Univers fétiche : Dystopique, fantastique, mythologie, etc.
Préférence de jeu : Les deux
Asma
Jeu 1 Déc - 6:28
Orion
J'ai 27 ans et je suis originaire de l'arche de Zéphyr. Dans la vie, je suis pilote d'aérostat et je m'en sors très bien. Sinon, j'étais célibataire et je le vivais très bien, mais on m'a arrangé un mariage, et je le vis un peu moins bien.En savoir plus.
Gagner du temps. Gagner du temps pour essayer de trouver une idée. C'était tout ce qui importait, désormais.
- Nous faisons naturellement l'acquisition de ce pouvoir dès notre plus jeune âge, alors il devient rapidement une extension de nous, commença Orion d'une voix mécanique. Pour comprendre un peu mieux ce pouvoir et sa façon de fonctionner, je dois vous expliquer comment les masses d'air se meuvent naturellement dans le ciel.
Le jeune homme se lança alors dans un long exposé sur Olympe, les vents, les déplacements des masses d'air et les flux que l'esprit de famille avait mis en place et gérait pour les routes qui relaient les arches. La façon dont chacun d'entre eux participaient à ce flux. Comment les navigateurs ne fabriquaient pas du vent en tant que tel mais manipulaient l'air présent autour d'eux. Il fallait déjà qu'elle apprenne à ressentir l'air présent autour d'elle, puis qu'elle essaie d'y imprégner un mouvement.
Astréos avait bien insisté sur le fait que c'était le pouvoir fondamental qu'elle devait acquérir. Orion savait que c'était parfaitement faux, mais il était supposé l'ignorer. Il aurait beau jeu de dire à l'intéressé qu'il avait mis le sérieux et le zèle nécessaire pour appliquer ses consignes à la lettre.
Tout en parlant, Orion s'était relevé lentement et avait entrepris de faire le tour de la pièce, à la recherche de quelque chose qui pourrait l'aider. Mais de quoi ? Une idée. Une inspiration. Quelque chose pour communiquer plus librement, déjà. Une feuille ? De quoi écrire ?
Il fit signe à la jeune femme de ne pas bouger de là où elle se trouver, et d'essayer effectivement de tester ce pouvoir. Il ne savait pas dans quelle mesure cela les aiderait, dans leur situation, mais éviter que la jeune femme ne provoque accidentellement des catastrophes n'était dans tous les cas pas forcément une mauvaise chose. Il retira la veste dans laquelle il étouffait et la jeta sur le rebord du canapé. Il détacha le bouton de col et les boutons de manchette de sa chemise blanche et replia les manches de celle-ci jusqu'aux coudes. Il serait plus à l'aise ainsi pour se mouvoir.
Il ouvrit des tiroirs, du plus délicatement qu'il pût, tout en parlant pour que le son de sa voix couvre les éventuels bruits que ses gestes pouvaient causer. Lui qui était plutôt taciturne n'avait jamais autant parlé d'affilée de toute sa vie. Leurs vies - celle d'Erika du moins - en dépendaient.
"Ne la perds pas", avait dit sa grand-mère. Ne parlait d'elle vraiment que de l'alliance ou aussi de la fille ? Sa grand-mère savait-elle quelque chose qu'il ignorait sur les motivations des deux Grands maîtres ? Le Conseil était-il au final derrière tout cela ? Ou bien s'agissait-il d'un sombre projet de sa guilde, seule ? Il avait pris sa décision. Il ne la laisserait pas à son sort sans rien faire.
- Vous pouvez utiliser vos mains, pour vous aider à mieux visualiser le mouvement, reprit-il.
Il faisait des allées et venues entre l'emplacement où se trouvait la petite brune et les endroits qu'il allait inspecter les uns après les autres. Il corrigea sa posture, alla vérifier un placard, revint lui montrer une nouvelle fois un geste à faire, repartit inspecter l'arrière de l'autel. Si elle avait déjà du mal avec son pouvoir natif, serait-elle vraiment capable de faire quelque chose d'un pouvoir ainsi transféré ? Le capitaine ne pût réprimer une petite moue circonspecte.
Placard, tiroir. Rien. Rien d'utile pour lui, du moins. Pas de feuille, de plume, ni de stylo. Quelques rafraîchissements avaient été mis à disposition des "convives" par leurs hôtes. Près des verres, Orion trouva quelques minuscules serviettes en papier. Ça, ça pouvait servir. Mais sans rien pour écrire dessus, elles lui étaient parfaitement inutiles.
À tout hasard, le jeune homme s'agenouilla devant un imposant buffet qui courait le long d'un des murs. C'était connu, il roulait souvent des choses sous les meubles, qu'on oubliait encore plus souvent d'aller récupérer. Le buffet ne fit pas exception à la règle. Désormais à plat ventre, il tendit le bras sous le meuble, dont il extirpa son trésor.
Un crayon papier ! Levant le bras en l'air d'un geste triomphant, il s'arrêta net en entendant l'appel d'Erika. Le grand brun fit volte-face et tomba sur le regard paniqué de la jeune femme. En trois enjambées, il fut face à elle. La dominant de toute sa hauteur, il plongea son regard dans le sien. Il sembla hésiter quelques instants, avant de reprendre la parole de la voix la plus posée qu'il pût.
- Comme me l'a demandé le Maestre, il faut tout de même que je vous parle de l'autre pouvoir, si toutefois il devait se manifester.
S'il était plutôt facile de parler de vent, comment mettre des mots sur ce pouvoir et tout ce qu'il impliquait ? Il concernait une part trop personnelle de lui-même. Et surtout, il fallait qu'il trouve le juste équilibre pour en dire suffisamment pour qu'elle comprenne, mais pas tant pour qu'une explication détaillée ne permette à une personne malveillante d'en faire un mauvais usage. Non pas qu'Erika soit une personne malveillante. Du moins, elle n'en avait pas l'air. Mais il ignorait encore ce que les Grands de sa guilde voulaient en faire.
- Ce…. Hum… ce n'est pas un pouvoir natif de Zéphyr. Ma mère… ma mère était arcadienne, se sentit-il obligé de préciser, un peu maladroitement.
Il toussota pour se redonner contenance. Son pouvoir créait des liens, avec des personnes, des choses, des lieux, des sensations, qui avaient la possibilité de devenir autant de points cardinaux sur la boussole de son esprit. Il ne perdait jamais rien. Il trouvait toujours ce qu'il cherchait. Il parvenait à visualiser ce qu'il cherchait dans son esprit, puis il se sentait guidé. Comme tiré par un fil invisible qui le guiderait vers sa cible. Quand l'objet de sa recherche était trop éloigné, la sensation était plus confuse. Il avait vaguement l'impression d'être au petit matin, avant les premiers rayons du soleil. Le monde autant de lui était terne, flou, et dans la bonne direction semblait apparaître le halo lumineux annonciateur du lever du soleil. Il n'aurait pas su l'expliquer autrement. Était-ce pour autant ce que tous les gens dotés de son pouvoir ressentaient ? Il n'avait jamais eu personne avec qui en parler.
- On commence par voir des gens ou des choses que l'on connaît. Comme une image qui se fixerait dans votre esprit. Et quand on cesse de la voir, on sait, dit-il en insistant sur ce dernier mot.
C'était une sensation impérieuse.
- On sait où aller.
Il la scruta, l'interrogeant silencieusement du regard. Était-ce cela qu'elle avait perçu ? Le jeune homme ressentit un complexe mélange d'émotions. De tous les pouvoirs qui ne fonctionnaient pas chez cette jeune femme, le seul qu'elle arrivait à déclencher était bien évidemment celui qui risquait de causer sa perte. Pour autant, si ce n'était pas qu'un malentendu, ce serait aussi la première fois de sa vie qu'il se retrouverait en face de quelqu'un qui partageait son pouvoir d'Aiguilleur. Il n'arrivait pas à la lâcher des yeux. Il aurait aimé lui poser milles questions, mais il n'était libre d'en formuler aucune. Un intense sentiment de frustration l'envahit.
Le crayon !
Orion retourna près des verres, saisit une serviette et griffonna sur celle-ci. Il la leva sans un mot vers elle.
"Ils ne doivent pas savoir."
Il reposa la serviette et ajouta deux mots.
"Moi si."
Il reprit alors à voix haute.
- Essayons quelque chose, si vous le voulez bien. Simple vérification. Vous permettez ?
Orion prit les mains d'Erika entre les siennes. Elle avait vraiment des mains minuscules. Son regard s'arrêta une fraction de seconde sur l'anneau à son doigt. Il n'arrivait pas à croire qu'il était officiellement marié à ce petit bout de femme. Il chassa rapidement cette idée de son esprit et poursuivit.
- Concentrez-vous sur moi. Fermez les yeux. Je vais m'éloigner et vous essayerez de me localiser. Sans bouger d'où vous êtes.
Il lâcha ses mains et s'écarta sans un bruit, allant se poster plus loin dans la pièce, légèrement dans son dos.
Messages : 206
Date d'inscription : 26/07/2022
Région : IDF
Crédits : fleacircus.ig
Univers fétiche : Fantastique
Préférence de jeu : Les deux
Jen
Jeu 1 Déc - 17:35
Erika
J'ai 24 ans et je vivais à Sidh, XVIème arche majeure. Dans la vie, je suis fille de famille inlfuente et je m'en sors bien selon moi, mal selon mon père. Sinon, grâce à ma malchance, je suis fiancée par arrangement et je le vis plutôt mal, évidemment.
Heureusement, Orion sembla immédiatement saisir le message. Erika relâcha très légèrement la pression. Il allait peut être l'aider - comment elle n'en savait rien. L'aider contre quoi et pour quoi faire, elle n'en savait rien non plus. Tout ce qu'elle pouvait faire, c'était écouter très attentivement chacune des paroles du grand brun pour espérer y déceler un quelconque indice. Elle s'y attela du mieux qu'elle pu.
Le capitaine sembla mal à l'aise, cherchant ses mots pour commencer son explication. Erika l'encouragea avec insistance du regard. Il devait lui en dire le plus possible, et apparemment le plus discrètement possible. Son explication fut plutôt sommaire, mais la jeune fille hocha vigoureusement de la tête avide de comprendre. Oui, cela ressemblait fortement à ce qu'elle venait de ressentir. Elle avait vu, et elle savait où aller. Non pas qu'il soit surprenant qu'elle sache que son père se trouvait en ce moment même dans son bureau, lui qui y était si souvent. C'était cette sensation qu'elle avait eue, d'être attirée par une force invisible vers cette vision de son père. Cette sensation qui lui semblait pouvoir la mener tout droit vers ce dernier. Comme si une part de son esprit était devenu une boussole, la guidant vers un point bien précis. Elle n'en était pas certaine et les sensations étaient très confuses, mais un fait était indiscutable : elle pouvait faire quelque chose qu'elle ne pouvait pas il y a de cela quelques minutes seulement.
Un silencieux échange de regard suivit la brève explication. Orion semblait être dans l'attente anxieuse d'une réponse ou d'un signe, et Erika s'efforçait de lui faire d'imperceptibles hochements de tête, le regard terrorisé par l'ampleur que prenait cette situation. Alors que la tension était à son comble, le grand brun fit brusquement volte face et se pencha au dessus des verres qui avaient été déposés un peu plus loin probablement à leur intention. Erika fronça les sourcils, qu'était-il entrain de manigancer ? Il attrapa une petite serviette en papier et sembla... griffonner ? Avait-il trouvé un moyen d'écrire ? Une lueur d'espoir s'alluma dans l'esprit de la jeune fille. Tout n'était pas encore perdu !
Avec curiosité, elle fit quelques pas en direction de la table basse pour déchiffrer le message écrit. Orion brandit la petite serviette et Erika hocha vivement de la tête le regard rivé sur les quelques mots jetés dessus. Elle était bien d'accord, moins ces gens en sauraient, mieux elle se porterait. Puis le capitaine rajouta deux autres mots. Moi si. Non pas qu'elle avait le choix de toute manière, il était sa dernière chance de salut. Elle hocha la tête plus timidement.
Orion s'approcha de nouveau et lui saisit les deux mains, en lui expliquant qu'il allait procéder à une simple vérification. La jeune fille approuva de la tête, comprenant qu'il lui faudrait nier en bloc à voix haute, même si elle parvenait à ressentir quoique ce soit. Il lui dit de se concentrer sur lui, de fermer les yeux, et de tenter de le localiser. Elle se mit alors à l'observer, et remarqua qu'il avait retirer sa veste d'apparat, et avait retroussé ses manches. Quelle chance, elle aurait elle aussi aimé pouvoir se mettre plus à son aise. Ses avants bras dévoilés faisaient ressortir tout particulièrement l'alliance fraîchement passée à son doigt. Elle observa l'anneau intensément. Il lui semblait plus facile de localiser ce petit objet que ce géant face à elle. Il était aussi beaucoup plus facile de détailler longuement du regard l'alliance plutôt qu'Orion.
Après quelques instants, le capitaine s'éloigna. Erika attrapa à son tour le crayon dans une main et la serviette dans l'autre, puis ferma les yeux.
"- Je suis prête, allez-y", fit-elle en prenant une profonde respiration.
Non seulement elle espérait que cela donnerait l'illusion qu'elle faisait de son mieux pour réveiller le pouvoir qu'elle était censée de pas avoir, mais surtout elle espérait ne pas réussir à réitérer ce petit exploit. Si elle n'avait hérité de rien, peut être que tout rentrerait en ordre. Ou alors serait-ce encore pire ? Des doutes l'assaillièrent, brouillant ses pensées. Mais elle devait se concentrer, maintenant plus que jamais. La jeune fille fit de son mieux pour chasser ses pensées alarmantes et tenta de se concentrer sur son objectif : localiser l'alliance.
Au début, elle vit rien, ne ressentit rien. Elle entendait seulement le bruit régulier de sa respiration qui s'apaisait lorsque ses yeux se fermaient. L'espace d'un instant, elle avait l'impression de ne plus être dans cette pièce étouffante, entourée de personnes plus inquiétantes les unes que les autres. L'espace d'un instant, elle crut retrouver sa sérénité. Elle pensa alors à l'image de cette alliance, au doigt d'Orion. Elle revoyait bien l'anneau, comme elle s'en rappelait quelques secondes auparavant. Et puis la vision s'élargit légèrement, et elle distingua quelque chose en arrière plan. Un meuble, probablement sur lequel Orion avait posé sa main. Elle voulut creuser l'image. Des tiroirs, et maintenant... Mince, pourquoi cela était-il si instable ? La main du capitaine bougeait-elle autant ou était-elle seulement incapable de maintenir son attention sur le petit objet ? Erika ne lâcha pas le morceau. Maintenant qu'elle avait saisi quelque chose, elle voulait aller jusqu'au bout.
Meuble en bois, tiroirs, bureau ? griffonna sa main tandis qu'elle gardait les yeux fermés. Elle laissa la vision l'attirer plus fortement jusqu'à ce que la boussole lui indique une direction. La certitude se fit dans son esprit. Derrière moi, gauche écrivit-elle à la suite.
"- Je suis navrée, je ne ressens rien du tout", lâcha t-elle d'un ton qu'elle voulait plat.
Lorsqu'elle rouvrit les yeux, elle avait pivoté sur elle-même et s'était retrouvé face à Orion - ou plutôt face à la bague qu'elle avait visualisé. Ses mains devinrent moites, et elle manqua de lâcher le crayon. J'ai réussi.
Erika avait la tête qui lui tournait. C'était irréel. Ce n'était pas entrain d'arriver. Elle n'avait pas activé le seul pouvoir qu'elle n'aurait jamais dû savoir utiliser. Si elle s'était sentie en danger jusque là, elle avait désormais l'impression d'avoir signé son arrêt de mort de sa propre main. Elle suffoqua. De l'air. De nouveau, elle tira sur le col montant de sa robe, en toussotant. C'était beaucoup, beaucoup trop d'informations d'un seul coup.
Avec le peu de contenance qu'il lui restait, elle ajouta sur la serviette :
"Que me veulent-ils ?"
Elle tendit la serviette à Orion, en cherchant son regard. Il lui fallait des réponses, elle devait comprendre de quoi il en retournait. Et elle devait savoir pourquoi le grand brun la regardait comme s'il dévisageait une condamnée.
Messages : 378
Date d'inscription : 01/04/2022
Crédits : graenfur
Univers fétiche : Dystopique, fantastique, mythologie, etc.
Préférence de jeu : Les deux
Asma
Jeu 1 Déc - 21:16
Orion
J'ai 27 ans et je suis originaire de l'arche de Zéphyr. Dans la vie, je suis pilote d'aérostat et je m'en sors très bien. Sinon, j'étais célibataire et je le vivais très bien, mais on m'a arrangé un mariage, et je le vis un peu moins bien.En savoir plus.
Le soleil commençait à descendre dans le ciel. Depuis combien de temps étaient-ils dans cette pièce ? Combien de temps leur restait-il à passer ensemble ? Il y avait encore peu, Orion se serait satisfait de passer le moins de temps possible avec Erika. Mais en l'espace de quelques heures à peine, tout avait changé.
Elle avait compris. Orion ne pût s'empêcher de ressentir un immense soulagement. Lui faisait-elle confiance ? Elle avait pourtant toutes les raisons du monde de refuser de lui accorder le moindre crédit, après tout ce qui s'était passé et toutes les horreurs qu'il avait été contraint de débiter. Elle semblait pourtant avoir compris que dans l'immédiat, il était son seul allié possible.
Le grand brun la contempla, postée au centre de la pièce, les yeux fermés. Tendu dans sa direction, guettant le moindre de ses gestes, il en avait cessé de respirer. Elle écrivait quelque chose à son tour, mais de là où il se trouvait, Orion ne parvenait pas à lire quoi. Néanmoins, il vit la jeune femme, les yeux fermés, pivoter jusqu'à lui faire parfaitement face. Il n'écouta pas particulièrement ses paroles, dont il savait de toute façon qu'elles ne lui étaient pas destinées.
Malgré lui, Orion sourit. Elle avait réussi. Puis la terrible réalisation s'empara de lui. Il perdit son sourire. Elle avait réussi. Plus qu'Erika, Astréos avait réussi. Il avait réussi à obtenir exactement ce qu'il désirait. Erika changea soudainement de couleur et manqua d'air. La même réalisation venait sûrement de l'atteindre à son tour. Une nouvelle fois, Orion couvrit en un éclair la distance qui les séparait. Craignant qu'elle ne s'évanouisse, il passa une main autour de sa taille pour la soutenir. Réalisant que ce ne serait pas le cas, et réalisant non sans une certaine gêne sa proximité, il s'empressa de la libérer de son étreinte et s'écarta.
Il la vit reprendre le crayon pour poursuive leur échange silencieux. Un long soupir s'échappa de ses Ièvres lorsqu'il prit connaissance de ce qu'elle avait écrit. Orion lui prit le crayon et la serviette des mains et nota à son tour : « mon pouvoir ».
« Mais pourquoi? » ajouta-t-il alors par écrit. Il lui tendit l'annotation, accompagnant son geste d'un haussement d'épaules qui indiquait qu'il n'en avait pas la moindre idée. C'était la question qui continuait à le tarauder. Pourquoi vouloir son pouvoir ? Pourquoi de cette façon ?
- Bon. Si cela ne fonctionne pas à cette distance, il me semble qu'il est inutile d'insister, reprit-il.
À ces mots, la porte s'ouvrit à la volée, révélant une délégation plus restreinte que précédemment. Astréos, son escorte de quatre Pégases. Le jeune homme s'empressa de fourrer le crayon et les deux morceaux de serviette sur lesquels ils s'étaient écrit au fond de sa poche. Le timing était bien trop parfait pour n'être qu'une simple coïncidence. Son instinct ne l'avait pas trompé. On les avait maintenus sous surveillance.
- Bien. Je crois que nous avons suffisamment abusé de votre temps, capitaine. - Je suis à votre service, Maestre, répondit Orion en se courbant respectueusement.
Il évita soigneusement de croiser le regard d'Erika. Il craignait trop qu’une de leurs réactions, à l'un ou à l'autre, ne les trahisse. Orion se dirigea vers le canapé et y récupéra sa veste, sur le dossier de l'assise. Sur le chemin retour, il s'arrêta tout de même face à la petite brune. Il prit sa main et la porta à ses lèvres.
- Adieu, Erika.
Contrairement à ce qu'avait voulu lui faire entendre Astréos, cet épisode ne serait jamais "rien qu'un désagrément mineur" dans son existence. Parce qu'Orion n'avait jamais été et ne serait jamais ce genre d'homme. De ses grands-parents, il avait appris le respect et la droiture d'âme.
Erika et lui étaient dans cette galère ensemble. Ils en sortiraient ensemble. Aucune autre alternative n'était envisageable.
Au moment de conclure son baisemain, il exerça une pression unique sur ses doigts. « Ce n'est pas la fin ». Orion tourna les talons et, impassible, quitta la pièce sans un regard en arrière pour la jeune femme.
- Ma part du contrat est remplie, déclara-t-il froidement au Grand de sa guilde. À vous d'honorer votre parole. - Votre vaisseau, votre équipage, comme promis. Avec votre assurance que vous repartez. Dès ce soir. - Il me tarde, conclut le capitaine.
Deux Pégases escortèrent Orion jusqu'au Boréal. Ils cherchaient certainement à s'assurer qu'il ne tenterait pas de leur fausser compagnie ou de faire quelque chose de stupide. Le jeune capitaine remonta à bord de son aérostat sous les regards interloqués de son équipage. Il se dirigea droit vers sa cabine et, l'atteignant, en claqua violemment la porte. La penne et la gâche se brisèrent sous la force de l'impact. Main sur le chambranle de la porte entrouverte, son regard se posa sur l'anneau brillant autour de son doigt. Il poussa un hurlement de rage.
Son second passa timidement la tête dans l'entrebaillement.
- Cap'?
Pas de réaction.
- Orion.
Silence.
- Orion, que s'est-il passé ?
« Ne la perds pas. »
- On ne peut pas la laisser, Bart. Je dois la retrouver.
Messages : 206
Date d'inscription : 26/07/2022
Région : IDF
Crédits : fleacircus.ig
Univers fétiche : Fantastique
Préférence de jeu : Les deux
Jen
Jeu 1 Déc - 22:26
Erika
J'ai 24 ans et je vivais à Sidh, XVIème arche majeure. Dans la vie, je suis fille de famille inlfuente et je m'en sors bien selon moi, mal selon mon père. Sinon, grâce à ma malchance, je suis fiancée par arrangement et je le vis plutôt mal, évidemment.
Tout s'était déroulé si vite. A peine Orion venait-il de confirmer sa pire crainte que la porte s'ouvrit à la volée, laissant apparaître le sinistre Astréos accompagné de quatre gardes. Toujours aussi bien armés. On expédia Orion pour un aller simple vers le Boréal, très bonne soirée et au plaisir. Adieu, lui lança t-il dans un baisemain avant de s'esquiver comme si de rien n'était. Erika le dévisagea une dernière fois, les yeux écarquillés, tétanisée. C'était donc ainsi que tout cela allait se terminer ? Ou plutôt, ce n'était que le début pour elle, mais le début de quoi exactement ? Ne devraient-ils pas la laisser tranquille maintenant qu'ils pensaient savoir qu'elle n'avait pas acquis le fameux pouvoir acadien ? Ou la ruse n'avait-elle pas fonctionné et avaient-ils compris que...
Impuissante, elle observa la silhouette du grand brun s'éloigner puis les portes se refermer derrière lui et son escorte. Alors son âme sombra dans un vide profond, noir, et infini. Comme la morne vue qu'elle avait eu des jours durant à bord du Boréal. Mais cette fois-ci, aucune étoile ne brillait à l'horizon.
Sans ménagement et tout son air mielleux disparu, Astréos lui agrippa le bras et la traîna en dehors de la salle, sans un mot. Le bruit de pas régulier des gardes leur emboitèrent la marche. Erika leva la tête vers son geôlier. Il était parfaitement de marbre et sa démarche était si rapide que la jeune fille avait du mal à le suivre sans se marcher sur les pans de la robe.
Où m'emmenez-vous ? Qu'allez-vous faire de moi ?
Mais elle ne parvint pas à formuler ses questions. Elle n'avait plus la force de se battre, ou de résister. Pas après cette ultime trahison. Elle avait vraiment cru qu'Orion pouvait l'aider. Qu'il allait l'aider. Mais pourquoi le ferait-il ? Ils avaient bien mis au clair à la minute où ils s'étaient rencontré qu'aucun d'entre eux ne voulait de cette union. Qu'ils tenaient tous les deux à vivre leur vie chacun de leur côté, sans plus avoir à se soucier de l'autre. C'était exactement ce qu'il faisait. Elle n'aurait pas dû être surprise. Qu'aurait-elle fait à sa place ? Aurait-elle mis sa famille, ses amis et sa vie en danger pour un parfait inconnu avec qui son seul point commun était de partager un anneau autour du doigt ? Effectivement, présenté comme ça, Orion n'était pas un monstre. Simplement un homme qui avait tenu parole. "Vous n'aurez pas à me supporter plus que nécessaire". On ne pouvait être plus littéral.
Astréos emprunta des escaliers en colimaçon, sans pour autant ralentir la cadence. Erika commençait à être essoufflée. Elle trébucha, et ressentit une douleur lacérante à l'épaule lorsque la poigne du Grand maître la remit de force sur ses pieds. Sans lui accorder le moindre mot ou le moindre regard, il la poussa dans une petite salle à l'étage, meublée très sommairement d'un grand bureau et de deux petites chaises. La pièce n'avait même pas de fenêtre. Plongée dans une demi-obscurité, l'attendait la glaçante Sélène. Elle planta son regard d'acier dans celui d'Erika, et d'un signe de tête, lui intima de s'asseoir face à elle. Alors seulement, Astréos la relâcha et claqua la porte dans son dos. Il resta toutefois posté derrière sa chaise, debout, comme s'il était prêt à intervenir. Prêt à écouter l'échange qui s'apprêtait à se dérouler sous ses yeux.
"- Vous avez menti Erika", fit Sélène d'une voix lasse.
La jeune fille tenta de maîtriser la tempête d'émotions qui l'envahissaient. Comment avaient-ils su ? Le regard de la femme la transperça de nouveau.
- Décidez de coopérer tout de suite, et aucun mal de vous sera fait, débita t-elle tel un automate sans la moindre trace d'émotion sur son visage.
Erika décida de jouer la carte de l'innocence. Jouer les idiotes. Avec un peu de chance, ils la prendraient vraiment pour une sotte et décideraient de lui ficher la paix.
- Je ne comprends pas Maestra, répondit-elle d'un ton faussement serein. A quel sujet aurais-je menti ?
- Ne jouez pas les idiotes avec moi, rétorqua Sélène de son ton toujours aussi inflexible. Vous avez hérité du pouvoir d'Aiguilleur.
C'est ainsi donc que s'appelait son nouveau pouvoir. La brunette feignis un air surpris sur son visage, mais ses mains tremblaient.
- Je suis navrée Maestra, reprit-elle avec une mine désolée, mais les pouvoirs familiaux n'ont jamais été mon fort... Je ne maîtrise même pas ceux de ma propre lignée voyez-vous.
Mais son petit manège ne semblait pas prendre. Elle sentit la présence oppressante d'Astréos dans son dos. Sélène échangea un regard avec lui. Puis Erika ressentit une désagréable sensation dans ses tympans. Elle fronça le nez. La pression s'intensifia encore jusqu'à rentrer dans sa tête. Elle avait l'impression que quelqu'un ou quelque chose lui serrait le crâne jusqu'à le faire exploser. Elle serra des dents, refusant de leur donner le plaisir d'hurler.
- Je vous avais prévenue, continua mollement Sélène. Allez-vous coopérer oui ou non ?
Erika lui lança un regard haineux. Mais la douleur devenait insupportable. Elle sentit une goutte de sueur sur son front, et ses mains agrippèrent le rebord de sa chaise. La Maestra lança un nouveau regard à son compagnon. Erika hurla de toutes ses forces lorsque la douleur décupla. Puis, ce fut l'obscurité complète.
Messages : 378
Date d'inscription : 01/04/2022
Crédits : graenfur
Univers fétiche : Dystopique, fantastique, mythologie, etc.
Préférence de jeu : Les deux
Asma
Ven 2 Déc - 18:25
Orion
J'ai 27 ans et je suis originaire de l'arche de Zéphyr. Dans la vie, je suis pilote d'aérostat et je m'en sors très bien. Sinon, j'étais célibataire et je le vivais très bien, mais on m'a arrangé un mariage, et je le vis un peu moins bien.En savoir plus.
- Votre Maestre peut bien dire ce que bon lui semble, nous sommes aux ordres des Consignataires, ici, tonna la voix de stentor de Bartolomé, sortant Orion de son état de torpeur. Je vous l'ai dit. Le Boréal doit charger une cargaison en provenance de Totem pour Babel, et le Khamsin n'est pas prévu d'arriver avant demain matin. Le Boréal partira une fois qu'il aura chargé, et pas avant.
Le capitaine quitta difficilement sa cabine et se dirigea en traînant des pieds vers la passerelle d'où provenaient des éclats de voix. Sur le chemin, il croisa l'un des deux Pégases qui l'avaient raccompagné jusqu'à son appareil plus tôt dans la soirée, visiblement furibond. Celui-ci le bouscula sans ménagement en partant. Orion pénétra dans la pièce et s'appuya de façon indolente sur l'alidade, le menton posé sur ses deux bras croisés. D'un air absent, il faisait tourner du bout des doigts la bague autour d’une phalange de son annulaire.
Le grand brun était clairement abattu. Ayant pris la pleine mesure de tout ce qui s’était produit au cours des dernières heures, et de la façon dont il avait laissé la jeune femme entre les mains de ces gens, il s’en voulait. Condamné à ne plus quitter le Boréal, des gardes postés à l’entrée de son aérostat pour lui en barrer la sortie, il était de nouveau prisonnier. Au moins, cette fois, il était assigné à résidence dans un environnement qui lui était familier. Il soupira.
- Que voulait-il ? - Les grands patrons de ta guilde sont visiblement assez pressés de te voir partir. Tu as dû leur faire un effet bœuf. - Et ? Demanda-t-il encore, las. - Et je viens de te gagner, quoi ? Sept ? Huit heures ? Grand, rétorqua Bartolomé, un clinquant sourire à en faire pâlir de jalousie le chat du Cheshire s'étirant sur son visage.
Orion redressa brusquement la tête et le fixa d'un air médusé.
- Ah, tu devras un dîner à Rhona. Cette fille est ab-so-lu-ment brillante. À moi aussi, par la même occasion. Tu as également le droit de me dire que tu me trouves brillant.
Le jeune homme continua à le regarder d'un air parfaitement interloqué. Qu'est-ce que c'était que toute cette histoire ?
- Il va falloir que tu t’expliques, camarade. - Tu crois vraiment que ton Grand Machin est le seul à avoir ses réseaux sur cette Arche ?
Bartolomé entreprit alors de lui expliquer ce qu'il avait réussi à faire. « Pendant que tu boudais », s’était-il fait un malin plaisir d’ajouter. Prenant sur lui-même, Orion s’abstint de relever la moquerie et lui fit signe d'enchaîner. Rhona, la Consignataire de la tour de contrôle et leur amie, avait pris contact avec des collègues à elle en charge de la logistique pour faire modifier le plan de chargement du Boréal. C’était comme cela qu’elle avait obtenu de lui imposer de récupérer la fameuse cargaison du Khamsin, lui-même ne devant arriver de l’arche de Totem que le lendemain. Ainsi, au lieu de repartir dès ce soir, l'aérostat était condamné à rester au Port-des-Airs jusqu'à six heures le lendemain matin.
Simple. Efficace. Il avait ainsi obtenu un sursis pour Orion. Mais comment le mettre à profit pour aider sa compagne d’infortune ? Bartolomé sembla comprendre le fond de sa pensée, car il reprit aussitôt, d'un ton enjoué.
- Ce n’est pas tout.
Un bruit dans la coursive attira son attention. Orion tourna la tête dans cette direction, mais il se trouvait dans un angle mort de la pièce, qui ne lui permettait pas de voir qui approchait.
- Hé, Beauté, tu tombes à pic, s'exclama Bartolomé, s’adressant à la porte ouverte, un sourire charmeur sur les lèvres.
Dans l’encadrement de la porte se détacha l’imposante silhouette d’une force de la nature. Une femme au moins aussi grande qu’Orion, à l’indomptable tignasse couleur de feu qui encadrait un visage rond, illuminé par deux immenses yeux émeraude. La paire de lunettes posées sur son nez accentuait encore, par son effet loupe, la taille de ces yeux, qui semblaient vous traverser de part en part quand ils se posaient sur vous. Elle était talonnée de près par un homme qui avait l’air d’une frêle brindille à ses côtés, mais qui de carrure faisait plus ou moins le gabarit d’Orion. Peut-être un peu plus petit. Tous deux portaient, épinglé à leurs bleus de travail, l’insigne des Consignataires.
- Ils ont pas l'air commode, les deux zigs devant la coupée, grommela-t-elle en guise de salutations. Hé, beau gosse, sourit-elle lorsque son regard se posa sur le capitaine, j’ai cru comprendre que les félicitations étaient de rigueur ?
Le concerné la gratifia d’un regard noir. Il se redressa et croisa les bras sur sa poitrine, cachant par la même occasion ses mains sous ses bras.
- De mauvais goût ? Ajouta-t-elle, taquine, en direction de son second.
Celui-ci se contenta d’opiner du chef. Bartolomé savait quand son capitaine était ouvert à la plaisanterie et quand il ne l’était pas. En cet instant, il ne l’était pas vraiment.
- Qu’est-ce que vous faites là ? Demanda-t-il froidement. - Aussi aimable que tes copains, dehors, dis-moi. Même interrogatoire, d’ailleurs. J’te fais la même réponse qu’à eux ou Bart a fini de te mettre au jus ?
Ce dernier fit « non » de la tête.
- Tu es arrivée trop tôt, bellissima, rétorqua Bartolomé, mi-charmeur, mi-moqueur. - Tiens, enfile ça, beau gosse.
Orion se vit soudain arriver dessus un tas de vêtement lancé avec force, qui lui coupa le souffle en rentrant en contact avec sa poitrine. Une partie tomba à terre. Il ramassa le tout et commença à déplier les affaires. Un uniforme, similaire à celui de Rhona et de son taciturne compagnon.
- Ne t’en fais pas, c'est ta taille, ajouta-t-elle avec un aplomb et un sourire carnassier qui le mirent instantanément mal à l'aise.
Orion entreprit d’enfiler les habits qu’on venait de lui donner tout en écoutant les explications qui ne manqueraient pas de suivre. Il jeta un coup d’œil au garçon qui n’avait toujours pas dit un mot, et commença à comprendre ce que les deux conspirateurs avaient manigancé. Deux Consignataires qui montaient à bord pour gérer des démarches administratives. Deux qui en ressortaient. Entre la semi-pénombre et leur désintérêt manifeste pour la tâche ingrate qu’on leur avait confiée, tout le monde doutait que les gardes à l’entrée ne fassent trop de zèle à vérifier les identités. Jusque-là, ça se tenait. Et ensuite ?
- Ah mais ensuite, c’est ton boulot, mon chou ! Nous, on te donne le moyen de sortir. Toi, tu débrouilles pour trouver la fille. Tu la ramènes, vous repartez demain avec le Boréal et tu vas la planquer où sais-je.
La grande rouquine s’approcha de son camarade et lui retira le béret posé sur son crâne. Elle vint l’enfoncer sur la tête d’Orion, le baissant volontairement sur son visage. Son compagnon dégrafa sa broche et la lui tendit, un peu à contrecœur. Rhona s’en saisit et prit un malin plaisir à l’accrocher elle-même à la poitrine d’Orion, se plaçant tout près de lui.
- Tiens, j’ai failli oublier. Le passe, pour le Pneumatique.
Elle lui tendit un rectangle plat de laiton percé de multiples trous. Le Pneumatique était l’axe principal qui reliait l’aérostation à l’arche elle-même. Il s’agissait d’un grand hall depuis lequel partaient une douzaine d’ascenseurs. Son nom venait du fait que les ascenseurs fonctionnaient en étant propulsé par des différences de pression ainsi que des courants ascendants et descendants qui leur permettaient de se déplacer verticalement. Si jamais Erika avait quitté le Port-des-Airs pour l’arche, il lui faudrait nécessairement passer par là.
- On est paré. On va pouvoir y aller, lança Rhona après l’avoir détaillé de la tête aux pieds une dernière fois.
Une nouvelle fois, Orion se sentit mal à l’aise.
- Oublie pas, surtout, tu me dois un dîner, susurra-t-elle.
Cette perspective le terrifia. Il sourit.
- Si on s’en sort, ce que tu veux, lui répondit-il.
Il ne restait plus qu'à retrouver Erika. Orion ferma les yeux et se concentra.
Messages : 206
Date d'inscription : 26/07/2022
Région : IDF
Crédits : fleacircus.ig
Univers fétiche : Fantastique
Préférence de jeu : Les deux
Jen
Ven 2 Déc - 21:29
Erika
J'ai 24 ans et je vivais à Sidh, XVIème arche majeure. Dans la vie, je suis fille de famille inlfuente et je m'en sors bien selon moi, mal selon mon père. Sinon, grâce à ma malchance, je suis fiancée par arrangement et je le vis plutôt mal, évidemment.
Maman ? Erika entrouvrit les yeux et aperçut une main posée à quelques centimètres de son visage. Tout son corps lui faisait mal et sa tête bourdonnait en sourdine. Elle avait l'impression d'être avachie sur une table. Elle ferma les yeux, prête à subir le savon mémorable qu'allait lui passer sa mère après que sa fille se soit encore laissée trop aller sur la boisson.
Soudain, elle rouvrit les yeux et se redressa d'un bond, malgré les douleurs lancinantes toujours présentes. Elle n'était pas à la maison, et cette main n'était pas celle de sa mère.
"- Bon retour parmi nous Erika," lâcha la voix glaciale de Sélène.
La jeune fille leva les yeux vers la femme qui la dominait de toute sa hauteur. En voyant ce visage éminent et impitoyable la dévisager, Erika se rappela d'une traite toutes les souffrances qu'elle avait enduré avant de perdre connaissance. Pas assez longtemps. Elle aurait aimé ne jamais avoir eu à se réveiller.
"- Êtes-vous décidée à coopérer maintenant ?" enchaîna la voix d'Astréos dans son dos.
Silence.
Un échange de regard. Non, pas encore. De nouveau, ses tympans la démangèrent. Mais elle n'en pouvait plus. Jamais elle n'avait eu à subir quelque chose d'aussi douloureux de sa vie. Quelque chose en elle se brisa alors.
"- Je vais vous aider."
La douleur cessa d'un seul coup. Erika prit une grande respiration. Qu'importe après tout, elle ne comprenait rien à cette situation et peut être qu'en coopérant, elle allait enfin pouvoir sortir de ce calvaire. Elle n'avait aucun engagement auprès de personne. Alors elle allait sauver sa peau. Le regard brûlant de Sélène la transperça tandis qu'elle reprenait place face à elle.
"- J'ai acquis le pouvoir d'Aiguilleur."
Un sourire sans chaleur barra le visage de la Maestra. Elle hocha lentement la tête, l'air satisfait.
"- Bien, va le chercher," ordonna t-elle à son compagnon.
Mais alors qu'elle s'attendait à ce qu'Astréos s'exécute sans demander son reste, celui-ci s'avança à la hauteur du bureau et sourit chaleureusement à Sélène. Erika fut surprise de constater que ce sourire avait l'air si réel, si authentique, alors même qu'il provenait de l'être le plus ignoble qu'elle n'ait jamais rencontré.
"- Ma très chère, c'est aujourd'hui l'aboutissement d'un si grand projet que tu as mené avec une habileté absolument remarquable. J'aimerais que tu aies l'honneur d'aller toi-même lui annoncer la bonne nouvelle. Je pense sincèrement que tu le mérites plus que n'importe qui d'autre. N'aies crainte, je m'occuperai de notre invitée en attendant votre retour."
Sélène cilla imperceptiblement. Une ombre de fierté passa sur son visage, puis elle se leva de sa chaise.
"- Tu as raison, c'est à moi d'aller lui annoncer la nouvelle. Tu n'as qu'à commencer à installer notre invitée en attendant."
Astréos hocha respectueusement de la tête, et accompagna la Maestra du regard jusqu'à ce qu'elle ait quitté la salle. Il se retourna alors vers Erika et celle-ci se fit toute petite sur sa chaise. Le regard avide et carnassier que lui jeta le Grand maître la firent trembler sur place.
"- Ton rôle aujourd'hui est plus important que tout ce que tu n'auras jamais accompli de ton existence, commença t-il. Tu devrais en être honorée."
Erika ne pouvait détacher son regard de cette expression proche de la folie qu'affichait le visage d'Astréos. Elle déglutit péniblement. Il était trop tard pour faire marche arrière de toute manière.
"- As-tu déjà entendu parler d'Arc-en-Terre ? poursuivit-il en la dévisageant curieusement. Bien sûr que tu en as entendu parler, tout le monde connait l'histoire de cette arche introuvable, qui referme tant de secrets et de mystères."
Erika hocha la tête. Non pas que ces histoires d'arches mystérieuses ne l'avaient jamais intéressée, mais elle savait qu'Arc-en-Terre était coupée du reste des arches et que personne ne pouvait y accéder sans avoir une raison exceptionnelle.
"- Ce que tu ne sais peut être pas, c'est quels secrets elle renferme. Le regard d'Astréos brilla d'un éclat fou. Tu aimerais vivre éternellement ?"
La brunette écarquilla les yeux, abasourdie. Cet homme pensait-il réellement pouvoir dénicher le secret de l'immortalité dans cette arche cachée ? Cela paraissait insensé. Pourtant, elle le laissa continuer.
"- Tu vas m'aider Erika, tu vas localiser Arc-en-Terre pour moi."
Pour lui ?
"- Viens avec moi."
Comme si elle avait le choix. Le Grand maître lui attrapa le bras et l'entraîna en dehors de la salle, saluant au passage les deux gardes postés de part et d'autre de l'entrée. Il leur fit signe de ne pas les suivre. Arrivé au fond du corridor, il bifurqua à gauche, puis emprunta un escalier dérobé. A ses côtés, Erika fit de son mieux pour grimper les marches, les pieds toujours empêtrés dans sa robe. Sa robe. Quelle vaste blague.
Avec une rapidité impressionnante, Astréos s'engouffra avec elle dans la seule porte en haut des marches. Tandis qu'il lui lâchait le bras, la jeune fille jeta un coup d'oeil autour d'elle. Une vingtaine de portes s'alignaient les unes à côtés des autres, encastrées dans les murs de la pièce circulaire. Sur chaque porte était inscrit un chiffre suivi d'un nom. I - Anima, II - Le Pôle... Erika fronça les sourcils. Qu'est ce que...
"- Une Rose des Vents, reprit Astréos l'air triomphant. Tu devais certainement être au courant que ces lieux existaient, mais cela fait toujours quelque chose de le découvrir par toi-même n'est-ce pas ?"
La brunette acquiesça en silence, le regard passant d'une porte à une autre. Elle avait bien entendu parler de ces lieux de passage, qui permettaient de franchir l'espace entre les arches en un rien de temps. Comme elle aurait aimé pouvoir s'enfuir par la porte marquée Sidh... Mais le Grand maître interrompit ses pensées.
"- N'essaye pas de t'enfuir, je te rattraperai en un claquement de doigts et c'en sera définitivement fini de toi."
Evidemment. Quelle que ce soit l'Arche qu'elle choisirait, l'homme n'avait qu'à franchir à son tour la même porte et ils se retrouveraient tous les deux ensemble à nouveau. Elle soupira.
"- Comme tu le vois, notre chère Arc-en-Terre manque à l'appel parmi les portes. Nos amis Arcadiens sont timides, vois-tu. Il lui décrocha un regard bouillonnant d'avidité. Mais toi, toi tu peux la retrouver. Il ne faut pas perdre de temps, je n'aimerais pas que l'on soit interrompus par les autres. Nous devons être partis lorsqu'ils reviendront. Il fouilla dans sa poche. Tiens prends ça."
Il lui tendit un petit mouchoir de poche. Interloquée, Erika l'attrapa et l'observa. C'était un mouchoir tout ce qu'il y avait de plus banal.
"- Il a appartenu à une femme Arcadienne. Tu vas t'imprégner de son identité et lorsque tu auras identifié sa localisation, tu vas me guider jusqu'à elle."
Erika fronça de nouveau les sourcils, perplexe. Pourquoi avait-il tenu à l'emmener dans une Rose des Vents pour cela alors que dans tous les cas ils devraient passer par la voie des Airs pour atteindre l'Arche ? Astréos sembla lire dans ses pensées.
"- Une escorte nous attends au Pôle. Mes alliés se tiennent prêts à appareiller dès aujourd'hui. J'attends simplement une direction de ta part."
La jeune fille haussa les sourcils. Jusqu'où allait l'emmener cette folie ? Sous le regard insistant d'Astréos, Erika ferma les yeux et essaya de retrouver la sensation qu'elle avait eue quelques heures plus tôt. Mais après plusieurs minutes, elle fut forcée de constater que rien ne bougeait. Son esprit de visualisait rien.
Astréos la pressa du regard. Elle fit de son mieux pour se concentrer, mais elle ne voyait toujours rien. Comment le pourrait-elle ? Elle ne savait même pas encore réellement comment fonctionnait son pouvoir, et elle ne savait rien de ce morceau de tissu, ni de la supposée Acadienne à qui il appartenait.
"- Je ne vois rien... finit-elle par souffler du bout des lèvres.
- Tu dois réussir Erika, gronda Astréos d'une voix menaçante. Tu le dois. Montre moi où se trouve Arc-en-Terre."
Erika secoua la tête incapable de parler. Elle recula pas par pas jusqu'à sentir le mur dans son dos. Piégée, encore.
"- Montre moi !" hurla Astréos
- Je n'y arrive pas ! "
Le regard d'Astréos changea d'un seul coup. Il s'assombrit puis fut envahi d'une colère noire. L'horreur dans ses yeux, qu'Erika pensait déjà à son comble, monta encore d'un cran.
"- Alors tu ne me sers à rien. Il fit un pas en sa direction. Et tu en sais trop."
Tremblante comme une feuille morte, le dos toujours contre le mur, Erika voulut le supplier de lui laisser plus de temps, elle s'entrainerait sans relâche jour et nuit pour perfectionner son pouvoir. Elle voulut lui assurer qu'elle lui trouverait son Arc-en-terre et elle qu'elle l'y guiderait. Qu'elle ne voyait pas d'inconvénient à l'aider lui plutôt que Sélène ou n'importe qui d'autre - en toute franchise. Mais elle n'en eut pas le temps.
Astréos dégaina une lame dissimulée sous sa veste et fondit en direction de sa gorge. NON ! Erika dévisagea le Grand maître avec horreur. Son corps réagit instinctivement, et elle voulut esquiver le coup. Mais rien ne vint. Elle se risqua alors d'entrouvrir un oeil et dû se retenir pour ne pas tomber à la renverse. Une statue de glace était figée à quelques doigts de son corps. Son pouvoir familial venait de lui sauver la vie.
Haletante et encore sous le choc de l'attaque, Erika tendit l'oreille. Aucun bruit. Elle regarda la Rose des Vents. C'était son unique chance de survie.
Mue par une énergie nouvelle, la brunette attrapa la lame qui avait failli lui trancher la gorge quelques secondes plus tôt, et la glissa sous sa robe. Elle pourrait en avoir grand besoin. Puis elle parcouru du regard toutes les portes disposées autour d'elle. Elle n'avait pas beaucoup de temps. Instinctivement, elle se dirigea vers Sidh mais elle s'interrompit : c'était bien trop prévisible, et Sélène et ses sinistres compagnons la retrouveraient en un clin d'oeil. Mais alors où aller ? Elle n'avait jamais rien connu d'autre... Paniquée, elle tourna la tête dans tous les sens jusqu'à tomber sur la porte marquée X - Babel. Emile ! Son frère y travaillait en tant que gardien de la paix. Un sourire d'espoir illumina son visage : c'était sa meilleure chance.
Sans un regard en arrière, Erika s'engouffra dans la porte, désormais seule face à l'inconnu.
Messages : 378
Date d'inscription : 01/04/2022
Crédits : graenfur
Univers fétiche : Dystopique, fantastique, mythologie, etc.
Préférence de jeu : Les deux
Asma
Sam 3 Déc - 8:55
Orion
J'ai 27 ans et je suis originaire de l'arche de Zéphyr. Dans la vie, je suis pilote d'aérostat et je m'en sors très bien. Sinon, j'étais célibataire et je le vivais très bien, mais on m'a arrangé un mariage, et je le vis un peu moins bien.En savoir plus.
Comme prévu, dans l'ombre de l'imposante consignataire, Orion parvint sans difficulté à échapper à la vigilance des deux gardes à l'entrée. Deux agents étaient montés à bord de l'aéronef, deux en étaient ressortis. Le béret soigneusement descendu sur ses yeux, le grand brun avançait en regardant le bout de ses chaussures.
Lorsqu'ils furent suffisamment éloignés et en dehors du champ de vision des Pégases qui surveillaient le Boréal, il releva la tête. Le jeune homme était parvenu à identifier que le groupe dans lequel se trouvait Erika avait quitté l'aérostation. Ils se trouvaient au temple du Conseil, probablement dans le bureau de l'un ou l'autre des deux Grands. Il connaissait l'emplacement du bâtiment, assez facilement identifiable, mais n'avait jamais eu l'occasion d'en visiter les locaux. C'était donc difficile à affirmer avec certitude. En tout état de cause, c'était un bureau, et surtout, il savait exactement où il se situait.
La grande rousse ouvrait toujours la marche. Elle savait par où passer, connaissait les raccourcis et les coursives de service. Au cœur de la grande spirale qu'était la station s'élevait un long tube vertical de verre transparent, contenant lui mettre six tubes plus fin, au sein desquels évoluaient chacun des ascenseurs à vide pneumatique. Tout autour, des branches horizontales partaient du grand tube central, les reliant en différents points à la spirale. Autant de passerelles qui connectaient les différents niveaux de l'aérostation au Pneumatique. Rhona s'engouffra sur l'une d'entre elles, talonnée de près par Orion.
La station était un petit bijou d'architecture. Arrivés devant les portes du Pneumatique, les deux compères s'arrêtèrent.
- Je te remercie pour tout, Rhona. Tu es extraordinaire, sincèrement. - Ne me remercie pas de sitôt, Orion, répondit-elle, visiblement émue du compliment.
Ses joues avaient pris une légère teinte rosée. Du bout du doigt, elle remonta ses lunettes, qui avaient glissé sur le bout de son nez.
- Tu n'es pas encore débarrassé de moi, ajouta-t-elle avec plus d'entrain et une tape amicale qui manqua de lui démettre une épaule. Si c'est comme tu l'as dit, tu ne vas certainement pas aller affronter ces gens tout seul.
Flatté de ce soutien mais ne sachant quoi dire de plus, le grand brun se contenta d'opiner du chef. Devant eux, les portes de l'un des ascenseurs s'ouvrirent. Rhona inséra sa carte métallique dans l'orifice prévu à cet effet. Elle fit signe à Orion d'en faire de même avec la sienne. Autour d'eux, le paysage se mit à défiler rapidement tandis que la cabine plongeait en direction de l'arche. Orion laissa son regard se perdre dans le vide. Il fronça les sourcils, contrarié.
Le jeune homme ferma les yeux, et se concentra. Rien. Il jeta un coup d'œil en direction de Rhona qui le fixait intensément.
- Quoi ? L'interrogea-t-elle.
Pour la première fois de sa vie, Orion n'arrivait pas à positionner quelqu'un. Il pouvait voir Erika, ce n'était pas le problème. Mais sa boussole interne, celle qui s'activait dès qu'il avait identifié sa cible, semblait ne plus fonctionner.
- Alors, elle est où ? Insista l'imposante rouquine. - Je la vois, mais… elle n'est plus au Temple.
La jeune femme était dans une pièce circulaire, avec des portes tout autour. Des chiffres. Ce n'était pas net. Une boussole interne qui ne voulait plus fonctionner.
- Une Rose des vents, souffla-t-il. Ils l'ont emmenée dans une rose des vents, répéta-t-il, l'évidence de la réponse soulevant encore plus de questions.
Pourquoi ? Que lui voulait-on ? Que voulait-on lui faire faire avec ce pouvoir ? Ce n'était pourtant pas sa préoccupation du moment. La question était désormais de savoir comment atteindre une espace qui se trouvait dans l'espace entre les espaces. Orion n'était pas un arcadien. S'il avait hérité d'un pouvoir bien spécifique de sa mère, il savait par ses lectures que les arcadiens étaient réputés pour leur capacité à manipuler l'espace. Ils pouvaient faire disparaître des choses dans des espaces qui n'étaient pas apparemment là. Les roses des vents se trouvaient dans cet espace interstitiel. Ce qu'Orion ressentait en cet instant était tellement moins de ses référentiels habituels qu'il ne savait pas comment traiter l'information. Comme une boussole qui aurait perdu le nord et dont l'aiguille s'agiterait frénétiquement dans tous les sens. Sa boussole interne avait perdu le nord.
- Que fait-on ? Demanda plus calmement Rhona. - Ils étaient dans le Temple. L'entrée de la Rose des vents doit se trouver à proximité. On continue.
La porte s'ouvrit dans un ding sonore. Les deux consignataires en sortirent et, reprenant un air affairé, traversèrent d'un pas décidé le Parvis. Le Parvis était une grande esplanade, protégée du soleil et de la pluie par de grandes voiles d'ombrage de différentes tailles, formes et couleurs. Des trapèzes, losanges et triangles étaient tendus à différentes hauteurs entre de grands mâts métalliques soigneusement ornés, habillant élégamment cet espace extrêmement fréquenté à toutes heures du jour et de la nuit. Sur les façades des bâtisses qui entouraient l'immense place couraient des plantes grimpantes et des massifs de végétaux qui apportaient de la fraîcheur à l'ensemble. Dans cet espace se croisaient toutes sortes de gens, des flâneurs et des gens plus pressés qui allaient et venaient depuis et vers le Pneumatique.
En ce milieu nuit, Rhona et Orion faisaient partie des gens pressés. Ils quittèrent la place chaleureusement éclairée et s'engouffrèrent rapidement dans une ruelle plus obscure. Le grand brun reprit la tête du duo. Il était chez lui et connaissait bien les lieux. Il avait toujours en tête le chemin le plus court pour atteindre le Temple. Ils avancèrent en silence.
Orion fit signe à sa compagne de s'arrêter. Ils se trouvaient à l'angle d'une ruelle qui donnait sur la grand-place au centre de laquelle trônait le Temple, haut lieu de réunion du Conseil qui réunissait l'ensemble des guildes de Zéphyr. C'était lui qui était chargé de prendre, de façon collégiale, les décisions pour l'arche.
- Et maintenant ? Chuchota la rousse.
Le jeune homme tenta de se concentrer une nouvelle fois sur Erika. Non ! Il s'élança en avant, mais fut stoppé net dans son élan par la femme à l'imposante carrure. Elle posa ses mains sur ses épaules et le plaqua contre un mur dans l'ombre de la ruelle.
- Quoi ?! Chuchota-t-elle plus furieusement.
La vision qu'il venait d'avoir était non pas celle d'Erika seule, mais d'Astréos en train de se jeter sur elle, une arme à la main. L'agitation d'Erika était telle que l'image ne parvenait pas à se stabiliser dans son esprit.
- Il va la tuer ! S'exclama Orion, en essayant de se détacher de la puissante poigne de Rhona.
La rouquine repoussa ses lunettes sur son nez, le retenant toujours de l'autre main. Pourquoi refusait-elle de le lâcher ? Comment cette femme pouvait-elle être aussi forte ? D'une seule main, elle parvenait encore à l'immobiliser. Son ego en prenait un sérieux coup. Il était furibond.
- Réfléchis, beau gosse, reprit posément Rhona sans lâcher son emprise sur lui, arrêtant son visage à quelques centimètres du sien. Il fût noyé dans une jungle capillaire rousse, d'où la fixait ses deux immenses yeux chlorophylle. Que comptes-tu faire, seul, sans savoir où aller ? Soit on arrive trop tard, auquel cas tout cela ne sert plus à rien, soit, et donne lui un peu de crédit, ta belle va encore bien. Réessaie, lui intima-t-elle.
Les mains d'Orion tremblaient de sa rage mal contenue. Si Astréos avait effectivement fait du mal à Erika, il le poursuivrait. Jusqu’au bout de l'enfer s'il le fallait. Il tenta néanmoins de se concentrer sur l'image de la jeune femme. Il ressentait toujours sa présence. Elle était en vie. Mais où ?
Le grand brun partit d'un éclat de rire nerveux. Rhona le dévisageait du regard comme s'il était devenu fou à lier. Elle finit par le lâcher.
- Changement de plan. On retourne à la station.
Rhona et Orion rebroussèrent chemin. Le jeune homme était pensif. Astréos l'avait-il vue passer la porte de Babel ? L'avait-il suivie ? Avait-il envoyé du monde à sa suite ? Était-elle blessée ? Comment allait-elle se débrouiller sur cette arche ? Là où il avait fallu une fraction de second à la jeune femme, il lui faudrait des jours et des jours de traversée pour espérer la rejoindre. Il espérait qu'il ne lui arriverait aucun malheur d'ici là.
"Ne la perds pas". Elle ne lui facilitait clairement pas la tâche. Orion se prit soudain à regretter que le départ du Boréal ait été retardé. Au vu de ce qu'il venait de se passer, toute demande inverse pour accélérer son départ serait jugée plus que suspicieuse. Il ne pourrait pas non plus directement aller à Babel, un certain nombre d'escales étant prévues sur le chemin. Encore une fois, toute modification du programme serait de nature à éveiller les soupçons ou à donner des indications sur là où pouvait se trouver la jeune femme, si les Grands de sa guilde l'ignoraient encore. L'équipage du Boréal devrait continuer à faire comme si de rien n'était. Toutefois, il n'était pas à exclure qu'Astréos s'intéresse de nouveau à lui, maintenant qu'il avait perdu Erika. Ne serait-ce que pour la retrouver, elle. Il ne faisait pas bon non plus s'éterniser sur Zéphyr pour le capitaine.
Rhona semblait en être arrivée à la même conclusion silencieuse que lui.
- Attendre le départ du Boréal est une mauvaise idée. Suis-moi.
Elle pressa un bouton du Pneumatique qui interrompit sa course plusieurs étages avant l'arrivée au quai d'honneur, au dernier niveau. Où l'emmenait-elle ? Secteur Juliet, indiquait un panneau à l'extrémité de la passerelle qui reliait l'ascenseur à la Spirale. Ici, les coursives étaient plus étroites et les bâtiments plus resserrés les uns contre les autres. Des structures de bois branlantes côtoyaient des charpentes métalliques plus cossues. Un mélange d'échoppes et de lieux de vie de bric et de broc. Sur les quais où étaient amarrés les aéronefs se côtoyaient des étals chamarrés et des populations cosmopolites. Equipages en attente d'un nouveau contrat, marchands ambulants, consignataires venus faire régler les taxes d'arrivée ou de marchandise, ouvriers transportant des pièces détachées. Malgré son imposante stature, Rhona se déplaçait de façon féline au milieu de cette foule bigarrée, se faufilant, esquivant. Parfois, des petits groupes s'écartaient à son approche. Orion la suivit, fasciné, jusqu'à un ponton à l'écart où étaient entassés de tous petits aérostats, de gabarit familial. Le genre d'engins avec lesquels il était possible de faire des promenades de loisir - nombreux étaient les amateurs, à Zéphyr -, ou de la course pour les passionnés.
L'Harmattan était un aéronef de passionnée. Surplombé d'un ballon central oblong, il était bardé de voiles positionnées stratégiquement qui lui conféraient vitesse et maniabilité. Bien qu'habitable, l'Harmattan n'était pas qu'un simple aérostat de promenade. Il était profilé pour la course. Avec ce petit bijou, elle avait la possibilité de partir pour plusieurs jours, faire de l'exploration de petites arches voisines. Rhona lui confirma qu'elle avait fait un plein de vivres. Il en aurait suffisamment pour une traversée jusqu'à Babel. Au besoin, il pourrait toujours faire escale sur une arche mineure sur le trajet.
- Voici mon bébé. Prends en soin comme de la prunelle de tes yeux.
Orion retira l'insigne, la sur-tenue de travail et le béret que Rhona lui avait remis plus tôt dans la soirée. Son collègue serait heureux de pouvoir les récupérer, surtout son insigne. Il passa une main dans ses cheveux, plaqués sous l'effet du couvre-chef. Il lui tendit la main pour la remercier.
- Je te le promets, Rhona.
Rhona saisit la main et attira le jeune homme à elle, le pressant contre son opulente poitrine dans une étreinte à lui en briser les côtes. Sans plus de cérémonie, il le repoussa en direction de l'engin, et se positionna pour aider Orion à en larguer les amarres. Le capitaine s'affaira à bord de l'appareil, et lui fit un signe de tête pour lui indiquer qu'il était paré. La grande femme saisit alors un appareil rectangulaire dont elle tourna un bouton et qu'elle vint plaquer contre son oreille.
- Contrôle, déclama-t-elle d'une voix professionnelle. L'Harmattan au décollage de Juliet-9. - Harmattan, de Contrôle, lui répondit une autre voix. Bien pris. Le Typhon est en approche Est pour Lima-8. Prenez directement vers Nord November pour éviter le croisement. - Bien pris, Contrôle, bonne journée.
- Hé, beau gosse, lança la contrôleuse alors que l'aérostat commençait doucement à s'éloigner. Tu me dois un restau et un vaisseau. Intact !
Messages : 206
Date d'inscription : 26/07/2022
Région : IDF
Crédits : fleacircus.ig
Univers fétiche : Fantastique
Préférence de jeu : Les deux
Jen
Sam 3 Déc - 11:30
Erika
J'ai 24 ans et je vivais à Sidh, XVIème arche majeure. Dans la vie, je suis fille de famille inlfuente et je m'en sors bien selon moi, mal selon mon père. Sinon, grâce à ma malchance, je suis fiancée par arrangement et je le vis plutôt mal, évidemment.
Erika déboula dans ce qui ressemblait à un petit cabanon de jardin. Depuis la porte d'entrée face à elle, elle distinguait une multitude d'équipement de jardinage dont certains dont elle ne connaissait même pas le nom. Lentement, elle tourna sur elle-même et constata avec soulagement qu'Astréos n'était plus là. Alors elle se risqua à sortir du cabanon. Une chaleur moite la frappa au visage. Si elle avait mieux écouté ses cours de géographie, peut-être se serait-elle souvenue du climat tropical typique de l'arche de Babel.
Prudemment, la jeune fille fit quelques pas autour de l'abri. Ce qui semblait l'entourer était un jardin immense dont elle ne voyait pas la fin, peuplé d'arbres, de plantes, et d'oiseaux en tous genres qu'elle n'avait pour la plupart jamais vus. Une douce odeur de végétation lui emplit les narines. En d'autres circonstances, l'endroit aurait été tout à fait charmant. Dans l'immédiat, Erika n'avait qu'une seule idée en tête : retrouver Emile. Elle entreprit alors d'explorer un peu plus loin, peut être pour trouver une sortie à ce jardin infini. La jeune fille tenta de se faire discrète entre les arbres, mais la précaution semblait inutile tant les allées étaient désertes. Quelle heure était-il ? La lumière naissante la poussait à croire qu'ils étaient en début de matinée. Mais n'avait-elle pas quitté Zéphyr à la tombée de la nuit ? Elle haussa les épaules. Qu'importe pour le moment.
Un petit bruit de roulement mécanique à sa droite la fit tressaillir. Médusée, la jeune fille observa un mannequin articulé au visage parfaitement lisse habillé seulement d'une casquette brodée "visite guidée".
"- Les jardins botaniques de Pollux," débita le mannequin d'une voix saccadée.
Elle était donc bien arrivée à Babel, et se trouvait au bon endroit pour retrouver son frère. Erika se sentit soulagée pour la première fois depuis longtemps.
Quelques instants plus tard, elle se trouvait face à la grille de sortie des jardins. La jeune fille aperçut alors les premiers passants et son coeur manqua un battement. Les uniformes. Elle n'y avait absolument pas pensé ! S'il y avait bien une chose qu'elle avait retenu de ses cours sur l'arche de Babel, c'était leur société structurée qui ne laissait aucune liberté de choix à ses habitants concernant les vêtements. Chacun devait porter une tunique drapée, aux couleurs correspondant à ses pouvoirs. Elle se souvenait s'être fait la réflexion qu'une vie sans pouvoir choisir ses vêtements devait être terriblement ennuyante. Jamais elle n'aurait cru devoir un jour elle aussi se plier à ce règlement. Il lui fallait trouver une tunique à troquer contre cette robe bien trop voyante, et vite. Car les sanctions étaient sévères pour quiconque ne respectait pas les lois.
Erika choisit de sortir par une autre grille, qui donnait sur une allée secondaire. En parcourant les rues à la recherche d'une boutique, elle réalisa soudain qu'elle n'avait aucun argent sur elle. Pas la moindre petite pièce. Elle était équipée du couteau qu'elle avait volé à Astréos, et c'était tout. Mais comment allait-elle pouvoir se procurer quoique ce soit, sans parler d'une tunique ? La panique la gagna, et les regards désapprobateurs des passants qui détaillaient sa robe ne l'aidaient pas. Se cacher, vite.
Au hasard, Erika se jeta dans la première ruelle étroite qu'elle trouva. Là, elle aurait quelques minutes pour reprendre ses esprits et échafauder un plan. Les mains moites et l'estomac noué, elle réfléchit à toute vitesse. La priorité absolue était de trouver une tunique adaptée, avant de ne se faire arrêter. Si les autorités s'en mêlaient, elle était persuadée qu'elle ne ferait pas long feu : après tout, sa visite ici était parfaitement illégale, et Zéphyr devait désormais la considérer comme fugitive. Merveilleux. Une fois le souci vestimentaire réglé, il lui fallait trouver son frère. Sa meilleure chance ? Probablement d'aller demander au Bureau des Gardiens dont il dépendait. Et une fois son frère trouvé... Hé bien elle y réfléchirait une fois à ses côtés.
Un approchant la fit sursauter. Elle se plaqua contre le mur, retenant sa respiration. Le blanc de sa robe contrastait beaucoup trop avec le mur gris pour espérer passer inaperçue. Une main peu confiante sur le manche de son couteau, elle attendit que le bruit se rapproche. Que comptait-elle faire exactement ? Puis le vacarme cessa. Un bruit de porte qui grince résonna, et le petit grondement reprit. Erika risqua un coup d'oeil. Un automate semblable à celui qu'elle avait croisé dans les jardins était entrain de poussr chariot qui semblait lourdement rempli. L'automate passa par la porte qui venait de s'ouvrir et se mit à tirer le chariot vers l'intérieur. Une odeur familière parvint alors à la brunette. Du linge propre ! Elle avait toujours adoré cette odeur si caractéristique du linge fraichement lavé. Poussée par la curiosité, elle se faufila pour se rapprocher du chariot. Son regard se posa sur son contenu et elle eut un hoquet de stupeur. Du linge blanc ! Sans réfléchir, Erika tendit la main pour attraper un morceau de tissu avant que le chariot ne disparaisse par l'entrebaillement de la porte. Puis elle s'en fut à toute allure dans la direction opposée.
La jeune fille jubila au fond d'elle. Finalement, elle s'en sortait plutôt bien ! A l'abri d'une cage d'escalier, elle déplia l'étoffe blanche. Elle ressemblait effectivement aux tuniques que portaient certains des passants. Avec empressement, Erika se défit de son ancienne robe et passa la tunique. Elle était clairement trop grande pour elle, mais tant pis elle ferait l'affaire pour le moment. Ses yeux se posèrent alors sur ses bottines à talons. Pouvait-elle les garder aux pieds ? La tunique était suffisamment longue pour les recouvrir pratiquement entièrement. Elle hésita, mais préféra les garder pour le moment. Le pire aurait été de devoir débouler dans les rues pieds nus. Elle vérifia rapidement qu'elle ne portait rien de plus. Son couteau, qu'elle dissimula précieusement sous la tunique. Pas de collier, ni d'accessoires... La bague. Son regard se posa sur l'anneau d'or toujours passé à son doigt. Devrait-elle s'en séparer ? Non, c'était le seul objet de valeur qu'elle avait sur elle, et il pouvait peut être lui servir d'objet de troc si elle ne parvenait pas à se sortir de sa situation rapidement. Toutefois, elle le retira de son doigt et le cacha dans sa chaussure. Pas très pratique, mais elle n'avait rien d'autre à disposition. Apprêtée, la brunette se saisit de sa robe et la jeta dans une benne qu'elle trouva à quelques pas. Elle n'en pouvait plus de cette robe de toute façon, et elle ne pouvait pas s'en encombrer.
Plus confiante, Erika retourna sur une allée plus fréquentée, en quête de son prochain objectif : son frère. Afin de ne pas éveiller les soupçons et ne pas avoir l'air parfaitement perdue dans sa tunique trop grande pour elle, elle se força à prendre un air déterminé et interpella une femme qui passait par là.
"- Je vous demande pardon, mais pourriez-vous m'indiquer où est-ce que je pourrais me renseigner sur les Gardiens de la paix s'il vous plait ?"
La femme lui indiqua une direction. Erika prit à peine le temps de la remercier et s'en fut à toute allure. Arrivée à l'endroit indiqué, elle leva le nez. Bureau des Gardiens de l'Ordre et de la Paix. Tout se déroulait comme prévu, c'était presque trop facile. Revigorée, Erika passa les portes de l'imposant bâtiment. Dans le grand hall immaculé et ordonné, un petit homme était assis derrière un comptoir d'accueil. La jeune fille s'approcha d'un pas vif.
"- Excusez-moi, je suis à la recherche d'un dénommé Emile, il travaille ici en tant que Gardien, commença t-elle hasardeusement. Pourriez-vous m'indiquer où je pourrais le trouver ?
Le petit homme releva le nez de son registre.
- Vous êtes ? fit-il avec un léger accent mélodieux.
- Sa cousine germaine, mentit Erika avec un sourire qui se voulait innocent.
L'homme plissa les yeux.
- Et pourquoi cherchez-vous l'un de nos Gardiens, Miss ?
- Hé bien... Erika se tordit les mains, elle ne s'était pas vraiment préparée à subir toutes ces questions. A vrai dire, il n'est pas au courant de ma venue ici et j'aurais aimé lui faire la surprise - cela fait si longtemps que nous nous sommes pas vus !"
Elle eut un petit rire nerveux. Elle espérait que son demi-mensonge passerait. L'homme la dévisagea encore quelques instants puis haussa les épaules et se mit à feuilleter les pages de son registre. Erika souffla. C'était l'avantage de se faire peur à personne : les gens se méfiaient un petit moins d'elle.
"- Emile, Emile... Ha. Il est en mission de patrouille hors de la cité, il sera de retour dans 3 jours. Repassez donc dans trois jours, Miss."
Trois jours ? Mais elle avait le temps de mourir au moins dix fois dans ce laps de temps ! Elle se sentit de nouveau désespérée. Mais l'homme était déjà retourné vaquer à ses occupations et ne se souciait plus d'elle. Dépitée, elle se traina à l'extérieur du bâtiment. Soudain, son ventre cria famine et elle sentit ses membres s'engourdir. Depuis combien de temps n'avait-elle ni mangé ni dormi ?
Dans une dernière tentative, Erika s'assit sur un banc et ferma les yeux dans l'espoir de localiser son frère. Après tout l'homme de l'accueil lui avait peut être menti pour une quelconque raison. Emile... Elle se concentra sur ce visage familier qu'elle n'avait pourtant pas revu depuis des années. Allez... Le coeur battant à tout rompre, elle pria que sa boussole interne fraichement acquise fonctionne. Une très légère image lui parvint alors, floue et incomplète. Elle y vit simplement son frère en tenue de Gardien, assis dans ce qui semblait être un aérostat ou un autre moyen de locomotion, elle n'aurait pas su dire. Sa seule certitude était qu'elle ne connaissait ni l'endroit ni les personnes autour de lui. Le visage neutre, son frère semblait s'être perdu dans ses pensées. Emile ! hurla t-elle dans sa tête. Sans succès. Puis elle perdit l'image et rouvrit les yeux, le coeur lourd.
Alors la réalité la frappa de plein fouet : elle était seule sur une Arche inconnue, sans vivres, sans ressources, et sans endroit où aller. Une vague de désespoir l'envahit. Comment allait-elle bien pouvoir s'en sortir ?
Elle erra dans les rues les moins passantes, à la recherche de n'importe quoi pour l'aider. Son regard se posa sur les bennes à déchet en dehors des habitations. Non, elle refusait de fouiller à l'intérieur, elle n'était pas encore assez désespérée pour cela. Elle se mit plutôt à la recherche d'un abri où elle pourrait se reposer. Même quelques minutes, mais son corps avait besoin de repos. Au détour d'une ruelle dérobée, Erika tomba sur un petit cagibi sous les marches d'un escalier, qui n'avait pas été verrouillé. Victoire ! Avec un regard prudent derrière elle, elle s'engouffra sans demander son reste dans l'étroit cagibi. A l'intérieur, des accessoires de jardin de toutes sortes s'entassaient, aux côtés de sacs de toiles dont la texture laissait penser qu'ils contenaient de la terre ou des graines fines. Prenant soin de ne pas faire face à la petite porte, Erika se plia en quatre pour s'enfoncer le plus loin possible, s'installa sommairement entre deux gros sacs de toile. Accablée de fatigue, elle s'assoupit dans un sommeil agité peuplé de boussoles, de pièges à souris, et de géants bruns.
Messages : 378
Date d'inscription : 01/04/2022
Crédits : graenfur
Univers fétiche : Dystopique, fantastique, mythologie, etc.
Préférence de jeu : Les deux
Asma
Sam 3 Déc - 16:31
Orion
J'ai 27 ans et je suis originaire de l'arche de Zéphyr. Dans la vie, je suis pilote d'aérostat et je m'en sors très bien. Sinon, j'étais célibataire et je le vivais très bien, mais on m'a arrangé un mariage, et je le vis un peu moins bien.En savoir plus.
En suivant son parcours nominal, y compris toutes ses escales sur les arches majeures et mineures prévues sur sa route, le Boréal en avait en tout et pour tout pour quinze jours à trois semaines à faire la traversée. Quinze s’il se pressait, plutôt vingt s’il prenait le temps de s’arrêter un peu plus longuement en cours de route. Si l’Harmattan était capable de tenir le train d’enfer que son capitaine lui imposait, Orion était en mesure de faire la traversée en six. Cela voulait dire pas de repos, ni de répit. Se maintenir dans le Flux, imprimer un vent favorable pour constamment remplir les voiles, quelles que soient les conditions météorologiques réelles.
Pendant trois jours, il parvint à tenir le rythme, dormant peu, ne s’accordant que de petites siestes pour récupérer suffisamment d’énergie pour reprendre le quart et maintenir son pouvoir activé. Il vit passer au loin la chaîne de montagnes rocheuses caractéristique du Tartare, mais ne s’y arrêta. Il poursuivit jusqu’à l’arche de Désert, dont il se délecta du paysage extraordinaire. Au creux de dunes d’un blanc immaculé dessinés par le vent se logeaient d’immenses lagons cristallins d’eau douce, verte, bleue, turquoise.
Installé sur la dunette, Orion était occupé à grignoter une pomme en regardant le soleil descendre vers la mer de nuages et teinter les dunes d’un camaïeu de rouges et d’oranges, lorsque l’Harmattan fit une soudaine embardée. Le jeune homme se redressa d’un bond. Nouveau coup de boutoir. Ni une ni deux, il s’approcha de la rambarde et jeta un œil par-dessus bord, d’un côté, puis de l’autre. Rien ni personne autour de lui. Il était seul dans le ciel. Ses voiles semblaient toutes intègres. Orion se concentra pour essayer de modérer le vent. L’inverse se produisit. Sous l’effet d’une nouvelle violente bourrasque, le vaisseau gîta dangereusement sur bâbord.
Il perdit sa concentration et cessa d’essayer de faire changer la masse d’air autour de lui. Tout s’arrêta net. Le jeune homme haleta. Que venait-il de se passer ? Jamais une telle chose ne lui était arrivée. C’était comme s’il avait momentanément perdu le contrôle sur son pouvoir. Il fallait dire qu’il n’avait jamais essayé de l’utiliser en continu pour aussi longtemps. Il lui fallait certainement une pause. Perchée sur un éperon rocheux, se trouvait Oasis, qui dominait une ouadi fertile à la lisière de l’étendue désertique. S’abstenant de réutiliser son pouvoir, Orion y descendit lentement, se posant au droit des grands immeubles de torchis de la cité.
L’escale fut de courte durée. Le temps de vérifier que rien ne clochait sur l’Harmattan et de se ravitailler en eau et en fruits frais. Les sourciers étaient une famille plutôt secrète et distante, qui n’appréciaient qu’assez peu les étrangers de passage sur leur arche. Des rumeurs et légendes laissaient entendre qu’ils étaient capables de jeter des maléfices ou d’attirer le mauvais œil sur quelqu’un. Orion ne comptait pas se faire plus d’ennemis qu’il n’en avait déjà. Il avait déjà assez de problèmes en l’état pour une vie entière.
Le capitaine s’empressa de reprendre les airs. Non, son navire volant ne rencontrait aucune avarie ni difficulté quelconque. Il fallait bien l’admettre. Si problème il y avait, cela devait venir de lui. Le grand brun se frotta les yeux d’un geste las. Il pouvait toujours ressentir l’attraction du fil invisible qui le guidait vers Babel. Que ferait-il une fois sur place ? Comment procéder pour chercher Erika sans attirer sur lui une attention non désirée ? Et s’il la trouvait ? Quoi alors ? Allait-il vraiment lui demander de la suivre, comme ça ? Pour faire quoi ? Pour aller où ? Lui ferait-elle confiance, après tout ce qui s’était passé sur Zéphyr ? Si elle était parvenue à s’échapper toute seule, peut-être – à juste titre – considèrerait-elle qu’elle n’avait pas besoin de son aide. Une main sur la barre, la tête en appui sur son poing fermé, il s’assoupit.
Longue. Trop longue. Cette traversée était beaucoup trop longue. En dépit de la vitesse à laquelle il avait filé, et du record qu’il avait dû battre pour atteindre Babel, Orion ne pouvait s’empêcher de penser qu’il avait trop tardé. Il reconnût au loin la surréaliste structure du Mémorial de Babel, surplombant en partie le néant, la contourna largement par l’ouest pour aller rejoindre la station d’aérostats de la cité. Et si Astréos ou ses sbires l’avaient pris de vitesse et étaient déjà là, sur l’arche ? Ces questions ne cessèrent de le tarauder jusqu’au moment où il amarra son vaisseau à quai.
- Bienvenue sur Babel, sir, l’accueillit une voix métallique sur le ponton. N’oubliez pas de réaliser les formalités d’usage pour votre arrivée. Ce sera au guichet, là-bas. Je vous rappelle que vous n’êtes pas autorisé à quitter le Terminal dans cette tenue, sous peine d’être ennuyé par la police vestimentaire, shocking ! Reprit l’automate.
Celui-ci tendit un formulaire à Orion et lui indiqua la direction à suivre. Sans un mot, le jeune homme s’exécuta.
Le grand brun baissa la tête en pénétrant dans l’échoppe familière qui embaumait l’encens.
- Miss Adélaïde, salua-t-il poliment la tenancière. - Orion ! Cela faisait longtemps que je ne vous avais pas vu, dear. Mais quel est donc cet accoutrement étrange ? - Justement, vous allez rire.
Une bonne demi-heure plus tard, le jeune homme ressortit de la boutique revêtu d’une tunique vert-de-gris à manches courtes et d’une toge assortie. La fibule qui maintenait la tunique sur son épaule droite portait le symbole de son insigne de Navigateur sur Zéphyr. A chacun de ses poignets, un bracelet jonc en bronze martelé, réhaussé d’un poinçon en forme de spirale, témoignait de ce qu’il avait un certain rang aux yeux des babéliens. Bien que présent sans sa machine, il était après tout le capitaine d’un aérostat d’une importante liaison inter-arches.
Orion avait choisi de ne pas cacher son identité. L’arche ne lui était pas totalement étrangère. Prétendre être ce qu’il n’était pas était susceptible de lui attirer plus d’ennuis que de se faire connaître sous sa véritable identité. Babel était une immense arche cosmopolite. On pouvait compter sur sa dimension pour assurer son anonymat, et il n’y avait rien de tel que de se cacher à la vue de tous. Officiellement, il n’était pas recherché par qui que ce soit. Astréos ne pouvait pas savoir qu’il était aussi en quête d’Erika. Quand bien même, il doutait, aussi Grand soit-il sur Zéphyr, que l’intéressé ait le bras particulièrement long sur Babel. Ou tout du moins, il espérait que ce ne soit pas le cas.
Orion poussa un long soupir. Il était paré à affronté la cité. Maintenant, ne restait qu’à trouver Erika.
Messages : 206
Date d'inscription : 26/07/2022
Région : IDF
Crédits : fleacircus.ig
Univers fétiche : Fantastique
Préférence de jeu : Les deux
Jen
Sam 3 Déc - 20:15
Erika
J'ai 24 ans et je vivais à Sidh, XVIème arche majeure. Dans la vie, je suis fille de famille inlfuente et je m'en sors bien selon moi, mal selon mon père. Sinon, grâce à ma malchance, je suis fiancée par arrangement et je le vis plutôt mal, évidemment.
C'est la faim qui la tira de son sommeil. Toujours coincée entre deux sacs de toile, Erika bougea pour se mettre un peu plus à l'aise. Le cagibi était si bas qu'elle ne pouvait que s'asseoir. Ainsi installée parmi les outils de jardinage, elle réfléchit. Il lui fallait survivre encore trois jours ici - peut-être seulement deux si elle avait dormi suffisamment longtemps, mais elle en doutait fort. Si elle pouvait compter sur cet abris de fortune pour dormir, elle avait à tout prix besoin de trouver de la nourriture et de l'eau. L'eau, il y en avait en abondance dans les multitudes de fontaines qu'elle avait aperçu un peu partout dans la cité. Mais la nourriture...
Silencieusement, Erika poussa la porte du cagibi. La ruelle était plongée dans une semi-obscurité qui la fit frissonner. Toujours aucun bruit dans les parages. Elle se décida à sortir. Rajustant tant bien que mal sa tunique, elle tenta de la replier astucieusement pour la remettre un peu mieux à sa taille.
La nuit commençait à tomber. Le climat de Sidh étant plutôt frais, elle n'avait jamais eu l'occasion de sortir dans un accoutrement aussi léger. Elle s'attendait à ressentir le froid, mais l'air ambiant était toujours aussi agréable, mais humide. Par réflexe, elle se passa une main dans les cheveux : ils avaient tendance à frisoter lorsqu'ils étaient exposés à l'humidité. Puis elle eut un sourire sans joie. Elle se préoccupait de l'apparence de ses cheveux alors même qu'elle n'avait ni de quoi manger ni de toit sous lequel dormir.
En prenant l'air le plus naturel possible, elle regagna une grande artère et se mit en quête de nourriture. Au passage, elle s'arrêta pour boire dans une fontaine à l'eau claire. Les habitants semblaient habitués à se désaltérer eux aussi dans ces fontaines, et personne ne sembla lui porter d'attention particulière. Tant mieux. Feignant d'être simplement entrain de se promener, elle laissa ses pieds la porter où bon leur semblait, jusqu'à ce qu'elle atteigne quelque chose qui ressemblait à un temple de verre et d'acier. Erika leva les yeux et y déchiffra l'inscription "Grand Bazar". C'était sûrement sa chance.
Elle entra dans le grand bâtiment et fut tout de suite envahie par une chaleur bien plus oppressante qu'à l'extérieur, mais surtout par des odeurs d'épices en tous genres. Son ventre gargouilla de plus belle. Elle jeta des coups d'oeil aux échoppes étalées tout autour et se rendit compte qu'elle avait l'embarras du choix. Des fruits, des légumes, et des plats en tous genre s'entassaient à en lui en faire tourner la tête. Seul souci, il lui faudrait être discrète. Elle ne voulait pas se retrouver dans le pétrin à cause d'une pomme volée.
Nonchalamment, elle s'approcha d'une grande échoppe centrale où étaient présentés des fruits exotiques dont la jeune fille ne connaissait même pas le nom. Tandis que le vendeur était en pleine négociation avec un client, Erika tendit une main discrète et fourra un fruit dans les pans de sa tunique, seul avantage que lui procurait sa trop grande taille. Elle vérifia d'un coup d'oeil que personne n'avait vu son manège mais effectivement, personne ne semblait prêter attention à une gamine dans le bazar. Elle soupira de soulagement - c'était la première fois qu'elle avait à voler quelque chose, et elle n'était vraiment pas à l'aise. Rapidement, elle ressortit du bazar et retourna dans son cagibi. Jour un, surmonté.
Les jours suivants, Erika explora un peu plus la cité. Après tout, elle n'avait pas encore la crainte que les cinglés de Zéphyr retrouvent sa trace ici. Il était encore sûrement trop tôt pour qu'ils se doutent qu'elle était venue à Babel. En effet, durant sa pétrification, Astréos n'aurait pas pu la voir s'enfuir par cette porte. Il avait dû reprendre connaissance en même temps que les effets du pouvoir se dissipaient, mais il aurait été bien trop tard et Erika s'était enfuie depuis longtemps. Alors autant profiter un petit peu en attendant le retour d'Emile. Tout par ici lui était étranger, et tant qu'elle évitait de parler avec les habitants, la jeune fille se sentait finalement plutôt en sécurité. Si son accent trahissait immédiatement ses origines, l'apparence des habitants d'ici était si hétéroclite qu'elle se fondait parfaitement dans la masse. Elle avait même fini par s'habituer à sa tunique, et se mouvait avec aisance dedans, et le soir venu y cachait les butins de ses larcins au Grand Bazar. Elle ne mangeait pas à sa faim et avait un sommeil irrégulier mais au moins, Emile ne devait plus trop tarder maintenant. Parfois, assise dans le cagibi ou sur un banc dans les jardins, la jeune fille se prenait à réfléchir au futur. Que devrait-elle faire une fois Emile retrouvé ? Elle aurait aimé rentrer à Sidh mais craignait de ne mettre sa famille en danger. Devait-elle seulement les prévenir de ce qu'il se tramait sur Zéphyr ? Et Orion dans tout ça ? Pouvait-elle encore espérer une aide de sa part ou le capitaine était-il déjà retourné parcourir le vent à bord de son Boréal sans plus se soucier du reste ? Ces interrogations l'empêchaient de dormir la nuit venue, blottie entre deux sacs de terre.
Au matin du troisième jour, Erika se sentit une énergie nouvelle. Emile devait être rentré de mission ! Avant de s'adresser au Bureau des Gardiens, Erika tenta de localiser son frère à l'aide de ce fameux pouvoir d'Aiguilleur. Mais elle n'eut qu'une vision très similaire à la première, lui assis dans un aéronef entouré d'inconnus. Sa boussole interne lui indiquait une direction vague, imprécise. Etrange. Peut être était-il sur le chemin du retour, et son pouvoir n'était pas encore assez fort pour le localiser à une grande distance. Elle décida donc d'attendre le soir avant de se présenter au Bureau, pour laisser le temps à Emile de rentrer. En attendant, elle alla se débarbouiller dans une fontaine, observa son reflet dans l'eau et grimaça. Sa trousse de toilette lui manquait énormément, sans compter ses jolies robes habituelles. Elle n'aimait pas la sobriété que lui renvoyait son reflet, sans parler de ses cheveux qu'elle avait de plus en plus de mal à "coiffer", et ses cernes qui lui tombaient jusqu'aux genoux. Vivement qu'elle retrouve un vrai lit !
En fin d'après-midi et n'en pouvant plus d'attendre, la jeune fille se dirigea vers le Bureaux des Gardiens. Impatiente de retrouver son frère, elle se dirigea droit vers le comptoir d'accueil constata qu'il ne s'agissait pas du petit homme de la dernière fois. Flûte, elle espérait que son petit manège allait fonctionner avec cette femme blonde également.
"- Bonjour, je suis à la recherche de mon cousin Emile, il est Gardien de la paix ici, pourriez-vous m'indiquer où le trouver je vous prie ?
- Ha Emile ! s'exclama alors la jeune femme avec un rire enjoué. Ce n'est pas de chance pour vous, il aurait dû rentrer aujourd'hui mais sa mission vient d'être rallongée, et d'après mes records la durée est encore inconnue.
Erika sentit le ciel lui tomber sur la tête. Comment ça, une durée indéterminée ?
- Mais vous êtes donc sa cousine ! reprit la femme blonde sans remarquer le visage décomposé de la visiteuse. Je suis moi-même très amie avec Emile, c'est un vrai plaisir de faire votre connaissance. Emile est un garçon tout à fait charmant...
La Babélienne fit milles éloges de son frère, les joues rosies et en jouant avec ses cheveux. Erika observa son manège, désarçonnée. Il était clair que cette jeune femme en pinçait pour son frère. Elle tenta alors d'en tirer avantage.
- Dites-moi, vous pourriez lui faire passer un message pour moi ? Puisque vous êtes en de si bon termes tous les deux...
- Oh Miss, j'aimerais beaucoup mais c'est malheureusement contraire à la procédure vous savez...
Erika lui fit un regard suppliant, qu'elle n'avait même pas à feindre. La blonde sembla réfléchir quelques secondes puis céda.
- Bon alors ça reste entre nous Miss, chuchota t-elle en se rapprochant du bord du comptoir. Que voulez-vous que je lui transmette ?
La brunette réfléchit vivement. Leurs parents étant tous les deux enfants uniques, ils n'avaient ni cousins, ni cousines. Son frère comprendrait certainement le message si elle le formulait correctement.
- Dites lui simplement que sa cousine est passée et qu'elle souhaite lui rendre visite dès que possible, pour attraper des souris glacées.
- Bien bien, pouffa la jeune femme en notant le tout sur un petit papier. Et à quel nom dois-je le signer ?
- Euh...
Erika paniqua. Devait-elle donner son vrai nom ? Ou cela n'était-il tout de même pas trop risqué ? Mais elle fut interrompue par le regard perçant de la grande blonde, qui avait soudain perdu toute trace de sympathie et qui la dévisageait avec suspicion. Les mots qu'elle prononça lui glacèrent le sang.
- Mais attendez, Emile m'a dit n'avoir aucune cousine..."
PARS. MAINTENANT. Erika vit rouge et sans demander son reste, détala hors du bâtiment. On pouvait difficilement faire plus suspect.
"- Miss attendez !" l'appela la voix de la blonde dans son dos.
Tous les sens en alerte et haletante sous la chaleur qu'elle trouvait soudain étouffante, Erika détala à travers les rues de Babel encore pleines à cette heure. Premier réflexe : aller se fondre dans la masse au Grand Bazar. Surtout, ne pas se diriger vers son cagibi au cas où elle aurait été suivie. Elle ne pouvait pas risquer de se faire arrêter maintenant.
Mais alors qu'elle déboula comme une furie au milieu des étals de Bazar, une main lui saisit violemment le bras et la coupa dans son élan. Brusquement, elle dut faire face à un garçon qui faisait une bonne tête de plus qu'elle, probablement son âge ou un petit peu plus jeune, et qui la fixait furieusement de ses grands yeux bruns.
"- Toi là, marmonna t-il entre ses dents comme s'il ne voulait pas que leur altercation soit remarquée. Ca fait des jours que je t'observe voler à l'étalage de mes parents. C'est quoi ton problème ? Tu crois qu'on roule sur l'or peut être ?"
Erika eut le souffle coupé. Elle était cuite. Face à son silence le garçon fit mine de lui agripper le col de la tunique. Affolée, la jeune fille voulut porter la main à son couteau mais elle l'avait si bien enfoui sous sa tunique qu'il était tout simplement inaccessible. Quel sens de la survie.
"- Arrête attends, je t'en prie écoute-moi", le supplia t-elle d'une voix tremblante.
Le garçon sembla hésiter puis relâcha légèrement la pression. Erika souffla, et osa lever les yeux vers son agresseur. Il ne semblait pas dangereux en tant que tel, mais si un combat de force s'imposait, il la battrait sans aucun doute à plate couture. Elle déglutit.
"- Je suis venue ici pour retrouver mon frère, commença t-elle d'une voix presque inaudible. Des gens en ont après moi pour quelque chose que je n'ai pas fait, et il est ma dernière chance de m'en sortir."
Elle observa anxieusement le garçon. Il ne bougeait pas, était-ce un bon signe ? Elle reprit alors.
"- Je suis sincèrement désolée d'avoir dû voler à l'étalage de tes parents. Je déteste bien évidemment avoir à faire ça, mais je n'avais vraiment pas d'autre choix. S'il te plait, laisse-moi repartir et je t'assure que je ne mettrai plus jamais les pieds ici."
Elle s'attendait à ce que le garçon proteste, la menace, ou même à ce qu'il la brutalise. Mais il n'en fit rien, et se contenta de l'observer de façon curieuse. La colère dans ses yeux s'était atténuée.
"- Tu vas pas survivre trois jours toute seule ici, qu'est-ce que t'espérais vraiment, hein ? Il la détailla du regard. Regarde-toi sérieusement, je ne comprends pas que tu ne sois pas déjà morte."
Indignée, Erika allait lui répondre qu'elle avait bien au contraire réussi à survivre trois jours seule, alors oui la suite était compromise mais c'était une autre affaire, et surtout qu'elle ne se laisserait pas abattre aussi facilement. Mais avant qu'elle ne puisse répliquer, il lui saisit le poignet et l'entraina plus loin, dans les arrières du bazar. Erika l'interrogea du regard.
"- Si je te laisse repartir tu vas continuer à voler et tu vas te faire attraper. Et t'es pas de taille à les affronter."
Les ? Erika fronça les sourcils. De qui parlait-il ? Les Gardiens ?
L'inconnu la poussa à l'arrière d'un étal et l'installa sur un petit tabouret. Puis il lui présenta une assiette fumante d'un ragoût à l'odeur délicieuse d'épices.
"- Tiens mange."
La brunette leva vers lui un regard plein de gratitude, et sans se méfier ni se poser de questions, avala le ragoût en un rien de temps. Cela faisait bien trop longtemps qu'elle n'avait rien mangé de consistant. Le garçon resta planté face à elle.
"- T'es peut-être bien une sans-pouvoirs, dit-il ne attrapant un bout de sa tunique blanche et en l'observant pensivement. Mais t'es certainement pas d'ici. Il releva les yeux vers elle. D'où tu viens ?"
Durant un instant, elle fut tentée de tout lui dévoiler. Elle n'en pouvait plus de garder tous ces secrets pour elle. Mais elle devait se montrer prudente, qui sait qui était ce garçon. Alors elle lui raconta une version - très - allégée de son périple. Elle ne mentit pas sur ses origines, mais prétendit simplement avoir été mariée de force pour des raisons diplomatiques. Cependant, ne supportant pas sa vie de mariée, elle s'était enfuie - vraiment très loin pour le coup. Elle lui dit qu'elle voulait simplement retrouver sa vie d'insouciance. Et qu'elle était probablement recherchée pour avoir osé fuir ainsi ses obligations conjugales et diplomatiques. Et que son frère était en mesure de l'aider mais qu'elle ne savait pas quand est-ce qu'il serait de retour. Son désespoir sembla convaincre le garçon, qui l'écouta en hochant la tête.
"- Ecoute, on fait pas vraiment dans la charité mais je pense que j'ai ce qu'il te faut en attendant que ton frère revienne. Il lui fit signe de le suivre. Viens avec moi."
Son bol de ragoût parfaitement vidé, Erika suivi le garçon. Après tout, elle s'était déjà trop ouverte à lui pour faire demi-tour, et elle ne pouvait pas se risquer à retourner dans les rues après l'alerte qu'elle avait dû déclencher au Bureau. Il la fit traverser le Bazar, puis passa sous une arcade qui semblait donner sur une grotte. L'odeur caractéristique de la pierre froide mélangée à l'eau stagnante lui saisit les narines. Erika frissonna. La température venait de chuter d'une dizaine de degrés. Le garçon se dirigea vers une échoppe apparemment abandonnée, à l'insigne d'une orange à peine visible sur le dessus. Sans hésitation, l'inconnu donna un coup à la porte. Aussitôt, un judas s'ouvrit.
"- C'est moi, ouvre", fit-il simplement.
- Et elle ? demanda la voix dans le judas.
- Une amie."
La porte s'ouvrit, et le garçon entraina Erika avec lui. Ils venaient d'arriver dans ce qui ressemblait à d'anciennes thermes qui avaient été abandonnées. Il y régnait une étrange odeur. Le garçon attrapa une lampe à gaz et lui fit signe de le suivre. Elle lui emboîta le pas dans un escalier obscur sinueux qui s'enfonçait dans le sol. Le froid s'accentua encore. Dans quel pétrin s'était-elle encore fourré ?
Ils passèrent par des couloirs sous-terrains où s'entassaient des ossements humains. A présent, la confiance qu'avait placé Erika en ce parfait inconnu commençait sérieusement à vaciller.
Mais alors qu'elle hésitait à faire demi-tour pour de bon, ils débouchèrent sur une grande salle voûtée dans laquelle se déroulait la fête la plus chaotique qu'Erika n'ait jamais vue. Des centaines de personnes s'entassaient là en dansant, en chantant, ou en buvant des boissons qui étaient pourtant proscrites à la surface. Certains s'enlaçaient sans la moindre gêne tandis que d'autres se battaient à mains nues sous les encouragements hystériques de la foule. Ici et là, des livres et des images de débauche pure s'entassaient. La jeune fille écarquilla les yeux tandis que le garçon s'enfonçait dans la foule en la trainant par la main. Même pour Erika qui aimait festoyer, l'ambiance était accablante, intenable. Ils arrivèrent à hauteur d'une table où une dizaine de jeunes gens buvaient dans des choppes, habillés de manière à se faire arrêter immédiatement s'ils remontaient dans la cité. Ils saluèrent le nouvel arrivant puis posèrent un regard curieux sur la brunette qui frissonna. Alors seulement, le garçon se retourna vers elle.
"- Au fait, moi c'est Zeyd, fit-il en lui souriant d'un air malicieux. Et je te présente les Sales Gosses de Babel."