Le repas arrivait sur sa fin et personne ne s’était entretué. Nate pouvait se réjouir de ça. Tout le monde avait même réussi à rester cordial. C’était déjà ça. Malgré les ressentiments commun, la soirée s’était plutôt bien passée. Mais l’heure de Matt de les congédier était arrivée bien trop vite. Nate avait esquissé une petite moue un peu triste. Il n’allait évidemment pas le retenir mais il aurait aimé passer plus de temps avec lui. « Plaisir partagé. » Et vu le sourire de sa mère, soit ils étaient tous les deux très bon pour faire semblant, soit il y avait un peu de vérité. Nate avait envie d’y croire. « Pas de soucis. » que Nate avait acquiescé quand Matt lui avait demandé de l’appeler quand il aurait le temps de le livrer. Sauf qu’il ne comptait pas s’arrêter là. Alors que Matt s’en allait chercher un taxi, Nate se pressa de le rattraper, laissant sa mère en plan. « Matt ! Attends ! » qu’il s’était exclamé. Il était parti bien trop vite pour qu’il ait le temps de lui faire sa proposition, proposition qui lui trottait dans la tête depuis le début du repas. « Je vais déposer ma mère à l’hôtel et après je pourrais peut-être te rejoindre ? » Allez. Dis oui Matt. Nate espérait qu’une chose à ce moment précis que l’excuse de devoir se lever tôt en était bien une et qu’ils puissent enfin passer une nuit ensemble. Il lui manquait. La mère de Nate était restée en retrait en les voyant discuter. Est-ce qu’elle commençait à savoir respecter les limites ? Peut-être.

J'étais sur le trottoir, m'allumant une cigarette en attendant de voir un taxi se pointer. La soirée avait été éprouvante et j'avais besoin de décompresser un peu. Je n'avais pas vraiment menti. La journée avait été longue. Ca restait difficile de côtoyer Dan de loin, de sentir son regard parfois sur moi, sans pouvoir avoir le voir. Le diner avait été encore plus compliqué à gérer. J'allais rentrer chez moi mais je n'étais pas encore couché. J'avais du texte à réviser pour le lendemain et je n'avais pas vraiment eu le temps de m'y pencher dessus. Une journée et une soirée éprouvante pour mes nerfs et elle n'était pas encore terminée.

Je me retournais surpris en entendant Nate m'interpeller et venir vers moi. Merde... il venait m'engueuler pour mon comportement avec sa mère? Parce que je n'avais pas été assez amicale peut être? J'avais fait de mon mieux pourtant, mais je ne pouvais pas faire plus envers la femme qui m'avait privé de l'homme que j'aimais pendant tant d'années.

Je fronçais un peu les sourcils en entendant sa proposition. Se débarrasser de sa mère pour venir me voir ensuite. J'avais presque le sentiment qu'il recommençait à venir me voir en cachette. Sauf que là sa mère allait certainement se douter de quelque chose. Je n'avais pas vraiment envie de penser à elle, entrain de s'imaginer ce que son fils pouvait faire avec moi maintenant que nous n'étions plus avec elle.

- Je suis désolé mais non, pas ce soir. Je suis réellement fatigué. Je dois me lever tôt demain et j'ai encore beaucoup de texte à apprendre. Et je ne pourrais pas réviser si tu es là.

Je lui souris doucement en disant ça. On savait très bien, lui comme moi, ce que nous allions faire si il venait me rejoindre chez moi ce soir.

Je tirais une bouffée de ma cigarette avant de l'écraser au sol. Un taxi venait de s'arrêter devant moi. J'ouvrais la portière avant de me retourner vers Nate.

- Appelle moi quand elle sera partie. Je pourrais te faire visiter les studios quand tu feras ta livraison. J'ai un ami aussi qui m'a parlé d'une maison plus loin sur la côte, sur la plage, qu'on peut louer pour le week end. On pourrait se faire un week end là bas, rien que toi et moi. Rappelle moi quand ce sera bon pour toi, et si ça te dit.

Un week end rien que tous les deux, coupés du monde comme lorsque nous étions au ranch... moi j'en rêvais en tout cas.

Nate avait rejoint Matt avant qu’il ne disparaisse, plein d’espoir. Il avait vraiment envie de le retrouver. Être séparés, c’était toujours un peu dur et ils n’avaient pas pu être seuls depuis leur dernier accrochage. Alors, oui, il en avait envie. Mais à la tête de son cher et tendre, il avait vite compris que ce ne serait pas pour ce soir. Il n’avait pas eu besoin d’ouvrir la bouche pour qu’il comprenne. Evidemment, ça avait un peu piqué sur le coup. Bien sûr, il avait également douté quant à la santé de leur couple. Mais Nate n’était pas du genre à forcer. Et il avait toujours su se montrer compréhensif. Alors il comprenait. « Ok. » qu’il avait alors simplement dit en répondant à son sourire. « Travaille bien. » qu’il lui avait souhaité ensuite, sincère. Un taxi était venu s’arrêter devant Matt, il avait ouvert la porte de la voiture et lui avait proposé un week-end à deux. Il ne s’y était pas du tout attendu mais ça avait eu le don de lui réchauffer le coeur. Dans un sourire plus franc cette fois, il avait répondu : « Je te rappellerais. Bonne nuit. » Et après un petit signe de la main, sa mère était venue le rejoindre et ils avaient regardé ensemble le taxi démarrer. Ils étaient retournés à l’hôtel dans un silence presque total. Ils étaient tous les deux dans leurs pensées. Nate n’avait pas spécialement envie de connaitre celles de sa mère et il fallait croire que c’était réciproque. Arrivés devant l’hôtel, Nate avait congédié sa mère avec une accolade et il avait repris le chemin de chez lui seul.
Le reste de la semaine était passé relativement vite. La mère de Nate avait eu énormément de mal à quitter son fils. Nate, lui, avait été heureux de la voir venir mais il n’était pas mécontent de la revoir partir : il avait envie de retrouver son homme. Cet homme qu’il avait appelé sitôt rentré de l’aéroport en espérant qu’il décroche. S’ils ne se voyaient pas, tant pis, mais il voulait au moins avoir de ses nouvelles.

Il était déçu, je le voyais bien. Mais là ce soir je ne pouvais pas. J'avais besoin de me reposer. Je devais travailler encore. Et je ne pouvais pas tant que sa mère était là. J'étais beaucoup trop mal à l'aise de la savoir dans le coin. Mais il semblait avoir compris malgré tout. Il n'avait rien dit sur mon projet de week end. Je ne pouvais pas lui en vouloir. Il était certainement encore sous le coup de la déception de ne pas passer le reste de la soirée ensemble.

Je rentrais chez moi et je me mis au travail. Je passais un moment à apprendre et répéter mon texte avant d'aller me coucher. Je maintenais cette routine toute la semaine. Je n'avais pas de nouvelles de Nate, mais en même temps je lui avais demandé de me recontacter quand elle serait partie. Mais il me manquait. L'ambiance restait mitigée sur le tournage. Je m'entendais bien avec les autres acteurs et les membres de la production. Mais je sentais toujours la présence de Dan, son regard sur moi quand il pensait que je ne le voyais pas, sa présence pesante quand on devait bosser ensemble, son ton froid... Il me tardait que ce tournage finisse. J'allais prendre un peu de temps pour moi. Peut être que Nate serait disponible d'ici là et peut être qu'il serait d'accord pour qu'on fasse ce week end à deux.

Les jours passaient donc lentement. J'avais hâte de pouvoir retrouver Nate au moins. Je ne pourrais pas changer grand chose pour Dan mais au moins je pourrais avoir la présence de mon homme à mes côtés.

J'étais en repos chez moi ce jour là, entrain de réviser mon texte. Je devais retrouver une amie ensuite pour déjeuner avec elle et faire un peu de shopping. Officiellement c'était pour elle, mais officieusement je savais qu'elle voulait me "relooker" pour que je laisse tomber un peu mes éternels jeans.

Je fronçais les sourcils en entendant le téléphone sonner. J'espérais que ce n'était pas Dan, ni mon amie qui venait annuler notre sortie. Je n'étais pas spécialement passionné par le shopping mais ça me ferait du bien de sortir un peu et de me changer les idées.

J'allais décrocher, ne sachant pas à quoi m'attendre, quand j'entendis la voix de Nate au bout du fil. Je me détendais aussitôt, souriant au son de sa voix.

- Salut toi, comment tu vas?

Et surtout est ce que sa mère était partie? Je n'osais pas le demander mais j'espérais que ce soit le cas.

Nate avait soupiré de soulagement en entendant la voix de Matt à l’autre bout du téléphone. Il aurait été sacrément déçu de ne pas réussir à l’avoir au téléphone. Il avait bien compris que sa mère avait posé problème mais maintenant qu’elle n’était plus là, il mourrait d’envie de le retrouver. Rien dans cette vie n’avait vraiment de saveur si Matt n’était pas de la partie. « Salut. » Il souriait tellement que ça devait probablement se percevoir dans sa voix. « Bien… Mieux, en fait. Et toi ? » Nate avait eu le temps de penser à ce week-end que Matt lui avait proposé. Et de s’en réjouir. Il ressentait plus que jamais l’envie de se retrouver en tête-à-tête avec lui. Sans réfléchir plus longtemps il avait alors dit : « Je viens de déposer ma mère à l'aéroport et je me demandais... Ça tient toujours ce week-end dans la maison de ton pote ? » Tant que ce pote n’était pas Dan, ça lui allait très bien. Et le fait qu’il pensait encore à lui lui faisait dire qu’il était temps qu’ils oublient un peu leurs problèmes et qu’ils aillent de l’avant. Et pour ça, il fallait qu’ils partagent des moments agréables. Loin des petits tracas que connaissaient leur couple.

- Ca va oui.

Beaucoup mieux depuis que j'avais pu entendre sa voix à nouveau. Il m'avait manqué pendant ces quelques jours. J'avais beau avoir connu bien plus long comme séparation, ça restait quand même difficile. Je m'étais fait à l'idée de l'avoir désormais à mes côtés, sans restriction. C'était dur de devoir revenir en arrière.

Je souris en entendant qu'il venait de déposer sa mère à l'aéroport. Enfin nous allions pouvoir être un peu plus libre. J'allais pouvoir le voir, sans me soucier de savoir sa mère dans les parages. Elle allait faire sa vie loin de nous et je n'aurais pas à la supporter avant un long moment. Du moins je l'espérais.

- Ce n'est pas la maison d'un ami. C'est un ami qui connait cette villa et qui l'a déjà loué pour un tournage précédent. Il a sympathisé avec le proprio du coup et il sait que si on veut la louer pour un week end, il pourra nous avoir un prix.

C'était plutôt un bon plan, dont mon ami avait déjà profité et dont il m'avait parlé. Il l'avait déjà loué plusieurs fois pour des week end, amenant à chaque fois une fille différente là bas. Selon lui, l'isolement, la beauté de l'endroit, réussissait à séduire les filles à chaque fois.

- Ca tient toujours oui. Il suffit que tu me dises quand tu es dispo et je verrais avec mon ami pour louer la maison. On ne tourne pas le week end donc c'est quand tu veux.

Je m'occuperais de la location et lui n'aurait qu'à nous conduire là bas. Je n'avais toujours pas de voiture, alors celle de Nate nous serait indispensable.

Je souriais alors que je réfléchissais déjà à comment nous organiser ce petit week end. Ca allait nous faire un bien fou. J'avais déjà hâte d'y être. Pouvoir profiter de tout un week end, rien que lui et moi, seuls au monde, c'était tout ce qu'il me fallait en ce moment.

Nate avait sourit en entendant Matt dire que ça allait. Il osait espérer qu’il n’avait pas eu d’ennuis pendant sa semaine, notamment avec Dan. Evidemment, il n’allait pas lui en parler. Il n’avait aucune envie de remuer la merde. Franchement, ils avaient eu assez de problème comme ça. Nate allait se focaliser sur l’avenir et faire tout pour qu’il soit radieux. « Ah. Au temps pour moi, j’avais mal compris. Ou mal retenu. C’était un peu bizarre ce soir-là. » qu’il avait avoué, un peu confus d’avoir tout compris de travers. Ça ne l’étonnait pas vraiment. Ça avait été une petite épreuve cette soirée. Et pourtant, ça s’était plutôt bien passé. « Eh bien… C’est trop tôt ce week-end tu crois ? » Trop tôt pour avoir la location, peut-être. Mais pour passer un week-end ensemble, non. Ils en avaient plus que besoin, au goût de Nate en tout cas. Il allait profiter de ce week-end pour tâter le terrain auprès de Matt et voir quand et s’il a envie qu’ils s’installent ensemble. Se manquer autant, ça n’avait plus aucun sens. Il avait envie qu’ils soient un vrai couple, qu’ils vivent ensemble en faisait parti.

C'était plus que bizarre, ça avait été une soirée des plus désagréables. Moins affreuse que la soirée d'inauguration de son salon de thé, mais désagréable quand même. Mais la palme des pires soirées serait toujours celle du mariage de Nate. Alors oui, ça avait été bizarre de passer toute la soirée avec une femme que je ne portais pas dans mon coeur et que je n'apprécierais peut être jamais. Ca avait été étrange pour Nate de nous voir ensemble et de sentir l'ambiance tendue entre nous. Mais ça ne serait jamais le pire que nous aurions vécu.

Je l'écoutais, souriant doucement en voyant à quel point il était impatient à l'idée que nous passions ce week end ensemble. J'étais un peu dans le même état. Il me manquait terriblement. Je rêvais de pouvoir passer tout un week end avec lui, pouvoir nous retrouver tous les deux au lieu de juste profiter de quelques moments volés à droite, à gauche.

- Et bien il faut que je vois avec mon ami, si la villa est libre ce week end. Je te tiens au courant dés que j'en sais plus.

J'espérais qu'elle le soit. Savoir qu'il était disponible et tout aussi impatient que moi, me donnait encore plus envie d'y être.

- Mais si ce n'est pas ce week end, je tenterais de faire en sorte que ce soit le suivant. Ou du moins le plus rapide possible.

Je serrais le téléphone contre moi, comme si en agissant ainsi je pouvais rapprocher Nate un peu plus de moi. J'aurais aimé qu'il soit là en cet instant et pas seulement à l'autre bout du fil. J'aurais voulu pouvoir le serrer dans mes bras et l'embrasser.

- Tu me manques Nate...

Ils s’y prenaient peut-être un peu tard pour réserver la villa pour ce week-end. Et même peut-être pour le week-end prochain, Nate en avait conscience. Pourtant, il en avait besoin. « Ok. Je ferai ma valise dans l’heure s’il faut. » qu’il avait assuré dans un sourire. Il mettrait même moins de temps s’il fallait. Ou bien il y irait sans valise. Peu importe. Il avait trop envie d’y aller. La destination comptait, c’est vrai. Mais ce qu’il voulait, c’était être seul avec Matt. « Le plus rapidement possible, oui… Ça me va. » Oui, c’est bien tout ce qu’il espérait. « Tu me manques aussi. » qu’il avait répondu directement quand Matt le lui avait confessé. Il avait ensuite légèrement soupiré. « C’est fou hein… Vivre dans la même ville et passer tout ce temps sans se voir. Le comble ! » Il avait sourit, un peu tristement. Quelque part, c’était bien qu’ils se manquent : ça prouvait qu’ils tenaient l’un à l’autre. Pour autant, Nate aurait préféré se passer de ce sentiment qu’il avait déjà largement éprouvé dans le passé.

- Je n'en doute pas...

Je souris doucement en disant ça. Il semblait tout aussi impatient que moi. Je serais prêt à partir sur le champ si j'avais la possibilité de passer un peu de temps avec lui. Enfin, je ne pouvais pas vraiment partir maintenant, je m'étais engagé auprès de mon amie pour la journée.

Je hochais la tête alors qu'il parlait du paradoxe de vivre dans la même ville et de ne pas pouvoir se voir.

- C'était un peu particulier, ta mère était là...

Je voulais leur laisser passer du temps ensemble, ils en avaient besoin tous les deux. Leur relation devait être assez tendue comme ça depuis que Nate avait quitté le Texas. J'étais pour Nate de voir que les choses s'étaient arrangées entre lui et sa mère. Mais je ne pouvais pas le voir tout en sachant que sa mère était dans les parages.

- Tu avais besoin de profiter d'elle c'est normal. Mais maintenant j'espère bien que je pourrais profiter de toi.

Je ris doucement en disant ça. J'espérais qu'on puisse faire très vite ce week end à deux. Je comptais bien profiter de lui, de toutes les façons possibles pendant ce week end.

- Il faut que tu me dises aussi quand tu pourras venir sur le plateau. Je leur ai promis des cookies, ils attendent ça avec impatience maintenant.

Et j'avais hâte moi aussi de lui faire visiter le plateau de tournage. Déjà parce qu'il me manquait, mais aussi parce que j'avais envie de lui faire découvrir un peu mon monde. J'avais été au pauvre type pendant des années. Je travaillais dans une ferme miteuse qui tombait en miettes, puis j'étais parti bosser dans le pétrole, m'abimant les mains jour après jour. Au moins maintenant je faisais un métier donc je pouvais être un minimum fier et j'espérais qu'il l'était lui aussi.