Je suis à la gare, celle accueillant le Poudlard Express, sensé nous conduire, moi et les autres élèves, à l'école du même nom. Enfin, du même nom, je parle de Poudlard, le mot " Express " n'est là que pour le train. Un bien joli train, d'ailleurs, rouge et noir, avec le logo regroupant l'emblème des quatre maisons de l'école.

À de nombreuses reprises, j'ai eu très envie de faire demi-tour, retourner à ma vie normale de garçon de 11 ans. Rien que quand j'ai simplement posé un pied au Chemin de Traverse, là où j'ai récupéré mes fournitures, j'étais déjà effrayé d'avoir mis le pied dans un monde qui m'est totalement inconnu.

J'ai du mal à croire que c'est pourtant là que se trouvent mes origines, comme me l'a certifié Albus Dumbledore, directeur actuel de Poudlard. Il a peut-être parfois - ou souvent ? - l'air d'un vieux fou, mais en revanche, je n'ai pas eu l'impression qu'il soit du genre à mentir. À notre rencontre, ses yeux bleus brillaient de sincérité, une sincérité qui m'a convaincu d'être ici, sur cette gare.

Préférant rester de mon côté, j'ai attendu l'arrivée du train à distance de mes nouveaux camarades sorciers. Je vais avoir du mal à me mêler à eux, à m'habituer à ma nouvelle vie et à mon nouveau chez moi. Parce que, de ce que j'ai compris, on reste à Poudlard pendant toute l'année, excepté pendant les vacances et ce, pendant trois années de suite.

Il paraît que certains finissent par considérer cette école comme leur deuxième maison ou famille, je doute que cela puisse m'arriver, sauf bien sûr si... le moment de ma rencontre avec lui va bien se passer.

C'est surtout ça, qui m'angoisse. Je ne le connais pas, je n'ai pas de souvenirs de lui, je ne sais même pas comment il est. Comment savoir si nos retrouvailles pourraient bien se passer ? Et si Dumbledore s'était trompé d'enfant ? Ça peut arriver ! J'aurais l'air de quoi, moi !?

Je secoue la tête pour chasser au mieux ces pensées. De toute façon, ce n'est pas la question pour le moment, je n'irais jamais vers lui dès le début en lui disant qui je suis. Non, je préfère attendre de prendre mes marques, de découvrir mon nouvel environnement, c'est déjà bien assez stressant comme ça.

Je finis par monter dans le Poudlard Express. Je me fais plusieurs fois bousculer par d'autres élèves visiblement surexcités mais je préfère me taire et éviter les protestations. On ne sait jamais, ils doivent mieux connaître la magie que moi, je veux éviter de me faire transformer en grenouille ou je ne sais quoi d'autre.

J'entre dans un compartiment au hasard, constatant qu'il est vide de tout occupant, m'arrachant un soupir de soulagement. Au moins, je n'aurais pas de risques à faire une bourde ou à être obligé de parler avec des inconnus. Je dépose mes bagages là où est leur place et m'assois sur l'une des banquettes, juste à côté de la fenêtre, pour mieux voir le paysage extérieur.

Je pense que le train ne va pas tarder à démarrer, parce que le reste des " retardataires " se dépêchent de monter, après un dernier au revoir à leur famille restée sur le quai. Je ressens un pincement au cœur en voyant ça, moi aussi, j'aurais aimé être salué et encouragé par ma famille, avant mon départ pour cette destination inconnue et angoissante pour moi.

Mais, je n'ai pas de famille. Enfin, si, peut-être. Peut-être que là-bas, à ma destination finale, je découvrirais qui je suis réellement. Et peut-être que je trouverais ma place. Mais tant que je n'en suis pas sûr... Je serais toujours Lucas River, l'orphelin qui est persuadé ne pas être à sa place, rien que dans ce train à la destination angoissante pour lui.

Le train finit par se mettre en marche et, au fur et à mesure, le paysage change tandis qu'il défile devant mes yeux. Plus je sais que l'on se rapproche de notre destination, plus les battements de mon cœur et mon angoisse augmentent petit à petit.

Après ça et une traversée en barque réservée aux nouveaux élèves, on se retrouve guidés jusqu'à une grande salle qui a faillit me convaincre de faire enfin demi-tour et de fuir cet endroit étrange.

Partout, des bougies flottent dans la pièce, alors qu'au dessus, à la place du plafond, on aperçoit une ciel étoilé, comme si le toit avait été retiré. Mais c'est surtout... La vue d'un professeur en particulier qui me fige sur place. Bien sûr, je ne l'ai jamais vu en vrai, à part peut-être quand j'étais bébé, mais grâce aux images que m'a montré Dumbledore, je sais que c'est lui.

Tout vêtu de noir, à l'air peu avenant et froid, il trône en compagnie des autres professeurs, aux côtés du directeur lui-même. Je ne me sens pas prêt à m'avancer parmi les autres élèves, je ne me sens pas bien tout à coup, c'est peut-être trop tôt pour moi... Je ne me sens même pas à l'aise, dans mes vêtements d'élève sorcier, j'aimerais tellement retrouver mes vêtements habituels.

Allez, courage, tu es déjà venu jusqu'ici de toute façon, tu ne peux plus faire marche arrière ! C'est ce que me dit ma petite voix intérieure, celle qui me pousse à finalement m'avancer avec hésitation pour me mêler à mes nouveaux camarades. Juste à temps, pour le début d'un discours long, presque à dormir debout.

C'était une nouvelle année scolaire qui débutait et probablement la pire depuis que Severus Rogue avait accepté de travailler à Poudlard pour ce vieux fou de Dumbledore. Cela faisait partie intégrante du contrat qu'ils avaient passé lorsqu'il lui avait demandé de protéger Lily. Et si cette protection avait été un échec monumental, il y avait encore quelque chose de Lily à protéger. C'était ce que Dumbledore lui avait dit, protéger Harry maintenant que sa mère était partie, protéger le fils de celle qu'il aimait et de celui qu'il haïssait. Mais il fallait lui donner sa chance. Peut-être avait-il quelque chose de la douce et de la belle que Severus avait aimé.

Alors qu'il se regardait dans le miroir de sa petite maison dans l'Impasse du Tisseur, le professeur de potion repensait à ceux qui étaient morts quelques années plus tôt, à celle qu'il avait aimée juste le temps d’oublier Lily pendant quelques instants. Mais quand elle avait mis au monde son enfant, il n'avait pas pu faire autrement que d'être là pour elle. Il les avait cachés tous les deux, mais pour quel résultat ? Finalement, il avait tout raté. Sa famille, la protection de Lily, il ne lui restait plus que sa mission pour Dumbledore pour redonner un minimum de sens à sa vie.

Il se mit donc en route pour Poudlard. Un transplanage à Pré-au-Lard, un peu de marche et il rejoignit le château, puis ses propres appartements. Sombres, silencieux et aussi vides que sa maison. Severus semblait être destiné à finir sa vie seul. S’efforçant de retrouver un peu de courage dans sa rage, il eut une pensée pour sa meilleure amie, et sa filleule. Kathleen allait intégrer l'école cette année, et elle serait certainement une lumière dans son obscurité, comme Mary l'avait été en son temps. D’elle, il connaissait les moindres talents et les cours lui sembleraient moins longs s'il pouvait enseigner à sa fille bien-aimée.

Une fois réinstallé, il fut temps de rejoindre la Grande Salle avant que les cornichons qui lui servaient d'élève ne fassent leur entrée. Au moment où les premières années entrèrent, Severus repéra tout de suite Potter qui avait le malheur de ressembler à son père de façon extrêmement flagrante. Pour éviter de montrer sa contrariété, Severus se concentra sur la jeune fille qui lui souriait, juste à côté d'un quelconque gamin qu'il n'avait même pas remarqué. Ses longs cheveux roux parfaitement coiffés et ses grands yeux bleus lui criaient son impatience de pouvoir lui parler de plus près. Il attendit de voir où elle serait répartie.

Mon regard surprend une fille de mon âge, juste à côté de moi, laquelle fait un sourire en direction du Professeur Rogue. Cette fille, je l'ai déjà vu dans la barque qui me menait au plus près de Poudlard. Qui est-elle ? Pourquoi lui offre-t-elle un sourire comme ça ? Ca ne me plaît vraiment pas ! En cet instant, j'ai presque envie d'aller effacer ce maudit sourire, par n'importe quel moyen !

C'est le début de la répartition des élèves dans leur maison qui m'en empêche. L'une des Professeurs s'avance avec une sorte de chapeau pointu dans la main. J'observe un instant ce couvre-chef de couleur brun et mon expression change pour afficher un air horrifié. Qu'est-ce que c'est que cet horreur ??? Oh non, ne me dites pas que je vais devoir porter ce truc repoussant sur la tête ! Mais les élèves qui défilent un à un sur l'estrade me confirme ma crainte : Oh que si, je vais devoir le porter !

C'est d'ailleurs à cette conclusion que j'entends mon nom être prononcé. Cette situation me fait tout à fait penser aux rentrées humaines, quand on dit notre nom à voix haute suivit de la classe dans laquelle nous sommes affectées. Sans en avoir le choix. Sauf que de un, mes précédentes écoles n'avaient rien de magiques et de deux, il semblerait qu'en soit, nous ayons le choix. Enfin, c'est très bizarre ou complexe, on dirait que ce chapeau étrange arrive à lire en nous. Mais... Jusqu'à quel point ? Je ne veux pas que mon secret soit dévoilé !

" Jeune homme ! Nous n'avons pas tout notre temps ! "

Je viens de me faire réprimander devant tous le monde, chouette... J'entends quelques rires fusés, mais je m'abstiens de les relever. J'en ai l'habitude, je m'étais toujours senti un peu différent des autres enfants. Mais je n'aurais jamais imaginé que c'était à ce point. Avec une nouvelle hésitation, je me décide à m'avancer sur l'estrade et à prendre place sur la haut tabouret.

Je réprime difficilement un frisson de dégoût - et de peur - quand ce chapeau est placé sur ma tête.  Si pour la plupart des élèves se traduisent probablement part " Je veux aller dans cette maison ! " ou " Pitié, pas cette maison là ! "... Moi, c'est plutôt : " Pitié, faites qu'il ne lise pas qui je suis ! "

" Hmm... Je vois... Un grand conflit intérieur te torture. Prends garde à ne pas choisir le mauvais chemin. Cependant, ton intelligence prouve que tu mérites d'entrer à... Serpentard ! "

Mon premier réflexe est de pousser un soupir de soulagement quant à mon secret bien gardé. Mais... Visiblement, l'annonce du chapeau bizarre ne plaît pas. Dans tous le rang des élèves, des chuchotements vont et viennent, tels des vagues venant s'écraser contre une falaise, tandis qu'ils me regardent furtivement. Qu'est-ce que...? Je ne peux m'empêcher de jeter un œil discret vers les professeurs, me demandant si eux aussi agissent aussi bizarrement et... De leur côté aussi, je perçois des inquiétudes, des chuchotements.

Je finis par me décider à descendre du tabouret, alors qu'on retire enfin le chapeau de ma tête puis je rejoins les autres élèves de Serpentard, tous assis le long de la longue table en bois, sur des bancs de la même matière. La répartition se termine, mais les chuchotements et regards en coin ne cessent pas pour autant, tant du côté des professeurs que des élèves.

Mal à l'aise, je garde mes distances. Est-ce que l'horrible chapeau voulait dire que je n'ai vraiment pas ma place ici ? Suis-je un danger ? Une menace ? Torturé par toutes ces nouveautés, par ces réactions diverses, et mes questions sans réponses, mon estomac se noue et m'empêche de prendre part au repas qui, comme tout le reste, est apparu par magie.

La cérémonie de la répartition était vraiment un moment à cheval entre l’ennui et l’intérêt pour Severus. Le seul intérêt qu’il y voyait, c’était de découvrir ses futurs élèves, ceux avec qui il pourrait faire le nécessaire pour faire triompher la maison Serpentard. Les autres ne l’intéressaient pas, du moins, pour la plupart. Cette année, bien-sûr, il y aurait Kathleen. Elle arrivait relativement tôt dans la liste des élèves et lorsqu’elle fut appelée, l’intérêt de Severus s’accrut imperceptiblement. Il échangea un regard encourageant avec Kathleen qu’elle seule put comprendre et il la regarda se glisser sous le Choixpeau, avec confiance et sérénité.

Bien entendu, toute potioniste de génie qu’elle était, elle ne rejoignit pas sa maison. Severus aurait évidemment aimé que ce soit le cas, mais elle suivit les traces de son père et de sa mère, elle rejoignit Poufsouffle. Avec un sourire d’excuse pour lui. Mais ce n’était pas comme s’il allait lui en vouloir. Sa filleule était à sa place, et il la suivrait de loin, sans être son directeur de Maison, c’était comme ça que les choses se passaient. Et puis, il avait tout-de-même sa matière. Elle serait une des meilleures élèves, à n’en pas douter, il avait participé à sa formation. Il eut un regard intéressé pour le jeune Malefoy également, compte tenu que le père était de ses amis.

Un peu plus tard, McGonagall annonça Potter, le très célèbre et déjà horripilant Potter, simplement du fait qu’il était le fils de James. Et en même temps, il était intrigué car il était le fils de Lily. Il ne put se demander quel potentiel il avait, mais lorsque sa répartition fut passée, il décida de s’en désintéresser, du moins tant qu’il n’avait pas pu l’évaluer en cours. Son intérêt se releva simplement un peu plus tard lorsqu’un jeune élève du nom de River fut envoyé à Serpentard, mais très vite, alors que la répartition s’achevait, il se désintéressa aussi de cet élève.

En général, les jours de rentrée, Severus se dépêchait de manger et filait directement aux cachots. La foule et les grandes discussions entre collègues, il n’aimait pas du tout cela. Aussi, il mangea rapidement et s’esquiva en direction des cachots en réfléchissant à ce qu’il allait prévoir pour la journée du lendemain. Il était temps de mettre les choses en place pour accueillir les nouveaux idiots qu’il allait devoir essayer de former en étant à peu près sûr que les trois quarts s’avèreraient décevants.

Pour ne rien arranger les choses, aucun contact n'avait été établit avec mon père. Mais à quoi je m'attendais, en même temps ? A de retrouvailles émouvantes, dans les bras l'un de l'autre ? Non, voyons, je n'ai pas à être aussi naïf ! Dumbledore me l'a dit lui-même, il me croit mort, comme ma mère. Alors il ne peut pas se soucier de mon existence, je dois me rendre à l'évidence. Et pour être honnête, quand je le vois aussi indifférent, ça ne me donne pas envie de venir vers lui. Bien sûr, je ne pense pas être un cas isolé, il semble se désintéresser de tout, de toute façon. Je ne dois pas prendre ça personnellement.

Après le repas, durant lequel je n'ai définitivement rien mangé, un des élèves plus âgé de Serpentard nous fais la visite guidée, à moi et autres nouveaux élèves, jusqu'à notre dortoir. Pour ce faire, on traverse un escalier qui ne tarde pas à m'effrayer, un escalier qui semble bouger selon sa propre volonté. Mais je n'ai pas le choix que de suivre le mouvement, le cœur battant, tentant de cacher ma peur, alors que certains élèves me regardent encore du coin de l'œil. Devant le dortoir, donc, il nous apprend le mot de passe à prononcer pour pouvoir y entrer. Je le note précieusement dans un coin de ma tête pour pouvoir m'en rappeler au besoin. Ce serait ridicule de se retrouver coincer de l'autre côté de la porte en l'ayant oublié.

Plus tard, la pièce est plongée dans le noir. Mes camarades de chambre se sont déjà endormi, pendant que moi, je me tourne et me retourne dans mon lit. Je n'arrive pas à fermer l'œil. Je suis à peine arrivé, mais j'ai déjà l'affreux sentiment de ne pas être à ma place. Les murs qui m'entourent me sont inconnus, ce n'est pas ma chambre, je ne suis pas dans mon orphelinat humain, à écouter la respiration de mes amis restés là-bas jusqu'à m'endormir.

Le lendemain matin, quand je me rend dans la grande salle commune pour le petit déjeuner, j'ai une tête horrible. Je n'ai pas pu dormir de la nuit et mon visage reflète ma fatigue, ma mauvaise nuit. Je me souviens que quand on partait lors de rares voyages, on nous disait toujours que la première nuit dans un lieu inconnu était toujours la pire, que c'était normal de pas bien y dormir. Espérons que ce soit vrai ici aussi, et que je ferais de meilleures nuits prochainement. Je m'avance jusqu'à une place de libre, quand soudain, je perd l'équilibre pour tomber à plat ventre sur le sol. Toutes les têtes se retournent pour me regarder, vu grand bruit que j'ai provoqué, provoquant un grand silence dans la salle.

" Ouuups, désoléééé ! "

J'aurais pu tomber par accident, m'emmêler les pieds. Ce sont des choses qui arrivent. Mais non, il a fallut que ce soit un élève qui me fasse un croche-pied. Furieux, alors que j'ai déjà passé une nuit horrible, je me relève et foudroie cet élève du regard. La couleur de ses vêtements représente le bleu. C'est la couleur de quelle maison, déjà...? En tout cas, ce n'est pas la mienne.

" Baisse ton regard, sale Moldu ! Ouais, il paraît que tu en étais un, avant de venir ici ! Et en plus, le Choixpeau a dit que tu étais une menace, pas vrai ? Alors on ne veut pas de toi ici ! Retourne d'où tu viens ! "

Ricanant, il se détourne de moi. Irrité, fatigué, de mauvais humeur, j'en profite pour le pousser sans ménagement, de manière à ce qu'il tombe à son tour. En cet instant, si j'avais pu sortir ma baguette, si je connaissais un sort, je l'aurais probablement utilisé comme représailles. Sans savoir que c'était interdit. Mon " camarade " se relève mais lui, en revanche, il sort sa baguette sans réfléchir, se laissant envahir par sa colère et probablement par son dégoût envers moi. Peut-être espère-t-il me chasser d'ici à coup de magie.

" Tu vas me le payer !!! "

Je recule, au fond, cet échange m'effraie, parce que je ne sais pas comment me défendre, ou me protéger d'une attaque magique. Mais je tente tout pour cacher cette peur et je lui tiens tête.

" De quoi ? De t'avoir poussé ? C'est toi qui a commencé, moi, je ne t'avais rien fais ! Et au fond, tu n'es qu'un lâche ! Tu veux utiliser la magie sur quelqu'un qui ne peux même pas se défendre ! "

Je vois sa rage augmenter encore. Peut-être que j'aurais dû me taire. M'effacer. Mais dans ma vie d'avant, j'ai appris que si on me fait quelque chose, je dois rendre la pareille. Ce n'est pas forcément la bonne méthode, mais... Il brandit sa baguette, prêt visiblement à l'utiliser et moi, je reste planté là, sans savoir quoi faire, les poings serrés, mon regard restant fier alors qu'au fond, je suis terrifié.

La nuit n'avait pas été facile pour Severus. Mais elles ne l’étaient jamais. Cela faisait longtemps que le directeur de Serpentard n'avait pas eu une nuit entière bien reposante. Il était condamné aux nuits de tourment à penser à ses nombreux échecs. Cela faisait des années que c'était ainsi et cela ne changerait pas du jour au lendemain. En revanche, il profitait de ses heures de liberté pour réfléchir au meilleur moyen d'obtenir un peu de level de la part des inutiles qui lui servaient d'élèves. En général, les méthodes qui lui venaient à l'esprit n’étaient ni pédagogique ni bienveillante. Mais elles avaient le mérite de l'aider à s'endormir.

De fait, il n'était pas du matin. Il valait mieux ne pas l’embêter au petit jour, à part si vous étiez Albus Dumbledore, car ce serait le meilleur moyen de vous prendre une remarque si vous aviez de la chance. Il ne se contentait de cela que quand il ne pouvait pas faire autrement, mais il n'était pas anodin qu'elle s'imagine étrangler la personne qui l'avait mis dans un tel état de fureur. Il ne passait heureusement pas souvent à l'acte, étant donné qu'il avait affaire à des élèves. Et puis, il ne s'en sortirait pas facilement en étranglant les personnes autour de lui. Mais cela ne diminuait pas son agacement.

C'est pourquoi il avait du mal avec les matins dans la grande salle de Poudlard. Il y avait toujours un petit plaisantin pour faire une bêtise où un petit vaurien pour ennuyer ses camarades et, en tant que professeur, il n'avait pas le droit de laisser les petits se faire maltraiter. Cela dit, en général, Severus laissait Minerva régler la majorité des problèmes. Elle avait plus de patience avec les sales gosses et cela lui permettait de rester dans son coin avec sa mauvaise humeur. Malgré tout, en général, il surveillait de loin le déroulé des opérations au cas où.

Cependant, ce matin-là, Severus fit une exception. Le premier année concerné était l'un des élèves fraîchement répartis de sa maison. Un Serpentard. Même si ceux-ci devaient montrer un peu de fierté et ne pas se laisser faire quand on s'en prenait à eux, le directeur de maison avait une certaine tendance à protéger ceux qui étaient particulièrement ses élèves. Ce matin, ce serait donc lui qui réagirait. Il s’avança en direction du petit groupe et notamment, du Serdaigle qui était très occupé à embêter le jeune Serpentard.

« Est-ce que je vous dérange ? » demanda-t-il d'un ton extrêmement froid. « Monsieur River, je vous suggère d'aller déjeuner, il ne serait pas de bon ton que vous arriviez en retard à mon cours n'est-ce pas ? Allez-y ! »

Severus se retourna vers l'agresseur qu’il toisa de son regard le plus sombre. Il n'était pas de sa maison et il aurait facilement pu lui retirer des points. Mais il n'était pas d'humeur à faire la police et il préféra laisser tomber pour le moment.

« Je pense que cette table n'est pas la vôtre, vous devriez rejoindre vos camarades avant de vous mettre en retard. »

Je me doutais qu'un professeur interviendrait sûrement. Je n'étais pas sûr que les affrontements entre élèves étaient autorisés. Mais que ce soit lui qui soit venu intervenir... Mon propre père... Mon ressenti en est différent. Mon cœur s'est laissé envahir par des battements d'espoir. En dehors de son indifférence et de sa froideur, il est malgré tout venu à mon secours. D'une manière subtile et toujours autant froide, certes, mais il en a eu le geste. Et si ce masque de froideur n'était qu'un leurre ? En plein doute et questionnement à propos de lui, je décide d'obtempérer. Mieux vaut jouer la carte de la prudence, il a l'air d'être du genre à s'énerver facilement.

" ... Non, bien sûr. J'y vais tout de suite, excusez-moi P... Professeur. "

Cependant, je dois avouer que je me sens mal. Alors qu'il m'avait sous les yeux, je n'ai pas eu la possibilité de me défendre. Je ne connais pas la magie, mais peut-être que si elle avait été instinctive chez moi, j'aurais pu savoir quoi faire... Non ? Surtout que je sais maintenant être né de l'union de deux sorciers. J'en viens encore à me dire que je ne suis pas à ma place, ici. Qui plus est, je me suis montré faible devant mon propre père. C'est vrai, il ne me connaît pas comme son fils. Mais il me connaît comme son élève. Je dois tellement lui faire honte... Plus je ressasse tout ces sentiments, toutes ses pensées, plus ils tourbillonnent en moi et me rendent mal.

Je m'esquive jusqu'à ma table, au moins soulagé d'avoir échappé à une situation qui aurait vite pu dégénérer, et prend peine à savourer mon petit déjeuner, envahit pas toutes mes questions, mes réflexions, mes hésitations. Et si j'avais eu tort en venant ici ? J'aurais sans doute dû rester dans mon orphelinat, à continuer ma petite vie tranquille de Moldu. Peut-être devrais-je songer à repartir. Après mon minuscule petit déjeuner, je me sers d'un plan obtenu pour trouver la salle de mon tout premier cours à Poudlard. Le cours de potions. Quand le professeur Rogue apparaît finalement pour nous laisser entrer, je suis les autres élèves, mais en passant à côté de lui, j'évite son regard. J'ai si honte... Pour être professeur ici, il est forcément un très bon sorcier. Et moi, alors ? Qu'est-ce que je suis, moi ?

J'oublie un instant mon mal-être pour observer la salle dans laquelle je suis entré. Il y fait froid et la luminosité est faible, à la différence du reste du château. Enfin, je n'ai pas encore vu les autres salles, mais rien que la grande salle commune est plus lumineuse et accueillante. Est-ce une coïncidence si elle reflète l'état d'esprit du Professeur de Potions ? Alors elle est sans doute plus chaleureuse qu'elle ne veut le laisser paraître.

Ensuite, je remarque des étagères couvrant tous les murs de haut en bas et de gauche à droite, toutes entièrement couvertes de bocaux en tout genre. Et pour finir, de grandes tables plutôt hautes, pouvant accueillir trois ou quatre élèves au moins, portant des chaudrons, des ingrédients et des ustensiles. C'est dingue, on se croirait dans un livre de sorcières prêtes à préparer des potions empoisonnées pour faire le mal. Genre la sorcière de Blanche-Neige... Quand j'étais petit, elle me traumatisait, c'est assez ironique, je dois dire...

On est ensuite répartit aux différentes tables, attendant les instructions de notre Professeur. Parmi les deux camarades qui sont à mes côtés, je reconnais la fille qui était dans la barque avec moi, et qui a fait un sourire au Professeur Rogue, lors de la répartition. Je ne sais pas si je dois l'apprécier ou non... Je préfère porter mon attention sur les ingrédients. Je n'arrive pas à les reconnaître, c'est très différent de ce que je voyais dans mon assiette à l'orphelinat. Qu'est-ce qu'on va devoir faire avec ça ? Vais-je m'en sortir...? Et si j'étais profondément nul en tout...?

Ce n'était pas surprenant, mais tout le monde avait obéi automatiquement à ses ordres. Travail, vite fait bien fait. L’ordre étant revenu, il pouvait retourner à son petit-déjeuner sans plus se préoccuper des deux garçons qui venaient de se chamailler. Pour ce qui était du gosse de sa maison qui s'en était pris plein la figure, il allait falloir qu'il voie s'il était digne d'intérêt ou s’il était aussi peu doué dans tous les domaines. Même s'il était de sa maison, il n'allait pas passer son temps derrière un incapable qui n'était même pas capable de gérer les situations. Il en saurait plus bien vite.

Il allait bientôt pouvoir en savoir plus puisqu'il avait cours avec les premières années. Mais, pour le moment, celui qu'il voulait tester n'était pas son nouvel élève mais le fils de son ancienne amie afin de voir ce qu'il valait et s'il pouvait lui accorder le bénéfice du doute parce que, comme l’avait sous-entendu Albus Dumbledore, il était également le fils de Lily. Physiquement, il lui rappelait un peu trop Potter à son goût, mais il s'était promis de lui laisser une chance de prouver ce qu'il était. Il jeta tout de même un regard à sa filleule, souriante et confiante.

Elle s'était installée à côté de son ami de toujours, un autre Poufsouffle évidemment, et d'une jeune fille de Gryffondor que Severus ne connaissait pas. Il jeta également un regard sur Drago Malefoy qui semblait particulièrement enchantée d'être là comme s'il s'attendait à un traitement de faveur. De manière générale, il devait bien avouer qu'il ne traitait pas ces élèves comme tous les autres, mais Drago, il avait une opinion en demi-teinte par rapport à lui. Certes, on pouvait un peu le voir comme un ami de ses parents, mais en réalité, c'est vrai savais que ce n'était pas vers eux qu’il se tournerait s'il avait un véritable souci.

« Vous êtes ici pour apprendre l'art subtil de la préparation des potions », commença-t-il, d'une voix froide et doucereuse.

Il commença alors son discours aux premières années qui avait une certaine tendance à poser les choses et à faire comprendre immédiatement aux élèves à qui ils avaient affaire. Il observa tour à tour chacun des visages qui ornaient les tables et, lorsqu'il parla de ceux qui avaient des prédispositions, son regard se posa d'abord sur Drago Malefoy, puis plus spontanément, bien qu'il le fasse après, sur sa filleule. À la fin de son discours, il fut temps de questionner Harry Potter, qui se montra aussi inutile que ne l'avait été son père. Après s'être vengé sur la maison de Gryffondor, il lança le début du cours et la préparation de la potion contre les furoncles. Cela faisait déjà plusieurs années que Kathleen savait la préparer et il était certains que sa filleule ferait une potion parfaite

Quel discours encourageant. Il faisait ça pour chaque classe de premières années ? Au moins, c'est sûr que ça a le mérite d'être clair. Parfois, c'est inutile de tourner autour du pot, je l'accorde. Après les explications, nous voilà livré à nous même pour la préparation d'une potion. Pour les... furoncles ? Sérieusement ? C'est une potion médicinale, alors ? J'avoue que je ne m'attendais pas à ça. Bon, c'est vrai qu'il y a toutes sortes de potions, j'imagine. Celle-ci ne doit pas être bien dangereuse, du coup.

Je tente de me concentrer sur la page explication la préparation de ladite potion. Des crochets de serpent... Des limaces à corne... Des épines de porc-épic... Beurk, pour un peu, ça pourrait presque me dégoûter amèrement. Mais... Si je veux faire mes preuves, moi aussi, je n'ai pas le choix. Je dois essayer ! Je tente de me concentrer un maximum en essayant d'ignorer certaines exclamations déçues que j'entends déjà, part certains autres élèves. N'y prête pas attention et essaye, c'est tout !

Alors... Il faut mettre les 6 crochets de serpent dans le mortier puis les écraser à l'aide du pilon pour obtenir une poudre fine. Ensuite... Ajouter quatre mesures de crochets de serpent écrasés dans le chaudron. Faire chauffer le mélange à 250 °C pendant 10 secondes. Je compte mentalement dans ma tête, priant pour ne pas me tromper. J'imagine qu'une seconde de trop ou de moins doit faire toute la différence et faire échouer la potion.

Après... Agiter ma baguette ? A quoi ça pourrait bien servir ? Est-ce que je pourrais oser poser la question au Professeur Rogue...? Bon, pour l'instant, je dois rester concentré. Si ils disent de le faire, alors il faut le faire ! C'est bien la première fois, cela dit, que je sors ma baguette. Je n'ai même jamais pris le temps de la regarder de plus prêt, tant j'avais peur de faire une mauvaise manipulation avec. Faite en bois de mélèze, portant en son cœur des crins de Sombral, je n'ai aucune idée à quel point elle me correspond parfaitement. Bref, du coup, je l'agite de manière concentré, même si je ne comprends pas trop puis je laisse bouillonner la potion pendant 39 minutes. Comptant une nouvelle fois mentalement dans ma tête.

Pour finir, j'ajoute dans le chaudron les quatre limaces à corne puis les deux épines de porc-épic. Je remue cinq fois dans le sens des aiguilles d'une montre et je termine en agitant ma baguette une deuxième fois. Voilà, c'est terminé... je crois... Pfiou, je n'avais pas remarqué à quel point j'avais chaud... D'un geste du revers de ma main, je m'essuie le front. C'est sans doute le stress qui m'a fait transpiré, bien plus que la chaleur émanant du chaudron. J'observe le contenu du chaudron avec attention, mais je suis incapable de dire si elle est réussie ou non.

Tout à coup, l'exclamation d'un élève juste à côté de moi me fait sursauter.

" Waouh, on dirait qu'elle est réussie, ta potion ! Trop bien ! Comment tu as fais ? Moi, je l'ai raté... "

Il parle bien de moi, là ? Surprit, ne sachant pas si je devais réagir en sautant de joie ou plutôt en me montrant modeste, tout naturellement, ma réaction penche plutôt vers cette seconde possibilité.

" Quoi...? Euh... Je... Je ne sais pas... J'ai juste suivi les instructions... "

Et c'était vrai, en fait. Je ne pense pas avoir fais quelque chose de spécial... Personnellement, j'aurais préféré pouvoir me faire tout petit en ce instant, j'ai horreur d'être au centre de l'attention.