Enfin elle est là, toute belle, à pied, en jean, mais elle est là. Elle semble abasourdie par les ballons, intriguée par cette fête qu'elle ne peut comprendre, puisqu'elle vient d'être créée pour elle.

Quand elle l'appelle, Max s'approche doucement et lui parle à coeur pour la première fois. Avouant enfin ses sentiments on ne peut plus humains.

« Si j'ai fui ce jour-là, c'est parce que je suis un lâche et que j'ai eu peur. Brianna, tu me manques. Pas en temps que robot à tout faire, tu me manques toi. Ton sourire, tes sautes d'humeurs, tes piques, tes remarques, ta culture, ta joie, tes sentiments. La maison est vide et j'ai compris à quel point j'étais un imbécile. Tu es une femme fantastique, un robot unique, mais qu'importe ; tu es toi. Et c'est ce toi là que je veux. »

Et il fait sortir quinze orchidée de son dos. Elle doit connaître la signification : Symbole ultime de l’élégance, l’orchidée prouve à la personne que vous avez blessé que vous avez du goût et que vous reconnaissez votre erreur. Elle se conserve plusieurs mois en souvenir de votre geste d’excuse. Et le chiffre quinze est associé au pardon dans le langage des fleurs. Alors Max il ne fait pas les choses à moitié.

Et c'est à cet instant que l'avion délivrant le message les survole.

Seulement la même question repasse en boucle, et s'il était un imbécile jusqu'à la fin de sa vie, ce n'est pas la première fois qu'il lui fait du mal, il avait même réussi à la blesser quand elle n'était qu'une IA sur un fond d'écran d'ordinateur, alors arrivera-t-il à aller de l'avant et à grandir ? A lui donner enfin l'amour qu'elle mérite ?

Elle le regarde sans comprendre, sans vouloir comprendre, comme si ses circuits refusaient d'analyser la situation pour réellement en saisir le sens. Max, il était là, devant elle, beau comme tout. Et quand elle le voit s'approcher d'elle, Bri, elle comprend petit à petit que non, ce n'est pas une fête nationale qu'elle aurait miraculeusement oublié, mais bel et bien de Max, rien que Max, qui lui faisait front, une lueur coupable dans le regard... avec autre chose. Et elle n'a pas le temps de poser plus de questions Brianna, que voilà qu'il prend la parole. Avoue sa peur, avoue qu'elle lui manque, qu'il a été idiot ce jour là où il lui a suggéré de partir. La qualifiant d'androïde, oui, mais aussi de femme à part entière. Et c'est son être tout entier qui s'embrase devant cet homme qui se dévoile à coeur ouvert. Elle passe nerveusement sa langue entre ses lèvres en regardant autour d'eux, où quelques passants attardaient leur regard sur eux tout en riant discrètement. Quand elle reporte à nouveau son regard sur Max, celui-ci lui tend un bouquet d'orchidées. Symbole de pardon à son égard, que la brune prend doucement entre ses mains, le regard brillant. Elle s'apprête à prendre la parole, quand un bruit attire son regard vers le ciel.

Reviens moi.

Elle reste bouche bée, abassourdie par cette avalanche d'affection, par pardon inattendu, inespéré, et en même temps terriblement nécessaire. "Tu es complètement fou..." qu'elle murmure en baissant à nouveau les yeux sur Max, les yeux désormais remplis de larmes. Et sans réfléchir, elle se laisse porter par ses jambes, Bri, pour venir jusque lui, et se blottir dans ses bras. Tenant toujours le bouquet contre elle, elle loge son visage tout contre lui, les paupières closes. Il est le seul qui la fasse réellement se sentir vivante. Le seul qui efface les rouages, les circuits, les programmes par milliers qui la composent, pour ne laisser qu'une femme parmi tant d'autres. "Je te pardonne Max... Je te pardonne et je veux revenir près de toi. Plus que tout." Si seulement il savait combien de fois elle en a rêvé. Combien de fois elle a voulu l'entendre dire ces quelques mots, après leur dispute. Elle était vide, Bri. Et elle réalise que son existence n'a de sens que tant qu'elle se trouve à ses côtés.

Les mots de Brianna "Je te pardonne Max... Je te pardonne et je veux revenir près de toi. Plus que tout." sont les plus beaux mots du monde. Max sent son coeur accélérer et s'apaiser à la fois. D'être excité et en paix à la fois. Tant de contractions qui le mettent à l'aise, il est si heureux, un futur possible s'ouvre sur eux.

Leurs corps serrés l'un contre l'autre lui fait un bien fou aussi. Combien de fois ne l'avait-il pas rêvé ? Et voilà que c'est enfin concret, enfin réel. Elle est là, pour lui. Il est là, pour elle.

« Merci » souffle-t-il à ses oreilles. Il n'y a pas d'autres mots plus puissant qu'il pourrait lui dire, enfin si, deux, mais c'est trop tôt, il est encore trop peureux. Il se mord la lèvre et dépose un baiser chaste sur son front.

Et puis, parce que Max ne sait pas profiter d'un instant, ne sait pas s'arrêter, il lui demande. « Je ne te lâche plus, viens travailler avec moi. Sois mon associée, sois mon égale, tu sais tout faire de toute manière. » Parce qu'il pense sincèrement qu'elle a les capacités, il pense sincèrement qu'ils peuvent travailler de concert, il pense sincèrement qu'ensemble ils monteront au sommet et surtout, il sait que sans elle, il n'arrive plus à grand chose. Les enjeux sont trop grands pour qu'il se laisse plonger sans elle à ses côtés. Ou qu'il ne puisse plus son concentrer parce qu'elle n'est pas là.

Les passants les observent d'un oeil attendri. Ils n'ont pas la moindre idée de leur histoire, de qui elle est, de ce qu'elle est réellement et de ce qui se passe vraiment ce matin, dans ce parc pour eux deux. Mais Brianna s'en moque. L'espace d'un instant, elle ne songe plus qu'à Max, à son étreinte, à cet abandon de sa part, lui qui s'était montré si froid le matin de son départ. Et elle sent son émotion dans ce "merci" qu'il lui fait parvenir, Bri serrant le brun un peu plus fort contre elle en retour, tandis qu'elle ferme les yeux, apaisée, lorsqu'il presse doucement ses lèvres sur son front. "Et maintenant ...?" qu'elle murmure sans trop savoir à quoi s'attendre pour la suite. Il lui demande de travailler pour lui. Avec lui. Brianna sourit tendrement, secoue la tête comme si ses mots n'avaient pas le moindre sens. "Les gens vont s'interroger à ton travail... Et s'ils demandent d'où je sors ?" Difficile de ne pas dire qu'elle sort techniquement d'une boite. Elle recule pour prendre ses mains dans les siennes, songeuse. "Si tu veux que je travaille pour toi... Laisse moi être ta secrétaire. Je travaillerais pour toi, et avec toi." Après tout c'est largement ce dont elle est capable, même si elle pourrait faire bien plus. Elle saurait se contenter de ça. "Mais il faut que je quitte mon emploi actuel." Elle dit ces quelques mots timidement, avouant qu'elle s'était trouvé un travail pour tenter de se débrouiller sans lui. survivre plus que vivre.

Elle se propose comme secrétaire, Max fronce les sourcils. S'il a évolué depuis cette année, c'est grâce à elle, ses préjugés sexistes sont bien loin. « Non, tu ne seras pas juste secrétaire. Tu veux que je t'avoue ? J'ai pas de diplôme, j'ai monté mon truc sans l'aide de rien, je me suis débrouillé seul. Alors pourquoi ils te feront chier toi ? » Parce que c'est une femme, mais il se montre garent. « Puis t'inventer un CV ce serait même pas de la triche, les connaissances, tu les as. » Il soupire en souriant. Puis la serre de nouveau contre son coeur et dépose ses lèvres sur son crâne.

Il se redresse à ses paroles. « Ton job ? » Et d'un coup il réalise qu'il l'a laissé sans rien, sans argent. Juste comme ça. Il n'avait pas peur pour elle, tant elle est forte, mais il n'avait pas songé aux conséquences de ses actes. C'est trop tard pour s'excuser de toute manière. Il s'en veut tellement de ne pas avoir songé à cela et se rend compte, que ça arrive souvent qu'il ne pense pas plus loin. Comment a-t-il pu réussir dans le monde de l'entreprise ? Il plonge son regard dans celui de Brianna en se demandant s'il peut l'embrasser quand « Eh, vous pouvez me regarder ? » Avant qu'ils n'aient le temps de comprendre, un jeune homme les photographie. Max ne songe pas un instant que c'est un journaliste, pas un instant que cette photo pourrait leur porter préjudice. Il sourit juste, plein d'amour, quand le flash se déclenche une seconde fois.