège et répondit d'un sourire qui fit craqueler ses lèvres. A ce stade, leurs visages étaient rougis de soleil et de givre, les extrémités entamées par le froid, et leurs bouches donc marbrées de gerçures. Elle se réhaussa et resserra le crochet alourdi de butin à sa ceinture.

"Je sais."

Mais quoiqu'elle ne se l'avoua pas, ni ne l'avoua à Malvo, ces mots la rassérénaient sur ses capacités à guider un groupe.

*

Les pics neigeux avaient cédé leur place progressivement aux flans de terre boueuse, déformée par les racines, et sur lesquels les luges progressaient mal. Ils décidèrent d'en abandonner une, allégeant le fardeau d'Ulwazi, et de ne conserver que celle où reposait le vieillard et une autre où pourraient se reposer les plus fragiles par intermittence, bien chargée de tout le barda. Un sentier se dessina face à eux annonciateur du retour à la civilisation et transfigurait l'expression de leur effort : si jusqu'alors ils s'arrachaient les épaules à tracter, les deux haks de l'expédition en venaient à accuser sur leurs mollets la glissade en avant de leur besogne, qui semblait mue d'un désir propre de les dépasser.

En surplomb, ils finirent par voir le relief d'une auberge, sa fumée cherchant à rejoindre les nuages, son écurie sommaire et les odeurs de bouc leur parvinrent. L'heure était à l'appréhension pour l'héritière qui redoutait cette rencontre entre hommes et mi-bêtes, et lorsqu'ils furent à une distance raisonnable, elle arrêta le convoi. Elle ne souhaitait pas risquer de se faire refouler dès la frontière mais elle savait qu'elle ne pourrait pas camoufler éternellement cette nouvelle race, sentiente et raisonnable, qu'elle s'était bien étonnamment engagée à prendre avec elle. Quoiqu'elle eût aimé louer une charrette - avec quel argent ? - et couvrir le petit peuple pour l'y dissimuler, elle réalisait qu'avec des enfants la démarche aurait été aussi complexe qu'indigne. Elle s'isola avec Malvo et Nalin pour en discuter.

"Nous y voilà, entonna-t-elle à l'intention de Nalin, le premier contact des Palans avec le monde humain. Comme je l'ai dis avant-hier, leur premier réflexe serait probablement de chercher à vous tuer, et de nous enfermer pour détention de bêtes de contrebande. Autant vous dire que vous n'aurez pas le temps de prouver que vous savez réfléchir et parler."

Elle croisa les bras, sourcils froncés de réflexion plutôt que de souci. Elle savait qu'elle camperait sur ses décisions si les propositions de ses acolytes ne lui plairaient pas, mais elle s'essayait à une démarche plus démocratique.

"Je pourrais éventuellement vous faire accepter une fois arrivés à destination, où j'ai des relations." Et pas des moindres. "Mais d'ici là, je serais d'avis de faire de vous faire passer clandestinement."

Mais impossible de simplement les faire disparaître, donc. Elle avait toujours l'image du lièvre mort à l'esprit. A la réflexion, ils pourraient jouer le rôle de livreurs d'exotisme, et faire des Palan une marchandise commanditée par Holt. Voilà qui n'était pas beaucoup plus digne au demeurant.


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Malvo prit le temps d’observer les alentours. L’auberge tenait plus du refuge d’altitude, n’étant ceinte que de quelques demeures de trappeurs. On lisait encore les restes d’un feu de fumage de ci, les raquettes de marche de là. Les écuries aussi étaient gardées bien closes, silencieuses. Les gens de ces terres n’étaient pas comme dans les vallées : c’était des survivants qui s’étaient installées aux frontières de l’acceptable pour un homme. Eux aussi n’étaient pas comme les autres hommes et ne seraient pas reconnus comme tels. Cela lui donna l’espoir d’une possibilité. Il aima croire qu’il pouvait y avoir une amitié entre ces bonnes gens de basse montagne et les palans réfugiés. Un navire à la barre duquel ils se placeraient tous ensemble et s’entraideraient.

 
Mélampe, comme à son habitude, se montra plus pessimiste et inquiète. Elle n’entrevoyait la rencontre entre les hommes et les petites gens des pics enneigés que sous le spectre de la cupidité de l’homme. Peut-être avait-elle raison. Peut-être et, à la fois, peut-être que la manière dont eux trois gèreraient cette rencontre et la présentation des palans définirait la suite des événements. Leur sphère d’habitation leur étant privée, les palans n’avaient d’autre choix que d’évoluer. Une génération de ces petits devaient trouver un nouveau moyen d’exister et de faire perdurer l’espèce, loin de la menace des redoutables raksis.
 
- Les haks sont-ils si gourmands qu’ils ne nous laisseraient pas nous installer et vivre dans une forêt enneigée ? soupira Nalin, épuisée par le voyage exigeant dont elle ressortait. Nous avez-vous guidé vers un plus grand péril que les raksis ?
 
Malvo n’eut pas le besoin de se retourner pour ressentir le malaise de la conversation entre les deux cheffesses. Le pis étant qu’elles avaient toutes deux le seul bien de la colonie comme priorité. Et Malvo avait la lourde tâche de devoir trancher entre les deux. Il ne devait pas trancher dans le sens où il aurait le dernier mot mais plutôt qu’en se ralliant à l’une des deux femmes, son discours prendrait en poids et finirait par emporter l’autre. D’un côté, Mélampe voulait cacher au monde la présence des palans pour leur permettre de continuer leur existence furtive et solitaire. Face à ça, il savait que l’esprit aventureux des hommes les pousserait à aller explorer toujours plus loin des chemins déjà tracés et que la rencontre entre les hommes et les palans serait alors laissée au soin de ceux qui la vivraient. De son côté, Nalin, qui ne réalisait pas l’importance de son peuple pour les hommes, se voyait comme plus qu’un grain de sable. Elle se crut le pouvoir de négocier des terres sans rien offrir en retour. Là encore, il ne faisait aucun doute que l’approche avait tout d’aléatoire.
 
Les oubliant quelques instants, il réfléchit à la situation pour ce qu’elle était. Les palans étaient… Il ne savait pas trop le dire pour sa part mais il avait l’absolue conviction que les palans étaient bénis de la Flamme tout autant que les hommes. Il avait vu la prêtresse se démener et s’épuiser avec Mina pour sauver chacun des enfants qu’elles avaient embarqués avec elle. Il avait observé de ses propres yeux l’émotion d’Ulwazi face à son grand-père qui avait un sursaut de vitalité. Et il savait aussi que Mélampe avait ressenti la même émotion que pour n’importe quel enfant quand elle s’était occupée du petit qui était venu la rejoindre en pleine nuit pour trouver de la chaleur. La vérité était claire comme l’eau qui coulait des ruisseaux glacés avoisinants : les palans n’étaient pas des animaux. Ce n’était pas des hommes non plus et peut-être qu’aucun lien autre que leurs esprits ne les reliait Et, dès lors, la solution qu’il voulait porter et défendre apparaissait tout aussi clairement.
 
- Je pense que nous devons présenter les palans aux hommes, fit-il, animé de son sourire d’homme de foi, en se retournant vers les autres. Les palans doivent avoir le droit de vivre parmi les hommes. Ils doivent avoir une chance de s’en sortir et pas seulement en tant qu’attraction d’un montreur d’ours. Peut-être que les débuts se feront difficilement mais je n’aurais de repos que lorsque les palans pourront marcher sereinement parmi les hommes.
 
Face à l’incrédulité de Mélampe, il prit le temps de trouver plus d’arguments qui pourraient la convaincre en faisant appel à sa rationalité. Dans le fond, ses craintes n’étaient pas infondées alors il ne pouvait simplement les balayer en promettant que tout irait bien.
 
- Je les protégerai, je ne peux pas en faire moins, soupira-t-il. Je les ai tiré, eux et leurs affaires, hors du danger qui pèse sur les hautes montagnes. Je ne peux pas juste les jeter hors de leur luge dans le monde des hommes sans au moins leur donner une chance, si infime soit-elle, de survivre. De toutes manières, Nalin ne pourra les nourrir seule. Si un monastère de la Flamme s’occupe d’eux jusqu’à ce qu’ils soient assez vieux pour chasser et arpenter les montagnes, ils feront de formidables guides. Ces montagnards, ajouta-t-il en montrant de la main l’auberge dont la cheminée fumait, eux, ils comprendront ce que je veux dire. Tout ce qu’il me faut, c’est le temps de leur raconter l’histoire des palans et que Nalin puisse leur parler de leurs rites, de leur vie et, surtout, des raksis. Oui ! Avec un ennemi commun, une menace qui pèse sur hommes comme palans, tout le monde pourra faire appel de sa raison pour faire au mieux !
 

Il sourit largement, voulant croire en l’utopie qu’il construisait dans son esprit. Il partageait les craintes de Mélampe, mais il n’arrivait pas à se résoudre à les prendre en compte. Quoi qu’ils fassent le danger existerait, il le savait désormais. Mais comme Nalin, il ne voulait se résoudre à fournir aux petits palans une existence de crainte et de surveillance.
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"Les haks sont-ils si gourmands qu’ils ne nous laisseraient pas nous installer et vivre dans une forêt enneigée ? soupira Nalin, épuisée par le voyage exigeant dont elle ressortait. Nous avez-vous guidé vers un plus grand péril que les raksis ?"

La posture de Mélampe s'arc-bouta sur les remontrances dont elle se sentit écoper, ses traits trahirent l'habitude du mépris dont sa caste l'avait affublée dans l'avancement de la mâchoire, ses sourcils fronçant comme d'un rejet.

"Je ne vous ai pas forcés à nous suivre ni ne vous ai menti sur la nature des hommes." Elle insista sur ce terme comme pour corriger la Palan - si elle n'était pas sur ses terres, elle n'en n'était pas moins sur les terres de sa race. L'énergie qu'elle avait investi dans la sauvegarde d'un peuple par pure bonté, et dont on semblait insatisfait, l'engrossait de son caractéristique orgueil. Elle allait poursuivre la vocifération de son venin mais l'intervention de Malvo - qui si bien lisait en elle - l'interrogea trop intensément. Elle l'observa délier ses espoirs comme on regarde s'épandre le miel, à la fois brusquée qu'on lui prête l'intention de cacher les Palans à tout jamais - là n'avait jamais été son objectif, au contraire comptait-elle les dissimuler jusqu'à ce qu'elle puisse leur offrir un véritable statut de sentience, une fois à la tête de son Royaume, un comté à eux où leur race serait considérée sinon comme leur égal, du moins comme protégée - et dubitative sur cette proposition qu'elle n'avait guère envisagé.

Le problème que lui posaient les raksis était de convaincre Holt alors qu'ils étaient dans ses pattes, ajoutant à la délicatesse de la manœuvre diplomatique. Mais si elle y pensait un moment, les larguer aux guides montagnards n'était pas de la pire idée. Si elle comptait les emmener jusqu'à Holt précisément pour prévenir le danger humain auxquels ils étaient exposés par leur simple existence, elle n'avait finalement pas à pousser si loin (au sens propre et figuré donc) l'altruisme, d'autant qu'elle ne le jugeait pas accueilli avec la félicité qu'elle le croyait mériter. "Bien, finit-elle par acquiescer trop épuisée pour corriger les intentions d'autarcie qu'on lui prêtait, faisons cela. Présentons les palans à ces bonnes gens." Elle n'adressa pas un plus ample regard à Nalin et le trio s'engagea dans le relais.

*

La bâtisse empierrée donnait sur toute sa sobriété - une pièce minuscule qu'un brasier de cheminée démesuré semblait pourtant peiner à chauffer, où une grille de fer forgé maintenait la soupe ; un monticule de roches désunies et agglomérées par un mauvais mortier, surplombé d'une planche de pin massif pour tout comptoir ; deux tabourets trapus sur des pieds courts. Dans le fond, un homme massif, à se demander comment il avait pu interdire à la neige de l'entamer, donnait tout l'air du tenancier. Un client installé, de même carrure, buvait une dense chope d'un alcool liquoreux.

"Ah ! s'interloqua le propriétaire. On va manquer de places assises.
- Laisse, Goll, je suis sur le départ de toutes manières.
- Attention avec les chiens."


Un regard entendu et l'homme termina son breuvage d'une goulée avant de prendre congé de l'équipée, non sans un regard brumeux vers Nalin - il mit cela sur le compte de son ébriété et reparti lourd d'interrogations tues. Malvo et Mélampe partagèrent à leur tour une oeillade et s'approchèrent des sièges. Le dénommé Goll leur tournait le dos, remuant par intermittences distraites son ragoût, et le fracas des bruits de cette vie humaine semblait imposer le silence. Parce qu'ils n'avaient pas entendus ces sons civilisés depuis des jours. Parce qu'ici le bruit du vent était couvert. Parce que devant eux se trouvait le genre d'homme qui crée des bouts d'humanité à la frontière du vivable.

"On n'a pas d'argent, précisa derechef Mélampe." Deux assiettes rejoignirent néanmoins le comptoir. "Et ça, (Goll pointa Nalin du menton), c'est quoi ? Ca mange ? Parce que les bêtes c'est dehors." La raison pour laquelle il n'avait pas déjà demandé à faire déguerpir la créature tenait à son regard résolument humain, rationnel. Il arrivait que ce même regard d'humanité, mais déchiquetée cette fois, revenait à la mémoire de Mélampe - c'était celui qu'elle avait vu dans les bêtes créées par Faramond à Valanne. "Ce n'est pas une bête, ça parle. Et on en a quelques autres qui aussi ont aussi faim qu'ils ont peu d'argent." Ce fut là tout le plaidoyer dont elle se voyait capable pour les Palans. Elle se jugeait suffisamment généreuse. Dans l'embrasure de l'entrée, les petits Palans, Ulwazi, Mina et le vieillard, attendaient recroquevillés pour entrer. Goll eu d'abord un air de dégoût, un éclair de violence dans le regard. Puis il jeta un oeil à Malvo comme s'il s'adressait à un pair, et devant sa paisibilité finit par sentencer.

"Laissez pas rentrer le froid la marmaille, à l'intérieur tous, allez !"


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Malvo s’assit à côté de la Princesse face au dénommé Goll. Il regarda un instant autour de lui pour découvrir comment on vivait en ces terres enneigées et retrouva la même rigueur à laquelle il avait le droit lorsqu’il faisait partie d’une compagnie de mercenaires. On vivait plus grâce à la chaleur humaine des camarades qu’à celle d’un repas consistant ou d’un feu dans l’âtre. Tant avait changé en si peu de temps et il s’en rendait seulement maintenant compte alors qu’il avait le sentiment de pouvoir reprendre son souffle.

 
- Merci de nous accueillir, Goll, fit-il simplement, en guise de préambule, se doutant que ce n’était pas un homme à goûter les longs discours. Ça fait du bien de pouvoir se retrouver à l’abri du vent, près du feu.
 
- D’où vous venez ? On n’a pas l’habitude des étrangers par ici.
 
- C’est toute une histoire, on vient d’Anuire ! fit Malvo en laissant les petits se masser aux pieds de Nalin, non loin de lui.
 
- Vraiment ! Sacrée trotte que vous avez faite là. Y a plus simple pour avancer vers la capitale. Vous êtes des marchands ?
 
- En quelques sortes, on avait des chevaux mais ils n’ont pas tenu le coup dans les hauteurs alors on a dû continuer à pied. On n’aurait pas pu s’en sortir sans les petits, reconnut le paladin.
 
L’aubergiste commença à servir des assiettes dans le nombre qui lui était possible. Il ne voulait pas interrompre le discours de celui qu’il reconnaissait comme un pair mais il lui brûlait de comprendre cette étrange fable qu’on lui comptait là. Le regard qu’il avait pour les palans évoluaient rapidement à mesure qu’il en entendait plus, à tel point qu’il leur passa un peu du ragoût sans le moindre signe de dégoût.
 
- Ce sont des petits êtres qui vivent dans les pics enneigés, ils s’appellent les palans entre eux. Ils étaient chassés par des créatures affreuses et ont quand même pris sur eux de nous sauver, Méline et moi, fit-il en désignant Mélampe avec un clin d’œil et un demi-sourire. Les petits et ces quelques adultes sont les seuls qu’on a pu arracher aux griffes des bêtes.
 
- Quel genre de bêtes ? s’enquit le tavernier aussitôt, incapable de contenir sa curiosité inquiète.
 
- Mmh… C’était la première fois qu’on voyait ça. Imagine-toi : des choses qui peuvent changer d’apparence pour venir dans les campements des petits palans et les dévorer dans leurs lits ! Ils sont bien braves mais ils ne faisaient pas le poids, c’est une certitude, conclut-il avec un regard contrit pour Nalin.
 
Goll prit un peu plus de temps pour considérer les palans et en particulier Nalin qui ressortait particulièrement avec son pelage blanc vif. Elle avait plus de traits animaux, ce qui le troubla fortement dans son jugement. Etait-ce des hommes ou des bêtes finalement ?
 
- Et… Comment vous savez qu’aucun d’entre eux n’est une de ces bêtes déguisées ? s’inquiéta plus encore l’hôte.
 
- Les raksis ne prennent notre forme que pour s’approcher. Ils ne peuvent pas parler ou faire autre chose que marcher et attaquer. On l’aurait déjà remarqué si l’un d’entre nous était un raksis, s’écria Nalin, presque outrée par la question.
 
Loin de se renfrogner du ton employé par la prêtresse, l’aubergiste hocha doucement de la tête en considérant le comportement de la petite troupe. Les petits mangeaient avidement leur nourriture, allant jusqu’à lécher les assiettes tandis que Mina tentait de les canaliser. Ulwazi donnait doucement la béquée à son grand père dans une attention qui débordait d’humanité. Tout dans l’animation du chalet faisait penser à une caravane de civils qui fuyaient la guerre.
 
- Seulement voilà, on a un problème, avoua finalement Malvo en laissant son assiette à Mélampe ou quiconque la prendrait. J’ai fait le serment d’aider les petits palans à s’installer quelque part maintenant qu’ils n’ont plus de chez eux mais on ne va pas pouvoir les garder avec nous plus longtemps. Je sais, je sais, concéda-t-il en notant le froncement de sourcils de Goll, la perspective de récupérer toute la marmaille n’a rien d’attirant… Mais si je peux dire une chose, c’est que je n’ai jamais vu d’êtres aussi courageux et à l’aise dans le blizzard qu’eux. Ils sont courts sur pattes, ne s’enfoncent pas dans la neige avec leurs gros pieds, mangent peu, … Bref, ils pourraient être utiles à une communauté comme la vôtre. Est-ce que vous connaitriez des trappeurs, des montagnards ou  qui pourraient avoir besoin d’aide ?
 
Goll pondéra la question, franchement soufflé par le tour que la conversation avait pris. Malvo lut en lui qu’il devait hésiter à leur botter le cul jusqu’au dehors de sa boutique ou à les accueillir pour la nuit chez lui. Il soupira un peu avant de finir par accepter et d’expliquer qu’il les accueillerait quelques temps pour pouvoir les présenter aux habitués et que le mot se passe. Il voyait d’avance le coup arriver où ces petites créatures attireraient des curieux. Il espéra que, dans l’opération, sa bicoque ne serait pas abimée.
 
- Je vais voir ce que je peux faire, je promets rien. Je peux pas m’occuper d’une douzaine de bouches à nourrir même si c’est des demi-portions.
 
Malvo sourit en hochant la tête pour signifier sa joie face à sa réaction. Il passa sa seule main valide dans ses fourrures pour aller y chercher un pendentif à l’effigie de la Flamme. Il connaissait la valeur de cet objet et le posa sur la table.
 
- Merci, c’est tout ce que j’ai pour vous remercier pour votre peine. Il vous portera chance, gardez le précieusement…
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