Tu te retournes un peu quand tu la vois venir dans l’encadrement de la porte et souris en croisant son regard. Tu pouffes un peu en lui montrant ton dos avant de buguer un peu sur son cou. Ouais, non, tu t’étais bien vengé pour le coup, mais tu te retiens de lui dire, voulant voir sa tête quand elle le remarquera. Peut-être que t’es monté trop haut dans le cou et que ce sera violet dans deux jours, mais tu t’en fiches bien là pour le coup. Tu rigoles doucement avant de t’approcher de la baignoire. Tu redresses la tête.

- Hum ? Oh, on s’est organisé une sortie piscine dans un parc aquatique avec l’équipe pour fêter l’transfert d’Jürgen. Il va dans l’Sud. Et on récupère un Berlinois en échange. Un p’tit jeune d’vingt ans, un défenseur. Donc on avait prévu d’se retrouver à la piscine pour fêter ça, créer des liens et accueillir l’nouveau. Rien d’méchant.

Tu essayes de voir la température de l’eau avant de commencer à te doucher et fronces les sourcils à sa deuxième question. Tu hausses les épaules, n’ayant pas vraiment de réponses concrètes à pouvoir lui offrir.

- J’sais pas… Cinq kilos ? Plus ? J’sais plus. T’façon, j’ai pris d’la masse quand j’ai tapé mes trente ballets… Une fête qui a duré toute la nuit et j’ai gagné un panneau de signalisation en cadeau. Un délire. Puis j’ai maint’nu les entraînements à la salle du coup… Donc j’saurais pas dire. Pourquoi ?

Que tu demandes, avec sincérité et innocence, ne voyant pas pourquoi cela l’intéressait maintenant. Peut-être qu’elle avait remarqué dans la nuit ou là, avec le recul en te voyant de toute ta hauteur. Et nu aussi. Ça aide. Tu lui fais signe.

- T’viens ? J’te connais, tu vas vouloir qu’j’en prenne une deuxième avec toi, autant la faire maintenant à deux.

Une sortie piscine pour fêter la mutation d’un collègue et l’arrivée dans l’équipe d’un petit nouveau, tout droit venu de Berlin. C’est plutôt une bonne chose, une bonne nouvelle et c’est une idée plutôt chouette. Une occasion qu’il ne peut pas manquer. Pourquoi devrait-il rater cette occasion à cause des marques dans son dos ? C’est rien, ça sera parti d’ici là. Enfin, elle espère que ça le sera. Et puis, même si ça ne l’est pas… Qu’est-ce que ses camarades pourraient lui reprocher ? D’avoir passé du bon temps ? Comme s’ils n’en faisaient pas de même, eux.

”- Oh c’est cool ça, pourquoi tu devrais laisser tomber ? Y’a pas de raison… Quoi, ils verront que tu t’es bien amusé ? Et alors ? qu’elle demande, penchant la tête sur le côté. ”Faut être fier de ses blessures de guerre, les exposer fièrement…” son sourire mutin s’élargit. ”Vous y allez quand, d’toute façon ?”

Il entre sous le jet de la douche après en avoir vérifié la température et elle reste là, s’adossant au cadre de la porte en le regardant faire, continuant tranquillement leur discussion comme elle le questionne sur cette masse musculaire qu’il semble avoir développé depuis la dernière fois qu’ils se sont vus. Elle ne s’est pas trompé, puisqu’il pense avoir pris plus ou moins cinq kilos, mais le rappel qu’il a eu trente ans lui fait baisser la tête, masquant son émotion. Il avait eu trente ans, ouai. Quand elle en avait eu vingt. Elle aurait dû être là. Elle aurait dû être avec lui. Ils auraient dû faire un truc de folie pour fêter cette dizaine qu’ils atteignaient tour à tour. Mais la vie en avait décidé autrement. Elle en avait décidé autrement. Elle hausse les épaules, sans le regarder.

”- Parce que, j’aime bien…”

Il l’invite à le rejoindre, affirmant qu’il la connaît et qu’elle lui réclamera probablement une douche à deux tout à l’heure, donc autant le faire maintenant. Elle acquiesce, entrant dans la baignoire pour le rejoindre, gardant la tête basse, encore contrariée. Il avait eu trente ans. Trente ans bordel. Et elle n’était pas là.

Parler ainsi, dans la salle de bain alors que vous veniez de faire l’amour plusieurs fois en quelques heures, sans ambiguïté, sans problème, sans pudeur, ça t’avait manqué. La retrouver d’une manière ou d’une autre t’avait manqué. Tu rigoles doucement à ses questions, alors qu’en plaisantant, tu avais dit que ce ne serait plus une si bonne idée que ça d’aller te pavaner torse-nu au parc aquatique avec le reste de l’équipe. Pas avec le dos que tu as actuellement, pas dans son état actuel. Tu secoues un peu la tête, sachant que la brune avait raison. Tu pourrais te montrer sans problème, tu l’avais déjà fait.

Ils sauront de toute façon ce qu’il s’est passé. Ils ne sont pas idiots. Juste un peu de temps en temps, mais pas comme ça. Tu réfléchis un peu alors que l’eau coule sous ta main et grimace.

- Samedi pro ? Ou vendredi, j’sais plus… Fin de la semaine en tout cas. C’est marqué dans mon tel de toute… T’sais, j’suis capable d’zapper facile, donc...

Encore un bel inconvénient de ce qui peut se passer dans ta petite tête. Accepter beaucoup de chose et les oublier si tu ne les marques pas quelque part. Ton téléphone et ton calendrier, placardé sur ton frigo, sont des atouts sans failles. Et la mémoire de tes proches aussi, mais ça… Tu souris finalement quand elle te rejoint avant d’observer sur son visage une petite moue attristée. Tu fronces un sourcil alors qu’elle hausse doucement les épaules en réponse à la remarque sur ta prise de masse. Tu baisses le visage pour être face au sien, sachant très bien que votre différence de taille joue beaucoup.

Tu souris un peu et poses un doigt sous son menton pour le soulever, la forcer à croiser ton regard pour l’embrasser doucement.

- C’est quoi cette moue, Princesse ? Hum ?

Elle semble soudainement comme… Contrariée. Tu ne sais pas si tu dois être soulagé ou non de réussir encore après tout ce temps à la décrypter aussi rapidement. Tu décides alors de transformer le moment douche en bain, baissant le bouchon de la baignoire et laisse l’eau monter doucement, la guidant pour s’asseoir entre tes jambes. Tu sais qu’il y a assez de place pour vous, pas comme si vous aviez déjà essayé avant.

- C’est quoi cette tête que tu m’fais ? J’ai dit quoi ?

Évidemment, l'homme ne sait pas, ne sait plus, quand est-ce qu'il a rendez-vous avec les garçons pour cette sortie à la piscine. Ça pourrait être samedi prochain, comme vendredi, il n'en a pas souvenir. C'est marqué dans son téléphone, évidemment. S'il n'avait pas un agenda, il oublierait la plupart de ses rendez-vous. Enfin, tous ceux que Lisa n'est pas capable de lui rappeler, parce qu'elle n'en a pas connaissance, parce qu'il ne l'a pas prévenu, parce qu'il a déjà oublié le temps de le lui dire. Heureusement qu'il a la jolie blonde dans sa vie, pour lui servir de pense-bête bien souvent.

"- Pourquoi est-ce que ça ne m'étonne même pas un petit peu ?" demande-t-elle avec un sourire.

Mais son sourire fane rapidement lorsque l'homme évoque sa prise de masse survenue notamment lorsqu'il avait passé le cap des trente ans. C'était un événement qu'elle n'avait pas vécu avec lui, un anniversaire auquel elle n'avait pas assisté et ce rappel est particulièrement difficile. Elle sait qu'elle aurait dû être là, que ça aurait dû être un moment heureux pour tous les deux, qu'ils auraient dû faire quelque chose ensemble pour marquer le coup. S'ils avaient été ensemble, elle aurait peut-être organisé un anniversaire surprise avec Lisa ou un beau voyage pour tous les deux. Mais elle n'avait rien fait. Elle n'avait rien fait parce qu'il n'était plus son petit ami à l'époque et ce rappel est difficile. Douloureux. Elle s'en veut.

Évidemment, l'homme remarque rapidement que quelque chose ne va pas, que quelque chose tracasse sa petite amie et, la questionnant, il glisse un doigt sous son menton pour lui faire relever la tête, la forçant à le regarder tandis qu'il vient cueillir ses lèvres. Puis, il ferme la baignoire avec la bonde et transforme la douche en bain, avant de s'installer, attirant sa belle entre ses jambes pour s'y asseoir. Là, alors, il répète sa question, soucieux de savoir ce qui la tracasse, ce qui vient ternir son beau visage.

"- J'étais pas avec toi." elle souffle. "T'as eu trente ans, c'est important et… et j'étais pas là. On… on aurait dû…"

Ils auraient dû être ensemble, célébrer ça l'un avec l'autre. S'éveiller dans les bras l'un de l'autre. Mais l'idée qu'il se soit réveillé seul dans son lit au matin de son anniversaire, comme elle au matin de ses vingt ans, lui brise soudainement le cœur.

Non, bien sûr que non. Rien ne l’étonne quand il s’agit de ta mémoire un peu foireuse. Cela n’étonne plus personne en fait en y réfléchissant. Tu es même sûr que la veille du départ pour le parc, tu auras un SMS par joueur du club et celui de l’entraîneur avec pour te le rappeler… Et Lisa aussi en passant si elle n’a pas oublié. Et Andreas sur un malentendu. Parce que sinon ce n'est pas drôle. Manquerait plus que Garrett et Erika s’y mettent, mais bon. Tu ne voudrais pas en arriver là, si ? Mais là n’est pas la question.

Tu vois surtout que la petite brune semble soudainement morose. Tu n’aimes pas ça et tentes d’en savoir plus, la calant contre toi pour la rassurer. Tu fronces les sourcils.

- Hein ?

Comment ça, elle n'était pas avec toi ? Tu attends la fin de son explication et baisse la tête. Oui, vu comme ça… Tu avais presque oublié tout ça. Tu avais presque oublié les trois ans qui vous ont séparé.

- Hey… Princesse… Tu pouvais pas savoir à l’époque… Viens là…

Que tu répètes en la gardant contre toi, lui caressant le dos en lui embrassant le front. Tu souris un peu, cherchant son regard. Tu sais très bien ce qu’elle ressent, en vérité. Ce jour-là, tu avais un peu fait la fête, mais ton cœur n’était pas vraiment présent. Lisa et Andreas avaient même été obligés d’écourter la soirée, faisant sortir les hockeyeurs de chez toi avant que tu ne fondes en larmes dans leurs bras. Tu n’avais pas dit réellement pourquoi tu avais été dans cet état. Disant juste que c’étaient les nerfs, que tu étais fatigué et que tu avais besoin juste de souffler.

Juste assez pour encaisser la solitude, encore une fois. Tu serres les dents avant de bercer la petite patineuse dans tes bras.

- C’pas grave… C’est derrière… On pourra pas rattraper c’qu’on a perdu, j’sais bien..

Que tu dis, conscient ce que cela pouvait impliquer. Tu recules pour croiser son regard en souriant. Tu prends ses mains dans les tiennes, lui embrassant le dos de chacune, hochant la tête pour lui prouver que tout ça, c’est fini.

- Mais ça veut pas dire qu’on peut pas prévoir maint’nant. Ensemble. On va pas faire les mêmes erreurs et on va juste avancer doucement, toi et moi… Mais ensemble... D’accord ?

Elle s'en veut, elle s'en veut énormément. Évidemment, réaliser qu'il a eu trente ans, c'est réaliser également tout ce qu'ils ont manqué, tout ce qu'ils ont raté, tout ce qu'ils n'ont pas vécu ensemble, ces dernières années, parce qu'ils n'étaient pas ensemble. Parce qu'elle avait décidé qu'il vallait mieux le quitter, le laisser libre, le laisser avancer. Quelle regrettable erreur ça avait été. Elle le regrette tous les jours depuis trois longues années, mais plus encore maintenant, dans ce bain, près de lui, quand elle réalise ce temps perdu qu'ils ne pourront pas rattraper. Et ça lui brise le cœur. Ça lui brise le cœur alors même qu'elle ignore à quel point la soirée avait été difficile pour le goalie, au point que ses meilleurs amis avaient décidé de l'écourter. Si elle savait ça, elle s'en voudrait d'autant plus d'avoir si mal jugé, à l'époque, de ce qu'il convenait de faire. Elle avait seulement voulu bien faire, convaincue qu'elle le freinait dans son existence, mais elle savait à présent que tout ça était sans nul doute la plus grosse erreur de sa vie toute entière.

Ce temps qui est passé ne pourra pas être rattrapé, jamais, elle en a conscience, lui aussi, et il le lui rappelle, d'ailleurs, tout en la berçant entre ses bras. Mais, pour autant, ça ne veut pas dire qu'ils doivent se morfondre sur la situation, au risque de perdre encore un temps précieux à passer ensemble. Maintenant, ils savent que la séparation n'est plus envisageable, plus jamais, comme ils se le sont promis. Cela veut dire que, désormais, ils vont pouvoir préparer d'autres choses. Pas rattraper le temps qui est passé, qui est perdu, mais ne pas perdre celui qui vient, au contraire, le croquer à pleine dents. Et cela ne veut pas non plus dire qu'elle ne peut pas lui offrir quelque chose maintenant, même si ça vient avec deux ans de retard...

"- Oui…" souffle-t-elle en reniflant pourtant. "Tu pourras me confirmer le calendrier des prochains mois ?"

Ce sera plus simple pour prévoir quelque chose, pour pouvoir éventuellement songer à partir ensemble cet été, pendant leurs trèves respectives, s'il n'a pas d'entraînement supplémentaires. Cela lui permettra de voir s'il n'a pas déjà un weekend ou un séjour de prévu avec son équipe, voire avec ses meilleurs amis, sait-on jamais. Une fois qu'elle saura quels sont ses projets pour les semaines à venir, elle pourra éventuellement réfléchir à en intégrer d'autres dans son emploie du temps, ou au moins savoir de combien de temps ils disposent pour faire des choses ensemble dans ce même laps de temps.

"- Tu as déjà prévu des choses cet été, ou j'ai le champ libre pour te kidnapper ?"

Tu essayes de la rassurer comme tu as toujours su faire avec elle. Tu n’as jamais aimé la voir ainsi, tu as toujours eu un pincement au cœur en voyant son regard fermé, triste. C’est comme ça. Elle a toujours eu sur toi cet espèce d’emprise, de charme incontrôlable qui t’a toujours empêché de réfléchir posément et de réagir encore plus par impulsivité, voulant juste revoir son sourire et chasser les nuages au-dessus de sa tête. Tu coupes l’eau en voyant qu’elle vous couvre bien, qu’elle pourrait déborder si vous vous agitez et continue de la bercer.

Tu hoches doucement quand elle parle des mois prochains, voyant très bien où elle voulait en venir. De toute façon, ce sera bien mieux pour vous organiser avant que tu ne pètes un boulon à cause de rendez-vous que tu oublies. Tu te grattes un peu la tempe.

- Ouais. J’te rajouterais dans l’calendrier en ligne pour que tu puisses voir ça quand tu veux. Lisa en profite parfois pour vérifier qu’j’ai tout fais.

Tu rigoles un peu en repensant à cette application de calendrier connecté. Une idée d’Andreas ça. Mais qui fonctionnait bien pour le moment. Tu rentrais tes rendez-vous, Lisa et Andreas pouvait rajouter des sorties en avance pour que tu puisses y réfléchir, y penser, accepter ou non. Si tu rajoutais la brune, se serait et plus pratique pour toi pour t’organiser avec elle. Tu lèves les yeux au plafond en réfléchissant.

- Cet été ? J’crois qu’j’ai ma place pour des extra au café si jamais, mais non… J’peux m’libérer, ouais.

Tu souris et touches son nez avec le tient.

- Pourquoi ? T’as déjà des idées ?

Ce ne serait pas étonnant d’ailleurs. Même si cela ne faisait pas vingt-quatre heures que vous étiez de nouveaux ensembles, vous connaissez déjà vos manières de faire, vos habitudes et vos caractères, ce sera bien plus simple pour la suite, mine de rien.

Il coupe l'eau et elle reste simplement contre lui, la tête contre son épaule, s'entend son buste contre son dos, son épiderme contre le soin, et son souffle qui lui caresse la joue, l'oreille, quand il reprend la parole. Oui, il ajoutera dans le calendrier en ligne qu'il a mis en place avec Lisa, à priori. Elle acquiesce d'un mouvement de tête. Si Lisa a accès au calendrier, alors Cornelia et à peu près sûr que ce dernier ait tenu à jour en tant presque réel, si bien qu'elle sait alors qu'il est plutôt fiable. Ce qui lui permet donc d'envisager pouvoir s'y fier. En tout cas, bien plus qu'à la mémoire de son petit ami.

"- Seulement parfois hein ?" souffle la demoiselle avec un petit sourire entendu.

Il sait ce qu'elle veut pointer du doigt par là. Elle sait que Lisa est un peu comme son pense-bête, sa raison, la personne qui lui permet de ne pas perdre le cap dans la liste des choses à faire. C'est sûrement elle qui lui rappelle de faire ses déclarations pour les impôts et tout le reste. Lui, il serait capable d'oublier et d'avoir des problèmes avec l'administration.

"- D'accord… ils sont déjà dans l'emploie du temps ou c'est trop tôt ?"

Vu la saison, ça ne l'est probablement pas, mais elle sait que dans la restauration, les horaires ne sont pas toujours connus très en avance. Parfois, il a son planning seulement deux ou trois semaines à l’avance alors… Ils verront bien. L’avantage d’être en extra, c’est qu’il peut se mettre en indisponibilité certaines semaines ou au moins quelques jours, pour qu’ils puissent partir un peu tous les deux.

”- Mhh sûrement pas très loin parce qu’on s’y prend tard et que ça risque d’être hors de prix.” sourit-elle en frottant son nez contre le sien.

Alors oui, elle a des parents aux revenus corrects à côté de ses sponsors et Den a une famille plutôt aisée mais… Elle ne peut juste pas, psychologiquement, dépenser l’argent comme si ce n’était rien. Sauf pour le patinage et les compétitions. Evidemment, ça, c’est toujours à part. Toujours un autre débat.

”- Je vais y réfléchir.“ promet-elle. ”Tu attaques quand au café ? Que je sache quand je pourrai venir t’y déranger, quand tu me manquera trop ?” demande innocemment la brune en lui adressant un sourire.

Parfois... C’est ce qu’elle demande, qu’elle souffle avec son sourire ravageur qui sait pertinemment que ta mémoire n’est pas non plus tout le temps au rendez-vous. Tu lèves les yeux aux ciels quand elle le fait remarquer et hoches la tête en signe de reddition.

- Bon ok… j’oublie… Beaucoup moins depuis qu’j’ai mes médoc, mais j’oublie parfois...

Que tu confirmes avant de rigoler, te redressant un peu pour récupérer le gel douche, commençant à lui laver ses épaules en premier. Tu lèves un sourcil quand elle pose la question pour l’emploi du temps, mais… De mémoire, parce que ça, oui, tu arrives à t’en souvenir si besoin, non… Tu n’as pas grand-chose, le plus récent et les plus évidents. Les week-ends les plus chargés à la limite, dont vous savez chaque année qu’une flopée de personne passera la porte et que vous allez être dévalisé en pâtisserie. Mais c’est tout. Tu lui caresses le dos et souris.

- J’ai quelques dates, ouais. Mais pas plus.

Que tu réponds avant de lui embrasser le front. Tu attends ensuite sa réponse pour savoir ce qu’elle a prévu et rigole doucement. Ouais, bon, ce qui est hors de prix pour toi ne l’est pas vraiment, elle le sait, même si tu n’aimes pas non plus afficher que tu viens d’une famille qui n’a pas besoin de réfléchir quand ils font leurs courses… Ou qui roule dans des voitures qui sortent du garage une fois l’an parce qu’il y en a douze qui attendent, la carrosserie luisante, derrière.

- Bah, au pire, j’irais prendre d’l’argent d’ mon père. Il dira rien.

Que tu dis en pouffant avant de reculer pour commencer à te passer du gel douche sur le torse. Tu la laisses dire qu’elle compte y réfléchir avant de demander pour le démarrage du café et tu hoches la tête. Tu souffles un peu et grimaces.

- À la fin de la saison. Puis au pire, tu peux venir m’déranger après les entraînements, comme tu as toujours fait. Ou… J’te kidnappe après les tiens.

Tu pouffes avant de l’embrasser sur le nez. Parce que oui, tu serais capable d’allier la parole et les actes.

Evidemment, elle fait mouche. Il oublie beaucoup moins de choses depuis qu’il prend ses cachets mais évidemment, ce n’est pas non plus efficace à 100%. Il oublie encore des trucs. Parfois. Parfois mais probablement souvent, en réalité. Parce qu’elle le connaît et parce que les médicaments ne peuvent pas non plus faire de miracles, elle en a parfaitement conscience. Elle sait comment il est et, s’il changeait, ce ne serait plus tout à fait lui. Elle aime autant, donc, que les médicaments ne le changent pas trop. Elle l’a toujours aimé tel qu’il était, avec sa mémoire défaillante et son impulsivité. Avec ses petits défauts qui le rendent parfait, qui composent toute sa personnalité.

Il passe ses doigts dans son dos pour la savonner et elle se laisse porter par la sensation délicieuse qu’il provoque avec ces caresses, fermant les yeux un instant, le temps d’apprécier la chose comme de rassembler ses pensées, les organiser. Elle réfléchit déjà à la possibilité de rattraper ces vacances d’anniversaire qu’ils n’ont pas prises, faute d’être ensemble. Elle sait qu’elle ne pourra pas rattraper le temps perdu, mais ils peuvent commencer à cesser d’en perdre. Regarder non pas vers le passé mais vers l’avenir. Elle s’est peut-être laissée un peu abattre juste avant mais son côté de gagnante refait surface. Elle n’est pas le genre qui abandonne, pas le genre qui baisse les bras, pas le genre qui n’obtient pas ce qu’elle veut. Non.

"- Oui, mais non. Je veux pas avoir l’impression de devoir quelque chose à ton père, ni même à ta famille. Je ne veux pas avoir à dépendre ni de mes parents, ni des tiens. Je me débrouillerai !"

Elle ne choisira peut-être pas les Bahamas, faute de moyens, mais ce sera bien quand-même. De toute façon, ils n’ont jamais besoin de partir très loin pour passer de bonnes vacances, du moment qu’ils sont ensemble. Ce qui compte, c’est la connexion l’un avec l’autre. Se retournant vers lui, elle vient voler ses lèvres, remplaçant les mains d’Aayden sur son buste.

"- Laisse moi t'aider avec ça..." murmure-t-elle contre ses lèvres avant de reprendre. "Mhhh ouai, c'était pour savoir quand venir te déranger où, surtout..." son sourire s'élargit. "Tu crois que c'est toujours du kidnapping si c'est consentis ?"