Il était venu. Lorsque sa mère lui avait dit qu’elle voulait inviter la famille de Jacob, Victoria ne s’était pas opposée. Elle les appréciait tous. Jacob lui manquait. Terriblement. Alors lorsqu’elle avait entendu sa voix à son oreille, son cœur avait fait un bon dans sa poitrine. Et puis il se sera. Il n’avait pas été certain de venir. Elle savait que c’était sa faute. Pourtant, durant ces trois mois, elle avait prit son téléphone une centaine de fois, avait hésité à appeler, ou envoyer un message. Elle n’avait jamais osé aller jusqu’au bout de la démarche. Il avait peut-être tourné la page… même si elle avait espéré l’inverse. Il avait dit qu’il était prêt à lui donner du temps. Aujourd’hui, il était temps de renouer, de parler. « -merci… » avait soufflé Vic, gênée par le geste autant que les paroles. Elle regarda plus loin, comprenant de qui il voulait parler. Les femmes avec qui elle parlait, revenaient. Elle avait sourit avec douceur, puis avait hoché la tête avant de souffler un timide : « -d’accord… » il restait. C’était une bonne chose. Il la fit rougir ensuite. Parfaite… elle n’en était pas aussi sur que lui…

Elle reprit sa conversation avec les deux autres jeunes femmes, mais elle ne cessait de lancer des regard en direction de Jacob : « -tu le connais ? » demanda l’une d’elle. « -heum… oui… c’est mon meilleur ami. » « -il a l’air charmant. Mais… il y a comme une gêne entre vous, je me trompe ? » Vic sourit avec timidité : « -on s’est… on s’est éloigné depuis quelques mois. Une histoire compliqué... » « -mais il est là aujourd’hui. Tu devrais aller le voir. » « -je vais le faire. » oui, elle ne comptait pas passer la journée loin de Jacob. « -il arrive… » avait soufflé la seconde jeune femme. Elles avaient toutes deux disparues le temps que Jacob regard ses sœurs au loin. « -je vais dire oui alors… » avait elle répondu avec un sourire tendre. « -et pas seulement pour que tes sœurs te foutent la paix » elle n’en avait rien à faire. Elle était seulement heureuse qu’il soit revenu vers elle.

« -mais… ça te gêne si on va plutôt marcher un peu ? » danser c’était offrir leur conversation et leur retrouvailles en spectacle à leurs deux familles. Et elle n’en avait pas envie. Jacob semblait nerveux. Elle l’était également même si cela se voyait moins. Elle lui adressa un petit signe de tête pour indiquer la direction, et commença à marcher à ses côtés. « -comment tu vas ? » ce n’était pas de la politesse, elle voulait vraiment savoir.

Oui, Jacob avait hésité à venir à la fête, craignant que la jeune femme ne soit pas encore prête à recroiser sa route, mais toutes ses craintes à ce sujet se dissipèrent au moment où elle posa son regard sur lui. Ce ne fut pas pour autant qu’il était plus détendu en sa présence. Jacob était anxieux et ne connaissait pas la marche à suivre après ces trois mois loin d’elle. Il osa effleurer sa joue tout en la complimentant sur sa beauté, et sourit à son remerciement pour seule réponse. Ses mains de nouveau dans ses poches, il se recula tout en précisant qu’il avait été heureux de la revoir, et qu’il la trouvait parfaite… Son compliment parvint à faire rougir Victoria. Une victoire pour le chirurgien qui retrouva ses sœurs le temps de quelques minutes. Pas davantage. En effet, ces dernières avaient décidé de s’immiscer, comme toujours, dans leur relation, le poussant à retourner auprès de la jeune femme pour la convier à danser. Une manière comme une autre de renouer le contact. C’était donc d’un pas lent et peu assuré qu’il était revenu auprès de Victoria. Un regard vers Teresa et Eva, et lorsqu’il reporta son attention sur la jeune femme, ses amies avaient disparu soudainement. Elles avaient compris qu’il voulait passer du temps en sa compagnie. C’était peut-être mieux ainsi. Il se mordit la lèvre inférieure lorsque Victoria accepta son invitation à danser, puis hocha lentement de la tête alors qu’un sourire étira les lèvres du trentenaire « Ok » avait-il soufflé, peu à l’aise encore en sa compagnie. Il fronça ensuite les sourcils quelques secondes alors que Victoria lui proposa plutôt de marcher plutôt que de danser aux yeux de tous « Non… Non… Au contraire ». En fait, il était lui aussi séduit par cette idée de s’éloigner de toute cette effervescence et la suivit donc dans la direction qu’elle avait choisie pour eux deux.

« Bien » répliqua-t-il simplement, avant de se mettre à rire « Tu voulais sûrement une réponse plus développée ? ». Il observa l’horizon quelques secondes pour réfléchir à ses mots, et finit par répondre « Je sors de temps à autre avec des amis. C’est souvent Rachel qui est à l’initiative… Quoi d’autres… Euh… Je continue de travailler énormément » pour ne pas penser au vide qu’elle avait laissé en quittant leur appartement quelques mois auparavant « Je fais un peu de basket le dimanche matin avec quelques confrères… Et… Et tu me manques terriblement » conclut-il en posant son regard sur elle « Et toi ? » avant d’ajouter « Je veux dire, comment vas-tu ? Tu travailles toujours avec Vinz ? Tu… Tu as rencontré quelqu’un… ? » autant poser la question dès maintenant, même s’il appréhendait la réponse qu’elle allait lui donner.

Elle avait commencé sa phrase par un mais… elle n’aurait pas dû. Elle venait de lui créer du stress pour rien. Vic voulait seulement qu’ils marchent côte à côte plutôt que de danser. Parce que cela évitait que leurs deux familles aient les yeux braqués sur eux. Mais aussi parce qu’elle voulait qu’ils puissent se parler sans être trop proche physiquement. Ils avaient des choses à se dire. Ils allaient sans doute faire remonter à la surface certaines choses douloureuses. Elle voulait pouvoir le faire en face à face et non en coller serrer. « -ok… ok… parfait alors… » Jacob était d’accord pour marcher un peu. Alors après un signe du menton, ils avancèrent l’un à côté de l’autre, d’un pas lent. Vic décida de lancer la conversation de la façon la plus simple possible. Lui demander comment il allait. Elle aurait pu trouver mieux, où du moins autre chose. Mais c’était un peu comme quand on rentre dans une piscine. Elle mettait un petit doigt de pieds, avant de se décidé à plonger.

Elle lui sourit : « -oui, même si c’est déjà pas mal… » il allait bien. Elle préférait entendre ça plutôt que l’inverse. Elle le laissa alors reprendre la parole et sourit en baissant le regard sur ses chaussures. Une idée venait de naitre dans son esprit en entendant le prénom de la collègue de Jacob. Rachel. Elle connaissait cette femme, elle l’appréciait. Jacob aussi. Est-ce qu’ils s’étaient rapprochés durant ces trois mois ? Cette pensée était peut-être folle. Elle déplu d’ailleurs à la belle brune. Mais elle n’en dit rien. Pour ce qui était du travail, elle ne l’avait pas imaginé diminuer son rythme. Vic se pinça les lèvres lorsqu’il évoqua à voix haute qu’elle lui manquait. Terriblement. « -tu me manques aussi… » avait elle alors répondu à sa question. Mais elle comprit qu’il voulait savoir comment elle allait. Alors elle sourit avant d’ouvrir de grands yeux. « -Non. Non. Enfin, si je bosse toujours pour Vinz, il a bien voulu me garder ma place. Mais non, je n’ai rencontré personne. Je ne vois pas pourquoi j’aurai fait ça. » elle trouva même cela étrange qu’il pose cette question. Est-ce qu’il la pensait sans cœur ? Est-ce qu’il s’imaginait qu’elle était capable de lui demander du temps et de tourner la page si facilement ? « -ce n’est pas pour cela que je t’ai demandé du temps… » loin de là.

Elle lui jeta un coup d’œil avant de reprendre : « -je vais mieux… je passe mon temps entre le boulot et les séances de thérapies. Je prends soin de ma mère aussi. » même si celle-ci ne voulait pas ralentir ou prendre conscience qu’elle devait le faire. « -je sors peu, seulement pour poursuivre les cours de peinture. Ça me fait du bien aussi. » elle lui sourit en tournant la tête vers lui. « -je suis désolée pour la dernière fois. Je… » un léger rire. « -je n’ai pas été des plus agréables. Je le sais et je m’en excuse. Et je suis heureuse que tu sois venu aujourd’hui. Parce que… je n’ai pas trouvé le courage de t’écrire ou t’appeler… »

Victoria ne souhaitait pas danser. En fait, elle voulait marcher et ainsi s’éloigner de l’effervescence de la fête de quartier, et plus particulièrement de leurs familles. Il accepta donc l’invitation et la suivit dans la direction qu’elle avait choisi pour eux deux. En fait, cela l’arrangeait. Il préférait de loin marcher dans le quartier plutôt que de danser aux yeux de tous. La première question était simple et la première qu’il apporta également. Mais peut-être qu’en lui demandant comment il allait, elle souhaitait également savoir quel était devenu son quotidien. Jacob évoqua donc son rythme de travail qui n’avait pas faiblit depuis leur séparation, si on pouvait appeler ces quelques moins loin de l’autre ainsi. En fait, il avait même augmenté pour tenter d’occuper ses pensées. Il fit également état des soirées auxquelles il était convié grâce à Rachel qui souhaitait le faire sortir le plus possible pour qu’il évite de ruminer l’absence de Victoria. Il avait également reprit le sport à son rythme. Il conclut son monologue par un aveu qu’il lui tenait à cœur. Elle lui manquait. Il voulait qu’elle le sache. Un sourire lorsque Victoria lui avoua qu’il lui manquait aussi. Au moins, ils étaient sur la même longueur d’ondes sur ce point. Qu’en était-il du reste ?! Avait-elle finalement rencontrer quelqu’un d’autre ? Est-ce que sa vie avait changé ces derniers mois ? Après tout, lors de leur dernière discussion, la jolie brune ne lui avait rien confié sur son quotidien, ni même sur son voyage en Europe. Elle était encore habitée par une certaine colère qui l’avait poussé à accepter sa décision les concernant. Un soulagement l’accable au moment où la jeune femme le rassura sur la question qui le préoccupait le plus. Elle n’avait rencontré personne. « Parfois le cœur a ses raisons que la raison ignore » souffla-t-il pour justifier sa question « Tu aurais pu souhaiter du temps, et finalement rencontrer quelqu’un d’autre… ça arrive, tu sais » répliqua-t-il avec douceur, tout en lui souriant.

Les mains dans les poches de son jean, le regard de Jacob vacillait entre le sol qu’ils foulaient tous les deux d’un même pas, et la jolie brune qui se confia sur son quotidien « Comment va ta mère ? » avait-il demandé par curiosité. En sachant que Victoria était revenue d’Europe et après son souhait de vouloir du temps pour guérir, Jacob n’avait pas rendu visite à la mère de cette dernière au risque de croiser la jeune femme, et que cela ne fasse que croître cette distance entre eux. Un sourire tendre étira les lèvres du chirurgien « Tu continues à aller aux cours ? » avait-il demandé, réellement satisfait de cette nouvelle « Avec Judith ? ». Il continua de la fixer lorsque Victoria s’excusa de son comportement de leur dernière rencontre, dans le jardin de ses parents « Tu étais en colère contre toi, contre moi aussi… Je peux comprendre... » et sans se départir de son sourire, rétorqua « Je ne l’ai pas trouvé non plus, pourtant Dieu sait que j’en ai eu envie tellement de fois » et se mit à rire face à cet aveu. Tous les deux n’avaient pas osé alors qu’ils avaient désiré la même chose : Renouer le contact. Il fixa à nouveau le sol bitumé qu’ils foulaient, et perdit son sourire alors qu’il décida d’enclencher un sujet difficile « Comment tu te sens maintenant ? Je veux dire vis-à-vis de Roberto et de … notre… dispute, notre séparation. Je ne sais pas comment appeler ça ». Parce qu’il n’avait pas envie de décrire ces quelques mois comme une séparation. Son cœur lui appartenait toujours, même en étant loin d’elle.

« -sauf qu’il n’y a pas d’autre comme toi… » avait elle répondu alors qu’il semblait vouloir lui trouver des excuses face à une potentielle rencontre. Elle avait hésité à ajouter qu’elle ne voulait personne d’autre que lui. Mais elle fixa ses pieds une nouvelle fois. « -je t’ai demandé du temps pour aller mieux, et pour rien d’autre que ça. » elle n’avait pas mentit. Elle n’avait pas eu envie de l’oublier ou de l’effacer de sa vie. Le but était de se retrouver, d’aller mieux et d’ainsi éviter de lui faire plus de mal encore. « -doucement… mais elle est têtue. Elle a des analyses à faire et elle trouve toutes les excuses du monde pour ne pas aller au labo. » la principale étant les frais médicaux. « -fatigue, perte d’appétit… elle a perdu du poids aussi. » Vic se faisait du souci, elle ne pouvait pas perdre sa mère. C’était impossible. « -peut-être que si tu lui parles… » en vérité, la mère de Vic lui avait fait du chantage à ce sujet. Si tu parles à Jacob, j’irais faire les analyses. Mais elle n’en dit rien, elle ne voulait pas qu’il pense qu’elle ouvrait le dialogue aujourd’hui pour faire plaisir à sa mère. Ce n’était pas le cas. « -elle t’écoutera peut-être toi… » il était médecin, il savait de quoi il parlait et ce n’était pas un secret, la mère de Vic l’adorait.

« -oui… et je dois dire que c’est devenu une routine. Ça me vide la tête et Judith est une personne de ces personnes apaisante, qui sais écouter. » oui, ces cours lui faisaient du bien. « -contre le monde entier je crois… » elle ne voulait pas qu’il pense que c’était sa faute à lui. Il n’était pas le fautif dans toute cette histoire. Il avait seulement subit. Elle le regrettait. Elle osa avoué que le courage lui avait manqué pour écrire un sms ou passer un coup de fil. Elle sourit en entendant qu’elle n’avait pas été seule. « -ne dis pas ça à ma mère s’il te plait. Elle serait trop heureuse de me répéter encore une fois que je ne suis qu’une imbécile, que la vie est courte. » Même si Vic savait que sa mère avait raison. « -pause… » elle eut du mal à soutenir son regard. « -une pause… » pour réfléchir et méditer. « -si ça avait été une séparation, l’un ou l’autre aurait fait des efforts pour oublier. » ce n’était pas le cas. « -je sais que j’ai fait le bon choix. Que j’ai été folle de croire que je pouvais lui faire entendre raison ou l’aider. J’étais… poussée ou aveuglée par le lien qu’on avait eut lui et moi par le passé. » elle arrêta de marcher et regarda Jacob : « -je sais aussi que le plus douloureux dans tout ça, a été de te perdre. De perdre ton estime, ta confiance. De perdre l’homme que j’aime et mon meilleur ami en même temps. » elle n’avait pas parlé au passé. Parce qu’elle l’aimait toujours. Infiniment. Terriblement. « -j’aimerais revenir en arrière seulement c’est impossible. Alors… il y a des questions auxquelles tu dois répondre. Sera tu capable de me faire à nouveau confiance ? Sera tu capables d’effacer le mal que je t’ai fait, de ne pas le remettre sur le tapis à la moindre dispute… » elle devait savoir. La fautive c’était elle. C’était à lui de pardonner, à lui de choisir si ils reprenaient là où ils avaient laissé leur histoire en suspens.

Durant ces quatre mois qui venaient de s’écouler, Jacob s’était préparé à cette éventualité. Qu’elle puisse rencontrer un autre homme et en tomber amoureuse. Il avait bien évidemment conscience que si Victoria lui avait demandé du temps, ce n’était pas pour préparer son cœur à accueillir un autre homme que lui. Pour autant, il savait que la vie pouvait être surprenante et que certaines rencontres pouvaient tout changer. Radicalement. Leur histoire était la preuve concrète que ça pouvait se produire. Elle était venue un jour pour déclarer la disparition de son fiancé au seul lieutenant de police prêt à lui tendre une oreille attentive, et à écouter son histoire. Rien ne pouvait laisser présager que cette rencontre allait modifier le cours de leur vie… Toutefois, Jacob fut soulagé d’entendre que ce n’était nullement le cas. La jolie brune n’avait rencontré aucun homme et se mit à sourire en entendant la raison de cela « Je présume que c’est une bonne chose » alors qu’il posa sur Victoria un regard à la fois doux et amusé. « Je sais » avait-il répondu alors que la jeune femme trouvait pertinent de lui rappeler les raisons qui l’avait poussé à lui demander du temps. Le sujet dévia ensuite sur l’état de santé de la mère de Victoria. Cela faisait trois mois qu’il n’avait pas vu cette dernière. Depuis le retour de la jeune femme d’Europe. Il était donc intrigué de connaître l’évolution de la santé de Madame Ruiz. Les nouvelles que lui apporta la jolie brune ne furent pas des plus optimistes pour la suite. Elle ne souhaitait pas poursuivre les analyses, alors que les symptômes que lui décrivaient Victoria ne présageaient rien de positif pour la suite « J’avais commencé à le constater lorsque tu étais en Europe », et fronça ensuite les sourcils, avant d’émettre un petit rire discret « Je ne suis pas certain de parvenir à lui faire entendre raison ». Il posa son regard sur cette dernière, et en constatant à quel point elle était préoccupée par la santé de sa mère, il hocha lentement de la tête « J’irais lui parler. Je te le promets Vic ». Il le ferait dans le courant de la semaine, espérant silencieusement qu’il parviendrait à lui faire entendre raison.

Ils ne s’attardèrent pas davantage sur la santé de la mère de Victoria, laissant cette dernière poursuivre sur le rythme qu’avait pris son quotidien depuis qu’ils ne vivaient plus sous le même toit. Il fut surpris… agréablement surpris d’apprendre que Victoria avait poursuivi les cours de peinture avec Judith « C’est une belle personne » confirma-t-il avec douceur. C’était pour cela qu’il avait porté son choix sur cette dernière lorsqu’il avait organisé l’activité quelques mois auparavant. Il savait que les deux femmes sauraient s’entendre à merveilles au fil des séances. Jacob perdit ensuite son sourire lorsque la jeune femme évoqua leur précédente rencontre dans le jardin. Il avait nourris beaucoup d’espoir sur l’issue de cette soirée orchestrée par leurs mères, en vain. A ce moment-là, Victoria éprouvait une colère contre elle, contre lui… contre le monde entier également, comme elle le précisa si bien « Tu te sentais incomprise… ». Un sourire finit par étirer à nouveau les lèvres du latino alors qu’ils se rendirent compte, tous les deux, de leur stupidité à ne pas vouloir franchir le premier pas. Tous les deux avaient voulu envoyer ce message, passer cet appel, renouer le contact, et aucun d’eux n’était parvenu à le faire. Sûrement par crainte. Il émit un petit rire lorsque Victoria lui demanda de ne pas en dire le moindre mot à sa mère « Je crois que nous sommes deux imbéciles qui n’avons pas conscience à quel point la vie est courte ». Mais la jolie brune avait demandé du temps, et il lui avait promis de lui en donner. Aujourd’hui, il était toutefois curieux de savoir comment elle se sentait vis-à-vis de tout cela. Il lui sourit avec douceur tout en acquiesçant « Une pause… J’aime bien ». Cela signifiait que tout n’était pas fini.

Lui prêtant une oreille attentive, Jacob constata un pas plus tard que la jeune femme avait arrêté sa marche tout en poursuivant la conversation. Il se tourna face à elle, les mains toujours enfoncées dans les poches de son jean et l’écouta avec attention. Il détourna un bref instant les yeux lorsqu’elle évoqua la douleur qu’elle avait éprouvé en le perdant lui. Il releva ses yeux bruns sur cette dernière et combla l’espace entre eux deux, lui saisit la main pour venir entrelacer leurs doigts, fixant leurs mains tout en rétorquant « Je ne vais pas te mentir en te disant que je n’ai pas eu mal, que je n’ai pas été déçu ou en colère à ce moment-là » puis releva ses yeux sur elle « Mais tu ne m’as pas perdu pour autant. J’ai toujours confiance en toi, en nous deux, sinon je ne serais pas là en cet instant, à discuter avec toi ». Il lui sourit et ajouta « Quant au fait de remettre ce qui s’est passé sur le tapis à la moindre dispute, je me dis que tu ne me connais pas encore totalement. Ça tombe bien, parce qu’on a au moins… je dirais… cinquante ans pour y remédier. Enfin, si tu veux de moi aussi longtemps » et pencha la tête sur le côté, esquissant un petit sourire en coin « Embrasse-moi », ces mots faisant écho à ceux qu’elle avait prononcé à la fête foraine.

« -oui. » elle n’avait pas demandé du temps pour poursuivre son chemin sans lui. Elle avait mit ces mois à profit pour se reconstruire, pour avancer et faire la paix avec son passé. Pour l’enterrer définitivement. Revoir Roberto l’avait forcé à ouvrir les yeux. Elle avait été forcé de constater et de comprendre l’homme qu’il était vraiment. L’homme qu’elle n’avait vu ou voulu voir. Cette confrontation avait été bénéfique malgré tout. Elle était plus que certaine des sentiments qu’elle portait à Jacob. Elle savait aujourd’hui que c’était lui qu’elle voulait, lui qu’elle aimait. Que c’était avec lui et personne d’autre qu’elle ne pouvait être heureuse et pleinement elle-même. Elle évoqua sa mère et sa santé et elle souffla un : « -merci. » lorsque Jacob promis de parler à sa mère. Vic espérait vraiment qu’il parviendrait à lui faire comprendre que c’était important de passer ces examens. Si elle ne voulait pas entendre, Vic ferait elle aussi du chantage. Elle avait parlé à Jacob, c’était à sa mère maintenant d’honorer sa part du marché.

Les cours de peinture l’avait également aidé à refaire surface. Cela avait canalisé et apaisé sa colère. Et Judith avait été d’un grand secours au milieu de tout cela. Elle avoua également ne pas avoir trouvé le courage nécessaire pour un sms ou un appel, évoquant le temps perdu. « -j’en ai conscience… seulement je ne pouvais pas reprendre notre relation là où nous l’avions laissé, comme ça, sans me… me réparer. Je t’ai fais souffrir, je ne voulais pas le faire plus encore. » c’était impossible. Elle tenait trop à lui. Elle avait trop de respect pour l’homme qu’il était. Aux yeux de Vic, c’était une sorte de pause qu’ils s’étaient accordés. Pas une rupture. Elle ne voulait pas voir cela ainsi, et elle fut soulagée que Jacob aime le terme employé. Cela voulait dire qu’il y avait une suite possible entre eux.

Ils touchaient au cœur du problème. Est-ce que Jacob était capable de laisser tout cela derrière eux, de lui faire à nouveau confiance. Elle avait besoin de l’entendre de sa bouche pour être certaine qu’un futur était envisageable. Un regard pour ses doigts que Jacob venait de saisir. Puis elle releva le visage afin de le regarder. Son cœur se mit à cogner plus fort. Elle ne l’avait pas perdu. Un timide sourire étira avec lenteur les lèvres de la jeune femme. Elle le couva d’un regard rempli de douceur et d’amour. « -bien sur… » souffla Vic avant de reprendre : « -bien sur que je vois de toi… » un léger rire en détourna le visage en l’entendant lui demander de l’embrasser. Elle combla le peu de distance qu’il y avait entre eux, et l’embrassa en souriant contre ses lèvres. Elle avait envi de pleurer de joie. Un soulagement infini venait de délester ses épaules d’un grand poids. Lorsqu’elle recula, elle posa son front contre celui de Jacob. « -tu m’as tellement manqué… »

Ce temps, Jacob le lui avait octroyé pour qu’elle guérisse les blessures de son passé, et qu’elle lui revienne à l’issue. Pas une seconde, il avait envisagé de confier son cœur à une autre femme que Victoria. Pourtant, ce n’était pas les opportunités qui avaient manquées durant ces derniers mois. Lors de leurs soirées entre collègues, il avait eu plusieurs fois la possibilité de rentrer accompagné, mais avait décliné à chaque fois, au grand damne de ses confrères qui ne comprenaient pas son choix. Il n’avait aucune femme qui l’attendait ce soir, en rentrant chez lui. Mais dans son esprit, il en était tout autre. Elle était là, quelque part et il l’attendait. Et ce soir, il savait qu’il avait fait le bon choix en lui donnant ce temps dont elle avait tant besoin. Victoria était et resterait l’amour de sa vie. Il en était convaincu. Peu importe le mal qu’elle avait pu lui faire quelques mois auparavant. Il s’en moquait aujourd’hui. Elle était là, devant lui et c’était tout ce qui lui importait à ce jour « C’est pour cela que je n’ai pas envoyé de message. Je me suis dit que tu saurais me trouver le jour où tu te sentirais prête à revenir vers moi ». Il avait confiance en la vie et en la jeune femme. Victoria avait des blessures à guérir, un deuil à terminer, même si Roberto était toujours en vie. Elle devait tirer un trait sur leur relation passée, sur cette mort qui n’en était pas une, sur l’homme qu’il était réellement, sur son arrestation. Maintenant, la question qui suivait les concernait. Est-ce qu’il était prêt à lui pardonner ce mal qu’elle lui avait fait et à tourner la page de cette épisode de leur relation.

Pour première réponse, Jacob entrelaça ses doigts aux siens et lui avait rappelé qu’elle ne le connaissait pas suffisamment pour lui poser une telle question. Peu importe ce que l’avenir leur réservait, peu importe les disputes, toute cette histoire appartenait au passé. Enfin, si elle voulait de cette histoire. Un sourire étira les lèvres du chirurgien quand elle lui répondit que oui. Elle voulait de lui « Parfait » rétorqua-t-il donc avant de lui demander de l’embrasser. Il savoura son rire qui lui avait tant manqué, lui aussi et la laissa combler l’espace entre leurs lèvres, répondant ainsi à son baiser avec tendresse. Son front contre le sien, il souffla un « Toi aussi… Je t’aime tellement Vic » et l’embrassa de nouveau, avant de désigner le chemin qu’ils venaient d’arpenter de la tête « On retourne à la fête ? ». Sa main dans la sienne, ils retournèrent aux festivités. Il retrouva ses parents, dansant avec ceux de Victoria, ce qui le fit sourire avec tendresse. Il attira la jeune femme à lui et l’embrassa de nouveau aux yeux de tous, prenant le temps de savourer le goût de ses lèvres après tout ce temps loin d’elle, et se recula légèrement en soufflant « Je ne veux plus me cacher… » et n’eut le temps d’embrasser Victoria une nouvelle fois qu’il entendit Eva crier de joie au loin « Enfin ! », ce qui fit rire Jacob qui nicha son visage dans la chevelure brune de cette dernière « Allez, viens danser », et l’attira près de leurs parents, après un regard complice avec les parents de cette dernière, et dansa avec Victoria sur la musique latine qui résonnait dans toute la rue « Je suis un mauvais danseur, alors tu peux me guider » répliqua-t-il.

Ils venaient de s’embrasser. Ils venaient de se dire à nouveau oui d’une certaine façon. Jacob était d’accord pour l’aimer encore. Vic était soulagée et elle avait la sensation de pouvoir à nouveau respirer convenablement. Il lui avait tellement manqué. Elle en prit un peu plus conscience encore avec le gout de ses lèvres et son corps contre le sien. « -je t’aime… » avait elle soufflé avant de lui rendre son baiser, et de recommencer ainsi deux autres fois. Elle voulait qu’il le comprenne et qu’il l’imprime en lettre d’or dans son esprit. C’était lui et personne d’autre. Un hochement de tête en gardant sa main dans la sienne. Elle n’avait même pas calculé que les membres de leurs familles allaient ouvrir des yeux comme des soucoupes. Vic avait sourit en voyant ses parents danser, tout le monde était de bonne humeur, riait et chantait. Elle fut surprise de l’initiative de Jacob mais lui rendit bien vite son baiser avec envie. « -ça me va… » lui avait elle soufflé en souriant, complice. Elle se mit à rire de bon cœur en entendant Eva. Puis elle adressa un regard tendre à sa mère.

Dix mois plus tard, bien des choses avaient changé…
La mère de Vic avait écouté Jacob, et elle avait passé ses examens. Cancer du sein. Il y avait eut une opération, puis une seconde, mais depuis quelques temps, elle se sentait mieux, avait un peu plus d’énergie.

Vic n’avait jamais remit les pieds à l’appartement. Ils avaient décidé de faire les choses en douceur et surtout de trouver cette maison avec baignoire, terrasse et grande cuisine ouverte, dont ils avaient parlé. Ils avaient cherché quelques semaines et avait trouvé la maison parfaite. Vic avait bien vu l’espoir dans les yeux de Jacob quand on leur avait montré les chambres. Une suite parentale, trois autres chambres. Ils n’avaient pas prit le temps de reparler d’enfants. Ils avaient emménagé, et la vie était douce et paisible. Vic tentait de savourer chaque moment, même s’il y avait des jours où c’était moins évident. Trop de travail, trop de fatigue…

Eva avait mise au monde un petit garçon, quelques semaines après la fête du quartier. Lisandro… et aujourd’hui, la jeune maman avait appelé Jacob et Vic à l’aide. Le bébé dans une écharpe de portage, le sac change posé au sol, les cernes et les cheveux en vrac, elle avait débarqué chez eux pour les supplier de garder quelques jours le petit. Vic venait de prendre le petit dans les bras lorsque la question avait été posé. Un regard pour Jacob alors qu’elle faisait déjà des sourire au bébé. Ça ne la gênait pas. « -je peux prendre quelques jours de repos. » Vinz lui devait encore des heures supp’ qu’elle avait cumulé quelques mois plus tôt.

En sentant les lèvres de Victoria se poser sur les siennes à sa demande, Jacob éprouvait la douce sensation que tout serait différent dorénavant. En tout cas, il comptait faire en sorte que ça le soit. C’étaient aux côtés de la jolie brune qu’il voulait avancer dans la vie, sa main dans la sienne. Il n’imaginait pas sa vie sans elle, et encore moins son futur. Et même si rien n’était vraiment écrit, il savait au plus profond de son être qu’elle lui était destinée à tout jamais. C’était donc sans crainte, sans appréhension, qu’il dévoila leur relation aux yeux de leurs proches, déposant ses lèvres sur les siennes. Il ne voulait pas plus se cacher. Il voulait pouvoir la serrer dans ses bras, l’embrasser, sans constamment faire attention. D’autant plus que leurs deux familles n’attendaient que cela les concernant. Et alors qu’il aspirait à une vie plus paisible dorénavant, ce fut nullement le cas. Les dix mois qui suivirent apportèrent son lot de changements et de chamboulements. Comme promis, Jacob avait pris le temps de parler à la mère de Victoria. Il était parvenu à la convaincre de rencontrer des spécialistes, les meilleurs de la ville, et d’accepter d’approfondir les analyses. Cancer du sein. Le diagnostic fut sans appel et tenta d’être un soutien sans faille pour Victoria dans cette période compliquée pour elle et ses proches. En parallèle, la jolie brune ne voulait pas revenir dans cet appartement qui renfermait bien trop de souvenirs pour eux deux. Ils avaient donc engagés les recherches de maison et il avait suffit que de quelques semaines pour parvenir à trouver la perle rare. Une jolie maison rassemblant l’ensemble de leurs critères, et notamment des chambres supplémentaires. En visitant, il avait nourris le doux espoir d’y voir un jour des enfants occuper ces murs. Mais il avait gardé cette envie d’être un jour le père de l’enfant de Victoria pour lui, d’autant plus qu’Eva venait de mettre au monde son neveu et que ça faisait inexorablement remonter des douloureux souvenirs chez la jeune femme. En attendant d’aborder le sujet avec sa moitié, Jacob avait pris à cœur son rôle d’oncle avec le jeune Lisandro, de telle sorte qu’un matin, il avait vu Eva débarquer chez eux, le bébé contre elle, et à bout de force.

Le bébé avait rapidement trouvé refuge dans les bras de sa tante avant même que Jacob n’ait eu le temps de répondre quoi que ce soit. En fait, il était surtout obnubilé par l’image que renvoyait la jeune femme berçant l’enfant dans le creux de ses bras, la couvant tendrement du regard. Il fut extirpé de ses pensées par le claquement de doigts d’Eva devant ses yeux « Eh ! Tu réponds » « Oui, oui. Allez vous reposer. On s’en occupe » « Oh merci ! » et elle avait serré son grand frère dans ses bras avant de venir embrasser son enfant, serrant Victoria dans ses bras à son tour, et après un nombre incalculable de remerciements, elle avait quitté leur maison pour les laisser seul avec le bébé. Dos à la porte d’entrée, il les observait en souriant « Je vais en prendre aussi » et se détacha de la porte pour se rapprocher, sa main dans le dos de Victoria et l’autre sur la tête de Lisandro « Alors comme ça, tu fais vivre un enfer sur Terre à tes parents petit être ? » et déposa ses lèvres sur la tempe de la jeune femme « Je vais appeler l’hôpital ». Ce qu’il fit, s’absentant quelques minutes, puis revint vers elle « Ça va Bonito Corazòn ? ».